Carême 3. Vendredi
(Osée)
La lecture est du prophète Osée !
Aussi, comme pour Isaïe et Jérémie, je me permets quelques mots sur cette
grande figure de ce “petit prophète“ qui
a eu une grande influence !
Tout son message peut se résumer dans la première
phrase de son livre : “Le Seigneur dit à
Osée : « Va, prends-toi une femme se livrant à la prostitution. Car
ce pays ne fait que se prostituer en se détournant du Seigneur »“.
Il est très probable qu’Osée a déchiffré le
“mystère de l’Alliance“, de l’Amour de Dieu pour les hommes à partir de sa vie
conjugale qui, semble-t-il, n’a pas été très heureuse ! Car Dieu aime, lui aussi ! C’est
un Dieu d’amour ! Partout, dans son livre, l’union avec Dieu a des
résonnances nuptiales. Et depuis lors, on ne trouvera pas de meilleure
comparaison pour exprimer l’“Alliance avec Dieu“ que l’amour de l’homme et de
la femme, malgré tous les avatars qu’il peut parfois rencontrer !
J’avoue simplement que cela me plaît !
Croyez-vous qu’aux noces de Cana (“premier signe“ de Notre Seigneur, selon
St Jean),
Jésus ait fait un simple tour de “passe-passe“ en transformant l’eau en vin par
déférence envers les époux d’une noce de village ?
Non ! Jésus pensait toujours dans les
dimensions à la fois verticales et horizontales. Toujours, le Verbe de Dieu
fait chair, s’exprimait divinement avec son intelligence humaine !
Toute réalité avait pour lui une telle consistance que, sans cesse, il invitait
à partir du réel - quel qu’il soit, même “scabreux“ moralement - à
découvrir une vérité plus réelle encore ! Ainsi, pour les noces de Cana !
Car, en fait, de quelles noces s’agissait-il ? St Augustin répondra :
“Quoi d’étonnant que Jésus soit venu dans cette maison pour des noces, lui qui
est venu dans le monde pour des noces ? Et quelles noces ! Les noces
de Dieu avec l’humanité… !".
Et St Paul ne déclare-t-il pas à
propos du mariage : “Ce mystère est
grand ! Je le dis en pensant au Christ et à son Eglise !“ (Eph 5.23).
Et que dire encore du dialogue entre la Samaritaine
et Jésus ? Celle-ci ne devait pas avoir, elle non plus, une vie maritale
très heureuse (cinq
maris !).
Mais était-ce là le plus important ? Jésus l’oriente vers le culte “en
esprit et vérité“ ! Et, sur ce plan, les cinq maris de la Samaritaine ne
sont-ils pas surtout les cinq divinités païennes importés par les Assyriens après
la conquête de Samarie (cf.
2 Chro. 17.30)
et dont il fallait se séparer pour vivre l’“Alliance avec Dieu“ , en "esprit et vérité" ?
Du coup, les hommes de la Samaritaine passent
au second plan. On n’en parlera plus. Cela me plaît ! Dieu prend
toujours l’homme tel qu’il est et là où il en est : il descend
toujours vers lui pour le faire monter, remonter à des réalités plus
importantes ! La seule condition qu'il demande à l'homme, c'est de
reconnaître sa pauvre situation avec grande humilité, comme le fit David
après sa faute !
Notre Dieu est le "Dieu vivant"
qui se met en prise, si je puis dire, avec des hommes "faits de chair et de sang". Il est bon de voir comment
cette “empoignade“ évolue et se termine. C’est plus précieux que tous les
traités abstraits de morale, expliqués parfois avec un peu de superbe - ce qui n'est pas
la méthode "pastorale" de notre Dieu-Berger - ! Certes, ces traités
donnent des principes absolument nécessaires, en conformité étroite avec la
Parole de Dieu. Mais ils ne manifestent souvent aucune sève de vie, la sève
de l’Amour de Dieu qui sans cesse se penche sur l’homme ! Car Dieu
aime !, dirait Osée.
En considérant dans la Bible les multiples
exemples de cette pédagogie "pastorale" de Dieu à l’égard de l’homme,
on acquiert plus facilement, me semble-t-il, cette grande vertu qui, selon St
Thomas d’Aquin, est à la frontière des vertus intellectuelles et des vertus
morales, la vertu de "Prudence“. Cette grande vertu permet à la liberté de
s’exercer avec grande lucidité... !
Il y a ainsi dans la Bible (dans le livre
d’Osée)
moult exemples qui peuvent heurter, en un premier temps, notre hiérarchie de
valeurs. Mais il est bon d’être, parfois, un peu bousculé et de se rendre
compte de la complexité de la vie. Cela permet de rentrer d’une façon plus
réaliste et avec grande humilité dans un véritable dialogue avec “le Dieu
vivant“ et aussi de mieux rencontrer les hommes et les femmes "faits de chair et de sang“ qui
sont également aux prises avec ce même “Dieu vivant“ qui cherche l’homme, tout
homme, même le "paumé", “tel
qu’il est et là où il en est“ !
Ne me faites pas dire que les principes
moraux sont inutiles. Je dis simplement qu’ils ne sont pas suffisants ! “C’est l’amour qui me plait, dit Osée
au nom de Dieu, et non le
sacrifice !“ (6.6.). “S’il me manque l’amour, disait St Paul, je ne suis rien !“ (I Co 13.2).
Cela dit pour la vie un peu “scabreuse“ de
notre prophète Osée ! Cela dit pour bien des récits “sauvages“ de
la Bible et même de l’évangile : la Samaritaine et cette femme prise
en flagrant délit d’adultère… Jésus la “relève“ ! A son sujet, je me suis
toujours demandé : Mais où est donc l’homme ? (Il me semble qu’on est
toujours deux en ce cas de délit !). Curieuse morale !
C’est dans cette perspective qu’il faut
lire le prophète Osée, ce prophète si malheureux dans ses amours humaines.
C’est que toute sa vie - avec ses grandes déceptions - est une grande leçon
d’amour, de l’amour de Dieu pour chacun d’entre nous. Dieu nous aime même
dans le désert de nos dénuements d’ici-bas : “Je te rappelle ton attachement, du temps de ta jeunesse, ton amour de
jeune mariée : tu me suivais au désert, dans une terre inculte“ (Jérémie 2.2,
disciple d’Osée). C’est dans le
désert que Dieu avait dit : “Je
t’aime d’un amour d’éternité ; aussi, c’est par fidélité que je t’attire à
moi“ (31.3).
Et nous retrouvons notre lecture : “Reviens, Israël, au Seigneur ton Dieu, car
tu es tombé à cause de ton péché (comme la prostituée d’Osée). Revenez au Seigneur et dites-lui : “… nous ne dirons plus “Notre Dieu“ à
l’œuvre de nos mains…“. Alors, dit Dieu,
"je
serai pour Israël comme la rosée, (tendre comme la rosée),
il
fleurira comme le lys (d’une
blancheur de lys !),
il
enfoncera ses racines comme le cèdre du Liban (la solidité de l’amour)
sa
beauté sera celle de l’olivier (le bel arbre du pays chaud)
son
parfum sera celui du Liban (le parfum d’une grande vertu)
on
viendra s’asseoir à son ombre (lieu de toute confidence en pays chaud).
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