mercredi 16 mars 2011

Jonas !

Carême 1. Mercredi - Jonas

Vous connaissez-vous le livre de Jonas !
En tous les cas, il n’est pas question de baleine dans ce livre, mais d’un gros poisson. D’ailleurs, même si la baleine a une grande gueule, elle a un tout petit gosier ! Alors, avaler un homme tout entier… ? Le livre de Jonas est l’un des plus beaux livres de la Bible ; mais on s’en est beaucoup moqué à cause de cette fameuse baleine irréelle.
C’est un livre d’une théologie humoristique ! Car Dieu ne parle pas toujours comme un professeur d’école, un grand maître, mais comme un père à ses enfants sous forme de paraboles, comme Jésus ! Malheureusement, la théologie humoristique ne s’apprend pas ! Quel dommage ! Le prophète Jonas a bien existé. On le cite très brièvement dans le second livre des Rois (14.23sv). Mais il n’est, là, nulle question de cette histoire… et surtout pas de la baleine.


Jonas est donc envoyé vers la grande ville, Ninive. Quand le livre fut écrit, Ninive n’existait plus, anéantie par les Mèdes. Mais peu importe ! L’auditeur ou le lecteur de l’époque n’est donc pas dupe. Ne le soyons donc pas nous non plus !
Des habitants de cette ville, Dieu dit : “Leur méchanceté est montée jusqu’à moi !“. C’est le langage déjà employé à l’égard de Babel, de Sodome et Gomorrhe, de tous les lieux du péché par excellence.

Jonas est donc envoyé. Mais il refuse dans un premier temps. Il fuit ! Curieusement, du fait de son refus, Jonas ne fait ensuite que “descendre“, verbe employé plusieurs fois en très peu de lignes : Il “descend“ au port de jaffa ; Il “descend“ dans le bateau ; il “descend“ au fond du bateau ; il “descend“ dans le ventre d’un gros poisson qui “descend“ au fond de la mer… Et c’est de là qu’il rebondit, remonte vers la vie.
Ce langage est prophétique. Rappelons-nous cet hymne liturgique que rapporte St Paul (Eph 2.6sv) : Lui, Jésus, de condition divine, n’a pas craint de s’anéantir (de descendre) jusqu’à la condition de péché… Aussi, Dieu l’a “exalté“, (remonté) ! Dieu veut toujours descendre vers les pécheurs pour les faire remonter !

Remarquons encore que dans le ventre du poisson, au fond de l’abîme, Jonas ne perd pas son temps : il prie ! Et sa prière est celle de la plupart des psaumes : “Non, je ne mourrai pas - Je vivrai - Je chanterai pour mon Dieu“ ! (118.17). Foi, espérance, charité. Que Jonas nous aide à prier ainsi !

Finalement, Jonas arrive à Ninive ; et il annonce l’imminence du châtiment divin ! Mais les habitants se repentent ; et le châtiment est écarté. Alors, Jonas se fâche. Mettons-nous à sa place. Je n’ai pas cherché à être prophète, dit-il (comme Amos, par exemple et d’autres… !). Au contraire, c’est Dieu qui m’a enrôlé de force. J’ai fui et il m’a ramené. Alors j’ai dit ce qu’il me demandait de dire. Et cela n’arrive pas !!!

Il maugrée, notre Jonas. Et il va bouder, dans son coin, sous un arbre à l’ombre d’une grande plante. Mais Dieu envoie un ver dans la plante qui en crève. Alors le soleil tape dur sur la tête de Jonas qui a un coup de soleil néfaste ! Pauvre Jonas ! Il rouspète, se fâche encore ! Evidemment ! Alors Dieu lui fait gentiment la leçon : Toi, tu as pitié de cette plante que tu n’as pas planté et pour laquelle tu n’as pas peiné ! Et moi, je n’aurais pas pitié de Ninive et de ses habitants qui se sont convertis ? Et la tradition juive commentera : Quand Dieu fait des prophéties de malheur, c’est pour ne pas avoir à les réaliser. Oui, Dieu veut que tous les hommes soient sauvés… Et peut-être que Jésus parle de l’enfer, finalement, pour que l’on n’y aille pas !

Voyez c’est un petit livre merveilleux qui frôle la pensée des Evangiles.

Une remarque encore : ce livre fut donc écrit juste après le retour d’exil. Le peuple se reconstruisait. Et dans ces moments-là, on a tendance à se replier sur soi pour, pense-t-on , retrouver plus facilement son identité (Quand les circonstances de la vie nous donnent une “bonne raclée“, on s’isole facilement pour réfléchir et prendre les décisions adéquates…). Ainsi le peuple d’Israël se referme sur lui-même, multiplie des règlements intérieurs et ferme plus ou moins les frontières (on chasse particulièrement les femmes étrangères ; mais Dieu arrive à s’y opposer !)!

Or, voici un livre, avec ce prophète Jonas, qui est totalement à l’opposé de cette tendance au repliement sur soi. C’est le livre le plus universaliste qui soit… et plein d’espérance sur la conversion des païens. (Ce sera l’attitude de Notre Seigneur dont la vie publique se passera très souvent en territoire païen : dans la Décapole à l’est ; dans la Syro-Phénicie à l’ouest ; et vers les sources du Jourdain, vers Dan, au nord !). Ainsi repliement sur soi d’un côté ; grande ouverture de l’autre ! Certains diront : Ici, intégrisme ; et là progressisme. Mais Dieu dit : il ne s’agit pas d’être intégriste ou progressiste ; vous devez être des progressants ! Pour que tout homme connaisse Dieu. Voilà l’important. Et Jésus est mort et ressuscité pour tous les hommes sans distinction.

Continuons notre Carême avec la foi, l’espérance et la charité de Jonas ! Même si nous maugréons un peu parfois comme lui !

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