1ère semaine de Carême - Lundi
On a déjà eu l’occasion de parler du chapitre 19ème qui est central dans le livre du Lévitique. C’est sur lui que se fonde l’idée - dont nous héritons - que la morale est l’adoption par le croyant des mœurs divines.
“Soyez
saints, car moi le Seigneur votre Dieu, je suis saint”.
La
première signification du mot "saint", c’est "séparé". Dieu est "trois Saint", complètement
Autre de tout ce qu’il a créé, "Séparé". "A qui pourriez-vous me comparer" (Is 40.25).
On ne le
connaît qu’en maniant prudemment l’analogie à partir de sa création, en
évitant non seulement l’idolâtrie mais l’anthropomorphisme.
On le
connaît aussi par ses interventions dans l’histoire, par ses délivrances
qui font chanter, comme Moïse après le passage de la Mer Rouge : "Qui est comme toi ?" (Exode 15.11)
Ce Dieu
saint, ce Dieu unique et séparé, s’est choisi un peuple qui en obéissant à ses
lois reflète ses attributs.
Le
premier de ses attributs, c’est la sainteté, la séparation. Ce sera
aussi la caractéristique première d’un peuple qu’il a choisi, élu, avec qui il
a contracté une alliance.
A
l’époque du Lévitique, l’accent est mis sur la séparation. Les Cananéens qui
peuplent la "Terre promise" où on vient d’entrer, ont des mœurs
souvent abominables. On sacrifie des enfants ; les perversions sexuelles sont
répandues ; le mensonge et la violence règnent. On peut facilement s’en faire
une idée en regardant le monde actuel ; et Jésus dira explicitement qu’il
ne faut pas aimer le monde où règnent toujours la convoitise, l’égoïsme et une
idolâtrie qui, pour être moins grossière que dans l’antiquité, est tout aussi
présente, plus dangereuse encore par son raffinement et son élégance.
La morale
chrétienne comporte bien des ruptures et des séparations par rapport au monde.
Jn 15,
18-19 : "Si le monde vous hait, sachez que moi, il m'a pris en
haine avant vous. Si vous étiez du
monde, le monde aimerait son bien ; mais parce que vous n'êtes pas du monde,
puisque mon choix vous a tirés du monde, pour cette raison, le monde vous
hait".
Pourtant
l’idée de "séparation" qui était principale en "allant au
départ", devient peu à peu secondaire.
Lors de
la vocation de Matthieu, Jésus scandalise les gens de son entourage en se
mêlant aux publicains et aux pécheurs ; et comment répond-il aux
reproches des pharisiens ? En leur rétorquant : "Soyez
miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux !". Le
principe de base "Soyez saints
parce que je suis saint" , devient "soyez miséricordieux comme
votre père céleste est miséricordieux".
L’accent
n’est plus mis sur la séparation mais sur l’accueil, la rencontre,
un a-priori de bienveillance. Le Sauveur n’est pas venu pour les justes
mais pour les pécheurs. Ceux qui se croient justes et se considèrent comme une
élite dans la pratique des observances – souvent alourdie par des casuistiques
minutieuses, - se voient condamnés !
Quant à
l’Evangile d'aujourd'hui, il laisse à penser qu’au jour du jugement dernier il
n’y aura plus que deux catégories de gens. Et on magnifie ceux qui, au cours de
leur vie, ont profité de toutes les occasions pour pratiquer la bienfaisance et
la charité, pour sortir de
leur égoïsme et de l’égocentrisme.
On dirait
que la séparation n’existe plus qu’entre ces deux catégories de gens. Les
portes du Royaume s’ouvrirent sur ceux qui, sans même s’en rendre compte, ont
fait du bien à Dieu lui-même, en s’occupant des plus pauvres, des démunis. Le
Roi dira : "Amen, je vous le
dis, chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères,
c’est à Moi que vous l’avez fait". On a l’impression que
tous les multiples et divers problèmes de désunion, de séparation auront disparu.
Tous ceux
qui ont pratiqué la miséricorde et la compassion entrent dans le Royaume, comme
si tous les autres problèmes s’étaient évanouis.
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