lundi 30 septembre 2013

Parole de Dieu - St Jérôme

26e Lundi T.O. 13                  

Le chapitre 8ème qui termine la première partie du Livre de Zacharie éveille notre attention sur une "Jérusalem terrestre" dont on minimise souvent l'importance dans la pensée chrétienne, en nous projetant, déjà et trop facilement, dans la "Jérusalem céleste" !

Les fêtes juives qui se célèbrent en Septembre-Octobre, généralement, nous invitent à toujours partir de la Jérusalem d'ici-bas avec tout ce que cette ville symbolise de terrestre vers la Jérusalem céleste dont "Dieu seul est l'Architecte et le Fondateur" (Heb 11).

Jésus nous a dit qu'il n'était pas venu abolir mais accomplir ! Aussi la "Jérusalem terrestre" restera toujours - même pour un chrétien - un mystère qui dévoile peu à peu tout le dessein de Dieu à travers l'histoire des hommes. Autrement dit, Jérusalem reste, symboliquement et spirituellement, "le nombril du monde" comme dit Ezéchiel (38.12) en lequel se récapitulent toutes les destructions et reconstructions accomplis par les hommes. Et en ce "nombril du monde", Dieu, selon sa promesse, reste mystérieusement présent ! Dieu est présent en ce "nombril du monde" - et par lui au monde entier -, selon sa volonté exprimée, par exemple, dans le psaume 131ème (v/ 13-14), ce psaume qui fut chanté lors du transfert de l'Arche d'Alliance à Jérusalem par David :
"Dieu a fait choix de Sion ; il a désiré ce Lieu pour Lui :
'C'est ici mon repos à tout jamais, car je l'ai désiré !'".

La "Jérusalem terrestre - et le monde dont elle est le "centre" - a traversé bien des catastrophes et, comme tout le laisse penser, en traversera encore ! Cependant en ce Lieu "que Dieu a choisi pour y faire habiter son Nom" (Dt 12.18,20 ; 16.2 etc), il y a des promesses d'éternité pour tous les hommes, pour le monde.

C'est dans cette pensée qu'il faut lire le prophète Zacharie en la lecture d'aujourd'hui et en celle de demain que nous n'entendrons pas cependant du fait de la fête de Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus, chère au cœur des chrétiens de France !

Mais je vous invite à méditer ces deux lectures tout à la fois :
"Ainsi parle le Seigneur Sabaot. J'éprouve pour Sion un amour jaloux... Je reviens à Sion et veux habiter au milieu de Jérusalem ! ...
Voici que je sauve mon peuple des pays d'Orient... Je les ramènerai pour qu'ils habitent Jérusalem. Ils seront mon peuple ; Je serai leur Dieu dans la fidélité et la justice...
Viendront encore des peuples et des habitants de grandes villes. Et les habitants d'une ville iront vers l'autre en disant : 'Allons donc implorer la face du Seigneur et chercher le Seigneur Sabaot !' ... En ces jours-là, dix hommes de toutes les langues des nations saisiront un Juif par le pan de son vêtement en disant : Nous voulons aller avec vous, car nous avons appris que Dieu est avec vous !".

Mystère de Jérusalem que tout pèlerin en Terre Sainte perçoit lorsqu'il s'y trouve, même si Jérusalem est toujours ce "nombril du monde" en lequel cohabitent inextricablement - comme en notre propre cœur parfois - : beauté et laideur ; paix et guerre ; mensonge et vérité ; connaissance et ignorance... etc. Contexte paradoxale de toute vie humaine !

Nous avons encore à apprendre de ce peuple, notre "frère aîné" dans la foi, disaient Jean-Paul II et Benoît XVI à sa suite.

Aussi, dans un esprit œcuménique, à la suite de St Jérôme que nous fêtons aujourd'hui, il est profitable pour notre foi, me semble-t-il, de savoir le sens des fêtes que les Juifs célèbrent en cette période du temps.

La fête de "Rosh Hachana" ("tête de l'année"), si elle marque bien le premier jour de l'an nouveau, veut surtout rappeler la création du monde, la création du premier homme "à l'image et ressemblance de Dieu". Mais la création est continuelle. La création, c'est "aujourd'hui" ("Yahoum", souvent répété dans le rituel juif). Avons-nous cette pensée que Dieu veut aujourd'hui nous créer "à son image et ressemblance" ? "Aujourd'hui, si vous écoutiez sa voix...!", dit le psaume 94ème qui débute l'office de chaque jour. "Aujourd'hui !". Ecouter la "Parole" créatrice de Dieu en notre vie !

Et avec cette fête juive et pendant deux jours, il est répété que Dieu juge les hommes - juif ou non - pour leurs bonnes ou mauvaises actions. C'est une occasion de nous rappeler que chacun "a du prix aux yeux de Dieu" (Cf. Is 43), qu'il a reçu un appel, une "vocation" particulière ! Y pensons-nous suffisamment ?

Les jours qui suivent la "fête de l'an" sont appelés "Jours terribles" (Yamin Noraïm") : chacun est appelé à faire pénitence pour les fautes commises et à se réconcilier avec son prochain... Jésus ne disait-il pas qu'il n'y a qu'un seul commandement : Aimer Dieu et son prochain ?

Enfin, cette période festive juive se termine solennellement par le "Yom Kippour" ("Jour du pardon") : chacun demande le pardon de Dieu et son inscription au Livre de la vie ! Le jour de notre baptême - il faut savoir s'en souvenir -, n'avons-nous pas été inscrits au "Livre de la vie" ?

Il y a donc toute une perspective d'un commun cheminement de la foi entre Juifs et chrétiens.
On m'a dit que les coutumes juives tendent malheureusement - même à Jérusalem - à se formaliser, à se ritualiser. C'est le danger, à toute époque et chez les chrétiens aussi, évidemment !

Voyez ! Au temps de St Jérôme et de St Augustin, on ne baptisait les jeunes gens qu'une fois passées les frasques de la jeunesse. Et même, certains ne voulaient recevoir ce sacrement que sur leur lit de mort, pensant ainsi parvenir immaculés devant la face de Dieu, au jour du jugement. Aujourd'hui, c'est plutôt l'inverse - et c'est la souffrance de bien des prêtres -- : des parents demandent le baptême pour leurs enfants sans trop savoir pourquoi : c'est comme "une assurance tous risques" devant Dieu... !  
Le formalisme ! Dans tous ces cas, c'est abuser de la confiance que l'on doit avoir dans la puissance régénératrice du sang rédempteur versé par le Christ sur la croix ! Ce que rappelle pourtant toute Eucharistie !

Aussi, avec humilité, nous avons tous - Juifs et chrétiens - à nous interroger sur la profondeur de notre foi en tous domaines..., à propos, par exemple, de la "Parole de Dieu" puisque nous fêtons aujourd'hui St Jérôme.
Sa vie fut l'accomplissement de l'exhortation de St Pierre qui, se souvenant de la Parole de Dieu au jour de la Transfiguration, écrivait : "Ainsi nous tenons plus ferme la parole prophétique : vous faites bien de la regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu'à ce que le jour commence à poindre et que l'astre du matin se lève dans vos cœurs" (2 Pet 1.19).
L'"astre du matin" fait allusion, bien sûr, à l'Incarnation du Verbe de Dieu... Dès lors, on peut dire : si nous rabaissons la "Parole de Dieu" à une simple écriture - l'écriture d'une "histoire sainte", l'écriture d'une pensée théologique... et que sais-je encore -, c'est que, inconsciemment, nous voilons ce grand mystère de notre foi : "Et le Verbe s'est fait chair". Le "Verbe" !  La "Parole" de Dieu !

Cette importance de la "Parole de Dieu" comme l'importance du mystère de l'Incarnation, St Jérôme en avait bien conscience, lui qui est le modèle de ceux qui ont consacré leur vie à l'interprétation des Ecritures.
Et un soir de Noël, à Bethléem, il disait, passant de l'Ecriture au mystère : "Nous avons assez argumenté...! Prenons-Le (l'Enfant de la crèche) en nos bras et adorons le Fils de Dieu ! Ce Dieu grand qui tonna si longtemps dans le ciel (comme au Sinaï) sans pouvoir nous sauver, il vagit dans son berceau et nous sauva !".

Accueillir Dieu qui naquit à Bethléem, qui veut naître en nos cœurs, c'est également accueillir sa Parole "plus tranchante qu'aucun glaive à double tranchant" (Heb 4.12). Accueillir un "Enfant"... Accueillir une "Parole"... ! C'est dire avec St Jérôme que ce n'est jamais la superbe qui sauve, mais c'est l'humilité qui sauve ! Accueillir humblement... et respectueusement !

Le tempérament assez fougueux de St Jérôme, ou du moins assez étranger à l'onction ecclésiastique ou religieuse - si conventionnelle -, avait besoin de trouver près de la crèche de Bethléem, le silence, la paix et... l'humilité !

Demandons-lui cette même grâce !

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