vendredi 9 octobre 2009

Le « Jugement » - T.O. 27 imp. - Vendredi - (Joël 1.13sv)

Aujourd’hui et demain, la liturgie nous met à l’école du prophète Joël. Les efforts qu’on a faits, pour le situer dans le temps, sont restés vains. Aucune allusion à un événement historique précis ne permet de le dater. Dans l’espace, c’est un peu moins difficile de le situer car il porta beaucoup d’intérêt au Temple de Jérusalem, au rituel des cérémonies. Son horizon semble donc se borner à Jérusalem. Sa prédication se fait dans un style clair et lyrique. Elle est comme une musique qui chante le rythme fondamental de l’Histoire Sainte : anéantissement et de surgissement, mort et résurrection. Et cela dans une espérance invincible du Jour où Dieu interviendra d’une manière décisive pour établir l’harmonie et la justice.

Cette impossibilité de situer exactement ce prophète Joël dans le temps fait qu’il est placé différemment dans la Bible hébraïque et la Bible grecque. La liturgie, en tous les cas, nous le fait lire au moment où on commence à s’approcher de la fin de l’année liturgique, à ce moment où la liturgie tend à donner une préférence à la littérature apocalyptique.

Ayant consacré l’année à parcourir toute la Bible, nous sommes invités à tirer l’enseignement qui se dégage de cette lecture : après avoir considéré le passé, nous sommes invités à “lever un coin de voile“ (c’est le sens du mot “apocalypse“) pour essayer d’imaginer ce que sera l’avenir. Ainsi le livre de Joël se présente en fin de compte comme une transition entre les livres prophétiques qui dégagent la signification providentielle des évènements de l’histoire et la littérature apocalyptique. On pourrait dire qu’il y a dans ce livre toute une théologie de l’histoire, une théologie qui, dégagée des conditionnements de l’espace et du temps, se présente à nous comme une lumière apte à nous faire déchiffrer les voies de la Providence dans les crises de notre propre histoire, de nos vies personnelles.

Deux jours sont consacrés à la lecture de Joël. Aujourd’hui, c’est l’appel à la repentance, à la pénitence ; demain ce sera l’évocation de la restauration. Toujours ce rythme de mort et de résurrection auquel Jésus donne un accent final par son mystère pascal de mort et de vie, comme il l’explique lui-même sur la route, aux disciples d’Emmaüs.

La lecture d’aujourd’hui nous invite donc à la conversion, à la pénitence, à attendre dans “la crainte et le tremblement“ (1) en nous efforçant de déchiffrer les signes du temps comme nous y invite Notre Seigneur :

" Lorsque vous voyez un nuage se lever au couchant, aussitôt vous dites que la pluie vient, et c’est ce qui arrive. Et lorsque c'est le vent du midi qui souffle, vous dites qu'il va faire chaud, et c'est ce qui arrive. Hypocrites, vous savez discerner le visage de la terre et du ciel ; et ce temps-ci alors, comment ne le discernez-vous pas ? " (Lc 12, 54-56).

Ces signes des temps semblent se multiplier de nos jours. On ne peut ouvrir un journal sans trouver de multiples invitations à y déchiffrer la signification providentielle. Cependant, Jésus nous met en garde contre une tendance assez fréquente à trouver trop facilement des rapports de cause à effet entre les catastrophes et les responsables :

« …Survinrent des gens qui rapportèrent à Jésus ce qui était arrivé aux Galiléens, dont Pilate avait mêlé le sang à celui de leurs victimes. Prenant la parole, il leur dit : " Pensez-vous que, pour avoir subi pareil sort, ces Galiléens fussent de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens ? Non, je vous le dis, mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous pareillement ! Ou ces dix-huit personnes que la tour de Siloé a tuées dans sa chute, pensez-vous que leur dette fût plus grande que celle de tous les hommes qui habitent Jérusalem ? Non, je vous le dis ; mais si vous ne voulez pas vous repentir, vous périrez tous de même." » Lc 13, 1 –5).

Ainsi, Joël invitait déjà à la repentance, c’est-à-dire à se tourner de plus en plus vers le Seigneur. Les canicules, les massacres, les famines, les épidémies, les changements climatiques, nous sommes appelés à les vivre tous et chacun, à l’école de la Bible et des Apocalypses, comme des appels à la conversion, à la repentance. La “paix“ que nous espérons ne sera pas alors une utopie.

« Jésus déclara : " Prenez garde qu'on ne vous abuse…. Lorsque vous entendrez parler de guerres et de rumeurs de guerres, ne vous alarmez pas : il faut que cela arrive, mais ce ne sera pas encore la fin. On se dressera, en effet, nation contre nation et royaume contre royaume. Il y aura par endroits des tremblements de terre, il y aura des famines. Ce sera le commencement des douleurs de l'enfantement. Soyez sur vos gardes" ». (Mc 13, 5. 7-9a)


« Mais relevez la tête. Votre délivrance est proche ! ».
Oui, notre Dieu est un “Dieu de délivrance“
.
Lui seul “a les issues de la mort !“.

  1. C’est de ce passage que fut tiré le “Dies irae, dies illa…“. Autrefois, la plupart des chrétiens, même non pratiquants, se faisaient un devoir de ne pas “rater“ les enterrements ; et ils savaient par cœur, en latin, l’hymne qui retentissait dans les églises parées de tentures noires, d’autant plus épaisses que le défunt était une personne importante… ! : “Dies irae, dies illa, solvet saeclum in favilla : Teste David cum Sibylla“ (Jour de colère que ce jour-là qui réduira le monde en cendres, selon David et la Sybille !“). On attendait avec angoisse le moment où les chantres risquaient de se gripper la gorge avec le “Tuba mirum spargens sonum“ – (“La trompette jetant ses notes stupéfiantes“). Cette hymne célèbre est inspirée de la fin de notre lecture : « Sonnez du cor à Sion, donnez l'alarme sur ma montagne sainte! Que tous les habitants du pays tremblent, car il vient, le jour du Seigneur, car il est proche ! Jour d'obscurité et de sombres nuages, jour de nuées et de ténèbres! Comme l'aurore, se déploie sur les montagnes un peuple nombreux et fort, tel que jamais il n'y en eut, tel qu'il n'en sera plus après lui, de génération en génération »( Jl 2, 1-2).

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