T.O. 27 - Vendredi - (Jl 1, 13… 2,2)
Aujourd’hui et demain, la liturgie nous met à
l’école du prophète Joël.
Les efforts qu’on a faits, pour le situer dans le temps, sont restés vains.
Aucune allusion à un événement historique précis ne permet de le dater. Dans
l’espace, c’est un peu moins difficile de le situer. Il porte beaucoup
d’intérêt au Temple de Jérusalem, au sacerdoce, au rituel des cérémonies. C’est
donc un Judéen dont l’horizon se borne à Juda et à Jérusalem.
Sa prédication se fait dans un style clair et
lyrique. Elle est comme une musique qui reflète le rythme fondamental de
l’Histoire Sainte qui est fait d’anéantissement et de surgissement, de mort
et de résurrection dans une espérance invincible du "Jour" où Dieu interviendra d’une
manière décisive pour établir l’harmonie et la justice.
La liturgie nous le fait lire au moment où on
commence à s’approcher de la fin de l’année liturgique, le moment où elle tend
à donner une préférence à la littérature apocalyptique.
Ayant parcouru la Bible tout au long de l'année,
nous sommes invités à tirer l’enseignement qui se dégage de ce voyage biblique.
Après avoir considéré le passé, nous sommes invités à lever un coin de voile (sens du mot apocalypse) pour essayer d’imaginer
ce que sera l’avenir.
Le livre de Joël se présente donc comme une
transition entre les livres prophétiques où s’est dégagée la signification
providentielle des évènements de l’histoire, une transition entre cette
littérature prophétique et la littérature apocalyptique.
Au terme de l’année liturgique, Joël nous présente
une philosophie de vie, ou plutôt une théologie de l’histoire. Précieuse
théologie, car dégagée des conditionnements de l’espace et du temps, elle se
présente comme une lumière contemporaine apte à nous faire déchiffrer les
voies de la Providence, dans les crises de l’histoire comme dans celles de
nos vies personnelles.
Deux jours sont consacrés à la lecture de Joël.
Aujourd’hui, c’est l’appel à la pénitence ;
demain ce sera l’évocation de la "Restauration". Toujours ce
rythme de mort et de résurrection auquel Jésus donne un accent final par sa
mort et sa résurrection, comme il l’explique sur la route, aux disciples
d’Emmaüs.
Il n’y a pas si longtemps, la plupart des
chrétiens, même non pratiquants, mais qui se faisaient un devoir d'être
présents aux enterrements, savaient par cœur, en latin, l’hymne qui
retentissait dans les églises parées de tentures noires d’autant plus épaisses
ou nombreuses que le défunt était une personne importante (Il y avait, n'est-ce pas, enterrement de première
classe, de deuxième classe, de troisième classe... Heureusement la réforme
liturgique issue du concile Vatican II a supprimé toutes ces draperies
mortuaires !).
C'était le "Dies irae, dies illa,
solvet saeclum in favilla : Teste David cum Sibylla" ("Jour de colère que ce
jour-là, qui réduira le monde en cendres, selon David et la Sibylle"). Jeunes et taquins attendaient avec amusement
le moment où les chantres risquaient de se gripper la gorge avec le "Tuba
mirum spargens sonum per sepulcra...". (La trompette, jetant ses notes stupéfiantes parmi
les tombeaux...).
Cette hymne célèbre qui date du 12ème-13ème
siècle (parfois attribuée à un franciscain,
Thomas de Celano) est inspirée de ce que nous avons entendu à la fin de
la lecture : Sonnez du cor à Sion, donnez
l'alarme sur ma montagne sainte ! Que
tous les habitants du pays tremblent, car il vient, le jour du Seigneur, il est
proche ! Jour d'obscurité et de sombres nuages, jour de nuées et de ténèbres !
Comme l'aurore, se déploie sur les montagnes, voici un peuple nombreux et fort,
tel que jamais il n'y en eut, tel qu'il n'en sera plus après lui, de génération
en génération". (Jl 2, 1-2)
La lecture d’aujourd’hui nous invite donc à
attendre dans la "crainte et le
tremblement" ! Ce que Jésus nous invite à faire en déchiffrant les "signes du temps" :
"Il disait aux foules : 'Lorsque vous voyez un nuage se lever au couchant,
aussitôt vous dites que la pluie vient, et c'est ce qui arrive. Et lorsque
c'est le vent du midi qui souffle, vous dites qu'il va faire chaud, et c'est ce
qui arrive. Hypocrites, vous savez discerner le visage de la terre et du ciel ;
et ce temps-ci alors, comment ne le discernez-vous pas ? ( Lc 12, 54-56).
Les signes des temps se multiplient de nos jours,
on ne peut ouvrir un journal sans trouver de multiples invitations à y
déchiffrer la signification providentielle. Mais Jésus nous met en garde contre
une tendance assez fréquente à trouver trop facilement des rapports de cause à
effet entre les catastrophes et les responsables : "En ce même
temps survinrent des gens qui lui rapportèrent ce qui était arrivé aux
Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang à celui de leurs victimes. Prenant la
parole, il leur dit : 'Pensez-vous que, pour avoir subi pareil sort, ces
Galiléens fussent de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens ? Non,
je vous le dis, mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous
pareillement. Ou ces dix-huit personnes que la tour de Siloé a tuées dans
sa chute, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres
habitants de Jérusalem ? Non, je vous le dis ; mais si vous ne voulez pas
vous repentir, vous périrez tous de la même manière'" (Lc 13, 1 –5).
Les canicules, les massacres, les famines, les
épidémies, les changements climatiques et que sais-je encore, nous sommes
appelés, à l’école de la Bible et des Apocalypses, à les vivre, tous et chacun,
comme des appels à la repentance. Et en ce sens, la paix que nous
espérons n’est pas une utopie : "Alors Jésus se mit à leur dire : 'Prenez
garde qu'on ne vous abuse…. Lorsque vous entendrez parler de guerres et de
rumeurs de guerres, ne vous alarmez pas : il faut que cela arrive, mais ce ne
sera pas encore la fin. On se dressera, en effet, nation contre nation et
royaume contre royaume. Il y aura par endroits des tremblements de terre, il y
aura des famines. Ce sera le commencement des douleurs de l'enfantement. Soyez
sur vos gardes" (Mc 13, 5. 7-9a).
Mais "quand
ces évènements commenceront à se produire, redressez-vous et relevez la tête, car
votre délivrance est proche !" (Lc 21.28).
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