mardi 22 décembre 2009

La folie du langage de Dieu - Avent - 21 Décembre - (Cant 2.8sv)

"J’entends mon bien-aimé qui vient !Il escalade les montagnes ; il franchit les collines. Il accourt comme une gazelle…“.

Il est une chose qu'on trouve assez fréquemment dans la tradition juive et dans la tradition patristique chrétienne : le péché a émoussé la fine pointe de l'intelligence humaine ; l'intelligence n'est plus capable de se mettre à l'écoute, de comprendre le langage discret que Dieu parle dans la nature : l’intelligence (à cause du péché) “retient captive la vérité“ (Rm 1.18), quoique le langage divin dans la nature existe toujours. “En effet, depuis la création du monde, les perfections invisibles (de Dieu) - éternelle puissance et divinité -, sont visibles dans ses œuvres pour l'intelligence…“. Mais les hommes “se sont fourvoyés dans leurs vains raisonnements et leur cœur insensé est devenu la proie des ténèbres“. (Rm 1.20-21).

Le livre de la Sagesse le disait déjà : “… En partant des biens visibles, ils (les hommes) n'ont pas été capables de connaître “Celui-qui-est“ ! En considérant les œuvres, ils n'ont pas reconnu l'Artisan…“. Pourtant, “qu'ils sachent combien leur Maître est supérieur : il est la source même de la beauté qui les a créées…, car la grandeur et la beauté des créatures font, par analogie, contempler leur Auteur“. (Sag 13.1sv).

Le 1er Concile du Vatican cite ces textes à l’appui de l’affirmation que Dieu peut être connu avec certitude par la raison humaine : L’Eglise “ tient et enseigne que Dieu, principe et fin de toutes choses, peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine à partir des choses créées, car, "depuis la création du monde, ce qu'il y a d'invisible se laisse voir à l'intelligence grâce à ses œuvres" (Rm 1,20). Toutefois, il a plu à sa sagesse et à sa bonté de se révéler lui-même au genre humain par une autre voie, surnaturelle celle-là : "Après avoir à maintes reprises et sous maintes formes parlé jadis à nos Pères par les prophètes, Dieu, tout récemment, nous a parlé par le Fils" (He 1,1) (Cf. Denzinger 3004-5).

Oui, Dieu parle d'une manière nouvelle pour remédier à cette espèce d'abrutissement de notre intelligence !

Il parle d’abord comme en frappant sur la table, par des prodiges, par des merveilles…, des événements extraordinaires… !

Ce n'est pourtant pas sa manière normale de parler : Lui “qui Est” n'a pas besoin de “paraître“ !!! Ceux qui n'ont pas de consistance dans l’être font beaucoup de bruit ; et ceux qui font beaucoup de bruit, souvent, n'ont pas beaucoup de consistance dans l’être ! Or, Dieu est, par excellence, “Celui qui Est”, (l’interprétation grecque n'est pas tellement différente de l’interprétation hébraïque : Dieu = “O ôn” : “Celui-qui-est”) ... Il y a une espèce de proportion inverse entre l’“être“ et le “paraître“. Dieu “qui Est” n'a pas besoin de “paraître“. Et si on vit au plan du “paraître“, on risque de dire qu'Il n'existe pas alors que c'est nous qui sommes distraits…

Alors, soudainement, Dieu parle, parfois, par des prodiges… : I Co.1:21 : “Puisqu'en effet les hommes, par le moyen de la sagesse, n'ont pas reconnu Dieu dans la sagesse de Dieu, c'est par la folie de la prédication qu'il a plu à Dieu de sauver les croyants“. Et Dieu prend alors un autre langage : “Je perdrai la sagesse des sages”. (cf Is. 29.14).

Et ainsi commence cette histoire biblique, notre “Histoire Sainte“ où, - c'est curieux - il y a comme des paradoxes, “des vérités, selon le mot de Chesterton, qui marchent sur la tête pour se faire remarquer”. Ce sont :
  • les femmes vierges qui enfantent (on le proclamera dans quelques jours)…,
  • les puînés qui remplacent les aînés… (David…),
  • les pécheurs qui deviennent des saints, comme ce Jacob (dont le nom signifie : “le tordu !“) qui devient “Israël“, père de tous les Juifs,
  • l’étrangère comme Ruth qui devient l’aïeule du Messie,
  • etc. etc…

Oui, Dieu, paradoxalement, marque sa liberté, pour accomplir son dessein d’amour, en accomplissant des choses invraisemblables !

Et finalement, il descend vers nous par des démarches insensées :
  • du ciel à la crèche,
  • de la crèche à la croix,
  • de la croix au tombeau et au plus profond des enfers !
  • Et puis, il “rebondit“ jusqu'au ciel...

Bien plus, Dieu dit qu'Il veut non seulement se faire connaître à l'homme (par le langage de la création et le langage de ses prodiges…), mais s’unir à sa créature

Cant. 2.8 : “J'entends mon bien-aimé. Voici qu'il arrive, sautant sur les montagnes, bondissant sur les collines“ : du ciel à la crèche, de la crèche à la croix ! etc.

Alors, n'est-ce pas par des démarches insensées que nous devrions répondre, nous aussi, à cette démarche invraisemblable de notre Dieu ?

“Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes“. (I Co. 1.25).

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