mardi 29 novembre 2011

Espérance !

1er Avent Mardi 11-12 -

Devant m’absenter jusqu’à la fin de la semaine, je ne commenterai pas, aujourd’hui, les textes de la “Parole de Dieu“ en ce temps merveilleux de l’Avent ! Temps d’espérance comme je l’ai souligné dimanche dernier !

Pourtant…, pourtant plusieurs m’ont avoué leur sentiment de découragement, d’accablement…, voire de déprime, d’apathie - ce que les Anciens appelaient “acédie“ - à la vue d’un monde qui semble de plus en plus mauvais.
Constat qui n’est pas d’aujourd’hui ! “Ce fut un temps bref et mauvais que les années de ma vie“, disait déjà le patriarche Joseph (Gen 47.9). “Je trouve mauvais ce qui se fait sous le soleil“, renchérira l’Ecclésiaste (2.17). St Paul, lui, de constater simplement : “les jours sont mauvais !“ (Eph. 5.16). Aussi, St Jean recommandera : “N’aimez pas le monde ni ce qui est dans le monde..., puisque tout ce qui est dans le monde ne provient pas du Père !“ (I Jn 2.16sv).

- Oui, ce monde est mauvais quand quelques généraux ou présidents peuvent faire disparaître des milliers d’hommes !
- Ce monde est mauvais quand des conflits d’intérêts cherchent une solution par l’assassinat individuel ou collectif.
- Ce monde est mauvais quand on menace inconsidérément l’avenir de la planète “Terre“.
- Ce monde est mauvais quand quatre cent cinquante millions d’hommes souffrent de malnutrition.
- Ce monde est mauvais quand les médias multiplient à l’envie le visage de l’horreur jusqu’à nausée.

La situation n’est donc pas nouvelle. Et facilement…, très facilement, trop facilement, nous sommes angoissés de cette angoisse que prédisait Moïse : “Au soir, tu diras : « Que vienne le matin : ». Et au matin, tu diras : « Que vienne le soir ! »“. (Deut 28.67). C’est la plus grande malédiction qu’ait jamais annoncée la Bible : l’incapacité de vivre le présent…, et la projection permanente dans un avenir incertain !

Aussi, avouons-le franchement avec Léon Bloy : souvent, “nous souffrons par imagination de ce qui n’existe pas“ encore ! Alors, prévoyant un avenir qui tourmente, nous avons peine à vivre dans le présent ! Corneille a traduit la remarque de Jésus : “A chaque jour suffit sa malice“ (Mth 6.34), par “Cesse d’aller au loin mendier ton supplice !“. Se tourmenter de l’avenir, c’est, je crois, la tentation de tout homme !

Cessons de nous tourmenter d’un avenir incertain, tout en sachant avec cet Ecclésiaste fort désabusé : “Ce qui a été, c’est ce qui sera ; ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera : rien de nouveau sous le soleil !“ (1.9).

Et, justement, essayons d’abord de comprendre ce qu’il y a d’intemporel dans le moment présent : à peine en parle-t-on qu’il est déjà du passé ! “O temps, suspens ton vol“, s’exclamait Lamartine ! Nous marchons vers un avenir dont le passé est l’image obscure au point, affirment certains, que “le présent n’est que le passé de l’avenir“ (ou l’avenir du passé) ! (J. Guitton).

Oui, c’est vrai : il y a beaucoup d’ombres en ce présent intemporel qui embrasse et notre passé et notre avenir…
Mais s’il y a des ombres, c’est que la lumière existe ! C’est le soleil qui explique l’ombre ! Ne faut-il pas alors regarder les ombres de notre monde et celles, plus cachées, de notre propre vie, pour mieux discerner - non plus avec découragement mais enthousiasme - la lumière du soleil cachée mais bien présente derrière les nuages plus ou moins obscurs du monde et de notre propre vie…

Et c’est là que la Bible crie l’Espérance, une espérance plus têtue et plus vivace que tous nos découragements. Non pas l’espoir, cet espoir que, par lassitude résignée, inventent souvent les hommes pour ne pas mourir. L’Espérance vient au secours de l’espoir comme on greffe un rameau sauvage. L’espérance dit à l’espoir : “Tu ne te trompais pas. Le seul tort de ton rêve, c’est d’attendre trop peu et trop servilement“. Peut-être d’ailleurs…, peut-être faut-il, parfois, que l’espoir “craque“ pour que commence l’Espérance ! La foi est parfois un doute surmonté ; l’Espérance, un désespoir surmonté !

Bien sûr, on dira : “Comment tenir et tenir encore dans l’Espérance quand si peu de choses changent autour de nous… et en nous-mêmes ? - “Mettez-vous bien dans la tête, nous dit le Christ, que vous n’avez pas à préparer votre défense (face à toutes les ombres envahissantes et accablantes). Moi-même, je vous inspirerai une sagesse et un langage“. (Lc 21.14)

Voilà l’origine de la force de celui qui tente l’aventure de la prière comme de celui qui tente l’aventure de l’engagement -ou plutôt des deux à la fois ! - : la force nous vient du Christ lui-même, lui qui a vaincu la mort - le mal par excellence -, lui qui, désormais, “a les issues de la mort“ (Ps 68.21), de toute mort, lui “qui nous mène “al mouth »“, dit le ps. 48e, c’est-à-dire par-delà tout, par-delà toute épreuve, par-delà la mort elle-même.

Aussi, en ce temps béni de l’Avent, ne cessons pas de prier et d’agir avec ces seuls mots sur nos lèvres et en notre cœur : “Viens, Seigneur Jésus, viens nous sauver !“. Tu es notre seule Espérance !




P.S. A tous et à chacun : Heureux temps de l'Avent, plein d'espérance ! A la semaine prochaine !

dimanche 27 novembre 2011

Viens Seigneur !

1er Avent B 11-12 -

Merveilleux temps de l’Avent ! Temps de joie intérieure, de sérénité, de paix ! Temps de préparation à la fête de Noël, à la venue de l’“Emmanuel“ : Dieu parmi nous ! Chaque année, les mêmes affirmations et appels sont proclamées, sont lancés : Le Seigneur vient ! Il est proche ! Réveillez-vous, ouvrez vos cœurs ! Mais de telles affirmations si belles, de tels appels si pressants résonnent-ils véritablement en nous ? Que chacun y réponde en reprenant les textes que la liturgie de l’Avent propose.

La première lecture - du prophète Isaïe - met en scène des femmes et des hommes malheureux, des êtres déçus de leur existence, un peu honteux de leur vie médiocre marquée sans doute par le péché. C’est toujours d’une grande actualité !
Mais dans leur cœur, il y a une faim, une soif. Ils rêvent d'un changement. Consciemment et inconsciemment, ils ont faim, soif de Dieu qui peut les faire vivre autrement, qui peut faire chanter leur existence. Aussi se tournent-ils vers lui, l'implorent avec ferveur : “Ah ! si tu déchirais les cieux. Si tu descendais, si tu venais à notre secours. Viens, Seigneur ! Sans toi, nous ne pouvons rien !” Viens, Seigneur !

Un appel aussi vif et sincère jaillit-il du fond de notre cœur ? Peut-être que ce temps de l’Avent éveillera en nous une profonde attente du Christ ! Mais peut-être sommes-nous parfois des chrétiens fatigués, quelque peu désabusés et sans projets. Ou sommes-nous encore comme le prophète Jérémie : “A cause de la parole du Seigneur, je suis en butte à longueur de journée aux outrages (de la vie), aux sarcasmes et moqueries. Mais quand je dis : « je n’en ferai plus mention, je ne dirai plus la parole en son nom », alors sa Parole devient au-dedans de moi comme un feu dévorant. Même si je veux le contenir, je n’y arrive pas” (20.9)

Et ce feu divin couve en chaque chrétien - même parfois désabusé -, en chaque croyant - même lorsque la souffrance l’entraîne loin de Dieu -. St Paul l’explique dans la deuxième lecture : Voyez ce que Dieu fait. Voyez les richesses, les grâces qui vous ont été accordées. N'est-ce pas admirable ? Je vous en prie : Ne vous reposez pas. Vous n'êtes pas encore arrivés au bout de votre course. Vous n'avez pas encore tout découvert de votre aventure avec le Christ. Ne vous endormez pas ! Tenez solidement jusqu'au bout.

Accueillons, aujourd'hui, une pareille exhortation ! Prenons-la au sérieux ! Le contraire serait notre perte : le Christ ne peut rien apporter, si nous pensons le connaître assez et qu'il n'a plus rien à nous apprendre, si nous sommes convaincus de lui avoir donné suffisamment... Il est alors bien évident que les Avents qui reviennent d'année en année n'ont plus guère de sens, ne peuvent plus en avoir.
Mais le contraire est aussi possible. Nous pouvons ouvrir nos cœurs, nos yeux, nos oreilles, tourner notre regard vers celui qui a promis de venir vers nous. Car s’il est venu, il viendra. Et non seulement il viendra, mais il vient… en notre vie !

Oui, notre foi l’affirme : nous savons que le Christ, qui viendra à la fin des temps, est déjà venu sur terre. Il est né à Bethléem, au temps du roi Auguste, alors que Quirinius était gouverneur de Syrie (Lc 2, 2). Nous le rappellerons à Noël ! Mais nous savons aussi que, depuis sa résurrection, il ne cesse de venir ; il est toujours présent. Et nous savons qu’il tient sa promesse : “Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde” (Mt 28,20).

Certes, cette présence du Ressuscité au milieu de nous n'est cependant pas toujours manifeste. Elle est même voilée, reconnaîtra St Paul lui-même. Nous ne voyons pas le Christ de nos yeux. Nous ne l'entendons pas de nos oreilles. Nous ne pouvons pas le toucher de nos mains. Lui-même nous a prévenus que nous ne pouvons pas pointer le doigt vers un lieu ou vers quelqu'un et dire : “Regarde là ! c'est lui !”. Impossible de dire cela.

Et je me permets de penser en ce moment à des personnes que je connais (et vous en connaissez !) : des événements tragiques (de santé, de famille ou autres) troublent l’œil pourtant exercé de leur foi ! Je sais alors que les motifs de découragements sont si forts qu’ils peuvent engendrer le cynisme le plus total et se traduire en fuites en des méandres de pensées et d’actions. Je sais que les défoulements de l’amertume peuvent amener à tout blasphémer !
En pensant à tous ceux-là en ce temps d’Avent, je prie le Seigneur de leur permettre d’apercevoir la tendresse de ceux qui, en son nom, au nom du Crucifié de Golgotha…, ont souvent “mal aux autres“, en les considérant. Je prie pour que dans le labyrinthe de leurs ténèbres, ils tiennent encore le fils d’Ariane de la Parole de Dieu. Car la Bible elle-même n’est pas un conte de fées pour bibliothèque rose. Le tragique de la vie n’est pas gommé. Il garde tout son poids de larmes et de sang et entretient cette épreuve qu’aux moments où l’on aurait le plus besoin de Dieu, Dieu semble se taire ! Et pourtant, pourtant…, la Bible tout entière crie l’Espérance, une Espérance têtue, plus vivace que tous les défaitismes.

Oui, nous qui vivons en un certain confort humain ou spirituel, nous devons sans cesse prier pour les grands éprouvés de la vie qui savent, malgré tout et vaille que vaille, allumer chaque matin leur petite chandelle “Espérance“ plutôt que de maudire l’obscurité. Car, finalement, ils savent qu’avec Dieu qui semble se taire comme au grand Vendredi Saint, les événements peuvent se retourner et devenir avènements, “Avent“, un Avent qui proclame : “Le Seigneur vient !“. …Et je m’émerveille alors profondément devant ceux et celles qui, dans leur vendredi saint qui semble se prolonger et durer encore, savent apercevoir que dans toute nuit une aurore peut se lever ; ils perçoivent que les croix peuvent devenir des brèches vers une Résurrection, vers le “Ressuscité“ parce qu’ils sentent, malgré tout, malgré les épreuves les plus amères, leur cœur devenir, parfois, tout brûlant sur leur chemin d’Emmaüs, et qu’ils iront proclamer, eux aussi, en un lendemain inattendu : "Le Seigneur vient ! Il est vivant !" Comme Jacob à l’issue de son combat avec l’ange, ils diront : “Dieu était là et je ne le savais pas ! Mais maintenant j’en ai la certitude”. Et, avec plus d’assurance, ils iront à la rencontre de tous ceux et celles qui ont faim, soif, qui sont rejetés, malades.... Ils finiront par mieux comprendre cette obscurité où Dieu semble se cacher comme dans l’obscurité d’une crèche de Noël, cette obscurité qui recèle pourtant sa présence : “C'est à moi que vous l'avez fait, chaque fois que vous avez fait (ceci ou cela) à l'un de ces petits qui sont mes frères” (Mt 25,40). (Cf Ev. de dimanche dernier)

Il nous faut donc être attentif à la venue permanente du Seigneur en nous-mêmes ou par l’intermédiaire de nos frères. Pour cela, il faut être en éveil, veiller ! Veiller, c’est l’un des maître-mots de ce temps de l’Avent. C’est tellement à prendre au sérieux que St Paul pour évoquer le veilleur, l’homme d’espérance, utilise un néologisme très évocateur : “apokadokein“ (Cf. Rm 8.19 ; Phil 1.20). Il s’agit du guetteur qui dresse la tête (kara) pour épier (dokein) et tâcher de découvrir au loin (apo) ce à quoi il s’attend ! Il espère ! "Apokaradokein !"

A vrai dire, cette longue et incertaine attente dans la nuit parfois très profonde est éprouvante ; et tous, nous sommes tentés de nous assoupir, vaincus par le sommeil, telle les vierges en la parabole de Jésus : “Comme l’époux tardait, elles s’assoupirent toutes et s’endormirent…“ (Math 25.5) Selon le verbe employé, elles “laissent tomber leur tête“, au contraire du veilleur… qui tend la tête pour observer ("apokadokein"). Et la primitive Eglise, dans une hymne liturgique probablement, encourage : “Eveille-toi, toi qui dors, lève-toi d’entre les morts et sur toi le Christ resplendira…“ (Eph. 5.14). Et de même St Paul : “Ne nous endormons comme les autres, mais soyons vigilants !“ (I Thess 5.6). D’ailleurs Jésus lui-même n’avait-il pas dit : “Veillez !“ “de peur qu’il (le Maître, à son retour), ne vous trouve endormis“. (Mc 13.36) Et dans le langage biblique, dormir n’est pas seulement être privé momentanément de l’usage de la raison, mais c’est le symbole de la négligence, de l’inertie ou de l’inactivité, un manque de contrôle de soi.
Disons avec humour : l’espérance impose l’insomnie ! (Comme dit le ps. 77 : “Seigneur tu as retenu les paupières de mes yeux !“).

En ce temps de l’Avent, demandons cette insomnie, non celle du corps, bien sûr, mais celle de l’âme ! ... pour être attentif à cette présence du Christ qui, de jour en jour, dans les modestes réalités de nos vies et par de multiples intermédiaires, vient à notre rencontre pour se manifester à nous.
Ne cessons pas d’aller à la recherche du Christ là où il se donne à voir et à rencontrer dans la foi.

Aussi - j’en reviens pour terminer -, prions pour les grands éprouvés de la vie ; sachons les aider, si l’occasion se présente. Car souvent ils sont les “handicapés de la foi“, cette foi que nous proclamons si facilement en nos divers conforts humains ou spirituels !

vendredi 25 novembre 2011

le Fils de l'homme !

T.O. 34 imp. Vendredi – Ce monde qui passe… ! (Da. 7.2sv)

Nous en finissons aujourd’hui avec le livre de Daniel. Dimanche débutera le temps merveilleux de l’Avent ! Temps de préparation à la venue du “Fils d’homme“ dont il est question en la lecture !

Avec le chapitre 7 de Daniel, nous n’apprenons pas grand chose de nouveau. La vision d’aujourd’hui est parallèle au rêve de Nabuchodonosor, interprété par Daniel au chapitre 2. Les quatre royaumes qui disparaîtront devant le Fils d’homme correspondent aux quatre métaux de la statue géante renversée par la petite pierre mystérieuse, “la pierre, dira plus tard St Pierre, qu'ont rejetée les constructeurs… ; elle est devenue la tête de l'angle, une pierre d'achoppement et un rocher qui fait tomber !“.

St Jean, au chapitre 13 de l’Apocalypse (qui termine le N.T.), donnera le sens eschatologique encore plus profond de cette vision de Daniel. Le symbolisme de Daniel y est simplement modifiée de manière à s’appliquer à l’Empire romain persécuteur, et au delà, à toutes les puissances ennemies du peuple de Dieu ; la 2ème bête représente les faux prophètes qui pullulent à la fin des temps comme Jésus et St Paul l’ont prédit.

Il faut lire, en parallèle, ce passage de l’Apocalypse qui concerne cette 2ème bête : “Je vis ensuite surgir de la terre une autre Bête ; elle avait deux cornes comme un agneau, mais parlait comme un dragon (à la manière des faux prophètes Cf. Ap. 16.13 ; 19.20 ; 20.10). Au service de la première Bête, elle en établit partout le pouvoir, amenant la terre et ses habitants à adorer cette première Bête dont la plaie mortelle fut guérie.
Elle accomplit des prodiges étonnants ; et, par ses prodiges..., elle fourvoie les habitants de la terre…, leur disant de dresser une image en l'honneur de cette Bête qui, frappée du glaive, a repris vie. On lui donna même… de faire en sorte que fussent mis à mort tous ceux qui n'adoreraient pas l'image de la Bête. - Par ses manœuvres, tous, petits et grands, riches ou pauvres, libres et esclaves, se feront marquer sur la main droite ou sur le front… C'est ici qu'il faut de la finesse ! Que l'homme doué d'esprit calcule le chiffre de la Bête ; c'est un chiffre d'homme. Son chiffre est 666“.
(Ap 13. 11sv)

666 ! 7, c’est le chiffre parfait ; 8, c’est le plus que parfait. [Le 8ème jour désigne l’histoire débouchant dans l’éternité par delà le péché et la mort et tous les esclavages dont ils sont la racine]. - 666 : c’est simplement trois fois le chiffre 6. C’est l’absolu du chiffre 6 qui vise la précarité de ce qui tend à fausser le dessein de Dieu dans l’histoire ; mais l’échec de cette tendance est aussi certain que l’est la victoire du Fils d’Homme dont il est question, et du “peuple des saints du Très-Haut “, selon l’expression de Daniel.(7.27).

L’expression “Fils d’homme“ devient dans le Nouveau Testament “Fils de l’homme“. Et cette expression (avec cette petite nuance grammaticale) se trouve plus de 80 fois dans l’Evangile, et toujours dans la bouche de Jésus. Jésus est le seul à l’employer et personne d’autre ne lui attribue ce titre.

C’est cette expression “Fils de l’homme“ - qui rappelle la victoire de Dieu sur me monde, chez Daniel -, que Jésus a choisie pour dire la conscience qu’il avait de sa mission messianique.

Mais cette expression, Jésus l’associe toujours à celle de “Serviteur“ souffrant d’Isaïe qui exprime toute sa pensée sur la fécondité de la souffrance et de la “mort du Juste“.

Ces deux expressions, dans la bouche de Jésus sont indissociables. Rappelons-nous St Marc 13,26 ; Le Fils de l’homme, on le verra venir, entouré de nuées, dans la plénitude de la puissance et de la gloire“. Mais au chapitre 9, auparavant, Jésus avait dit aux disciples : Le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes, et ils le tueront“. - De même, Jésus n’a accepté d’être appelé Roi que devant Pilate, une fois enchaîné, pauvre, condamné, abandonné de tous sauf de Marie et du disciple bien aimé, au moment où il n’avait aucunement l’apparence d’un Roi.

Ainsi, Jésus rejoint l’enseignement du livre de Daniel : en attendant les derniers temps, il nous laisse dans l’assurance que toutes les épreuves n’auront qu’un temps et que si nous voulons donner un vrai sens à la petite durée qui nous reste à vivre ici-bas, il nous faut l’imiter, devenir comme lui, le “Serviteur“. C’est en étant Serviteur qu’il devient Fils de l’homme.

On peut se rappeler encore un autre épisode. Les fils de Zébédée demandent à Jésus au cours de sa montée vers Jérusalem : « "Accorde-nous, lui dirent-ils, de siéger, l'un à ta droite et l'autre à ta gauche, dans ta gloire". … Les ayant appelés près de lui, Jésus leur dit : "Vous savez que ceux qu'on regarde comme les chefs des nations dominent sur elles en maîtres et que les grands leur font sentir leur pouvoir. Il ne doit pas en être ainsi parmi vous : au contraire, celui qui voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur, et celui qui voudra être le premier parmi vous, sera l'esclave de tous. Aussi bien, le Fils de l'homme lui-même n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude". » (Mc 10, 37.42-45).

- Restons donc fermes dans l’espérance !
- Nous savons la victoire du “Fils de l’Homme“ sur toutes les puissances du mal. Il règne désormais dans les cieux !
- Cette victoire, il l’a obtenu en étant “Serviteur“ souffrant. Ne nous étonnons donc de rien, grâce à notre foi au Christ, vainqueur de la mort elle-même !

mercredi 23 novembre 2011

Ce monde qui passe… !

T.O. 34 imp. Mercredi(Da. 5.1sv)

Le livre de Daniel, aujourd’hui, peut renforcer notre foi et notre espérance en nous faisant prendre conscience que dans l’incohérence apparente des avatars de l’histoire humaine, se développe un dessein de Dieu, qui, sans entamer la liberté humaine - liberté qu’il a lui-même créée et dont il se montre souvent plus jaloux que nous -, donne un sens à l’existence humaine pour ceux qui veulent bien réfléchir.

Dans cette lecture, on se trouve au milieu d’un banquet sacrilège et lubrique où règne une parfaite insouciance (c’est souvent le cas !). Tout à coup, apparaît une main mystérieuse qui trace trois mots sur le mur, le mieux illuminé par les candélabres ; trois mots qu’il nous est assez facile de comprendre “Mené“ - “Thekel“ - “Parsin“.
Mené“: ce mot veut dire compter
Thekel“ : (on peut penser à “shekel“, la monnaie israélienne). Ce mot veut dire peser ; peser des choses ou peser le pour et le contre quand on raisonne.
Parsin“ : fractionner, partager, déchirer, rompre, réduire en morceaux. (“Perousat Lehem“ : fraction du pain).

Toute cette insouciance du monde ne va pas durer longtemps.
Le temps est compté.
Dieu a pesé le pour et le contre, il n’a pas renoncé à intervenir pour faire triompher la justice et rétablir le bon droit.
Dieu va fractionner, réduire en morceau. Cela nous ramène à ce que nous aurions pu méditer hier : toute construction - c’est-à-dire tout cet empire babylonien - n’est qu’une statue composite aux pieds d’argile et qu’un petit caillou roulant sur la pente de la montagne est capable de faire s’écrouler d’un seul coup.
“Mené“ - “Thekel“ - “Parsin“ !

En trois mots que Daniel explique au roi Balthazar, pris d’un soudain tremblement de frayeur, surgit l’invitation à garder l’espérance et la foi envers et contre tout dans les pires moments de l’existence.

Et Daniel d’expliquer : “Voici l'interprétation de ces mots :
- Mené : Dieu a mesuré ton royaume et l'a livré ;
- Teqel : tu as été pesé dans la balance et ton poids se trouve en défaut ;
- Parsin : ton royaume a été divisé et donné aux Mèdes et aux Perses.
Alors Balthazar ordonna de revêtir Daniel de pourpre, de lui mettre au cou une chaîne d'or et de proclamer qu'il gouvernerait en troisième dans le royaume. Cette nuit-là, le roi chaldéen Balthazar fut assassiné“.


L’Alléluia, qui précède l’évangile dans le lectionnaire français, résume l’enseignement que Jésus lui-même a souvent donné à ses disciples qui peuvent être affronter à mille difficultés, voire persécutions : “Reste fidèle jusqu’à la mort, et tu recevras de mes mains la couronne de vie“ (Apoc 2.10).
Jésus ne nous laisse aucune illusion, tout peut arriver et ce n’est que par la persévérance qu’on peut être sauvé.

Toutes les persécutions ne sont que des occasions de rendre témoignage. Voilà de nouveau réaffirmée la primauté de la spontanéité chrétienne de base, celle du témoignage…, et ce, parfois, jusqu’au martyr. Elle est de toutes les époques et semble bien n’être pas passée de mode.

Un des martyrs du Vietnam au 19e s. (le plus célèbre : Théophile Venard), avant de mourir, écrivait, en référence spontanée à notre passage du livre de Daniel :
“Le livre de Daniel nous apparaît fabuleux, mais le livre des martyrs tout au long de l’histoire montre que tout cela est très réel dans le christianisme, toujours et partout, et qu’actuellement, probablement souffrent des martyrs inconnus“.

Prions pour eux, prions avec eux.

mardi 22 novembre 2011

Ste Cécile

22 Novembre

Si on lit la “Passion de Ste Cécile“ (peu historique certainement ; mais qu'importe !), on peut instruire notre vie chrétienne (monastique) en retenant trois vertus principales de la grande sainte, vertus toujours d’actualité :

- la chasteté : être tout à Dieu, corps, esprit, âme. “Je voudrais vous voir..., disait St Paul…, ayant seulement souci des affaires du Seigneur“ (I Co 7.32). - “Aussitôt que je crus qu’il y avait un Dieu, écrivait Ch. de Foucault, je compris que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour lui !“ (pour Dieu!).

- le martyre : être martyr, c’est “témoigner“ jusqu’au prix de sa vie, s’il le faut. “Il y a des hommes, connus de Dieu seul, qui sont déjà pour lui des martyrs au témoignage de leur conscience, parce qu’ils sont prêts, si on le leur demande, à répandre leur sang pour le nom de Jésus Christ“ (Origène). “Certains subissent le martyre une bonne fois par le glaive, disait encore Jean Tauler, un mystique rhénan, d’autres connaissent le martyre qui les couronne de l’intérieur“. La vie monastique n’a-t-elle pas été comprise, après la période des grandes persécutions, comme le succédané du martyre ?

- Chanter ! Faire de toute sa vie un chant, une louange à Dieu. Personnellement, j’aime ce verset du psaume 118e : “Non je ne mourrai pas, je vivrai et je chanterai les merveilles du Seigneur !“.
Et puis, disons-le une bonne fois : la prédication dont on parle tant, ce n’est pas toujours de donner des “instructions“, de faire des sermons (qui endorment parfois), c’est emprunter le langage des préfaces liturgiques : “Vere dignum et justum est : laudare, benedicere…“. C’est, si je puis dire, prophétiser : “prophétise sur ces ossements et qu’ils vivent…“, disait Dieu à Ezéchiel. Notre chant doit être capable de “ressusciter les morts“ ! Car c’est proclamer les hauts faits de Dieu, c’est, sans cesse, chanter le magnificat, “chanter un chant toujours nouveau…“.

Et cela autant par notre voix que par toute notre vie !
Ainsi, même si notre voix est cassée, on peut toujours cependant chanter…, et chanter encore ! St Augustin avait bien compris cela : “Qui peut oser chanter devant Dieu, lui qui juge le chanteur, à qui n'échappe aucune fausse note ? Rassure-toi. Il t'indique la manière de chanter : Contente-toi de jubiler. Bien chanter devant Dieu, c'est jubiler. Qu'est-ce-à-dire ? Renonce à comprendre, renonce à dire avec des mots ce qui se chante dans le cœur.
Regardez ceux qui chantent : moissonneurs, vendangeurs, et les autres : leur joie s'allume d'abord avec les paroles des chansons, mais bientôt elle les envahit ; ils laissent les mots et l'on n'entend que leur seule jubilation. Musique sans paroles, parce que le cœur exprime ce qui ne peut se dire. A qui cela convient-il mieux qu'au Dieu ineffable. Ineffable : tu ne peux dire ce qu'il est. Tu ne peux le dire et tu ne peux pas garder le silence. Ouvre donc ton cœur au-delà des mots pour que déborde ton allégresse plus grande que la parole“
. (Commentaire ps 32).

Demandons à Ste Cécile que toute notre vie chante et chant encore – quel que soit notre âge -, chante :
- et par notre entière consécration au Seigneur,
- et par notre témoignage qui peut être un “martyre intérieur“,
- et par notre chant qui doit être avant tout une “jubilation intérieure“ qui nous prépare à chanter avec les anges du ciel !

lundi 21 novembre 2011

Présentation de Marie

Présentation de Notre Dame au Temple – 21 Novembre

[N.B. Naturellement - comme cela m’arrive assez fréquemment ; et ce n’est pas une excuse, loin s’en faut -, je pensais que la fête d’aujourd’hui serait demain ! Aussi, je ne vous ferais aujourd’hui que quelques réflexions hâtives !]

Il est curieux, mais significatif que la liturgie nous propose un rapprochement entre la Sagesse qui préside à la création (lecture), qui préside“ au commencement“ des mondes, cette Sagesse qui “trouve déjà ses délices à être parmi les hommes“… et ce que St Luc nous dit (Evangile) de la naissance de Jésus, fils de Dieu fait homme par Marie, ce qu’il nous dit des événements qui s’accomplirent “à la plénitude des temps“, c’est-à-dire en cette plénitude de l’Alliance de Dieu avec l’homme !

“Au commencement“, dit le livre de la Genèse, au commencement “du premier jour “. Et le terme hébreu (erad) traduit par “premier“ a le sens de “Unique“ : en cet “unique jour“, comme si l’écrivain sacré ne savait pas qu’il y aurait un second, puis un troisième... C’est l’“UNIQUE“ jour, le Jour Unique de Dieu, le Jour éternel.

Et St Jean dira au début de son évangile : “Au commencement était le Verbe… Et le Verbe était Dieu !... Tout fut par lui… Et le Verbe fut chair et il a habité parmi nous“. Et en ce “commencement“, Marie est là : elle préside, comme la Sagesse divine, à cette plénitude de l’Alliance de Dieu avec les hommes,
voulue dès le matin de la création,
qui se réalise visiblement en la nuit de Noël,
et qui sera parfaite en la gloire du Christ ressuscité !

En cette gloire divine, la Vierge-Mère, est entrée, comme en un temple. Elle nous précède, nous montre le but de toute notre vie… : l’ALLIANCE parfaite avec le Seigneur !

On pourrait rappeler ici ce vieux principe scholastique : “Ce qui est dernier dans l’ordre de l’exécution est premier dans l’ordre de l’intention“. Le chef-d’œuvre que l’artiste va produire au sommet de sa vie, c’est ce qu’il avait en sa pensée dès le début. Ce qui arrive au terme de la Création, c’est ce que Dieu avait, dès le début, en sa pensée, en son “JOUR UNIQUE“.

C’est l’une des grandes lois de la pédagogie divine à notre égard : Dieu dit tout dès le commencement (et dès le commencement de notre vie). Et on découvre peu à peu au fur et à mesure que l’histoire se déroule, tout au long de notre propre existence…, on découvre l’exécution de la pensée de Dieu, du dessein de Dieu voulu dès le commencement. Jean Guitton avait raison d’écrire en son beau livre sur la Vierge Marie :
“Les commencements sont toujours riches de significations, contenant déjà en germe ce qui va se développer par la suite. C’est en effet un des caractères de la conduite de Dieu sur l’histoire que de ramasser en de certains moments critiques, en de certains être privilégiés (comme Marie) ce qui, par la suite, doit se développer longuement, se déployer, s’expliciter. Ainsi l’homme inquiet, asservi à l’écoulement du temps, peut jouir de ce qui n’est pas encore“. N’est-ce pas là une définition de l’espérance : jouir déjà de ce qui n’est pas encore, malgré échecs, souffrances, contrariétés de toutes sortes, voire péchés et fautes elles-mêmes ?.

Tout est déjà dit. C’est l’histoire de toute la destinée de celui, celle qui prend la route à la recherche de Dieu. La vierge Marie, dans son Magnificat, chante l’accomplissement des “promesses faites à Abraham et à sa descendance pour toujours“. C’est tout cela qu’elle “méditait en son cœur“.

Et nous-mêmes, nous nous mettons en route pour “VOIR“ Dieu et “FAIRE ALLIANCE définitive avec lui, sans trop savoir encore avec précision les chemins que nous aurons à emprunter. Mais un jour viendra où, comme Abraham, nous parviendrons à notre mont “Moriah“, c’est-à- dire à la montagne de la vision. Et nous ferons l’expérience - peut-être au fond de l’absurde selon la pensée humaine, c’est-à-dire au fond de la souffrance et de la mort elle-même -…, nous ferons l’expérience que Dieu ne nous a pas quittés du regard et nous serons au seuil de cette vision de Celui qui nous voit maintenant et sans cesse, de Celui que nous verrons alors comme il nous voit. En le temple de la Gloire divine, Marie, la première, nous précède et nous attend. Nous serons alors, dit St Jean, comme divinisés !

La fête de la Présentation de Marie au Temple est le symbole de la consécration que la Vierge Immaculée fit d’elle-même au Seigneur à l’aube de sa vie consciente. Marie est alors comme le modèle de la vie consacrée. Mais chaque chrétien, par le baptême, par sa confirmation, (éventuellement par son oblature) n’est-il pas consacré à Dieu… ?

Non du monde, mais dans le monde !

T.O. 34 imp. Lundi-Mardi (Da. 1 & 2)

Dans cette dernière semaine de l’année liturgique, l’Eglise, après nous avoir fait relire la littérature de la Sagesse, après nous avoir fait revivre l’histoire des Martyrs d’Israël, nous plonge dans la littérature apocalyptique, (= apocalypse veut dire : “Dieu révèle“ !) qui traduit, comme les précédentes lectures mais à sa manière propre, l’attente et l’espérance du peuple élu, l’attente des derniers jours.

En lisant le début du livre de Daniel, on peut penser à ce que St Jean dit dans sa première épître : “N'aimez ni le monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde - la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la richesse - vient non pas du Père, mais du monde. Or le monde passe avec ses convoitises ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement". (1 Jn 2, 15-17 )

En effet, les premiers chapitres du livre de Daniel nous invitent
- à l’esprit critique vis à vis du monde tel qu’il se présente toujours ;
- à prendre nos distances par rapport à ce qu’il a de plus séduisant ;
- à être parfois en rupture avec ce qu’il a de plus impressionnant, avec les modes de pensée ou d’action qui se succèdent souvent dans l’incohérence…

Dans le premier chapitre, Daniel nous est présenté comme un de ces garçons d’élite que l’on veut éduquer dans ce que la culture païenne a de plus raffiné, cultivé… Cependant, avec quelques compagnons, Daniel obtient de garder ses coutumes religieuses, en totale contradiction avec la pensée commune ! Et grande surprise : au terme d’un temps d’épreuve, ils apparaissent en meilleure santé physique et intellectuelle que leurs compagnons ; ils font preuve de plus de sagesse et de prestance que les meilleurs docteurs de l’empire babylonien. C’est que la fidélité à Dieu fait acquérir la vraie sagesse et donne déjà “jeunesse éternelle“ ! Première leçon vis-à-vis du monde, leçon que nous avons toujours à méditer.

Dans le 2ème chapitre (demain), il y a la célèbre vision du colosse aux pieds d’argile. On dirait que l’auteur du livre - écrivain tardif - a eu l’occasion de tirer des leçons de l’histoire dont il a été témoin, ou qu’on a pu lui raconter, ou qu’il a étudiée dans les bibliothèques.
Cette vision est d’une étrange actualité pour les plus anciens
qui sont nés au lendemain de la première guerre mondiale,
qui ont vu s’entrechoquer les superpuissances,
qui ont été témoins de la chute des cruels tyrans du dernier siècle,
qui ont assisté à diverses “révolutions“ entraînant souvent bien des pays dans les impasses de la violence, alors qu’ils aspiraient à la paix…

Le génie de l’auteur inspiré nous fait un tableau qui résume, de manière synthétique, ce monde que nous connaissons bien. On ne peut être à meilleure école pour exercer l’esprit critique, prendre ses distances et ne pas être des moutons de panurge, dans le courant des idées à la mode, fussent-elles religieuses…

Je pense au panégyrique que Jésus fait à Jean Baptiste : “Qui êtes-vous allés voir au désert ? (en dehors de toutes ces agitations du monde). Un roseau agité par le vent, un homme revêtu d’habits moelleux ?“.
Je pense aussi
à St François d’Assise, en rupture avec la civilisation artificielle de son temps ;
à St Dominique persuadant les ecclésiastiques envoyés convertir les cathares de commencer par abandonner leur luxe, leurs chevaux et leurs carrosses pour rejoindre leurs interlocuteurs dans la pauvreté évangélique…

Mais de toutes les critiques, les distances, les ruptures dont nous parle la liturgie de ces jours-ci, la plus frappante me semble celle dont le Christ nous donne l’exemple dans l’Evangile de demain. On l’invite à admirer le temple d’Hérode dans sa magnificence presque achevée à son époque, au maximum de son importance dans la mentalité des Juifs de son temps. Certains disciples, parlant du temple, admiraient la beauté des pierres et les dons des fidèles. Et Jésus de réagir de la manière la plus inattendue, bien que cette réaction soit dans la ligne des prophètes, de Jérémie, d’Ezéchiel et de beaucoup d’autres, condamnant le ritualisme rassurant : “Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit“. Aussi, Jésus, du mont des Oliviers, a pleuré sur la grandeur de Jérusalem qui, cependant, n’avait pas su reconnaître le temps de sa visite !

Bref, la liturgie de ces jours-ci nous apprend à chercher les valeurs stables, à investir dans ce qui ne passe pas, à bâtir sur le roc et non sur le sable.
Car, si l’on aime le monde et ce qu’il y a dans le monde, selon les expressions de St Jean, alors il ne faut s’étonner de rien et s’attendre à tout.

dimanche 20 novembre 2011

Christ Roi !


Le texte de l’évangile d’aujourd’hui est souvent intitulé : “Le Jugement dernier”. Or, dans notre mentalité actuelle, il y a comme une sorte d'allergie à l'idée de “jugement“ ! A tort… et à raison, tout à la fois. A raison, parce que l’idée trop humaine du jugement que nous nous faisons ne correspond pas à l’enseignement de l’évangile et des apôtres ! St Jean affirme magnifiquement : “Nous lui serons semblables, parce que nous le verrons tel qu’il est !“ (I Jn 3.2). Aussi, c’est le pécheur qui ne peut et ne pourra supporter le regard d’amour de Dieu, manifesté en son Fils, toujours proposé par son Esprit ! C’est lui qui se détourne et se détournera du regard de Dieu-Amour ! Ce n’est pas Dieu qui détourne son regard, lui, toujours “plein d’amour et de miséricorde !“

Aussi, une première évidence : En ce texte, le Seigneur nous présente le jugement comme une glorification des petits. (D’ailleurs, St Matthieu insiste constamment, en son évangile, sur les petits des communautés chrétiennes, sur les petits du monde, sur tous les petits qu'il faut aider).
Ainsi, dans le passage d’aujourd’hui, le Christ se présente comme
- le roi des petits, non comme un roi grandiose, loin de nous,
- un roi qui va prendre sur lui l’extrême pauvreté du péché du monde : notre texte précède immédiatement le récit de la passion du Seigneur,
- un roi qui appelle tous les malheureux, quels qu’ils soient, à le rencontrer : “Venez, les bénis de mon Père…”.

Oui, le visage du Seigneur que nous présente cet évangile est une image merveilleuse. C'est l'image du Seigneur qui a eu faim, soif, qui a été étranger, malade, en prison, c-à-d. le visage de tous les hommes qui souffrent, qui sont opprimés, bafoués humainement, spirituellement. Le Seigneur est là dans tous ces hommes. L’évangile nous découvre cette dignité invraisemblable de tout homme - même pécheur - appelé à rencontrer le Seigneur dans la vérité de son amour ! Et cette vérité, c’est d’abord de reconnaître notre pauvreté, notre petitesse, d’une manière ou d’une autre. Et parce que nous-mêmes, affamés, assoiffés, malades, pécheurs, nous sommes appelés à recevoir l’amour de Dieu ; et, le recevant, nous sommes alors portés à soulager tous les souffrants, par la force de cet amour de Dieu qui veut réunir tous les hommes en cette Vie d’amour que s’échangent éternellement le Père, le Fils et l’Esprit-Saint !

Tous les hommes sans distinction ! Car le Seigneur insiste sur le fait que ces petits, ces justes - ceux-là mêmes qui semblent parfois éloignés de lui - ne se rendaient même pas toujours compte de ce qu'ils faisaient : “Quand t'avons-nous vu avoir faim et nous t'avons nourri, avoir soif et nous t'avons donné à boire ? Quand sommes-nous venus jusqu'à toi ?” Et le Seigneur leur répond : “Vraiment, chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces petits, c'est à moi que vous l'avez fait”.

C'est cela le grand mystère de notre foi : la rencontre avec la miséricorde de Dieu, avec la vérité de l'amour qui met à nu la pauvreté de notre vie ; et le Seigneur comble cette pauvreté en nous appelant à être “à son image et ressemblance”, à être constamment au service de nos frères qui ont faim, qui ont soif, qui sont étrangers, malades, qui pauvrement cherchent Dieu ! Parce que pauvres, nous sommes appelés à reconnaître Dieu qui donne et se donne en le retrouvant en nos frères à qui nous donnons ce que nous recevons. Voilà le jugement du Seigneur ! “Chaque fois que vous l’avez fait…”. Au fond, le jugement est d’aujourd’hui, avant d’être de demain !

Et remarquons bien : le jugement porte sur des actes concrets faits ou non-faits : curieusement, ce n’est même pas l’intention qui compte. St Matthieu avait déjà rapporté ces paroles de Notre Seigneur : “Il ne suffit pas de dire… pour entrer dans le Royaume de Dieu ; il faut faire la volonté de mon Père…” - Il faut découvrir, même confusément, cette profondeur de l'amour de Dieu : le Christ en croix est venu prendre sur lui le jugement à la manière du monde et nous en libérer. Le jugement à la manière du monde disparaît parce qu'il n'y a plus que la miséricorde de Dieu que nous recevons du Christ en croix si nous savons la transmettre. Voilà le jugement à la manière de Dieu. “Venez, les bénis de mon Père…”. Autrement dit : dès aujourd’hui, vous êtes ses fils, fils du Royaume parce que vous lui ressemblez ! Parce que vous êtes déjà, peu ou prou, à l’image de ce berger qui prend soin de ses brebis dont parlait Ezéchiel dans la 1ère lecture.

Il reste que ce texte garde un caractère un peu choquant par l’opposition radicale entre les deux catégories : les bénis du Père et les maudits. Dans laquelle pourrions-nous être comptés ? Tous, nous avons su, un jour ou l'autre, visiter le malade ou le prisonnier, vêtir celui qui avait froid et nourrir l'affamé, l’affamé de Dieu ! Mais tous aussi, nous avons, un jour ou l'autre, détourné les yeux (le porte-monnaie ou la main et surtout le cœur) d'une détresse rencontrée.

Aucun de nous n'oserait se compter parmi "les bénis du Père" ; aucun non plus ne mérite totalement la condamnation radicale. Dieu, le juste juge, sait cela mieux que nous. Et Lui seul, peut apprécier à sa juste valeur le cœur d’un chacun ! Aussi, quand nous rencontrons dans la Bible cette opposition entre bons et méchants, justes et pécheurs, il faut savoir que ce sont deux attitudes opposées qui sont visées et non pas deux catégories de personnes. Il n'est évidemment pas question de séparer l'humanité en deux catégories, les bons et les justes d'un côté, les méchants et les pécheurs de l'autre ! Disons-le une bonne fois : c’est en chacun de nous qu’il y a cette face de lumière et cette face de ténèbres !

Aussi faut-il surtout découvrir, redécouvrir la miséricorde de Dieu qui nous sauve de tout mal. Et cette miséricorde divine nous oblige à prendre partie pour le Seigneur, et avec lui pour les pauvres, les malades, corporels, spirituels… ! Le chrétien doit avoir le rôle de “révélateur de la miséricorde de Dieu“. Et nous n’aurons alors aucune crainte de ne pas être sauvés.

Oui, l’évangile d’aujourd’hui nous enseigne de n’avoir qu’une seule crainte, la crainte de ne pas obéir à la Parole de Dieu. Mais si nous écoutons cette Parole, elle nous sauvera en nous demandant de devenir des petits. Car le Seigneur est le roi des petits, le roi qui s'identifie à tous les pauvres du monde, à tous ceux qui souffrent, humainement ou spirituellement. Il s'est engagé jusqu'au bout pour nous apprendre cela. Il s'est humilié jusqu'au bout, il nous a lavé les pieds, il est monté sur la croix pour répondre à l'amour de son Père qui aime tous les hommes !

Et il nous demande d’entrer en ce même mystère, d’en vivre ! Nous n'avons pas à nous interroger sur notre salut, nous avons à nous livrer à la miséricorde de Dieu qui nous sauve. Nous sommes des êtres sauvés en espérance, disaient tous les apôtres qui furent les témoins de la miséricorde infinie de Dieu qu’ils ont imitée. Oui, Dieu est miséricorde infinie ; et, déjà, cette miséricorde nous transfigure. Et cette miséricorde, à nous confiée, triomphera de toutes les misères, de toutes les faiblesses.

Je termine en soulignant que ce passage d’évangile est le dernier texte de St Matthieu avant la Passion du Christ, c'est-à-dire le moment où les forces de la lumière vont affronter celles des ténèbres. Au moment de quitter ce monde, Celui qui nous fait confiance - comme il nous l'a dit dans la parabole des talents -, nous confie ce qu'il a de plus précieux au monde : l'humanité. Tous ces derniers dimanches, les évangiles nous proposaient ce que j'appellerais des variations sur la vigilance, sur le mot "veiller". Ici, une nouvelle variation nous est proposée : "veiller" cela peut vouloir dire "veiller sur." Veiller sur son frère !

jeudi 17 novembre 2011

Le martyre… !

T.O. 33 imp. Jeudi - (I Macc. 2.15-29)

Textes difficiles, abscons que nous fait lire la liturgie tous ces jours-ci, surtout quand elle nous passer (indistinctement) du premier livre des Maccabées (lundi) au second (Mardi-Mercredi), puis du second au premier (Aujourd’hui, demain) !
Pourtant, me semble-t-il, il faut discerner dans la succession de ces deux livres toute une pédagogie divine à propos de notre fidélité à Dieu, fidélité qui peut entraîner jusqu’au martyr ! Essayons de comprendre !

Observons d’abord qu’il y a, bien sûr, une logique historique entre la résistance de Mattathias, le père des Maccabées, que l’Eglise nous fait lire aujourd’hui (1er livre des Macc.) et le martyr d’Eléazar qu’on a lu Mardi dernier (2ème livre des Macc.). La différence de style apparaît cependant immédiatement. Mardi, le martyr d’Eléazar nous était raconté dans une pathétique atmosphère de foi en laquelle baigne le second livre des Martyrs d’Israël. Aujourd’hui (1er livre des Macc.), nous sommes dans un style beaucoup plus sec et dépouillé. Nous sommes pourtant à la même époque ; ce sont les mêmes événements qui sont relatés ; mais les auteurs inspirés ont ressenti les choses différemment.
Aussi, nous est-il permis de discerner une progression dans la manière de réagir de Mattathias et d’Eléazar ! Une progression qui est comme un effet de la pédagogie de Dieu à l’égard de l’homme, à notre égard ! Essayons de comprendre !

Mattathias - première réaction - réagit, est-il dit, avec la violence de Pinhas qui est relatée au livre des Nombres (25.1-13). Vous pourrez vous y reporter ! Comme Pinhas, Mattathias réagit violemment ! Une violence que l’on ne comprend pas chrétiennement bien sûr, mais qui est toujours malheureusement d’actualité ; une violence quasi “terroriste“, serions-nous tentés de dire aujourd’hui ! Une violence telle parce que Mattathias est, dit le texte, “possédé d’une jalousie pour son Dieu“, parce qu'il est, dirions-nous aujourd’hui, possédé par un sens exacerbé de la justice, face à ceux qui acceptent l’injustice de l’apostasie au regard de la fidélité dû à son Dieu ! Et son geste de violence - peut-être compréhensible humainement (?) - aboutit à la révolte : ceux qui veulent à tout prix garder la fidélité à l’Alliance, vont se cacher dans le désert où, poursuivis par leurs persécuteurs, ils refusent de se défendre le jour du Sabbat ! C’est parfois notre réaction : pot de fer, pot de terre ! … Réactions donc de violences en chaîne.

Dans le récit d’Eléazar et de la mère des sept fils (2ème livre des Macc.), nous sommes amenés directement au témoignage du martyr dans la foi au Dieu Unique ! (μάρτυς, en grec veut dire : “témoin“). C’est, si je puis dire, la deuxième phase de la pédagogie divine appliquée au peuple élu !
Il semble, déjà, que dans la succession des événements ou du moins des récits, il faille distinguer ainsi une progression, fruit d’une pédagogie divine, qui aboutira au Christ et à ce que sera le martyre chrétien, la première spiritualité chrétienne lors des temps apostoliques ! A Gethsémani, Jésus n’a-t-il pas dit à Pierre : “Rentre ton épée au fourreau : ne sais-tu pas que si je le demandais auprès du Père, il m’enverrait douze légions d’anges ?“. On passe de la réaction de violence (compréhensible humainement) au témoignage ? "Comment alors s’accompliraient les Ecritures d’après lesquelles il doit en être ainsi ?“ (Mt 26.51-54).

“Comment d’accompliraient les Ecritures ?“. (dAvec Jésus, on est au terme de cette pédagogie divine qui interpellent les hommes au niveau de leurs primitives réactions spontanées (de violence souvent) pour les faire progresser vers la morale qui reflète les mœurs divines ; Jésus expire en disant : “Père pardonne-leur ; ils ne savent pas ce qu’ils font !“ (Lc 23.34).
Dans cette continuité, il sera dit dans les Actes des Apôtres : “Tandis qu'ils le lapidaient, Étienne prononça cette invocation : " Seigneur Jésus, reçois mon esprit". Puis il fléchit les genoux et lança un grand cri : "Seigneur, ne leur compte pas ce péché". Et sur ces mots il mourut“.

Et, bien plus, au “temps des accomplissements des Ecritures“, le martyr est non seulement un “témoignage d’Amour accompli par fidélité au Dieu Unique“, mais il recèle une fécondité inattendu et étonnante : “Le sang des martyrs est semence de chrétiens“, disait Tertullien ! C’est, si on peut dire, la troisième phase de cette pédagogie de Dieu à notre égard : une fécondité comme le sang du Christ dont nous bénéficions ! En effet, qui ne dira pas le rapport de cause à effet que l’on peut observer entre le martyr d’Etienne et la conversion sur le chemin de Damas de celui qui, gardant les manteaux… et respirant la fureur et la menace, devint l’Apôtre des nations ?

Ainsi on est passé de la violence humaine bien compréhensible parfois à la fécondité cachée du martyre.
Leçon que l’on peut méditer, aujourd’hui particulièrement, pour que, nous aussi, nous “accomplissions les Ecritures“ : prendre en compte, dans nos prières, les révoltes bien compréhensibles - si bien exprimées par exemple dans certaines expressions des psaumes … - … prendre en compte ces révoltes de nos frères (et les nôtres aussi) injustement condamnés, pour les transformer, avec le Christ, en sources de fécondité. Tel est le sens du martyre !

mercredi 16 novembre 2011

Ste Gertrude

16 Novembre -

Ste Gertrude est l’un des grands noms de la “Mystique chrétienne“. Sa spiritualité très sensible, aux expressions scripturaires, aux accents très romantiques peuvent en rebuter bon nombre de ses lecteurs. Cependant elle témoigne d’une union extraordinaire au Christ que tous nous recherchons à travers les méandres de notre vie.

Elle naquit vers 1250, époque de grande foi mais encore socialement très dure ! Nous ne connaissons rien de ses parents. Mais, dès l’âge de cinq ans, elle fut offerte comme “oblate“ au monastère d’Helfta, en Saxe. C’était une coutume assez courante, en ce temps-là, qui permettait de donner à des enfants une “bonne éducation“ à la fois humaine et chrétienne. De fait, la jeune enfant trouva dans le cloître non seulement une sécurité (recherchée) mais un climat qui lui convenait. La Liturgie, l’Office divin lui permettait, d’une part, d’apprendre le “langage de Dieu“ grâce à l’Ecriture Sainte et, d’autre part, d’acquérir une disposition à “écouter“ Dieu. De plus, elle profita d’une formation littéraire assez poussée. L’une de ses compagnes, Mechtilde (Sainte, elle aussi), était très musicienne ; une autre brillait par son talent de calligraphe ; une troisième était une habile miniaturiste. Gertrude mordit avec un tel appétit aux études profanes qu’elle devait fortement se le reprocher après sa “conversion“.

Les temps étaient assez rudes et difficiles. Les Seigneurs se faisaient facilement la guerre ; l’insécurité régnait ; et les famines, plus ou moins fortes, sévissaient. Cependant son monastère prospéra sous la houlette d’une abbesse remarquable au point d’assumer deux fondations.

Dans ce milieu d’élite où le temps se partageait entre la “Sainte Liturgie“, riche et paisible, et les travaux intellectuels, manuels, Gertrude se formait sans inquiétude religieuse particulière. Faut-il penser : dans une certaine tiédeur spirituelle ? Elle écrira plus tard qu’alors “elle se souciait de son âme comme de l’intérieur de ses pieds !“. Pieuse exagération, sans doute !

Elle conta elle-même comment le Christ l’avait convertie : “Je rends grâce à votre immense miséricorde, Seigneur, et à votre patience jusqu’à mes vingt-cinq ans“ durant lesquels j’ai vécu comme une païenne “jusqu’au moment où vous m’avez prévenue par un dégoût connaturel du mal et un plaisir du bien“.“En la 25ème année de mon âge, en la fête de la Purification de Notre Dame, … vous, la Vérité, mon Dieu, plus serein que toute lumière, mais plus intérieur que tout secret, vous avez résolu de diluer la densité de mes ténèbres, commençant par calmer ce trouble qu’un mois auparavant vous aviez suscité en mon cœur. Par ce trouble, vous avez essayé de détruire la tour de ma vanité et de ma curiosité qu’avait bâtie mon orgueil“.

Le Christ lui apparaît. Il lui dit : “Je te sauverai et te libèrerai !“ Et c’est en recevant les stigmates du Christ qu’elle vécu intimement du Christ, en Lui, avec Lui, par Lui.

Dès lors, la vie de Gertrude fut un progrès permanent en Dieu, vers Dieu. Souvent souffrante, elle apprit la patience, l’humilité, la condescendance, la charité, étant au service de ses Sœurs, recevant multiples pèlerins… Elle mourut probablement le 16 Novembre 1302.

Ses œuvres sont des méditations sur la vie intérieure, sur la vie chrétienne et monastique : l’innocence baptismale, la conversion spirituelle, la consécration à Dieu, la louange et l’action de grâces…

Son style est très romantique : “Jusqu’à quand, jusqu’à quand, ô mon Bien-aimé, attendrai-je l’heure où je jouirai de vous, et de la contemplation de votre face digne d’amour ?“. - “De vous, mon âme a soif (Cf. Ps 41.3). Le ciel et la terre et tout ce qu’ils contiennent, sans vous, ne sont pour moi qu’un hiver glacé…“. – “Oh ! Amour, Amour, quand allez-vous me délivrer de ce corps pour que je jouisse sans intermédiaire de l’aimé de mon cœur et que je reste avec lui à jamais ?“. Tous les thèmes d’un grand lyrisme sont là : la nature, l’amour, la mort. Son style a été comparé à celui de Lamartine.

Au-delà de ce style, retenons surtout que sa vie peut se résumer en ce mot du livre de Josué : “Vous aurez bien soin - car il y va de votre vie - d’aimer le Seigneur votre Dieu !“ (23.11). Ste Gertrude est une âme d’amour ! Sa piété se portait de préférence sur l’Incarnation, l’humanité du Christ, le Sacré-Cœur. Elle aima l’Eucharistie, la communion fréquente.

Pour terminer, je vous transmets une de ses belles prières à l’intention des défunts : “Très doux Seigneur Jésus, je te prie de bien vouloir exaucer, par les mérites de ta très sainte vie, cette prière que je t’adresse pour les défunts de tous les temps, et spécialement ceux pour qui on ne prie jamais. Je te demande de suppléer à tout ce que ces âmes ont négligé dans l’exercice de tes louanges, de ton amour, de la reconnaissance, de la prière, des vertus et de toutes les autres bonnes œuvres qu’elles auraient pu accomplir et qu’elles n’ont point faites, ou qu’elles ont accomplies avec trop d’imperfection“.

Aussi invoquons St Gertrude ! Qu’elle supplie le Seigneur à cause de toutes nos imperfections !

mardi 15 novembre 2011

Temps des persécutions…

T.O. 33 imp. Mardi - (II Macc. 6.18-31)

Hier, nous n’avons pas médité la lecture du jour. Elle est cependant importante pour comprendre les livres des Maccabées, livres historiques et spirituels tout à la fois.
Le premier livre des Maccabées commence ainsi : “Après qu'Alexandre, fils de Philippe, Macédonien, eut battu Darius, roi des Perses et des Mèdes (bataille de Issos : 333), et fut devenu roi à sa place, …il entreprit de nombreuses guerres, enleva maintes places fortes et mit à mort les rois de la région. Il poussa jusqu'au bout du monde et prit les dépouilles d'une multitude de nations. La terre se tut devant lui. (On a connu ce genre de phénomène !). Son cœur s'exalta et s'enfla d'orgueil ; il rassembla une armée très puissante et soumit provinces, nations et dynastes. Après cela, il s'alita et comprit qu'il allait mourir“. Voilà la place que fait la Bible à Alexandre le Grand ! “Quel avantage l’homme aura-t-il à gagner le monde, s’il le paye de sa vie ?“ (Mth 16).Première leçon d’histoire !

Alexandre mort, la Terre Promise redevient ce qu’elle a toujours été : la proie des rivalités entre les superpuissances qui sont au sud autour du Nil et les superpuissances qui sont au nord autour de l’Euphrate.

Je passe sur les nombreuses péripéties politiques de ceux qui se sont partagé l’empire d’Alexandre. Après avoir été soumise aux “Ptolémée“ d’Egypte, bienveillants pour Israël (300-200), la Palestine passe au pouvoir des Séleucides de Syrie qui eurent une politique maladroite d’assimilation forcée et brutale. Ils voulaient contraindre les Juifs à abandonner leurs traditions politiques, nationales et religieuses. Ce qui provoqua chez les Juifs un formidable rebondissement de leur identité tant raciale que spirituelle. Et ce fut la révolte des Maccabées qui dans un premier temps infligèrent aux Grecs plusieurs défaites retentissantes. Nous sommes aux environs de 160.

Mais, comme souvent, les descendants des Maccabées qui s’étaient donc révoltés pour sauvegarder l’intégrité du patrimoine culturel et religieux, deviennent, à leur tour, - 2ème leçon d’histoire !- des petits roitelets despotes, cumulant pouvoir politique et pouvoir sacerdotal, ce qui est toujours néfaste - 3ème leçon d’histoire !-. Et naturellement ils pactisent avec les cultes des Syriens, des Grecs qu’ils introduisent jusque dans le temple !

C’est l’heure d’une 2ème révolte - puissance deux, si je puis dire - : Beaucoup se réfugient dans le désert de Juda pour retrouver la pureté de la foi. C’est toujours dans un désert que l’on se rend dans les périodes équivoques (Ex. : les résistants… de la dernière guerre). Ce fut la naissance des Esséniens désireux de retrouver la pureté de l’Alliance.
Mais, évidemment, tous les Juifs n’allèrent pas au désert. Et, à Jérusalem surtout, des épisodes de persécution sanglante eurent lieu, tel celui que relate notre lecture.

Que retenir de toute cette histoire en l’espace d’un siècle ?
1. D’abord, une grande leçon de fidélité et de foi de la part de ce vieillard de 90 ans qui préféra le martyre, “obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes“. - “Il est indigne à notre âge, disait-il, de dissimuler !“. “Savoir dissimuler est le savoir des rois“, disait Richelieu. Et, Mazarin, après lui, en fit sa règle !
Mais cela ne vaut pas quand il s’agit du Roi des rois, le Christ qui lui n’a pas dissimulé son amour pour nous et qui attend de nous une “profession de foi“. “Nous ne pouvons pas ne pas dire…“, disait Pierre. La foi donne une participation à la vie même de Dieu. La foi n’est pas de l’ordre de l’opinion privée comme on le dit tellement en Occident. Certes, le témoignage n’est pas toujours facile… Grande question !
2. D’autre part, que sont devenus les Esséniens, ces purs, puristes ? Il semble qu’ils avaient encore au temps de Notre Seigneur une assez grande influence. Il y a plusieurs causes à leur disparition.
a) D’abord un mini tremblement de terre qui a suffi à disloquer le système d’adduction d’eau qui était si importante pour eux, pour leurs ablutions rituelles, ce qui était le centre de leur spiritualité (cf. Pharisiens). Quand les rites remplacent la foi, il y a toujours danger, un danger qui guette tout croyant !
b) Il y avait certainement aussi les permanentes incursions des Parthes qui ébranlaient périodiquement le pouvoir romain en cette région. Et les Esséniens étaient en première ligne ! Notre Eglise n’a-t-elle pas toujours ses ennemis permanents ?
c) Il y a eu surtout la prise de Jérusalem en 70 par Titus. Bien que n’ayant pas les mêmes opinions des nationalistes juifs, les Zélotes, on pense que les Esséniens pactisèrent avec eux dans la révolte de Massada. Ce fut leur perte. Et puis, par intransigeance, ils avaient eu tendance à se “recroqueviller“ sur eux-mêmes, à devenir une secte finalement.

Jean-Baptiste lui-même (on a pensé qu’il les avait fréquentés) est déjà en rupture avec eux quand il va à la rencontre des foules, prêchant un baptême de pénitence…
Et Jésus, lui, était en totale rupture quand il allait, de préférence, vers les pauvres, les illettrés, les malades.
Et le baptême chrétien - participation à la mort et à la résurrection du Christ - ne s’est jamais inspiré du baptême des Esséniens. Jamais leurs repas sacrés n’ont eu une signification eucharistique ! Puissions-nous ne jamais avoir une tendance sectaire, être rangés sous le vocable d’une secte !

L’histoire est toujours riche d’enseignements à méditer !

lundi 14 novembre 2011

Voir - Foi

33e T.O. Lundi

Vous m’excuserez. Mais, aujourd’hui, je suis “très pris“, comme l’on dit. Et je n’ai pas eu le temps d’écrire un mot !
Alors, une simple réflexion à propos de l’évangile pour souligner que je n’oublie pas tous ceux qui ont la délicatesse et la gentillesse de me lire fidèlement !

Jésus arrive à Jéricho. C’est son “dernier voyage“ avant sa passion. Il s’est recueilli, méditant certainement sur sa “mission“, pendant plusieurs jours à Ephraïm (aujourd’hui Taibé), au sud de la Samarie, avant les monts de Juda !

Sa première rencontre (avant celle de Zachée, bien connue) est celle d’un aveugle. Celui-ci le supplie ! Il demande à Jésus : “Fais que je voie !“ Et Jésus lui répond : “Retrouve ta vue, ta foi t’a sauvé !“.

Jésus met toujours l’homme dans une véritable vision, celle de la foi. La foi donne la véritable “vision“ : tout regarder avec le regard de Dieu ! Déjà ici-bas ! Cette vision nous fait véritablement “enfant de Dieu“.

St Jean écrira : “Nous savons que lorsqu’il (le Christ) apparaîtra, nous lui serons semblables, puisque nous le verrons tel qu’il est“ (I Jn 3.2)
(Il y a un jeu de mots en grec entre “semblables“ et “verrons“ : “esometha“ – “exometha“).

Voir Dieu ! Déjà ici-bas, par la foi, avant de le voir “face à face“. Et tout “VOIR“ en regardant Dieu. Voir Dieu, tout voir en lui, en lui qui nous voit sans cesse !

Bonne journée !

dimanche 13 novembre 2011

Attente active !

33ème Dimanche T.O. A/11

Très souvent, dans ses paraboles, Jésus répond à la question : quel est le sens de la vie ? N’est-ce pas la question des questions : le “pour quoi” de notre vie ? C’est St Bernard, il me semble, qui se demandait sans cesse : “Pourquoi suis-je ici, venu ici, en ce cloître ?“… Et Jésus commence par nous révéler qu’au point de départ de notre existence, il y a Quelqu’un : “un homme appela ses serviteurs et leur confia ses biens” : ce “propriétaire”, c’est Dieu, bien sûr, car tout lui appartient. Mais si Dieu a créé le ciel et la terre, il a “fait” l’homme “à son image et ressemblance” pour qu’il domine sur toute la création. Comme dit St Paul, “Dieu nous donne tous les biens en abondance, pour que nous en jouissions”. (1 Tim. 6/17).

Certes ! Mais sans oublier pour autant que nous ne sommes pas des propriétaires : nous sommes des intendants. Je ne suis pas le propriétaire de mes richesses, de mon corps, de mon cœur, de mon intelligence. Dieu me les a loués, en quelque sorte ! Si on vous prête une maison, une voiture ou tout autre objet, vous en prenez grand soin, car ces biens ne vous appartiennent pas. Ainsi Dieu a-t-il agi envers nous : il nous a donné beaucoup, mais nous ne sommes pas propriétaires. Ce fut le premier péché, celui d’Adam et Eve, symbolisé ensuite par la “tour de Babel“ !

Et “le Maître partit en voyage”. – C’est bien vrai que Dieu semble absent de ce monde. Il semble nous avoir laissé seuls. Et Jésus nous fait comprendre que c’est voulu. Après avoir créé l’univers, Dieu se reposa : il se repose sur l’homme, en lui disant : je te donne cet univers en gérance jusqu’à mon retour. Car Dieu, en nous créant, nous a élevé à une telle grandeur qu’il veut sans cesse respecter notre liberté. Aussi, nous a-t-il créés, a-t-on dit, comme la mer les continents : en se retirant ! Et à chacun, il dit en quelque sorte : A cause de la liberté que je t’ai donnée - cette liberté qui te fait “à mon image et ressemblance“ -, tu deviens “responsable“. Cependant, je te poserai la question : “Avec ta liberté, qu’as-tu fait de ce monde, qu’as-tu fait de ton corps, de ton âme ? Qu’as-tu fait de ton frère ?”

“Longtemps après, le Maître revient”. Combien de temps ? Nous l’ignorons. Le temps d’une vie d’homme, sans doute ! Quelle bonne nouvelle, au moins pour ceux qui s’y attendent et qui sont prêts : la mort, ce n’est pas le néant, c’est une rencontre avec Quelqu’un ; c’est le retour du Seigneur ! Le même propriétaire qui nous avait embauché au point du jour, en nous disant : “va, toi aussi, travailler à ma vigne”, revient au soir de la journée pour demander des comptes et donner le salaire aux bons ouvriers. La perspective de ce rendez-vous devrait ensoleiller nos vies ! Nous ne savons pas l’heure exacte de cette venue. C’est le secret de Dieu. Aussi, comme nous le recommandait l’évangile de dimanche dernier, faut-il toujours veiller pour ne pas nous laisser surprendre et pour ouvrir dès que le Maître frappera à la porte.

Sachons remplir à fond ce temps qui nous reste et qui s’écoule dans le sablier de l’Histoire. “La vie est courte”, dit-on ; alors il la faut pleine. Mettons-nous au travail avec ardeur, courage, car bientôt, nous dit Jésus, après les douze heures de la journée survient la nuit où personne ne peut plus travailler.

Et quelle est la première tâche qui nous est demandée ? C’est de croire, de croire à l’amour du Père manifesté en Jésus Christ. Il est le premier Serviteur qui est aussi le Fils unique. Cette foi nous dynamisera, car l’amour du Père nous poussera à transformer de toutes nos forces ce monde qu’il nous a laissé “inachevé”. Nous ne serons pas jugés sur la quantité de travail, sur les richesses accumulées, mais sur la qualité de notre foi. Lorsque les juifs demandent : “Que nous faut-il faire pour travailler aux œuvres de Dieu ?“, Jésus leur répond non plus au pluriel, mais au singulier : “L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en Celui qu’il a envoyé”. (Jn 6/28-29). Nous ne serons pas sauvés sur nos œuvres mais sur notre foi en Celui que Dieu a envoyé et qui, sans cesse, nous donne sa force, cette force divine qui a vaincu la mort elle-même !

Plus nous croirons au Dieu-Amour, moins nous aurons peur de le rencontrer, parce que notre foi au Christ vainqueur de la mort nous aura rendus semblables à lui, semblable à un Dieu actif qui, tout en se reposant sur nous, continue avec nous et grâce à nous, de donner à ses enfants le pain de chaque jour et tout ce qui leur est nécessaire : “Mon Père, disait Jésus, travaille toujours et moi aussi je travaille”. Oui, si nous croyons à Jésus Christ, Fils de Dieu fait homme, c’est avec lui que nous travaillerons : c’est lui qui travaille en nous et par nous. Et grâce à nous, il pourra redire à son Père : “L’heure est venue, Père, glorifie ton Fils”. Et Dieu nous dira : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle, (tu as cru), entre dans la joie de ton Maître”.

Et le mauvais serviteur sera congédié. Lui-même nous livre d’ailleurs le motif de sa paresse : “J’ai eu peur”. Il a eu peur de Dieu (il n’a pas cru !) ; il a eu peur de lui-même ; il a eu peur des autres. “Sans moi, vous ne pouvez rien faire”, dit Jésus. C’est vrai ! Mais si nous croyons qu’il est en nous, qu’il agit à travers nous, alors nous sommes pleins d’audace et d’énergie et nous pouvons dire avec St Paul : “Je puis tout en celui qui me fortifie”.

Ne nous laissons pas paralyser par nos peurs, nos timidités, nos angoisses. Si vraiment Dieu nous confie une mission, alors faisons-lui confiance, ayons foi en lui et, ensemble, en Communauté, en Communion d’Eglise, nous ferons beaucoup à travers les mille petits riens de notre existence. Ne répétons pas : je n’en suis pas capable quand Dieu nous confie, par exemple, notre famille - humaine ou spirituelle, religieuse - l’éducation humaine et religieuse de nos enfants, quand il veut nous rendre responsables de nos frères, sœurs qui vivent avec nous, près de nous, tous les jours…. N’enfouissons pas nos talents dans la terre de nos petits conforts (même spirituels ! Ah ! ces petits conforts !) sous prétexte de conserver nos petits talents perçus à vue humaine, seulement. Acceptons au contraire de nous perdre aujourd’hui, de mourir un peu et alors nous récolterons des milliers de gerbes dans la mesure où nous aurons semé généreusement aujourd’hui.

Puissions-nous tous faire cette prière : “Seigneur, tu viens parmi nous déjà durant cette Eucharistie. Tu nous communique un “faire-part”, sans date, celui de ton retour. Notre rendez-vous aujourd’hui n’est pas de cette obligation que l’on effectue par politesse. Au contraire, c’est un engagement de tout nous-mêmes à ton service. Nous sommes venus et nous disons : voilà ton bien, celui que tu nous as donné : mon corps, mon cœur, mon intelligence que j’essaye de développer à ton service. Car tout ce qui est à moi est à toi ! "

samedi 12 novembre 2011

La Sagesse (2)

32ème T.O. Lundi et jours suivants (2)

C’est à nous de recevoir la Sagesse, cette Sagesse qui présidait à la création des mondes, cette Sagesse qui “trouve ses délices parmi les enfants des hommes“, cette Sagesse qui est venue habiter parmi nous, - le Verbe de Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne enfant de Dieu - !

Sachons, en tout temps, demander, accueillir cette Sagesse divine. Il y a, à ce sujet, une magnifique prière du roi Salomon que l’on peut facilement reprendre :
Sag. 8.2sv : “C'est elle (la Sagesse) que j'ai chérie et recherchée dès ma jeunesse ; et je suis devenu amoureux de sa beauté… Je décidai donc de la prendre pour compagne de ma vie, sachant qu'elle me serait une conseillère pour le bien, un encouragement dans les soucis et la tristesse…
Mais, comprenant que je ne pourrais devenir possesseur de la Sagesse que si Dieu me la donnait, je m'adressai au Seigneur et le priai, et je dis de tout mon cœur :
9.1sv : "Dieu des Pères et Seigneur de miséricorde, toi qui, par ta parole, as fait l'univers, toi qui, par ta Sagesse, as formé l'homme pour qu’il domine sur les créatures que tu as faites…, donne-moi celle qui partage ton trône, la Sagesse…
Quelqu'un, en effet, serait-il parfait parmi les fils des hommes, s'il lui manque la sagesse qui vient de toi, on le comptera pour rien… !
Avec toi est la Sagesse… ; elle sait ce qui est agréable à tes yeux, ce qui est conforme à tes commandements. Mande-la des cieux saints ; envoie-la, pour qu'elle me seconde et que je sache ce qui te plaît. Elle me guidera prudemment dans mes actions, me protégera par sa gloire.
Quel homme en effet peut connaître le dessein de Dieu ? Car les pensées des mortels sont timides, et instables nos réflexions… Nous avons peine à conjecturer ce qui est sur la terre ; mais ce qui est dans les cieux, qui l'a découvert ?
Et ta volonté, qui l'a connue, sans que tu aies donné la Sagesse et envoyé d'en haut ton esprit saint ?
Ainsi ont été rendus droits les sentiers de ceux qui sont sur la terre, ainsi les hommes ont été instruits de ce qui te plaît et, par la Sagesse, ont été sauvés".

“L’avenir du monde serait en péril si notre époque ne savait pas se donner des sages… !“, enseigne le Concile Vatican II (G.S. 15) qui enjoint de ne pas “faire obstacle à la sagesse ancestrale“ (Id 50). Bien plus, l’Eglise doit s’efforcer de mettre en valeur le message du Christ en utilisant “la sagesse des philosophes“. (Id 44).
Autrement dit, Dieu n’a qu’une Parole, cette Parole qui a créé le monde, cette Parole - Verbe de Dieu fait chair - qui, sans cesse, re-crée le monde !

Naguère, j’ai eu un professeur qui martelait : il ne faut surtout pas opposer le Dieu-Créateur au Dieu-Rédempteur : c’est le même ! Si nous opposons la Création - même ternie par le péché de l’homme - à la Rédemption, si les sciences et la pensée de l’homme ne s’accordent pas avec le message évangélique, c’est que nous manquons vraiment d’intelligence !

C’est le moment alors de reprendre la prière de Salomon afin que Dieu nous donne, nous redonne la Sagesse !

Ce fut toute la démarche, me semble-t-il, du pape Benoît XVI à Assise qui, loin de faire de l’amalgame, du syncrétisme (comme certains l’ont dit), a voulu, veut “harmoniser“ (comme un bon musicien qu’il est lui-même) les diverses partitions que “la Sagesse joue devant Dieu depuis la création du monde“ en soulignant l’accord final qui nous est donné dans le Christ “à la plénitude des temps“ ! Sans gommer les différences, voire les oppositions apparentes qu’il y a entre les divers courants de pensée, les religions, - ces différences que notre manque d’intelligence, alourdie par nos fautes, accentue parfois -, le pape, lui, en bon humaniste et théologien tout a la fois, se plaçant à un niveau bien supérieur, a voulu, veut, à la suite de Jean-Paul II, “harmoniser“ tous les multiples effets de la Sagesse divine, en vue de la construction de la PAIX : paix entre les hommes, paix d’alliance de Dieu avec les hommes.

“Shalom !“ aurait pu répondre le rabbin assis à ses côtés ! La racine de ce mot hébreu signifie : "plénitude, intégrité" ! (mot souvent utilisé dans les contrats à propos d'un bien prêté et restitué "intégralement"). Car s’il y a "plénitude de vie", "intégrité" de toutes les composantes qui fondent notre existence, comme le désirait la Sagesse au matin de la création, il y a obligatoirement une "HARMONIE" entre toutes nos pensées, tous nos désirs et toutes nos affections, autrement dit entre toutes nos activités d'intelligence, de volonté et de sensibilité ! Ce sera alors le bonheur (mot souvent employé au pluriel, en hébreu, parce que concernant justement toutes nos facultés !).
Et cette "HARMONIE" établie et entretenue à l'intérieur de notre être se traduira alors à l'extérieur : une "HARMONIE" entre toutes les relations que nous pouvons entretenir avec celles et ceux que nous pouvons rencontrer. Ce sera alors LA PAIX !

"SHALOM !" : que règnent le bonheur, la paix en tout homme créé “à l’image et ressemblance de Dieu !“.
"SHALOM !" : que la paix progresse alors entre les hommes qui vivent ensemble sur la terre trop souvent labourée d'affreux sillons de souffrances !

vendredi 11 novembre 2011

Saint Martin

11 Novembre

Jésus parlait de "sa venue" : "quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire…". Des centaines de peintres, de sculpteurs feront surgir la fresque du jour final sur la toile, dans la pierre. Et l’évocation du tribunal de fin du monde, creusera de gravité et de crainte le sérieux de la vie humaine…

Pourtant, il ne faut pas se laisser fasciner par le décor, l'imagerie de l'ultime assemblée. Jésus ne veut pas décrire, à l'avance, l'avènement du monde à venir. D'ailleurs, il n'a jamais répondu à la soif de merveilleux, si profonde chez l’homme ! A propos de la fin des temps, en comparaison de la littérature de son époque, Jésus est d’une sobriété étonnante… Il a même déclaré qu'il ne savait "ni le jour ni l'heure". Jésus n'a donc pas voulu faire, à l'avance, le scénario du jugement, ni satisfaire la curiosité par une page de littérature d'anticipation.

L'insistance de Jésus ne porte pas sur l'avenir, mais bien sur le présent. C'est aujourd'hui, nous dit-il, que le jugement est commencé, et non pas dans quelque ultime débat. Car c'est aujourd'hui que les hommes ont faim et soif, et qu'il y a parmi vous des étrangers, des malades, des prisonniers, des démunis.

Maniant le paradoxe, Jésus utilise et renverse les représentations religieuses habituelles. Certes, il reprend l'imagerie courante, ouvrant à son tour le tribunal du jour final. Mais c'est pour dire : ce n'est pas ce jour-là que la décision est prise ; c'est fait depuis longtemps. Si Jésus se transporte à la fin des temps, c'est pour nous faire saisir l'importance du présent. C'est une manière subtile de nous crier : le grand soir, c'est ce soir ! Ce n'est pas vers l'avenir lointain que Jésus jette la lumière de son regard, mais vers la profondeur actuelle de la vie. Il nous révèle que Dieu habite notre aujourd'hui. L'échéance d'éternité, c'est maintenant, le moment présent.

De plus, cette page nous réserve une autre surprise, plus étonnante encore : la rencontre du roi ne sera pas, elle non plus, ce que nous attendions. Ce n'est pas dans la fulgurance du ciel - ou pas seulement, du moins - que les hommes auront l'entrevue décisive. En réalité, Dieu est accueilli ou repoussé chaque fois que sont accueillis ou repoussés les hommes qui ont besoin des autres hommes. Quel prodigieux renversement, et scandaleux pour certains : le visage de Dieu que nous désirons voir un jour, c'est aussi - depuis l'Incarnation - le visage de l'homme: celui de mon voisin, de mon frère, de ma sœur… Oui, la rencontre avec Dieu, c'est obligatoirement la rencontre avec l'homme créé à son image et "re-créé" par Dieu fait homme. Aimer Dieu, c'est aimer l'homme !

Et Jésus lui-même n'a cessé, durant toute sa vie humaine, de nous donner l'exemple de cet amour de l'homme. Par l’évangile d’aujourd’hui, il nous dit : "Tu veux savoir ce que signifie le verbe "aimer", interroge donc ceux que j'ai rencontré; et tu sauras comment rencontrer tes frères.
- Interroge cette femme prise en flagrant délit d'adultère. Arrachée à la mort la plus infâmante…, elle te dira de quel amour elle fut aimée…
- Interroge ce fonctionnaire véreux, ce Zachée, exploiteur des pauvres…, Libéré des ambitions qui le dévorent, il te dira si ce jour-là, il fut aimé…
- Interroge cette prostituée, objet de sarcasmes chez Simon. Qu'elle te dise mon regard sur elle, ce regard qui a changé en diamant la fange de sa vie.
- Interroge cet homme à la main desséchée que j'ai guéri un jour de sabbat, transgressant, pour lui tout seul, le tabou le plus sacré. Lui aussi a connu la puissance libératrice de l'amour…
- Interroge Simon-Pierre, après son reniement et son pardon reçu. Demande-lui jusqu'où va l'amour lorsque c'est Dieu qui aime…
- Interroge ces pécheurs de tout acabit, ils te diront ce que j'ai enduré de mépris, de réprobations pour avoir osé les fréquenter, les rencontrer".

Depuis lors, toute rencontre humaine est une rencontre sacrée. L'évangile d'aujourd'hui doit nous fait comprendre qu'une rencontre de l'homme, même au tournant imprévue de sa vie, est une rencontre de Dieu!

St Martin a compris cela. Devenu, bien malgré lui, officier dans l'armée romaine, on lui attribue automatiquement un esclave pour lui servir d'ordonnance. Il le considère comme un frère : il l'invite à sa table, parfois le sert et lui nettoie ses chaussures. - Durant le rude hiver 338-339, il est en garnison à Amiens. De bon matin, il effectue une ronde. Aux portes de la ville, il aperçoit un mendiant mal vêtu, un étranger, un gaulois loqueteux. Sans hésiter, Martin coupe en deux son large manteau de cavalier ; il couvre le malheureux ; il habille le Christ lui-même : "j'étais nu, et tu m'as vêtu"!

Et, bien sûr, il y a multitude d’autres exemples… Exemples que nous ne pouvons sans doute pas refaire, copier… Mais ils nous enseignent que tous, nous avons à inventer, là où Dieu nous a placés, des gestes d'amour de Dieu qui sont des gestes d'amour de nos frères. Bien sûr, seuls, nous sommes souvent démunis ; mais avec la force du Christ ressuscité, nous pourrons accomplir des choses humaines qui seront divines.

N'oublions pas ! Dieu n'est pas enfermé au bout du chemin de notre vie, derrière les portes de bronze de quelque tribunal d'éternité. Il est ici, parmi nous ; il est en tout lieu de la terre. Et ce que les hommes sont les uns pour les autres, ils le sont en même temps pour Dieu. Impossible de compartimenter la vie, et de mettre Dieu en des lieux réservés que l'on aborderait avec des airs de circonstance. Dieu habite la joie, le bonheur, mais aussi la faim, la solitude, la prison, la maladie, le dénuement. Il attend que les hommes soient simplement humains à son égard. Son temple - son Corps - c'est l'humanité souffrante et ardente, accablée par toutes les morts, mais vouée aussi à toutes les résurrections.

Et, en terminant, pour vous signifier que ce que je viens de vous dire n'est pas arbitraire, je vous renvoie au grand Saint Augustin. Il disait dans l'un de ses sermons : « Au jugement dernier, le Seigneur ne dira pas : “Venez prendre possession du Royaume puisque vous avez vécu chastement, n'avez fraudé personne, n'avez pas écrasé le pauvre, n'avez violé la propriété de personne, n'avez trompé personne avec un faux serment“. Il n'a pas dit cela, mais : “Recevez le Royaume, car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger“. Et pourquoi les impies sont-ils condamnés ? Parce qu'ils sont adultères, homicides, fourbes, sacrilèges, blasphémateurs, infidèles ? Non, Notre Seigneur ne dit rien de tout cela, mais il leur dit simplement : “J'ai eu faim et vous ne m'avez pas donné à manger !“"
Vous êtes émus, je le vois
- continuait St Augustin - comme je le suis moi-même. La chose est vraiment admirable. Et je résume la raison de cette chose admirable pour vous l'expliquer. Et comment l'expliquer ? La Parole de Dieu nous répond : "L'eau éteint les flammes ; l'amour du prochain remet les péchés" (Eccle 3/30). Ou encore : "Enferme ton amour dans le cœur du pauvre, et c'est lui qui priera pour toi le Seigneur" (19/15)… Et il y a dans la Parole de Dieu, de nombreux autres exemples qui nous montrent la valeur de l'amour fraternel pour obtenir l'extinction et la destruction des péchés.
C'est pourquoi, envers ceux qu'il va condamner, et plus encore, envers ceux qu'il va couronner, le Christ tiendra compte seulement de l'amour fraternel. Comme s'il disait : “Si je vous examinais et vous pesais en scrutant avec soin toutes vos actions, il serait bien difficile de ne pas trouver de quoi vous condamner. Mais recevez le Royaume, car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger. Si vous entrez dans le Royaume, ce n'est pas parce que vous n'avez pas péché, mais parce que, par votre amour de vos frères, vous avez expié vos péchés“ ».

Retenons cette leçon de l'Evangile que l'Evêque d'Hippone avait bien su discerner. Et rappelons-nous ce devoir de l'amour de nos frères, même si nous ne l'exprimons que par un simple verre d'eau ou par un simple sourire réconfortant.

jeudi 10 novembre 2011

St Léon

10 Novembre

On peut tout particulièrement invoquer aujourd’hui St Léon, pape, l’invoquer pour notre monde d’aujourd’hui, si inquiet, troublé, incertain...

Je sais bien que toutes les époques - et toute existence (la nôtre) - sont “troublées“. St Jean lui-même ne disait-il pas que, globalement, le monde où nous vivons est “mauvais“ ?

Mais le cinquième siècle - celui de St Léon - est une époque de grande crise, de grande mutation.

- Politiquement : c’est l’époque de ce que l’on a appelé, improprement me semble-il, “l’époque des Barbares“ : ces peuplades du Centre de l’Europe actuelle, principalement, qui immigraient vers l’Ouest à la recherche, la plupart du temps, de richesses et tout simplement de nourriture, de moyens de subsistance. Certains pays ne connaissent-ils pas, actuellement, ce même phénomène d’immigrations, provoquant vagues, voire tempêtes humaines ? Et, en son temps, le pape St Léon assista, impuissant, au pillage de Rome par les Vandales en 455.

- Religieusement : c’est l’époque des grands troubles en ce qui concerne la formulation de la foi. Et nous-mêmes, nous pleurons parfois sur notre Eglise qui, en Europe du moins, semble s’émietter, voire se déchirer !
St Léon s’engagea à fond dans ces querelles d’expression de la vraie foi, en particulier lors du Concile de Chalcédoine (451). “Pierre a parlé par la bouche de Léon“, s’écrièrent les évêques, lors de cette assemblée importante. Et depuis lors, le pape fut considéré comme le garant de l’Unité de l’Eglise.
Nous-mêmes, prions pour notre pape : successeur de Pierre pour qui Jésus a prié afin que sa foi ne défaille pas, il est le gardien de l’intégrité de la foi, de notre foi qui doit s’exprimer, comme disait St Paul, par une “persévérante espérance“ et un “amour qui se met toujours en peine“, un amour et envers Dieu et envers nos frères… (Cf. début I Thess.)

Malgré ces troubles importants à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Eglise, St Léon montra une grande SERENITE qu’il puisait justement en sa foi : “Chrétien, s’exclamait-il, reconnais ta DIGNITE (malgré les souffrances et difficultés diverses). Et souviens-toi toujours de quelle Tête, de quel Corps tu es membre !“.

Le secret de sa paix, de sa maitrise de lui-même, c’étaient l’amour et la foi qui l’animaient.
- Sa foi en Jésus, vrai Dieu et vrai homme. Aussi avait-il une dévotion particulière pour Marie, Mère de Jésus.
- Sa foi en l’Eglise fondée par le Christ.
- Son amour de l’Eglise - malgré des défaillances diverses et nombreuses à son époque -, cette Eglise dont Pierre - avec ses successeurs - continue de tenir le gouvernail d’une main assurée.

“Ne craignez pas !“, disait le Pape Jean-Paul II à la suite de Jésus. C’est toujours d’actualité.

Et, peut-être, qu’à l’occasion de la fête d’un si grand pape, St Léon, il est bon de vivifier notre prière pour le pape.
- Je ne suis pas encore très vieux ; mais je me rappelle le pape de mon enfance, Pie XII, si injustement décrié aujourd’hui. Ce fut le pape de la plus grande guerre mondiale, le pape de la plus grande persécution de l’histoire de l’Eglise. Quand je le revois bénir et prier, je pense à son silence de père, à sa souffrance de père ! Il était et reste, par delà toutes les lamentables considérations politiciennes et idéologiques, le bon Pasteur, ferme dans sa foi, “espérant contre toute espérance“, manifestant l’amour de Dieu au milieu d’un monde de cruauté !
- Et que dire du “bon pape Jean“ ? Il était vraiment l’image de notre Père du ciel !
- Quand je revois Paul VI, j’ai le même sentiment. Ce petit homme humble qui, dans son silence montre la maison du Père. Intacte est sa foi (sa “Profession de foi“), intacte son espérance, intact son ordre moral inspiré par son amour pour l’homme. Il ne se fâchait pas ; il ne condamnait pas. Il était, en un temps de turbulence intellectuelle et morale, le “roc“ de l’Eglise !
- Et que dire de Jean-Paul II ? Sans crainte aucune, il manifestait la force même de Dieu, et pour le monde et pour l’Eglise !
- Prions pour notre pape actuel, Benoît XVI. Dans sa grande humilité, sa simplicité, malgré les nombreuses attaques dont il est l’objet, il reste serein ne cessant d’enseigner pour transmettre la juste expression de la foi, inspirer une profonde espérance, manifester un chant d’amour pour Dieu et les hommes tout à la fois !

Oui, prier pour le pape, c’est aussi prier pour l’Eglise !

mardi 8 novembre 2011

La Sagesse !

32ème T.O. Lundi et jours suivants (1)

Vous avez peut-être feuilleté un peu les livres de Sagesse (Sagesse, Siracide, Proverbes…). Le P. de Courville (de passage ici) me disait que ce sont des livres (écrits tardifs – 2ème s. av. J.-C) qu’on lit, qu’on étudit peu. C’est dommage ! Certes, y a des passages extrêmement banals… Et c’est un peu long ! Mais si on prenait un peu plus au sérieux certaines règles de politesse, de courtoisie, de convivialité qu’on y trouve, peut-être que des communautés aux aspirations mystiques les plus hautes s’en porteraient encore mieux !

Car le sage par excellence, c’est l’expert en l’art de bien vivre. Ses recommandations - que l’on retrouve dans la Règle de St Benoît et en bien des auteurs spirituels (Imitation…) - sont constantes : prudence, modération dans les désirs, travail, humilité, loyauté du langage… et surtout respect de la justice, amour des pauvres… etc.
Sir. 6.33 : “Si tu aimes à écouter, tu apprendras et si tu prêtes l'oreille, tu seras sage".
7.2 : “Eloigne-toi de l'injustice et elle s'écartera de toi“.
7.13 : “Garde-toi de proférer aucun mensonge, car il ne peut en sortir rien de bon“.
10.14 : “Le Seigneur a renversé le trône des puissants et fait asseoir à leur place les doux. Le Seigneur a déraciné les orgueilleux et planté à leur place les humbles“.
Sentiments que l’on retrouve, bien sûr, dans le N.T. La Sagesse est comme l’échelle de Jacob : quand elle bien plantée, elle peut s’élever très haut !

Et cette Sagesse, dans l’A.T., est comme hypostasiée, personnifiée. C’est encore une créature (on est encore loin de la pensée de St Jean : “Et le Verbe s’est fait chair !“). Mais c’est une créature qui existe avant la création du monde. Elle “joue“ devant Dieu ! Elle inspire Dieu créant le monde :
Prov. 8.22sv : "Dieu m'a créée, prémices de son œuvre, avant ses oeuvres les plus anciennes". (“prémices“ : “reschit“ en hébreu, comme “berèchit“ : commencement“).
"Dès l'éternité je fus établie… Quand les abîmes n'étaient pas, je fus enfantée…, Avant que fussent implantées les montagnes, avant les collines, je fus enfantée…
Quand Dieu affermit les cieux…, quand il condensa les nuées d'en haut,…, quand il assigna son terme à la mer, quand il traça les fondements de la terre, j'étais à ses côtés comme le maître d’œuvre“.


Et lorsque le monde est créé, elle vient converser avec les enfants des hommes :
8.30-31 : “Je faisais ses délices, jour après jour, m'ébattant tout le temps en sa présence, m'ébattant sur la surface de sa terre et trouvant mes délices parmi les enfants des hommes“

Il y a un texte qui frôle de plus près encore le N.T. :
Sir. 24 : "Je suis issue de la bouche du Très-Haut... J'ai habité dans les cieux et mon trône était une colonne de nuée.
Dans les flots de la mer, sur toute la terre, chez tous les peuples et toutes les nations, j'ai régné…
Alors le Créateur de l'univers m'a donné un ordre… Il m'a dit : Installe-toi en Jacob, entre dans l'héritage d'Israël… C’est ainsi qu'en Sion je me suis établie…, qu'en Jérusalem j'exerce mon pouvoir.
J'y ai grandi comme le cèdre du Liban, comme le cyprès sur le mont Hermon. Comme le cinnamome et l'acanthe j'ai donné du parfum…, Je suis comme une vigne aux pampres gracieux, et mes fleurs sont des produits de gloire et de richesse.
Venez à moi, et rassasiez-vous de mes produits“.

Oui, c’est un texte qui annonce ce que St Jean écrira :
Jn 1.1sv : “Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu. Tout fut par lui, et sans lui rien ne fut… Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous, et nous avons contemplé sa gloire, gloire qu'il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité“.

Et c’est parce que la Sagesse est bien plantée en terre, qu’elle s’élève, qu’elle élève très, très haut : il s’agit toujours de l’échelle de Jacob plantée désormais un peu partout, plantée en nos cœurs eux-mêmes, comme dans le cœur de Nathanaël :
Jn 1.51 : “En vérité, je vous le dis : vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme !“

Le Fils de Dieu, Verbe de Dieu, Sagesse de Dieu, est descendu parmi les hommes… Il s’est fait homme… Aussi Dieu l’a exalté, l’a fait remonter entraînant avec lui une multitude de frères :
Phil. 2.6 sv : “Lui, de condition divine, ne retient pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais il s'anéantit lui-même, prenant condition d'esclave, et devenant semblable aux hommes…
Aussi Dieu l'a-t-il exalté et lui a-t-il donné le Nom qui est au-dessus de tout nom, pour que toute langue proclame, de Jésus Christ, qu'il est SEIGNEUR, à la gloire de Dieu le Père“.


C’est à nous de recevoir cette Sagesse, de l’accueillir… (Nous y réfléchirons demain)…