Carême
2 - Jeudi -
L’autre jour - c’était au début du Carême,
le Lundi de la première semaine -, la lecture du chapitre 24ème de
St Matthieu nous disait qu’au dernier jour, à la fin des temps, lors du
jugement dernier, il n’y aura plus que deux catégories d’hommes.
- Ceux qui auront profité de tous les
instants de leur vie à s’occuper des autres et qui s’apercevront avec
surprise que tous les bienfaits qu’ils auront accomplis, Dieu les considèrera
comme faits à Lui-même ;
- et, par ailleurs, ceux qui constateront
avec la même surprise que leur indifférence à l’égard des autres a été une
indifférence à Dieu lui-même :
Aux premiers, Dieu dira : "Ce que
vous avez fait au plus petit d’entre les miens c’est à moi que vous l’avez
fait. Entrez dans le Royaume qui vous a été préparé depuis les origines !".
Aujourd’hui c’est le même
enseignement
qui nous est donné dans la parabole de Lazare et du mauvais riche. On est
invité à méditer cet enseignement d’une manière plus personnelle et dans la
perspective, non plus du jugement dernier, mais dans la perspective des "comptes"
que nous aurons à rendre au jour même de notre mort.
En effet, notre passage ici-bas doit être
le témoignage d'une condition essentielle de notre existence : vivre notre
condition de créatures faites "à
l’image et à la ressemblance" du Créateur.
Or, Dieu nous révèle progressivement son
vrai visage ; et la morale que nous sommes invités à pratiquer est une
invitation à progresser au rythme de cette révélation.
-
"Soyez
saints parce que je suis Saint !"
- … "parfaits comme votre Père céleste est
parfait !".
-
"Aimez
votre prochain" non seulement comme vous-mêmes, mais "comme je vous ai aimés" : jusqu’à verser mon sang
pour vous et pour la multitude en rémission des péchés.
-
"Soyez
miséricordieux comme votre
Père céleste est miséricordieux !".
Il y a là, sans doute, pour chacun d'entre
nous, comme une progression à réaliser tout au long de notre vie. Mais ce que
l'on peut dire avec certitude, c'est qu'au jour de notre comparution devant
Dieu nous serons jugés selon que nous ressemblerons à Lazare ou au mauvais riche.
Il semble que cette progression, cette
perfection de la morale chrétienne demandent à être méditées sous la lumière
de la Sainte Trinité.
"A la plénitude des temps", Dieu
ne nous révèle pas seulement qu’il est Un, et que nous appartenons à une
religion monothéiste qui invite tous les hommes à se considérer comme frères. Il nous fait la confidence du comment Il
est UN, pour que nous puissions accomplir le commandement nouveau qui caractérise la nouvelle alliance : "qu’ils soient Un comme nous sommes UN !".
Comment Dieu est-il Un en trois personnes
distinctes ?
C’est un mystère qui nous éblouit comme la lumière du soleil qu’on ne peut
regarder directement, mais qui illumine tout ce qui est ici bas.
Les théologiens, secondés par la foi, ont
fait marcher leur intelligence à pas de raison aussi loin que possible dans cet
océan de lumière... Ils nous disent que ces trois personnes ne forment qu’une nature divine parce qu’elles ne sont que relations subsistantes
les unes envers les autres.
D'après la philosophie traditionnelle, la
"relation" est ce que l'on appelle un "accident",
c'est-à-dire ce qui ne fait pas partie de l'essence de la personne humaine. Ce
qui signifie : à la limite, je peux vivre sans l'autre, alors même que l'on
peut se demander si un "Robinson Crusoë" aurait pu vraiment survivre.
Aussi, certaines philosophies modernes font de la "relation" une
partie intégrante de la personne humaine !
Peut-être n'ont-ils pas tout à fait tort,
car c’est en devenant de plus en plus "relation" les uns envers les autres que nous marchons ici
bas pour entrer dans le Royaume, la vraie Terre Promise qui est le mystère
même de la Sainte Trinité. Or, les Personnes divines ne sont que "pure
Relation", les unes envers les autres. C'est leur essence même. Le Père
existe parce qu'il n'est que "pure relation" paternelle avec son Fils
; le Fils existe parce qu'il n'est, lui aussi, en retour, que "pure
relation" filial avec le Père. Et le Père et le Fils ne sont que "pures
relations" dans leur Esprit commun.
Or, il s'agit bien de s'aimer en répondant
- déjà, ici bas - au souhait du Seigneur : "qu’ils soient Un comme nous sommes UN".
L’apprentissage se fait dans la
quotidienneté de l’existence, lorsque nous profitons de toutes les occasions
qui se présentent pour sortir de notre égocentrisme afin de nous préoccuper de
bienveillance, de compréhension et d’accueil envers notre prochain. La question
est de nous montrer en toute occasion le "prochain de l’autre" comme
le dit Jésus à la fin de la parabole du bon samaritain au terme de sa
conversation avec le scribe. Et il se sépare de lui en disant : "Fais
cela et tu vivras !".
Il me semble que c’est dans ce commandement
nouveau - s'aimer les uns les autres comme Dieu nous aime ! - qui résume
la Loi, les prophètes et tout l'Evangile, que le nom d’"Israël" pourrait prendre tout son
sens. Rappelez-vous cette lutte au bord du Yabbok lorsque Dieu change le nom de
Jacob en celui d’"Israël"
qui veut dire" tu as été fort contre Dieu et contre les hommes et
tu l’as emporté !".
Notre religion consiste en un double
affrontement, une double sortie de soi.
- une sortie de soi vers Dieu, par un désir
incessant de Dieu qui n'est finalement qu'une forme de la prière continuelle
dont parle St Paul.
- et, en même temps, une sortie de soi vers
l’autre, vers le prochain.
Etre de plus en plus "à l'image et à la ressemblance de Dieu !".
Tu aimeras ! Tu aimeras Dieu et tu aimeras
ton prochain !
C'est
à cette seule condition que nous pourrons prétendre à être, nous aussi, l’"Israël"
de Dieu.
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