1ère semaine de Carême - Mercredi
La liturgie
nous fait rencontrer aujourd’hui un personnage curieux !
Disons tout d'abord : quand on parle de
Jonas, il faut distinguer trois niveaux de lecture.
- Il y a le Jonas historique.
- Il y a le livre de Jonas.
- Et il y a, dans l’Evangile, le "signe
de Jonas".
Le Jonas
historique a droit à
quelques lignes dans le 2ème livre des Rois (14,23-25 ) "En
la quinzième année d'Amasias fils de Joas, roi de Juda, Jéroboam fils de
Joas devint roi d'Israël à Samarie; il régna 41 ans. Il fit ce qui déplaît à Dieu,
il ne se détourna pas de tous les péchés de Jéroboam fils de Nebat, où celui-ci
avait entraîné Israël. C'est lui qui recouvra le territoire d'Israël, depuis
l'Entrée de Hamat jusqu'à la mer de la Araba, selon ce que le Seigneur, Dieu
d'Israël, avait dit par le ministère de son serviteur, le prophète Jonas
fils d'Amittaï, qui était de Gat-Hépher. »
Joroboam II, 783-743,
+ C'est après
le schisme qui suivit le règne de Salomon ;
+ Un des plus
longs règnes sur le royaume du Nord ; 41 ans ;
+ C'est un
mécréant… Et curieusement il est comme récompensé… ! C'est lui - ce mécréant - qui recouvre le "grand Israël"
… ; et plus curieusement encore "selon…
ce qu’avait dit…. Jonas, fils d’Amittaï de Gat-Hépher". C’est tout ce
qu’on sait de lui.
Passage
biblique très curieux : un prophète qui transmet la bénédiction divine à un
mécréant de roi pour qu'il puisse
reconquérir tout le territoire d'Israël ! Grande question que l'on ne peut
aborder aujourd'hui ! (Dieu se sert de tout pour son dessein divin !)
A un deuxième et très différent niveau de
pensée, on a le "livre de Jonas" que l’on trouve dans les
recueils prophétiques. On situe sa rédaction au temps du retour de l’exil de
Babylone.
A cette époque, sous l’inspiration d’Esdras
et de Néhémie, le peuple élu développait une tendance à se renfermer sur lui-même par peur de perdre son identité.
L’élection divine tournait au particularisme ethnique ; et on avait tendance à
oublier le but universalise
de cette élection.
Alors, à la même époque, un auteur plein
d’humour s’empare du personnage de Jonas et compose le livre de Jonas où il
montre que les païens,
- qu’ils viennent de l’Ouest comme les
marins du bateau où Jonas s’embarque à Jaffa pour s’enfuir à Tharsis ;
- ou qu’ils viennent de l’Est comme les
Ninivites,
valent mieux que ses compatriotes et se
convertissent au Dieu Vivant.
C’est intéressant de remarquer au passage
que Dieu inspire des courants de pensées en apparence contradictoires mais en
fait complémentaires et s’équilibrant.
Quand on parle de Jonas, on pense surtout
à la baleine ou au grand poisson. L’iconographie chrétienne s’est beaucoup
inspirée de la disparition de Jonas dans le ventre du poisson, comme un symbole
de la mort et de la résurrection du Christ. St Matthieu, dans le passage
parallèle à l’Evangile que nous avons lu dans St Luc, parle en effet de cela.: "De
même, en effet, que Jonas fut dans le ventre du monstre marin durant trois
jours et trois nuits, de même le Fils de l’homme sera dans le sein de la terre
durant trois jours et trois nuits."
(Mt 12,40).
Le signe
universaliste de Jonas –
St Luc, dans
l’Evangile qui est proposé à notre méditation d’aujourd’hui, ne parle pas du
poisson, et centre notre attention sur le principal : la conversion des
païens, alors que les juifs, disons plutôt les dirigeants du peuple juif à
son époque, se montrent sceptiques envers le messianisme universaliste de Jésus.
Rappelons-nous
: après la multiplication des pains, les Pharisiens et les Sadducéens demandent
à Jésus, pour l’éprouver, de leur montrer un signe venant du ciel :
"Les
Pharisiens et les Sadducéens s’approchèrent alors et lui demandèrent, pour le
mettre à l’épreuve, de leur faire voir un signe venant du ciel.
Il leur
répondit : "Au crépuscule vous dites : Il va faire beau temps,
car le ciel est rouge feu ; et à
l’aurore : Mauvais temps aujourd’hui, car le ciel est d’un rouge
sombre. Ainsi, le visage du ciel, vous
savez l’interpréter, et pour les signes des temps vous n’en êtes pas
capables ! Génération mauvaise et adultère ! Elle réclame un signe,
et de signe, il ne lui sera donné que le signe (universaliste) de
Jonas. …Et les laissant, il s’en
alla". » (Mt 16,1-4)
Déchiffrer les signes du temps !
Beaucoup de prédicateurs ont prêché sur
la fin des temps ; de grands saints. Je pense au dominicain St Vincent
Ferrier.
Le Christ a dit que lui-même ignorait
quant arriverait la fin des temps. De toutes manières, pour chacun de nous, le
jour de notre mort est la fin des temps ; nous sommes projetés en dehors
du temps et bien mystérieuse est la nature de la durée dans laquelle nous
habiterons…
La liturgie
d’aujourd’hui n’a retenu que l’idée
de conversion que nous avons tous à faire car notre vie est courte et
la pensée de l'"après de la mort" peut stimuler les véritables examens
de conscience.
… Et en nous
disant avec foi et espérance : Dieu qui nous appelle au repentir nous dit que lui
aussi peut pardonner nos infidélités, nos froideurs et nous accueillir
comme le père de la parabole accueillant l’enfant prodigue à son retour.
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