samedi 6 novembre 2010

Charité

Samedi - 31e T.O. – Charité ! Phil. 4.10-19

Certains commentateurs font arrêter la lettre de Paul juste avant notre lecture d’aujourd’hui. Celle-ci constituerait un “court billet“ de remerciement envoyé aussitôt les dons que Paul a reçus de la part des Philippiens. Et la lettre que nous connaissons aurait suivi. Mais peu importe finalement.

En tous les cas, en notre passage, il n’est question en effet que de ce que Paul a reçu alors qu’il était dans le dénuement. L’Apôtre remercie avec délicatesse. Mais toujours il élève la réflexion : “Ce n’est pas que je recherche les dons. Car ce que je recherche, c’est le fruit qui s’accroît à votre actif“. - Ce n’est pas le matériel qui importe, mais bien davantage le résultat spirituel. Les dons qu’il reçoit représentent aux yeux de l’apôtre les bonnes dispositions de ceux qui les font, leur sens du sacrifice, leur amour efficace et donc les progrès qu’ils font pour acquérir “une bonne conduite dans le Christ“.

Un adage patristique énonce : “Tu vois ton frère, tu vois le Seigneur Dieu !“.
Un grand spirituel, Mgr Wladimir Ghika (1) écrivait : “Rien ne rend Dieu proche comme le prochain. Et qui voit Dieu lointain, le prochain ne sera jamais bien proche ; pour qui ne voit pas le prochain bien proche, Dieu restera toujours lointain !“.

Il voyait dans “la visite du pauvre“ (C’est le titre de l’un de ses livres) comme une liturgie.
“Double et mystérieuse liturgie
- du côté du pauvre voyant venir à lui le Christ sous les espèces du frère secourable… ;
- du côté du bienfaiteur voyant apparaître dans le pauvre le Christ souffrant sur lequel il se penche.
Et liturgie unique par cela même !
Car si le geste est de part et d’autre ce qu’il faut, il n’y a plus des deux côtés que le Christ rejoint dans deux êtres, à travers deux êtres, le Christ bienfaiteur venu vers le Christ souffrant pour se réintégrer (lui-même) dans le Christ victorieux, glorieux et bénissant…“.

Et il ajoutait, soulignant pour cela l’importance de l’Eucharistie : “Il faut, pour que la liturgie de la “visite du pauvre“ ait sa valeur et sa vie, que la liturgie de l’autel ait été préalablement vécue bien au fond de l’âme. La tâche de charité universelle et sans heure fixe n’est que la dilatation de la messe à la journée et au monde entier ; elle est comme un retentissement d’ondes concentriques autour du sacrifice et de la communion du matin…“.

Tant il est vrai que le véritable sacrifice, c’est l’amour manifesté aux autres hommes : “Car c’est l’amour qui me plaît, non le sacrifice“, disait Dieu par le prophète Osée (6.6), phrase reprise par Notre Seigneur lui-même : Math 9.13. (Cf. Amos 5.22-24).

“N’oubliez pas la bienfaisance et l’entraide communautaire, car ce sont de tels sacrifices qui plaisent à Dieu“, dira l’épître au Hébreux (13.16) qui soulignera encore : “N’oubliez pas l’hospitalité, car, grâce à elle, certains, sans le savoir, ont accueilli des anges“ (13.2) - c’est-à-dire : Dieu lui-même.

Retenons pour aujourd’hui, si vous le voulez bien, cette formule lapidaire de Mgr Ghika : “Qui se dépouille pour autrui se revêt du Christ“. Et “Plus on donne de son cœur, moins on s’appauvrit !“.


(1) Prince et prélat roumain, tué par les Allemands durant la dernière guerre, et qui, avant celle-ci, fréquentait l’Abbaye de la Source, à Paris. Il a écrit particulièrement “La visite des pauvres !“.

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