jeudi 17 novembre 2011

Le martyre… !

T.O. 33 imp. Jeudi - (I Macc. 2.15-29)

Textes difficiles, abscons que nous fait lire la liturgie tous ces jours-ci, surtout quand elle nous passer (indistinctement) du premier livre des Maccabées (lundi) au second (Mardi-Mercredi), puis du second au premier (Aujourd’hui, demain) !
Pourtant, me semble-t-il, il faut discerner dans la succession de ces deux livres toute une pédagogie divine à propos de notre fidélité à Dieu, fidélité qui peut entraîner jusqu’au martyr ! Essayons de comprendre !

Observons d’abord qu’il y a, bien sûr, une logique historique entre la résistance de Mattathias, le père des Maccabées, que l’Eglise nous fait lire aujourd’hui (1er livre des Macc.) et le martyr d’Eléazar qu’on a lu Mardi dernier (2ème livre des Macc.). La différence de style apparaît cependant immédiatement. Mardi, le martyr d’Eléazar nous était raconté dans une pathétique atmosphère de foi en laquelle baigne le second livre des Martyrs d’Israël. Aujourd’hui (1er livre des Macc.), nous sommes dans un style beaucoup plus sec et dépouillé. Nous sommes pourtant à la même époque ; ce sont les mêmes événements qui sont relatés ; mais les auteurs inspirés ont ressenti les choses différemment.
Aussi, nous est-il permis de discerner une progression dans la manière de réagir de Mattathias et d’Eléazar ! Une progression qui est comme un effet de la pédagogie de Dieu à l’égard de l’homme, à notre égard ! Essayons de comprendre !

Mattathias - première réaction - réagit, est-il dit, avec la violence de Pinhas qui est relatée au livre des Nombres (25.1-13). Vous pourrez vous y reporter ! Comme Pinhas, Mattathias réagit violemment ! Une violence que l’on ne comprend pas chrétiennement bien sûr, mais qui est toujours malheureusement d’actualité ; une violence quasi “terroriste“, serions-nous tentés de dire aujourd’hui ! Une violence telle parce que Mattathias est, dit le texte, “possédé d’une jalousie pour son Dieu“, parce qu'il est, dirions-nous aujourd’hui, possédé par un sens exacerbé de la justice, face à ceux qui acceptent l’injustice de l’apostasie au regard de la fidélité dû à son Dieu ! Et son geste de violence - peut-être compréhensible humainement (?) - aboutit à la révolte : ceux qui veulent à tout prix garder la fidélité à l’Alliance, vont se cacher dans le désert où, poursuivis par leurs persécuteurs, ils refusent de se défendre le jour du Sabbat ! C’est parfois notre réaction : pot de fer, pot de terre ! … Réactions donc de violences en chaîne.

Dans le récit d’Eléazar et de la mère des sept fils (2ème livre des Macc.), nous sommes amenés directement au témoignage du martyr dans la foi au Dieu Unique ! (μάρτυς, en grec veut dire : “témoin“). C’est, si je puis dire, la deuxième phase de la pédagogie divine appliquée au peuple élu !
Il semble, déjà, que dans la succession des événements ou du moins des récits, il faille distinguer ainsi une progression, fruit d’une pédagogie divine, qui aboutira au Christ et à ce que sera le martyre chrétien, la première spiritualité chrétienne lors des temps apostoliques ! A Gethsémani, Jésus n’a-t-il pas dit à Pierre : “Rentre ton épée au fourreau : ne sais-tu pas que si je le demandais auprès du Père, il m’enverrait douze légions d’anges ?“. On passe de la réaction de violence (compréhensible humainement) au témoignage ? "Comment alors s’accompliraient les Ecritures d’après lesquelles il doit en être ainsi ?“ (Mt 26.51-54).

“Comment d’accompliraient les Ecritures ?“. (dAvec Jésus, on est au terme de cette pédagogie divine qui interpellent les hommes au niveau de leurs primitives réactions spontanées (de violence souvent) pour les faire progresser vers la morale qui reflète les mœurs divines ; Jésus expire en disant : “Père pardonne-leur ; ils ne savent pas ce qu’ils font !“ (Lc 23.34).
Dans cette continuité, il sera dit dans les Actes des Apôtres : “Tandis qu'ils le lapidaient, Étienne prononça cette invocation : " Seigneur Jésus, reçois mon esprit". Puis il fléchit les genoux et lança un grand cri : "Seigneur, ne leur compte pas ce péché". Et sur ces mots il mourut“.

Et, bien plus, au “temps des accomplissements des Ecritures“, le martyr est non seulement un “témoignage d’Amour accompli par fidélité au Dieu Unique“, mais il recèle une fécondité inattendu et étonnante : “Le sang des martyrs est semence de chrétiens“, disait Tertullien ! C’est, si on peut dire, la troisième phase de cette pédagogie de Dieu à notre égard : une fécondité comme le sang du Christ dont nous bénéficions ! En effet, qui ne dira pas le rapport de cause à effet que l’on peut observer entre le martyr d’Etienne et la conversion sur le chemin de Damas de celui qui, gardant les manteaux… et respirant la fureur et la menace, devint l’Apôtre des nations ?

Ainsi on est passé de la violence humaine bien compréhensible parfois à la fécondité cachée du martyre.
Leçon que l’on peut méditer, aujourd’hui particulièrement, pour que, nous aussi, nous “accomplissions les Ecritures“ : prendre en compte, dans nos prières, les révoltes bien compréhensibles - si bien exprimées par exemple dans certaines expressions des psaumes … - … prendre en compte ces révoltes de nos frères (et les nôtres aussi) injustement condamnés, pour les transformer, avec le Christ, en sources de fécondité. Tel est le sens du martyre !

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