mardi 17 mars 2020

l'humble prière


3ème semaine de Carême – Mardi

La lecture tirée du livre de Daniel nous fait retrouver, comme au début de la semaine dernière, le plus beau langage de liturgie pénitentielle qu’on puisse trouver dans la Bible.

Dans sa prière, Daniel se fait l’interprète, auprès de Dieu, du peuple élu ; au plus profond de sa détresse, ce peuple -  il est en exil - a pris conscience, à l’école des prophètes, que sa situation d'exilé à Babylone, est sans doute la cause du châtiment qu'il subit !  Il a été infidèle à  l'Alliance avec Dieu !

Mais cette situation déplorable doit se présenter également comme une preuve d’un Dieu qui, Lui, reste fidèle à l'Alliance avec ce peuple ; et que Dieu veut par ce moyen, que cette Alliance soit un jour restaurée.

Et si Israël est devenu le plus petit d’entre les peuples, cela ne l’empêche pas de croire qu’il est la descendance des ancêtres auxquels Dieu a promis qu’elle deviendrait aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable sur le rivage de la mer.

Et tout cela le met dans la disposition la plus fondamentale de la prière ainsi que le rappelle le Catéchisme de Vatican  II,  à la fin de sa dernière partie consacrée à la prière.
§ 2559 :  "La prière est l’élévation de l’âme vers Dieu ou la demande à Dieu des biens convenables" (St Jean Damascène, f.o.3,24). De quoi parlons-nous en priant ? De la hauteur de notre orgueil et de notre volonté propre, ou des "profondeurs" (Ps 130,14) d’un cœur humble et contrit ?  C’est celui qui s’abaisse qui est élevé. (Cf. Lc 18,9-14). L’humilité est le fondement de la prière. "Nous ne savons que demander pour prier comme il faut" (Rm 8,26). L’humilité est la disposition pour recevoir gratuitement le don de la prière : l’homme est un mendiant de Dieu. (Cf. St Augustin, ser. 56,6,9).”

Au fond de sa détresse, le peuple est dans cette situation où il risque souvent de se laisser glisser dans un formalisme très courant qui donne facilement une assurance de la conscience.
Mais, avec humilité, il peut trouver également des accents qui, des profondeurs de sa vie, s’élèvent irrésistiblement jusqu’au trône de la miséricorde divine ; cette miséricorde qui domine sa justice : "et misericordiae ejus super omnia opera ejus" - et sa miséricorde est sur toutes ses œuvres" (Ps 145,9).

Le peuple en a la certitude : Dieu renouvellera un jour ses merveilles, il opérera dans l’avenir des délivrances qui dépasseront, à l’étonnement du monde entier, celles qui ont déjà jalonnées son histoire dans le passé, depuis l’exode et la sortie d’Egypte. Mon missel  fait précéder cette lecture de ce souhait : "Puisse la prière des chrétiens n’être pas inférieure à cette magnifique supplication de l’Ancien Testament".

L’Evangile, dans le langage simple d’une parabole, nous montre quel est le moyen le plus simple de trouver et de cultiver cette humilité qui est la disposition fondamentale de la prière :  Se mettre sous le regard de Dieu qui sonde les reins et les cœurs doit causer en nous, en plus de cette humilité, un sentiment de pitié et d’indulgence envers les autres.

On peut facilement rejoindre les compagnons du débiteur impitoyable : voyant son comportement (après sa remise d’une forte dette - 10.000 talents -, il, est prêt à étrangler celui qui n’a envers lui qu’une modeste dette - 100 deniers -) ses propres compagnons  sont profondément dégoûtés à son égard.

On est amené à méditer profondément sur une des demandes de la prière par excellence que Jésus nous a enseignée : "Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés.

A propos de cet  évangile on m'a transmis une phrase d’un philosophe juif, Henri Bergson, qui est mort très proche du christianisme. Il n’a pas voulu être baptisé, car, pendant la période de la persécution nazie, cela aurait pu être considéré comme une rupture avec son peuple ; mais, il a voulu qu’un prêtre catholique soit présent à ses funérailles.
Dans un de ses livres les plus célèbres, "les deux sources de la morale et de la religion", il dit ceci : "on mettrait longtemps à devenir misanthrope si on se bornait à l’observation des autres". Autrement dit, dans ce style condensé, il dit qu'on ne remarque en fin de compte chez les autres que les défauts que nous avons nous-mêmes - que nous en ayons conscience ou non  - ; et que par conséquent, une bonne analyse et un bon examen de conscience, sous le regard de Dieu, doivent nous amener à une attitude de bienveillance à priori et d’indulgence. Le Seigneur nous fait un devoir de nous réconcilier avec les autres avant d’apporter notre offrande à l’autel. Si nous avons parfois quelques difficultés à faire cette demande, surmontons-la, en nous examinant sous le regard de Dieu.

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