vendredi 11 décembre 2009

“Ne jugez pas !“ … - Avent 2 - Vendredi - (Isaïe 48.17sv)

Comparant le comportement de Jean-Baptiste et de Jésus, les gens bavardent comme des gamins… Je crois que nous sommes tous des gamins et que nous avons tous à profiter des mises en garde que fait Jésus quand il dit : "Qui n'est pas avec moi est contre moi, et qui n'amasse pas avec moi dissipe. Aussi je vous le dis, tout péché, tout blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l'Esprit ne sera pas remis. Et quiconque aura dit une parole contre le Fils de l'homme, cela lui sera remis ; mais quiconque aura parlé contre l'Esprit Saint, cela ne lui sera remis ni en ce monde ni dans l'autre. "Prenez un arbre bon : son fruit sera bon ; prenez un arbre gâté : son fruit sera gâté. Car c'est au fruit qu'on reconnaît l'arbre. Engeance de vipères, comment pourriez-vous tenir un bon langage, alors que vous êtes mauvais ? Car c'est du trop-plein du cœur que la bouche parle. L'homme bon, de son bon trésor tire de bonnes choses ; et l'homme mauvais, de son mauvais trésor en tire de mauvaises. Or je vous le dis : de toute parole sans fondement que les hommes auront proférée, ils rendront compte au Jour du Jugement. Car c'est d'après tes paroles que tu seras justifié ; et c'est d'après tes paroles que tu seras condamné". (Mth 12.30-36-37).

Le premier évêque de Jérusalem, Jacques, le “frère du Seigneur“ à qui est attribué “l’épitre de St Jacques“ dans le N.T., est celui qui a parlé des intempérances du langage dont nous avons tous à nous méfier : "Si quelqu'un ne commet pas d'écart de paroles, c'est un homme parfait, il est capable de refréner tout son corps. Quand nous mettons aux chevaux un mors dans la bouche pour nous en faire obéir, nous dirigeons tout leur corps. Voyez encore les vaisseaux : si grands qu'ils soient, même poussés par des vents violents, ils sont dirigés par un tout petit gouvernail, au gré du pilote. De même la langue est un membre minuscule et elle peut se glorifier de grandes choses ! Voyez quel petit feu embrase une immense forêt : la langue aussi est un feu. …. La langue, personne ne peut la dompter : c'est un fléau sans repos. …Par elle nous bénissons le Seigneur et Père, et par elle nous maudissons les hommes faits à l'image de Dieu ! De la même bouche sortent bénédiction et malédiction. Il ne faut pas qu'il en soit ainsi. La source fait-elle jaillir par la même ouverture le doux et l'amer ? Un figuier, mes frères, peut-il donner des olives, ou une vigne des figues ? L'eau de mer ne peut pas non plus donner de l'eau douce. (3.1-12).

On juge un arbre à ses fruits ! St Jacques, comme Jésus, prend la comparaison du figuier. Ne pas pouvoir s’exprimer, c’est être étouffé. Il faut parler ! Mais encore faut-il le faire avec discernement après avoir purifié son cœur, car les paroles sortent du cœur et le révèlent. Bien plus, les paroles même les plus judicieuses demandent à être dites à propos et en temps voulu ! (in tempore opportuno“, disait St Benoît).

La littérature de Sagesse est pleine de versets qui dénoncent les ravages des paroles oiseuses. En voici un parmi d’autres : "Plutôt rencontrer une ourse privée de ses petits qu'un insensé en son délire". (Prov. 17.12). Feuilletez le livre du Qohélet (Ecclésiaste), c’est lui qui est le plus féroce sur les paroles inutiles.

Jean-Baptiste lui-même, le Précurseur, a eu du mal à comprendre le comportement de Jésus de qui pourtant il avait affirmé la certitude qu’il était le Messie accomplissant la loi et les prophètes. Alors ne nous étonnons pas d’être perplexes devant le comportement de l’un ou l’autre de nos proches qui ne vit pas selon nos catégories de pensée. Efforçons-nous de ne pas juger prématurément comme nous le défend d’ailleurs Jésus lui-même : “Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés !“. Porter un jugement sur quelqu’un, c’est souvent l’enfoncer dans ses torts, alors que tout le problème est de le reprendre pour l’accompagner et l’aider à en sortir. Le mal que nous avons-nous-mêmes à porter et qui doit provoquer un jugement sur nous-mêmes devrait nous aider à cultiver les sentiments de compassion que nous avons à éprouver pour les autres.

La Bible nous invite à marcher environnés d’une nuée de témoins qui surgissent de l’Ancien comme du Nouveau Testament. Ils nous servent de compagnons de route. Les Saints du Nouveau Testament, mieux encore que ceux de l’Ancien, nous aident à fixer notre regard sur le Christ. Leurs imperfections et leurs difficultés, mieux que leurs vertus parfois nous aident à marcher sur la route. On ne saurait compter les sermons qu’ont faits les Pères de l’Eglise sur St Thomas, cet Apôtre qui eut tant de difficultés à croire avant de mettre ses doigts dans les plaies de Jésus ressuscité et de s’écrier : “Mon Seigneur et mon Dieu !“.

Je crois que la culture biblique a pour résultat, et peut-être pour résultat principal, de nous guérir de cette tendance à juger sommairement et prématurément les gens qui ne pensent pas comme nous, de nous guérir de ces jugements qui ne font que durcir les situations, d’élargir les abîmes d’incompréhensions et de nous apprendre, au lieu de juger notre prochain, de le situer pour le rejoindre et devenir son compagnon de route vers la Jérusalem céleste.

Le Livre de la Consolation dans lequel la liturgie nous plonge actuellement nous montre combien Israël a eu du mal à déchiffrer les voies de Dieu ! Il en est venu jusqu’à le croire absent dans les moments où sa Providence s’exerçait le plus manifestement dans son histoire. Chacun, dans son existence, peut se trouver dans la même situation. “En vérité, tu es un Dieu qui se cache, Dieu d'Israël, Sauveur !“.

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