samedi 5 mars 2011

Ancien et Nouveau !

8 T.O. Samedi - Ancien et Nouveau ! (Mc 10 17-27)

On a dit que Marc ne savait pas très bien écrire. Il est vrai que Luc a un meilleur style et un vocabulaire plus riche. Il n’empêche que Marc construit et mène très bien son récit : au fur et à mesure que Jésus dévoile sa véritable identité, l’opposition se fait de plus en plus forte. Avec la péricope d’aujourd’hui, on dirait que le procès de Jésus commence : les grands prêtres, est-il dit, les scribes et les anciens s’approchent de Jésus. C’est toute une délégation de membres des trois ordres du Sanhédrin, autrement dit, les représentants de l’autorité suprême ! Ce n’est pas rien !
Et, naturellement, ces représentants de l’autorité demandent : “De quelle autorité fais-tu cela ?“. Argument d’autorité ! C’est classique. Par l’autorité dont ils se revêtent, ils se portent garants de la Loi, cette Loi de Moïse multipliée par toutes sortes de prescriptions plus ou moins justifiées. Et pour eux, la Loi, avec toutes ces prescriptions, c’est la Loi ! “Dura lex, sed lex !“. Or Jésus vient de faire à leurs yeux une profanation caractérisée, en chassant les vendeurs du temple, ce “lieu que Dieu a choisi pour y faire habiter son Nom !“ - De plus - St Matthieu (21.23) et St Luc (20.1) le notent -, cette délégation du Sanhédrin aborde Jésus alors qu’il enseignait ! Leur question d’autorité vise donc non seulement les actes de Jésus, mais égale-ment son enseignement !

Jésus ne se dérobe pas. Comme souvent, à une question, il répond par une autre question : “Le baptême de Jean venait-il du ciel ou des hommes ?“. Habile stratagème puisque tout le peuple avait Jean-Baptiste en “odeur de sainteté“, si je puis dire. Certes ! Mais Jésus n’utilise pas seulement un moyen humain de dialectique (qu’il sait parfaitement manier), car il pense toujours, lui, dans le sens d’une Alliance verticale avec Dieu. Les apôtres le comprendront plus tard. St Pierre affirmera : “l’événement… (Le mot “événement“ dans le langage biblique désigne l’intervention de Dieu dans l’histoire) … l’événement, vous le savez, a gagné toute la Judée. Il a commencé par la Galilée après le baptême que proclamait Jean-Baptiste (Ac. 10.37). A partir de Jean-Baptiste, avec lui, c’est Dieu qui, en Jésus, intervient pour sauver son peuple ! - Et St Paul sera plus précis encore (Cf Ac. 13.24-25).

Autrement dit, Jean-Baptiste résumait en lui-même toutes les interventions de Dieu déjà accomplies. Jésus n’avait-il pas dit : “Elie (le premier des grands prophètes et qui les représentait tous au moment de la Transfiguration)… Elie est revenu. C’est Jean-Baptiste !“. D’ailleurs, en désignant Jésus comme l’“Agneau de Dieu“, Jean-Baptiste le révélait comme celui qui accomplirait la prophétie d’Isaïe, la prophétie du “Serviteur souffrant“ qui donnerait sa vie pour le salut du peuple ! Jean-Baptiste désignait Jésus comme celui qui accomplissait les Ecritures !

Ainsi donc, si les garants de la Loi divine savait véritablement l’interpréter à l’aide de la Tradition dont ils se réclament souvent, à l’aide des prophètes qu’ils vénèrent, ils identifieraient facilement qui est Jean-Baptiste…, et de ce fait qui est Jésus ! Ils comprendraient les paroles de Jean-Baptiste lui-même : “J’ai vu et j’atteste qu’il est, lui (Jésus), le Fils de Dieu !“. (certains manuscrits : “l’Elu“, le “Fils élu“ !)

Que retenir de ce passage ? Bien des enseignements que vous vous ferez à vous-mêmes, certainement. Je n’en retiens qu’un exprimé par le pape Benoît XVI dans son exhortation “Verbum Domini“. Toute la Bible, dit-il, doit être considérée comme “unique Parole de Dieu“ ! L’Ancien Testament trouve son accomplissement dans le Nouveau Testament
- un accomplissement de continuité
- un accomplissement de rupture, tant l’intervention de Dieu est différente (Incarnation du Fils de Dieu)
- un accomplissement de dépassement…
Il rappelle la célèbre phrase de St Augustin : “Le N.T. est caché dans l’Ancien ; et l’Ancien est révélé dans le Nouveau“. Et St Grégoire-le-Grand d’affirmer : l’A. T. est prophétie du N. T. ; et le meilleur commentaire de l’A. T. est le N. T. !“. Aussi le pape met en garde contre toute forme de marcionisme, contre l’exigence de ce M. Marçion qui, au 2ème s., prétendait supprimer non seulement l’A.T. mais même les citations de l’A.T. dans le Nouveau !

Et, pour notre itinéraire de foi, je crois que c’est important de comprendre (avec Jean-Baptiste) que le N.T. ne dégage sa signification qu’au terme de l’A.T. comme l’accord finale d’une symphonie divine.

Il est vrai que l’A.T. décrit des situations épouvantables, met en valeur des hommes peu recommandables… etc (au point que dans les écoles chrétiennes d’autrefois, la Bible était à l’index ; on ne jouissait que d’un recueil de textes !). Mais, dites-moi, ne vivons-nous pas encore ces situations épouvantables, ne sommes-nous pas encore des gens peu recommandables ? Or, dans l’A.T., Dieu prend les hommes tels qu’ils sont et là où ils en sont et les fait avancer dans le mystère de son Alliance. Oui, nous-mêmes, nous sommes parfois au niveau de l’A.T. ; et nous sommes heureux de trouver des compagnons de route, tels David, Jacob, Sanson et bien d’autres peu recommandables que Jean-Baptiste accueille avec son baptême de conversion. Tous ceux-là nous aident grandement - Jean-Baptiste nous expliquant les Ecritures en désignant Jésus - à marcher, tels que nous sommes et là où nous en sommes, mais sans découragement, vers cette “Cité dont Dieu seul est l’Architecte et le Fondateur“. Avec l’A.T., nous sommes à bonne école pour mieux comprendre toute la pédagogie de Dieu à notre égard, pédagogie qui culmine à Noël et à Pâques !

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