mardi 10 mai 2011

Martyre !

Pâques 3 Mardi - (Actes 7.51sv)

Au-delà de ce qui s’est passé à Jérusalem en ces heures bouleversantes du matin de Pâques, il y a - et c’est une seconde étape importante -, il y a la manière dont la Pâque du Christ s’est ensuite inscrite, incrustée dans la vie et le destin des apôtres, des premiers chrétiens. Si Pâques veut dire “passage“, passage de la mort à la vie, les récits du livre des Actes des apôtres et de leurs diverses lettres nous font assister au passage des disciples de l’obscurité et de la faiblesse à la lumière et au courage auxquels les a conduits l’intrusion en eux et parmi eux de l’Esprit du Ressuscité ! Transformés, renouvelés, c’est toute leur existence qui désormais “témoigne“ du rythme pascal de mort et de renaissance en Jésus Christ !

A leur suite, par la force du baptême qui nous a plongés et nous plonge à tout moment - on l’oublie trop facilement parfois - dans la mort avec le Christ pour renaître, revivre avec lui, nous devons en tout instant, nous aussi, être les “témoins“, par nos paroles, par nos actes, par toute notre existence, de ce passage pascal dont nous “faisons mémoire“ par l’Eucharistie, afin qu’il s’actualise de plus en plus en nous pour que nous parvenions au Royaume de Dieu !
- Il nous faut prendre conscience des véritables aliénations dont nous sommes victimes, que sont le péché et finalement la mort…
- Il nous faut prendre conscience de la véritable liberté à laquelle nous sommes appelés, liberté qui n’est rien moins que le “repos en Dieu“ : voir Dieu comme il nous voit présentement.
- Oui, il nous faut prendre conscience de ce passage que nous avons à faire et à refaire constamment, que nous avons déjà fondamentalement fait par notre baptême (par notre profession religieuse…). Il faut le dire et se le redire : spirituellement, ce que nous avons fait reste toujours à faire !

Etre des “témoins“ de Pâques comme les apôtres ! En grec, le mot “témoin“, c’est “martus“ d’où est venu le mot “martyre“. Oui, notre vie de baptisé est, doit être un “martyrion“, un témoignage qui peut aller jusqu’au don de soi-même (n’est-ce pas un aspect de la “profession monastique“ ?), qui peut aller jusqu’à verser son sang à l’exemple du Christ. Et n’est-ce pas un devoir pour nous d’avoir à la pensée toutes celles et tous ceux qui sont ces sortes de “témoins“ donnant leur vie jusqu’à épuisement…, jusqu’à verser leur sang…


Pour en revenir au protomartyr, St Etienne, qui nous est présenté tous ces jours-ci, on peut dire, d’après les Actes des apôtres, que l’Eglise primitive, afin de nous faire goûter, dès le commencement, l’absolu de notre vocation baptismale, a voulu mettre en valeur ce grand moyen d’être “témoin du Christ“, celui du martyre !


St Etienne, premier martyr, l’Eglise étant à peine née ! Il est à remarquer qu’à cette occasion, c’est la première fois qu’il est question de Paul : il gardait les vêtements de ceux qui lapidaient Etienne !... Plus tard, il se vantera d’avoir été élève de Gamaliel, le plus célèbre rabbin de Jérusalem. Il n’est pas défendu d’imaginer ces deux garçons - Etienne et Saul - comme étudiants ensemble à Jérusalem, mais appartenant à des tendances différentes : ironie mordante du martyre que Notre Seigneur avait prévu au sein même d’une famille… Mais qui dira le rôle d’Etienne dans la conversion de Saul, s’il est vrai que “le sang des martyrs est une semence de chrétiens“ (Tertullien) ?

Dans l’Eglise primitive, le martyre fut, en quelque sorte, le seul et grand “témoignage“, jusqu’à la conversion de l’Empire au christianisme, ce “témoignage“ toujours inscrit au fond de notre être par le caractère baptismal, ce qu’exprime bien St Paul dans sa lettre aux Philippiens, par exemple : “Il s'agit de connaître le Christ - et la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances - (pour) devenir semblable à lui dans sa mort afin de parvenir, s'il est possible, à la résurrection d'entre les morts… - Nous, les "parfaits" (= “baptisés“), comportons-nous donc ainsi, et si en quelque point vous vous comportez autrement, là-dessus aussi Dieu vous éclairera. En attendant, au point où nous sommes arrivés, marchons dans la même direction (3.10sv)
N’avait-il pas prévenu son disciple Timothée : “Tous ceux qui veulent vivre avec sincérité dans le Christ seront persécutés !“ (2 Tim 3.12).

Il faudrait, là, relire les célèbres lettres d’Ignace d’Antioche : “Laissez-moi être la pâture des bêtes. Par elle, il me sera possible de rencontrer Dieu !“. Et puis sachons nous dire ce qu’écrivait Jean Tauler, par exemple : “Certains subissent le martyre une bonne fois par le glaive ; d’autres connaissent le martyre qui les couronne de l’intérieur !“. Paul VI, ce grand souffrant intérieur, écrivait : “Il est nécessaire que l’Eglise souffre. Pour sa fidélité au Christ. Pour son authenticité. Pour renouveler sa capacité de parler au monde et de le sauver. Le martyre est un de ses charismes“.

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