samedi 14 janvier 2012

Que cherchez-vous ? Qui cherchez-vous ?

2ème Dimanche. T.O. 12/B

St Jean sait écrire et bien écrire. Tout son évangile en témoigne. Il ne laisse rien au hasard. Tout a une signification : les premiers mots, les précisions, jusqu’à la construction des cènes qu’il raconte.

Aussi
- quand St Jean fait parler Jésus pour la première fois au seuil de sa vie publique,
- quand il le refait parler pour la première fois au seuil de sa vie de Ressuscité, au matin de Pâques,
il nous transmet une même parole, une interrogation identique.
Cette sorte d’inclusion littéraire veut marquer l’importance de cette
+ parole du Seigneur,
+ parole qu’il ne cessera de répéter tout au long de sa vie terrestre,
+ parole qui nous est adressée du début à la fin de notre existence mortelle.

Aux deux disciples qui le suivent, Jésus leur demande : “Que cherchez-vous ?”
A Marie-Madelaine tout en pleurs près de son tombeau, Jésus formule la même interrogation : “Qui cherches-tu ?”.
Comme a tous ceux qu’il avait rencontrés et qui lui demandaient quelque chose, il sollicitait une réponse : “Que cherchez-vous ?”
Et nous-mêmes, si nous voulons suivre le Christ, aujourd’hui et demain, c’est cette même question qu’il nous faut entendre et recevoir. C’est à cette même question qu’il nous faut répondre : “Que cherchez-vous ?” Vraiment !

Quand on vieillit – et l’on vieillit tous les jours – force nous est de réduire nos ambitions. C’est évident ! Dans l’enfance, dans la jeunesse, on voudrait embrasser le monde entier. On a des ambitions intellectuelles ; on voudrait faire de sa tête une encyclopédie vivante. On a des ambitions matérielles de toutes sortes. Et il n’est pas rare d’entendre un enfant vouloir devenir tout à tour pilote de ligne, chirurgien, général et même - pourquoi pas ? – président de la République ! C’est que l’enfant a des ambitions.

Quand on avance dans la vie, il faut bien “en rabattre” ! On s’aperçoit vite que nous n’avons pas assez de vigueur, assez de force pour tout embrasser ! Et alors, la sagesse aidant et l’âge aussi, on se dit : “bornons-nous à l’essentiel !” Mais où est-il cet essentiel ? Où le cherchons-nous ?

Oui, le Seigneur, tout en respectant notre liberté, ne cesse de nous poser la question des questions : “Que cherchez-vous ?” Vraiment ? Quelles sont vos intentions profondes, vos désirs les plus secrets, vos points de repères ? Quel est pour vous cet “essentiel” pour lequel vous seriez prêts à tout sacrifier ? Quel est le but de votre recherche ?

Mais si nous voulons répondre en toute vérité, il faut d’abord savoir écouter. On a dit que notre civilisation est une civilisation de l’image. Et c’est vrai depuis le cinéma, la télévision…, internet…
Mais c’est aussi une civilisation de l’oreille : mille paroles, mille bruits nous sollicitent inlassablement du matin au soir. Certains finissent même par y prendre goût au point qu’ils ne peuvent plus rien faire sans un “fond-sonore”. Le bruit, la parole nous envahissent littéralement. On entend beaucoup ! Mais savons-nous écouter ? Pourrions-nous dire comme le petit Samuel : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute !”

Oui, je le crois, pour percevoir l’essentiel de la vie, pour pouvoir répondre à la question du Christ : “Que cherchez-vous ?”, il faut faire silence, faire taire bien des bruits autant que nous le pouvons et écouter…, écouter de l’oreille de notre cœur. Ce n’est souvent qu’à cette condition que Dieu pourra se faire entendre. Nombreux (Psichari, Charles de Foucault…, et même Saint-Exupéry avec son “Petit Prince“) sont ceux qui n’apprirent à écouter et à rencontrer Dieu que dans le silence d’un désert…

Oui il faut, dans un silence intérieur, savoir écouter ; alors seulement il est possible de lancer cette supplication : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute !” – Il est dit : “Quiconque invoquera le Nom du Seigneur sera sauvé !” Et St Paul de demander : “Mais comment l’invoquer sans avoir cru en lui ? Et comment croire en lui sans l’avoir écouté ?”

Oui, il faut savoir écouter pour découvrir l’essentiel de notre vie et bien répondre à la question permanente du Seigneur : “Que cherchez-vous ?”

Oui, écouter… Ecouter Dieu qui, sans cesse, nous parle,
+ à travers les splendeurs de sa création,
+ à travers la Bible, l’Evangile,
+ à travers l’Eglise, ses apôtres, ses envoyés qui, sans cesse, invitent
= non pas simplement à entendre, mais à écouter
= non pas eux-mêmes, mais le Christ, le “Maître intérieur” !

St Augustin avait bien perçu l’importance de cette écoute intérieure pour quiconque voulait répondre véritablement à cette question : “Que cherchez-vous ?” – “Le son de notre voix peut attirer l’attention, disait-il, (c’est le rôle de tout prédicateur même imparfait), mais s’il n’y a personne à l’intérieur de vous qui puisse être écouté, vain est le son de notre voix. Car, n’avez-vous pas tous entendu mes propos ? Or, combien s’en iront d’ici sans avoir reçu d’enseignement ? Le rôle de celui qui parle est extérieur : une sorte d’aide, d’appel à l’attention. Car il a sa chaire dans le ciel celui qui instruit les cœurs. Il n’y a qu’un seul Maître, le Christ. Qu’il vous parle donc lui-même à l’intérieur de vous-même. Et puissiez-vous l’écouter !” - “Moi, disait-il encore, je ne suis que le répétiteur extérieur du Maître intérieur qui seul instruit les cœurs !“. Puissions-nous écouter ce Maître intérieur !

Comme Abraham, comme Moïse, comme le petit Samuel (malgré son âge), comme le grand prophète Elie, le disciple du Christ est d’abord celui qui écoute l’appel de Dieu. Et après avoir écouté réellement, on ne peut que suivre Jésus, comme les deux disciples dont parle l’Evangile. Ayant écouté, ils eurent immédiatement un grand désir : “Maître, où demeures-tu ? – Venez et vous verrez ! – Ils allèrent, ils virent ; et ils demeurèrent auprès de lui, ce jour-là”.
L’écoute conduit à une rencontre, à une union ! N’est-ce pas cela la foi ? Ah ! Il s’en souvient bien, St Jean, de cette rencontre ! Il note même l’heure : “c’était environ la dixième heure” : quatre heures de l’après-midi ! Il demeura avec Jésus ! “Demeurer”, c’est une autre caractéristique de l’union à Dieu ; St Jean le note souvent.

Aujourd’hui, si nous voulons écouter le Christ, nous serons capables de répondre à sa question fondamentale : “Que cherchez-vous ?” – Et nous dirons : “Vous, Seigneur !” Et nous accepterons de le suivre : “Venez et vous verrez”, dit Jésus.

Et les deux disciples, ayant suivi Jésus, “demeurèrent avec lui” pour toujours. Et ils furent tellement enthousiasmés qu’ils allèrent chercher Simon, le frère d’André à qui Jésus dit d’emblée : “Tu t’appelleras désormais Pierre !” Jésus change le nom de Simon, c’est-à-dire il change son être profond ? C’est tellement évident depuis cet épisode jusqu’à nos jours : l’événement se reproduit sans cesse. Dès que quelqu’un s’attache à lui, Jésus change les manières de voir, de penser, de choisir. Il change le regard et finalement toute la vie. Pensons à Ste Thérèse, François d’Assise, Charles de Foucault… … et une multitude d’autres. Saisis par le Christ, ils l’ont écouté, ils l’ont suivi ; et ils ont été radicalement transformés, retournés de fond en comble.

Aussi, à chacun d’entre nous, nous qui, en quelque sorte, l’avons suivi jusqu’en cette église, le Christ, comme se retournant, demande : “Que cherches-tu ? – Qui cherches-tu ?” – Puissions-nous répondre : “Seigneur, où demeures-tu” ? Alors, à chacun il dira : “Venez et vous verrez”. Et St jean précise la suite : “Ils y allèrent… ils demeurèrent avec lui… et ils le suivirent”.

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