mardi 13 octobre 2009

La Justice de Dieu - T.O. 28 imp. Mardi - (Rm 1.16-25)

Je n’ai pas honte de l’Evangile !“. Quand Paul écrit à cette Communauté qui doit - nolens, volens – se réclamer du prestige de la capitale de l’Empire, de la célèbre ville de Rome, il n’éprouve aucune timidité, aucune honte à parler de l’Evangile. C’est sa fier té, à lui ! Belle leçon de l’assurance, de la hardiesse qu’il souhaite à tout chrétien pour manifester sa foi !

Il a tellement conscience que cet Evangile est “puissance de Dieu pour le salut de tout croyant !“. Et pour lui, évidemment, c’est l’amitié avec Dieu, cette amitié qui est déjà, ici-bas, Vie éternelle !

Et cela “pour le Juif d’abord, puis pour le Grec “! Dès le début de sa lettre, Paul revient sur ce thème qui le fait tant souffrir. C’est vous (Juifs), avait-il martelé bien des fois, qui êtes les premiers bénéficiaires de la Parole de Dieu ! C’est affirmer en même temps et fortement que le Nouveau Testament est dans la ligne de l’Ancien Testament, bien davantage, évidemment, que dans celle du paganisme ! - Ne faut-il pas, nous-mêmes, quand lon parle tant d’œcuménisme, mieux discerner, - tout en affirmant notre spécificité chrétienne (“Je n’ai pas honte de l’Evangile !) -, “les connaturalités, les compréhensions… davantage avec telle ou telle aspiration religieuse qu’avec des associations, même sympathiques, qui professent un athéisme… ? Vaste question ! Comme celle de Paul !

Et c’est peut-être dans ce contexte que Paul aborde la notion de la “Justice de Dieu“ qui est si facilement dévoyé, détourné de son sens profond. - Dans le langage courant, la “Justice de Dieu“, c’est la justice d’un tribunal qui punit ou récompense. Mais comme “tous les hommes sont enfermés dans le péché“, dira St Paul, chacun de nous doit vivre dans la crainte du châtiment éternel. C’est vrai, en partie ! Et les plus grands saints ont éprouvé cette crainte ; et nous devons sans cesses en appelé à la miséricorde de Dieu qui épargne, délivre, pardonne. C’est l’objet de notre persévérante espérance !

Cependant cette compréhension de la “Justice de Dieu“ est un peu caricaturale, trop humaine. St Thomas d’Aquin, quand il veut appuyer sur l’Ecriture Sainte sa notion de “Justice de Dieu“ en ce sens de rétribution du bien ou du mal, il choisit des textes où il est question non de “Justice de Dieu“, mais de “colère de Dieu“, de cette colère dont parle St Paul lui-même dans notre texte. – Mais pour ce grand théologien, la “Justice de Dieu“, c’est toute l’activité que Dieu déploie auprès des hommes en vertu de laquelle il ne cesse d’“ajuster“ les hommes à lui, le seul “JUSTE“. Sa “Justice“ ne veut qu’émonder l’arbre qui doit porter de bons fruits.

Et cette notion de la véritable “Justice de Dieu“ qui s’apparente avant tout à la fidélité de Dieu envers l’homme qu’il a créé “à son image et ressemblance“, à la fidélité envers le peuple qu’il a choisi…, St Thomas l’illustre par bien des passages de l’Ancien Testament lui-même, les psaumes en particulier :
- Aux yeux des nations, il a révélé sa justice ; il s’est rappelé sa fidélité, sa loyauté“ (Ps 98.2-3).

“Dans la grande assemblée, j’ai annoncé ta justice ; je n’ai pas caché ta justice au fond de mon cœur ; je n’ai pas dissimulé ta fidélité et ta vérité“ (Ps 40.10-11).
- “Mon Dieu, Dieu Sauveur…, que ma langue crie ta justice“ (Ps 51.16).
- Et cette phrase significative du prophète Daniel : “Seigneur, selon tes actes de justice, que ta colère se détourne de Jérusalem“ (9.16).

Ainsi, la “Justice de Dieu“ ne s’oppose pas à sa miséricorde qui suscite notre espérance, mais à sa “colère“ qui suscite la crainte.

Nous n’avons donc rien à craindre de la “Justice de Dieu“ qui atteint l’homme uniquement pour le “justifier“, le rendre “juste“, le rendre exactement ce qu’il est appelé à être dans la pensée éternelle de Dieu !

La “Justice de Dieu“ introduit l’homme dans le BIEN que Dieu est lui-même ; c’est la volonté miséricordieuse de Dieu-Amour qui veut sauver l’homme pour qu’il participe à sa VIE.

Comment accueillir cette “Justice de Dieu“ ? Notre texte dit : “par la foi, pour la foi“ ; je préfère le mot-à-mot : “de la foi à la foi“. En suivant la préoccupation de St Paul, Origène fait une magnifique réflexion : il faut passer de la foi (“ex fide“) du peuple ancien à la foi (“in fidem) du peuple nouveau ; “il faut, pour posséder vraiment le Nouveau Testament, posséder déjà l’Ancien ; il faut récapituler en soi l’histoire du salut“.

Mais il semble qu’il faille aller encore plus loin : la “Justice de Dieu“ agit en l’homme, pour l’“ajuster“ à lui, à partir d’une foi initiale pour une plénitude de foi…, en lui-même, dans l’Eglise. Autrement dit, la foi n’est pas un système, une théorie, un ensemble de dogmes, mais une “économie“ évangélique, disaient les Pères de l’Eglise, c’est-à-dire un dessein divin qui est une volonté de “justification“. Mais il faut que l’homme réponde à ce dessein divin en faisant de lui-même un don total au Dieu juste qui “justifie“ par sa “Justice“, cette “Justice“ qui donne une possession anticipée de tous les bienfaits divins.

C’est pourquoi, Paul conclue cette phrase si dense par une citation du prophète Habacuc : “Le Juste vivra par la foi !“ (Ha. 2.4).

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