dimanche 1 janvier 2012

Marie, Mère de Dieu !

1er Janvier 2012

En ce premier jour de l'An, je vous redis à tous, en toute simplicité : "Bonne et Sainte Année". La salutation du Célébrant, au début de toute célébration, est souvent et doit être littéralement : "Le Seigneur avec vous" !
Oui, le Seigneur est avec vous,
- du fait que vous êtes réunis en son nom ("Si deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d'eux" - Mth 18.20),
- du fait de votre baptême qui vous fait vivre “de la vie même du Christ“ (Gal 2.20 – Ph. 1.21)
du fait de votre appartenance à l'Eglise, Corps du Christ.

Oui, le Seigneur est avec vous ! Qu'il soit avec nous tous de plus en plus et tout spécialement au cours de l'année qui commence : qu'il soit le guide de nos pensées, de toutes nos actions. Et que Marie - que nous saluons "Mère de Dieu" aujourd'hui - nous aide à l'accueillir comme elle-même l'a accueilli pour le salut de tous les hommes. “Marie portait le Christ en son sein ; portons-le en notre cœur“, disait St Augustin en ses très beaux sermons de Noël. “La Vierge a enfanté le Sauveur ; que notre âme enfante le salut… Ne soyons pas stériles ! Que nos âmes soient fécondes de Dieu !“. C'est la grâce que nous pouvons implorer les uns pour les autres, grâce qui découle de la fête de Noël que nous avons célébrée il y a huit jours.

St Paul nous a justement rappelé dans la seconde lecture : “Dieu a envoyé son Fils!“.
Bien sûr, quand nous disons “Fils“ pour désigner le "Verbe de Dieu", nous n'employons pas ce mot en son sens habituel. Et d'ailleurs, si nous disons “Verbe“ plutôt que “Parole“, c'est parce que le mot "Verbe", mot peu usité, nous fait comprendre qu'il ne s'agit pas de la "parole" au sens ordinaire. Parce que aucun mot, aucune formule ne peut dire Dieu ! Il faut le savoir si nous voulons continuer à utiliser les mots et les formules sans idolâtrie. On n’enferme Dieu ni dans un temple, ni dans un raisonnement, ni dans un mot ! Le mot “Dieu“ lui-même est un peu comme le "Saint des Saints" du Temple de Jérusalem : un espace vide, mais un espace vide qui est pourtant comme le centre de tous le reste de l'espace.

Nous voici donc en face d'une formule : "Dieu a envoyé son Fils" dont les termes eux-mêmes nous échappent, je dirais une formule-tremplin qui nous projette dans l'inconnaissable, l'Inconnaissable qu'est Dieu, comme l'avouait St Thomas d'Aquin lui-même quand il énumère les noms de Dieu.
Et s'il est bon de reconnaître humblement que la raison ne peut atteindre Dieu que difficilement, c'est pour souligner l'énormité, l'audace inouïe de cette autre formule : "Marie, Mère de Dieu", objet de la fête d'aujourd'hui. Car la foi chrétienne, c'est aussi et surtout cela : ce Jésus, né d'une femme, est Dieu !

Par contre, quand nous disons : "Jésus, né d'une femme" ou "Jésus, fils de Marie", les mots ne sont plus, comme pour "Fils de Dieu", des indications qui nous orientent quelque peu vers le mystère de Dieu ; ils sont pris au sens le plus habituel, celui de notre expérience humaine, de sorte que lorsque le "Fils de Dieu" se fait "fils de Marie", c'est l'Inconnaissable qui se fait connaître, c'est celui auquel on ne peut donner de nom qui se met à porter un nom : “L'enfant reçut le nom de "Jésus", le nom que l'Ange lui avait donné avant sa conception“ (Lc 2.21). Celui que l'espace ne peut contenir, le voici enfermé dans le corps de Marie ; “elle portait celui qui porte les mondes“, dira encore St Augustin dans ses aphorismes intraduisibles ! “Celui qui transcende tous les temps, le voici en un point du temps“ ; - “Celui qui fit le jour, vint au jour !“ - “Celui qui est "Parole éternelle" se soumet à une parole humaine !“.
Bref, voici Dieu enfermé dans nos limites, dans les limites d'un homme situé dans le temps et dans l'espace : “L'an quinze du règne de l'empereur Tibère, Ponce-Pilate étant gouverneur de la Judée, un nouveau-né est couché dans une mangeoire“… dans une mangeoire : Dieu devient homme pour se faire "nourriture" de vie pour tous les hommes ! (“Le Créateur des anges s’est fait homme afin que l’homme puisse manger le pain des anges !“, dit encore l’évêque d’Hippone !)

Ainsi quand Dieu est venu nous manifester qu'il était avec nous sur nos chemins (“Le Seigneur avec vous !”), il n'est plus l'Etre suprême sans visage. Désormais, nous avons devant les yeux un visage ; dans la bouche, un nom ; dans les oreilles, des paroles qui disent la Parole éternelle, Verbe de Dieu ! Et certainement que ce visage devait ressembler à celui de Marie, et ses paroles avoir les intonations des siennes, comme un enfant peut ressembler à sa mère !

…“Marie, mère de Dieu… !“. … de Dieu ! Et si à propos de cette formule, j’ai parlé de Dieu, du Christ, et peu, apparemment, de sa mère, c’est que le "Concile d'Ephèse" (431), en imposant la formule “Marie, mère de Dieu“ voulait justement souligner que l'homme que Marie avait mis au monde était bien le Dieu de l'Univers.

Mais, à propos de Marie, que veut dire encore, dans le concret, "Mère de Dieu" ? Tout l'Evangile nous répond : Cela veut dire : se faire "lieu de passage" par lequel Dieu va à l'homme.
- Comme toutes les mères, mais d'une façon plus singulière, Marie ne possède pas son fils pour elle-même, mais pour les autres, pour tous les hommes, pour leur salut.
- Mais en même temps, plus elle donne, plus elle se donne et donne son fils, plus "elle médite en son cœur les événements" qui lui arrivent par son fils et qui le manifestent comme Dieu. De plus en plus elle le reconnait et le reçoit comme Dieu.

Autrement dit, plus elle donne son fils, plus elle le reçoit comme Dieu. - Et nous-mêmes, soyons-en persuadés pour cette année qui s'ouvre : plus nous donnerons, nous nous donnerons, nous essayerons de transmettre le Christ par nos attitudes, notre capacité d'écouter, nos paroles, bref par tout notre être humain, plus le Christ divin se manifestera en nous-mêmes, en notre cœur qui "médite tous les événements" de notre vie. C'est en transmettant le Christ que nous l'accueillerons davantage en nous-mêmes. Qui donne reçoit. Et c'est ainsi que le Christ, que Dieu sera, comme dit St Paul, sera de plus en plus "tout en tous".

Vivons à l’exemple de Marie, en union avec Marie, avec l’aide de Marie. Aussi je ne peux terminer qu’en vous rappelant un texte de St Bernard que vous connaissez bien :
“Que son nom soit constamment sur vos lèvres,
qu'il ne quitte pas votre cœur ;
et afin d'obtenir l'appui de sa prière, ne perdez point de vue son exemple.
En la suivant, vous ne vous égarez pas ;
en la priant, vous ne vous désespérez pas ;
en pensant à elle, vous ne craignez pas ;
si elle vous guide, vous ne vous fatiguez pas ;
si elle vous est favorable, vous atteignez le but, et ainsi en vous-même, vous expérimentez avec combien de raison il est dit : “Et le nom de la Vierge était Marie”.


Tels sont mes vœux pour chacun d'entre vous. “Le Seigneur avec vous!“. Bonne et sainte année pour tous.

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