dimanche 29 décembre 2019

Famille de l'homme ! Famille de Dieu !


 Sainte Famille  19/A

Fête de la Sainte Famille ! Fête de famille !
Or, la famille semble aujourd’hui ébranlée, combattue dans certaines de ses valeurs.
Pourtant, ces semaines, autour de Noël, soulignent, d'année en année, le bienfait du tissu familial. Dans un monde violent, égoïste qui bouscule et désempare, Noël avec Marie, Jésus et Joseph, apparaît comme une halte de tendresse humaine.

Il faut pourtant le reconnaître : la famille de sang ne peut prétendre suffire, puisque Jésus vient fonder une FAMILLE NOUVELLE : la famille spirituelle des croyants.
Nous appartenons à ces deux familles. A l'une par les liens du sang ; à l'autre comme disciples du Christ. Entre les deux, des affrontements sont parfois inévitables. Comment les vivons-nous ?

FAMILLE DE LA TERRE 
Remarquons tout d’abord que le Christ a voulu être membre à part entière d'une famille terrestre normale. "Jésus était de bonne famille ! A la bonne heure !", aurait dit Mgr Affre, archevêque de Paris, mort fusillé lors des affrontements de la Commune  en 1871.  

Joseph assume ses responsabilités, prend des décisions, se sait au service d'une mission divine. C'est par lui, que Jésus, enfant et jeune homme, sera introduit dans les coutumes et les traditions des gens de Nazareth en Galilée. Il sera “le fils du charpentier Joseph”, enraciné dans une vraie famille, elle-même enracinée dans un village ordinaire.
Tel est l'exemple que Jésus oppose aux détracteurs de la “cellule familiale”.

PAROLES DU CHRIST 
Plus encore, au cours de sa vie publique le Christ se fera le défenseur de quelques aspects essentiels de l'institution familiale. Contre les caprices ou les ambitions qui brisent l'unité, il recommande un amour vivant et fidèle, en continuité d'affection :“Que l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni !” - “Ils ne seront plus deux, ils ne font qu’un!”.  A la suite des enseignements de l'Eglise : une solide cellule familiale permet au jeune, encore fragile, de se structurer, de s'équilibrer, avant de se lancer dans les affrontements de la vie. Et si l'ensemble des cellules familiales d'une nation est sain, vigoureux, celle-ci pourra faire face courageusement aux événements du monde, et y jouer son rôle.

Jésus rappelle encore aux enfants le devoir de reconnaissance envers leurs parents. Il stigmatise l'attitude révoltante de ceux qui refusent de les assister dans leur vieillesse sous prétexte qu'ils ont consacré leur argent à l'entretien du temple…  Il y a priorité d'obligation envers les parents.

EVOLUTION ET PERMANENCE. 
Certes, aujourd'hui la famille - comme la société - est en pleine évolution. Ainsi chaque couple, très vite, veut son autonomie complète et décide de son rythme de vie.
L’enfant, lui, veut s'ouvrir très tôt aux connaissances les plus diverses. Vite, il veut prendre des initiatives qui semblent l’éloigner de la famille. 
Beaucoup plus qu’autrefois, les parents sont dans l'obligation de partager leur rôle éducatif et instructif avec l'école et toutes sortes d'organisations complémentaires. Ils ne doivent pas les ignorer ou y trouver un moyen commode de se débarrasser de l'enfant, mais être partie prenante et membre actif de ces organisations.

Malgré tout cela, la famille reste le lieu privilégié, si elle est normale, d'une sécurité, d'une affection attentive, d'un espace de liberté et de compréhension nécessaires au développement harmonieux de ses membres.
Cependant la famille de la terre, et Jésus le soulignera, n'est plus un ABSOLU.

FAMILLE DU ROYAUME  
Jésus ne méprise pas la famille selon la chair. Il y a été fidèle. Cependant, il vient en marquer les limites. Il vient en créer une autre.
Il quitta Nazareth, comme pour prendre de la distance avec le passé.
Il fut vite entouré d'une foule d'auditeurs, hier encore inconnus. Entre Lui et eux, de jour en jour, des liens de plus en plus forts se créèrent.

Un jour on lui dit : “Ta mère et tes frères sont là ; ils te cherchent”. La réponse fut calme et nette: “Qui sont ma mère et mes frères ?” Et parcourant du regard ceux qui étaient assis en cercle autour de lui, il dit : “Voici ma mère et mes frères. Quiconque fait la volonté de mon Père, voilà mon frère, ma sœur et ma mère”.  -  Si Marie est devenue la mère de la famille du Royaume de Dieu, c'est qu'elle est entrée pleinement dans les projets du Christ.

TENSIONS  !  
La famille n'est pas un but en soi. L'enfant n'est pas sa possession. A la stupéfaction de ses parents, Jésus l'avait déclaré lors du pèlerinage de ses douze ans à Jérusalem : “Ne dois-je pas être aux affaires de mon Père ?”  
La famille prépare ses membres à mieux prendre place dans la famille du Royaume de Dieu. “Qui aime son père ou sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs plus que moi, n'est pas digne de moi.”

Dans les premiers siècles, se convertir au Christ signifiait souvent briser les liens avec sa famille humaine. Beaucoup de saints furent obligés de se démarquer de leur famille de sang pour suivre les appels de l'Esprit et préférer la famille du Royaume de Dieu. L'exemple le plus pittoresque n'est-il pas celui de S. François d'Assise ?

A l'heure actuelle, dès qu'un chrétien cherche un style de vie plus évangélique, plus généreux, il trouvera souvent des obstacles parmi ses proches.
Parfois des parents ont la douleur de voir leurs propres enfants leur reprocher leur dévouement apostolique, refuser de les suivre sur le chemin d'une plus grande sainteté.
Et à l'opposé combien de vocations à la vie sacerdotale ou religieuse, combien de vocations à une authentique vie conjugale chrétienne ont été contrariées et même étouffées au sein de leur famille de la terre !

LE CENTUPLE  
Ces fêtes de Noël et du premier de l'An nous redisent un peu plus fort les joies de la famille humaine. Il faut les conserver, les promouvoir.
Mais la fête d’aujourd’hui - et celle-même de Noël - nous rappellent que tous, nous sommes destinés à entrer, un jour, pleinement dans la Famille de Dieu : Père Fils, Esprit-Saint.

Que les familles de la terre s’y préparent. Que la famille humaine soit signe réalisateur de la famille divine
Et que Celui qui est venu créer cette NOUVELLE FAMILLE, celle du Royaume de Dieu, donne force et générosité à ceux et celles qui, sans mépris pour les liens du sang, veulent suivre les appels de l'Esprit pour se consacrer totalement au service du Fils de Dieu ! “lls recevront au centuple en ce temps-ci... et dans le monde à venir, la Vie éternelle”.

dimanche 22 décembre 2019

Annonce à Joseph !


4e Dim. Avent 19.A  :

« Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse. »

Dans les églises, on évoque souvent “l’annonce faite à Marie” : les 8 décembre, 25 Mars ; et bien des tableaux, vitraux, sculptures évoquent la visite de l'Ange à Marie et sa réponse.

Mais pratiquement rien sur “l'annonce faite à Joseph”, rien sur l'Ange du Seigneur qui lui a pourtant dit, à lui aussi, des choses surprenantes, rien sur sa réponse.

Qui est Joseph, cet homme dont l'Évangile ne rapporte aucune parole ? Qui est-il ? Il n'est pas insignifiant, Joseph, et le peu de mots du récit de l’évangile disent beaucoup plus que nous n'imaginons.

Il y a une attitude chrétienne essentielle, indispensable, c’est : ÉCOUTER. Et Joseph peut nous servir d'exemple et nous entraîner.

Prenons cette histoire de songe. C'est souvent, dans la Bible, que l'on évoque le songe. Dans la langue de la bible, le songe n'est pas un rêve. C'est la façon imagée de rendre compte d'une aventure intérieure où quelque chose d'essentiel est engagée.
Dire que Joseph, dans un songe, a entendu l'Ange du Seigneur, c'est dire que Dieu lui a parlé au cœur. Qu'a-t-il entendu, Joseph dans l'intérieur de son cœur ?
“Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse. L'enfant qui est engendré en elle vient de l'Esprit-Saint”.


Comment comprendre l'incompréhensible ? Comment croire l'incroyable ? Comment faire confiance sur parole ?
Ce qui allait de soi, c'était de répudier Marie, c'était conforme à la tradition. Prendre Marie chez lui, c'était, pour Joseph, faire fi du “qu'en dira-t-on”, des chuchotements sournois.
La parole de l'Ange, la parole de Dieu a été plus forte que ses réticences. Joseph a donné raison à cette Parole de Dieu entendue dans son cœur ; et il a eu le courage de changer de projet et de se faire serviteur d'un mystère qu'il ne comprend pas encore.

Oui, on peut se demander : “Joseph, qui est-il ?”. Eh bien ! c'est un homme de silence, un homme intérieur, capable d'écouter Dieu, et capable de changer sa vie à la lumière de la parole qu'il a entendue.

Quelle leçon pour chacun de nous !
Dans un monde bruyant, dans nos vies bousculées, encombrées d'une foule d'activités souvent utiles et indispensables, comment écouter ce qui se passe en nous, faire le point, prendre du recul, si nous ne prenons pas des moments de silence ?

Oui, il faut trouver des lieux, des moments de silence pour Écouter. Vous le faites sûrement et beaucoup le font ! C'est tellement important de descendre parfois dans la crypte de son cœur, pour Écouter.


Que pensez-vous qu'ils viennent faire, ces hommes et femmes qui s'arrêtent de temps en temps dans une église ? Un temps pour se taire, faire silence. Tout se tait alors ; et le silence appelle vers l'intérieur, vers plus loin que l'intérieur, on ne sait ; mais on écoute.

Que pensez-vous qu’ils viennent faire, ces innombrables touristes ? Ils font du tourisme, certes, un peu de culture, souvent. Peut-être sont-ils sensibles aussi à un message, ceux qui écoutent avec le cœur ?

Que pensez-vous qu'elles viennent faire, ces personnes qui s'arrêtent dans les abbayes, une heure, un jour, trois jours ? Ils viennent souvent chercher le silence, écouter le silence, un silence habité d'une présence, une présence célébrée dans la prière.

Que pensez-vous qu'ils viennent faire ces millions de personnes qui entrent en des sanctuaires de Paris, de Lourdes… et d'ailleurs ? On dit que des chrétiens, qui se croient éclairés, se scandalisent de voir alors des personnes aux comportements peu religieux, parfois, et qui se contentent de faire brûler un cierge. Mais monter vers Marie  et faire brûler un cierge, cette démarche peut bien être une réponse, mal formulée peut-être, [ mais, sommes-nous toujours au clair avec nos démarches de croyants ?],  une réponse à un appel mystérieux de Dieu. N’y a-t-il pas dans cette démarche l'expression d'une foi en une présence accueillante et aimante ? C’est certainement Marie, toute maternelle, qui sait, elle, accueillir ceux qui croient et ceux qui cherchent, ceux qui savent prier et ceux qui voudraient savoir.

Prendre du temps pour se taire, pour faire silence, pour écouter, c'est essentiel, capital !
On rappelle souvent qu'être chrétien ne peut pas se concevoir sans un engagement résolu envers ses frères, surtout les plus pauvres !
Il faut dire aussi fort, qu'être chrétien ne peut se concevoir sans un engagement aussi déterminé pour retrouver le chemin du cœur. Car, hélas, il est parfois recouvert de broussailles, tel un sentier de randonnée qu'on ne pratique plus et qui peut disparaître sous les ronces.


Préparer Noël, c'est donc prendre du temps pour le silence, pour écouter ce que Dieu nous suggère et, nous aussi, comme Joseph, nous faire serviteurs d'un mystère qui nous dépasse.

Après-demain, ce sera Noël ! Nous fêterons l'anniversaire de la naissance du Christ. Noël, ce n'est pas seulement le souvenir d'un événement passé, c'est le Seigneur qui nous tend la main aujourd'hui, qui nous demande de l'accueillir aujourd'hui. Il y a 2000 ans, il n'y avait pas de place pour lui à l'hôtellerie. Y-a-t-il de la place pour lui chez nous ?

Certainement, si nous avons pris le temps de veiller et de prier, comme les textes du 1er dimanche nous le conseillaient.
Certainement, si nous avons décidé de préparer son chemin, à la suite d’Isaïe et de Jean-Baptiste..
Certainement, si nous osons espérer son salut contre toute espérance.
Certainement, si nous voulons l'écouter.

C'est ce que nous pouvons nous souhaiter de meilleur en nous disant :  “Saint et joyeux Noël”.

lundi 16 décembre 2019

Espérance !


3ème Avent. 19/A

Veiller  comme celui qui n veut pas manquer le passage du Seigneur C"était l"encouragement du 1er dimanche de l'Avent !
Ptéârer le chemin du Seigneur en nos coeurs et dans la vie du monde? C'était le souhait de dimanche dernier !

Espérerc'est la troisième étape vers Noël. Mais, en réalité, les textes d’aujourd’hui parlent plutôt des raisons d’une apparente désespérance

Ainsi, il y a  désespérance de Jean-Baptiste.
Il est en prison. Hérode l'a fait enfermer dans la forteresse de Machéronte, sur les hauteurs de la mer Morte. Comment pourrait-il ne pas s'interroger, ne pas douter ? Humainement, il n'a plus rien à espérer ; d’ailleurs, la suite le prouvera. Pourtant, il a été fidèle à sa mission de prophète, dénonçant courageusement la conduite d'Hérode.
Alors, où est Dieu, que fait-il ? Ne pouvait-il pas épargner un tel châtiment injuste à son fidèle serviteur ? Et puis, Jésus, est-il vraiment l'envoyé de Dieu ? “Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ?”. Question qui manifeste un découragement !

Cette question de Jean-Baptiste, n’est-ce pas, parfois, la nôtre ? Quand le malheur nous accable, il nous arrive de dire nous aussi : “Où est Dieu, que fait-il ?.” Face au malheur du monde, combien disent : “Où est-il ton Dieu ?” Les chrétiens entendent cette question chaque jour. Le Dieu qu'ils prient semble absent de la vie familiale, sociale, de la vie du monde ; et, s'il est nommé dans la culture, c'est comme le souvenir d'un passé révolu.

Vous-mêmes, moi-même, la question nous taraude.
Après plus de deux mille ans de christianisme…,
avec des millions de commentaires évangéliques, des milliers de livres sur Jésus-Christ…,
aujourd'hui encore, il y a des milliers d'hommes, de femmes qui se disent chrétiens et qui continuent de s'égorger courageusement…,

Aussi, n'a-t-on pas raison de désespérer ? A la suite des deux disciples d'Emmaüs, ne pourrait-on pas dire : “Nous espérions que c'était le Christ qui délivrerait notre monde. Mais voilà plus de deux mille ans que ces choses sont arrivées”. Et qu'en est-il ?

La question est on ne peut plus claire. Elle exige donc une réponse claire. En ce 3ème dimanche de l'Avent, écoutons l'inlassable répétition d'Isaïe : “Prenez courage, ne craignez pas, voici votre Dieu. Il vient lui-même ; il vient vous sauver. Le boiteux bondira comme un cerf et la bouche du muet criera de joie”.

Écoutons aussi l'inlassable répétition de Jésus : “Le Royaume de Dieu est proche, il est au milieu de vous”. - “Allez rapporter à Jean ce que vous voyez : les aveugles voient, les boiteux, marchent, les lépreux sont purifiés, la Bonne Nouvelle est pour les pauvres”.

Aujourd’hui ayons cette conviction pour nous répéter les uns aux autres, inlassablement : “Le Royaume de Dieu est là, ne le voyez-vous pas ?”

Mais comment cette conviction qui entraîne une annonce peut paraître véritablement fondée ?
C'est l'apôtre Jacques, dans sa lettre, qui a trouvé les mots justes : “Frères, en attendant la venue du Seigneur, ayez de la patience. Voyez le cultivateur, il attend les produits précieux de la terre avec patience”.

Ces mots me font penser à une légende qui pourrait être un conte de l'Avent, une légende nous engageant sur le chemin d'une réponse fragile, mais vraie.

Un jeune homme, dans son rêve, entre dans un magasin. Derrière le comptoir, se tient un Ange qui fait office de vendeuse. - “Que vendez-vous ?”, lui demande le jeune homme.  - “Tout ce que vous désirez”, lui répond l'Ange avec courtoisie.
Alors, le jeune homme se met à énumérer : “Dans ce cas, je voudrais bien la fin des guerres dans le monde, plus de justice, la tolérance, la générosité, davantage d'amour dans les familles, du travail pour les chômeurs”… . Mais l’ange lui coupe la parole : “Excusez-moi, Monsieur, mais vous m'avez mal compris ; ici on ne vend pas les fruits, mais seulement les graines”.

Jésus nous l'a dit, c'est en toutes lettres dans l'Évangile, Dieu est un semeur. Il a semé des graines de justice dans le cœur de l'homme, des germes de réconciliation, des germes de pardon, des germes d'amour et de tendresse. Pas des fruits, des semences seulement !
C'est à nous de les faire grandir et éclore.
C'est à nous de faire marcher les boiteux, d'éclairer les aveugles, de donner la parole aux sans-voix, de servir les pauvres…
C'est l’inouï de notre vocation chrétienne : nous sommes invités à ne faire qu'un avec le Christ pour qu'il continue par nous à réaliser sa Promesse. Le Christ, aujourd'hui, n'a pas d'autres mains que les nôtres pour transformer le monde. Les mains du Christ, le regard du Christ, la tendresse du Christ doivent désormais passer par nos mains, nos yeux et notre cœur.

Faut-il ajouter que l'espérance chrétienne s'appelle aussi confiance, confiance absolue en un Dieu qui réalisera sa Promesse au-delà de ce qu'on peut imaginer.

Et aujourd’hui, demandons tout spécialement à Marie, qui, elle aussi, se posait des questions (Cf. “Comment cela se fera-t-il ?”), demandons-lui
comment elle faisait quand il n'y avait apparemment plus rien à faire,
comment elle croyait quand il n'y avait apparemment plus moyen de croire,
comment elle espérait quand il n'y avait apparemment plus rien à espérer… au pied de la croix.

Demandons-lui que la lumière de l'espérance passe dans le cœur de ceux qui doutent et désespèrent. Et que nous puissions chanter, la nuit de Noël : “Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière”.

Grande lumière et pourtant parfois petit falot dans une nuit épaisse. Et comme on l'a magnifiquement écrit : “Il est des soirs où il faut à cette lumière bien de la hardiesse, bien de l'assurance pour passer sous la porte des noirs événements”.

Mais elle est là, depuis qu'une toute petite lumière a percé la nuit dans une étable, il y a deux mille ans.

Et pour terminer je ne peux m’empêcher de vous raconter l’histoire d’une très belle fête juive - le fête des Néoménies - reprise en notre liturgie, principalement en la veillée de Pâques.
Le calendrier juif était un calendrier lunaire (je ne vous explique pas pourquoi ; ce serait trop long). Et à chaque nouvelle lune, des témoins, du haut du mont Sion, guettaient son apparition. Ce n’était pas facile : juste un petit cordon à l’horizon.
Dès qu’ils l’avaient aperçue, ils venaient témoigner solennellement devant le Sanhédrin. Alors, on envoyait des émissaires sur le mont des Oliviers où un bûcher avait été préparé. On y mettait le feu. Ce feu était visible d’une autre colline assez éloignée, le Sartabé. Là, un autre bûcher était alors allumé. Dès que sa flamme s’élançait, était allumé un autre brasier en contrebas, à Belvoir, dominant cependant toute la vallée du Jourdain. Alors, un quatrième brassier s’allumait sur le mont Thabor. Le Thabor n’est pas très haut, mais on le voit de partout en la plaine d'Izréël, de partout en Galilée. Et on continuait ainsi : c’était une traînée de lumière vers l’est et l’ouest.

Pour nous, on peut dire qu’une lumière divine a jailli sur le mont Sion, à Jérusalem… Et tous les chrétiens sont chargés de la propager à travers le monde, … avec la ferme espérance qu’elle embrasera divinement le cœur de tous les hommes.

dimanche 1 décembre 2019

V eillez !


1er Avent T.O. 19-20.A  :

Noël !  Bientôt ! Déjà ! Encore quatre semaines, seulement !
Dès à présent, on en parle, en famille, en ville, dans les magasins (surtout, évidemment !)
Eh bien, dans les églises, pendant quatre semaines, les chrétiens vont parler de Noël, préparer Noël. C‘est le sens du temps de l’Avent : préparer l'adventus", la venue du Seigneur !

Et, durant ce temps, nous serons en bonne compagnie, en compagnie de trois personnages qui ont préparé la venue du Seigneur :
* Isaïe, le prophète qui a entretenu dans le peuple d'Israël cette attente d'un salut, d'un Sauveur.
* Jean-Baptiste, le précurseur, c'est lui qui a désigné Jésus comme le Sauveur attendu.
* Marie, elle a donné naissance au Sauveur.

Oui, pendant tout l'Avent, nous entendrons parler de la venue du Seigneur et de l'attitude qui convient pour ne pas manquer sa visite. Et il me semble que les textes proposés par la liturgie durant ces quatre dimanches prochains, nous indiquent quatre attitudes :
Veiller.. préparer.. espérer.. écouter.
Quatre mots, mais ce sont des verbes actifs qui commandent donc une action !

VEILLER, d’abord !
Ce jour-là, Jésus parlait à ses disciples de sa venue, pour leur demander de se tenir prêts. De quelle venue s'agit-il ? Spontanément, beaucoup pensent à l'heure de leur mort. Pourquoi pas ? Nous n'en connaissons ni le jour ni l'heure.
Mais dans l'évangile d'aujourd'hui, il s'agit de la venue du Seigneur à la fin des temps, son retour dans la gloire. Les premiers chrétiens attendaient le retour du Seigneur de façon imminente. Mais plus les années passaient, plus ils ont réalisé que le retour du Seigneur n'était pas pour le lendemain. Aussi, ont-ils pensé qu’ils ne devaient pas se contenter d'attendre passivement. Il convenait au contraire de prendre au sérieux le temps présent et de veiller activement. “Veillez donc !”, soyez prêts à accueillir le Christ,
non seulement quand il viendra à la fin des temps, nul ne sait quand,
non seulement à la fin de notre vie, nul ne sait quand,
mais à tout instant, car le Christ frappe à notre porte à tout instant et parfois de façon inattendue.
Inattendue comme l'arrivée du déluge à l'époque de Noé (1ère lecture), ou comme la venue d'un voleur qui ne prévient pas (Evangile).
Après Jésus, les évangélistes le répèteront sur tous les tons : “Tenez-vous prêts, ne dormez pas, veillez”.

Il s’agit donc de “veiller”, aujourd’hui et chaque jour. Et pour que ce ne soit pas un mot, une parole sans suite, on peut suggérer deux manières de veiller.
- La première est une attitude permanente : faire attention, être en éveil, ne pas dormir.
- La seconde est une décision : prendre de temps en temps de vrais moments de veille.

La première : Faire attention, être en éveil, ne pas dormir. C’est l’attitude de beaucoup qui attendent un salut, quel qu’il soit : la paix dans le monde, la prospérité… un véritable amour… et que sais-je encore. C'est l'attente de tous les hommes au long de l'Histoire. C'est une attente qui parcourt tout l'Ancien Testament et tout le Nouveau Testament.
Isaïe l'exprimait souvent, comme tous les prophètes, et il entretenait cette attente, nous venons de l'entendre.
Souvenons-nous aussi de ce que St Paul nous disait : “Frères, vous le savez, c'est le moment, l'heure est venue de sortir de votre sommeil, le salut est là, tout proche”.

Eh bien, pour nous qui savons que Jésus est venu combler cette attente et accomplir initialement le salut pour tout homme, il nous faut nous mettre à l’œuvre pour faire de ce salut une réalité. Ce n'est pas le moment de dormir !

Il y a bien des manières d'être endormi. Le sommeil de l'habitude, de la routine, de l'engourdissement.
Dans nos vies surmenées, il faut se tenir éveillé pour ne pas vivre sa vie machinalement, superficiellement. Il faut ouvrir les yeux, les mains, le cœur sur l'essentiel que nous risquons d'oublier. Ce n’est pas la vie qui doit nous mener ; c’est à chacun de déterminer le plus possible sa propre vie !
Ceci est vrai dans nos relations les plus quotidiennes. Et ceci s'impose également dans notre participation à la vie du monde. Avoir, au minimum, une réflexion de salut - donné par le Christ - face à tout ce que les mass médias véhiculent comme informations. Ce n’et pas toujours facile, mais ce n'est pas le moment de s'endormir. Si nous manquons cet éveil, cette “veille” pour nos frères proches ou lointains, nous manquerons la visite du Seigneur.

La seconde recommandation : prendre de temps en temps de vrais moments de veille.
Et là, on peut traduire le mot "veiller" par un autre mot : "prier". C'est Jésus lui-même qui a associé les deux mots, la veille de sa mort : “Veillez et priez”. C’est la mission de beaucoup de religieux, religieuses. Mais ils nous encouragent à les imiter quelque peu.
“Qui s’élève, élève le monde”, a-t-on dit. La prière est le lieu d’un “web spirituel”, si je puis dire : dès qu’un point d’une toile d’araignée vibre, c’est toute la toile qui vibre en même temps. Ainsi en est-il de la force de la prière. Prier, c’est veiller avec ceux que l’on aime, avec ceux qui souffrent…

Je pense aux grands-parents, sortis, pour la plupart, des remous du "moyen-âge" (si je puis dire)
qui prennent le temps de prier pour les enfants, petits-enfants,
qui prennent le temps de prier pour ceux qui souffrent de diverses manières.
Ils veillent dans la prière. Et avec le Christ, ils participent au salut du monde, lui qui, souvent, se retirait, seul, pour prier. Et cela, jusqu’à la veille de sa mort…

Un prêtre m'a dit un jour : “J'aime prier chaque jour comme on veille sur ceux et celles dont on est proche, solidaire, responsable : dans ma prière, j'aime évoquer les visages heureux et douloureux de mes frères, devant Dieu. J'aime égrener leurs noms, leurs souffrances, leurs bonheurs, ce qui les fait vivre et ce qui les accable”.
Oui, avec le Christ, le priant porte le monde vers le véritable salut.

“Veiller !” Voilà la première recommandation en ce temps de l’Avent : veiller dans la prière. Si nous voulons éviter l’insouciance tranquille et nous tenir prêts pour la venue du Christ qui vient sauver le monde avec nous, par nous et pour nous, il nous faut veiller et prier.