mercredi 11 mars 2020

"Serviteur souffrant" !


2ème semaine de Carême  -  Mercredi

Le but principal du Carême est de nous faire rejoindre Jésus dans sa montée à Jérusalem.
Ses options messianiques, nous les connaissons depuis le récit de la triple tentation au désert, depuis sa rencontre avec Satan au début de sa vie publique, après son baptême dans le Jourdain.

Ces options qui se sont certainement formées durant ses trente ans de sa vie cachée dans les horizons de Nazareth, dans la méditation de la vie des prophètes …,  ces options sont très éloignées de la mentalité de son peuple à l’époque.

Pour faire part de ses options messianiques, il choisit quelques apôtres qu’il éduque et qu’il initie lentement en parcourant le pays. C’est seulement au bout de quelques mois que dans la région de Césarée de Philippe, au Nord du pays – lieu pourtant très païens ! -, il les révèle explicitement à ses apôtres après la confession de Pierre et la fondation de l’Eglise.
Pierre est le premier "scandalisé". "A Dieu ne plaise, Seigneur, tout cela ne t’arrivera pas !". Il se fait rabrouer et même traiter de Satan qui le premier avait tenté de détourner Jésus de ces options.

Moïse et Elie sur la montagne de la Transfiguration apparaissent alors pour confirmer que les options messianiques de Jésus sont celles qui correspondent au dessein de Dieu pour le salut du monde. Et s’intensifie alors la montée à Jérusalem, en même temps que s’accroît l’incompréhension de ses apôtres les plus intimes.

L’Evangile d’aujourd’hui est particulièrement révélateur de ce décalage, de cette incompréhension, en rappelant les prédictions des prophètes, et surtout en évoquant la figure du "Serviteur souffrant" dont parle Isaïe en particulier.

Les apôtres qui suivent Jésus, n'y prêtent aucune attention. Bien plus,  ils discutent de la façon la plus mesquine sur lequel d'entre eux qui occupera la première  place dans le royaume à venir qu’ils imaginent selon la mentalité courante de l’époque : on rêvait alors du triomphe sur l’occupant romain, de la restauration de la gloire salomonienne, et d’une suprématie mondiale d’Israël sur le monde… Et que sais-je encore.

C’est la mère de Jacques et Jean qui se fait naïvement l’interprète des ambitions qu’elle a pour la carrière de ses deux garçons. Et cette demande se place juste immédiatement après que Jésus, pour la deuxième fois, ait formulé le tragique de sa destinée et parlé de la "coupe amère" qu’il demandera à son Père de ne pas boire lors de son agonie à Gethsémani : "Pouvez-vous boire à la coupe que je dois boire ?"

Pour nous aider à rejoindre Jésus dans sa solitude incomprise, la liturgie du Carême fait souvent appel à Jérémie qui a eu lui aussi son "Gethsémani," et qui nous fait part des souffrances qui ont jalonné toute sa vie et qui sont toutes liées à son ministère.

Il nous les a confiées avec une sincérité qui nous aide à rejoindre Jésus dont il est une impressionnante préfiguration.
L’incompréhension de ses compatriotes à Anatot, sa ville natale, ses échecs, la persécution officielle ou sournoise qu’il subit
quand il met en question les fausses sécurités que l’on cultive à l’époque,
quand il critique le culte somptueux et formaliste du temple qu’on considérait comme une sorte d’"assurance tout-risques" et une garantie d’échapper à toutes les menaces de catastrophes qui s’accumulent comme des nuages à l’horizon...

Aucun personnage de l’Ancien Testament ne peut mieux nous aider dans cet effort que nous sommes invités à faire durant le Carême pour rejoindre Jésus
dans la solitude incomprise de sa montée à Jérusalem,
dans ce dialogue où il n’a plus pour interlocuteur que Dieu seul, dont il est venu réaliser le dessein de salut pour le monde entier.

Relisons Jérémie et en particulier les passages qu’on a appelés les "confessions de Jérémie" et que les notes de nos Bibles et les introductions de nos éditions nous font facilement retrouver.

Aucun commentaire: