4 Octobre - St François d'Assise.
Que dire de François d'Assise en quelques
mots ?
D'autant que sa jeunesse est parsemée
de frasques plus ou moins truculentes !
D'autant que sa vie d'adulte est
parsemée de détails "charismatiques", diront certains, mais très
fantasques également.
D'autant que l'Eglise de son temps était
traversée de courants hétéroclites plus ou moins orthodoxes autant que la nôtre
sinon plus !
Mais en tout cela, François manifeste son
attachement à "Dame Pauvreté" qui le dépouille de tout pour
mieux adhérer au Christ qui lui-même s'est humainement abaissé pour nous enrichir
de sa vie divine ! Et si François peut parfois nous dérouter, sachons qu'avec
lui, disciple du Christ encore plus déroutant, cette déroute se
transforme en victoire !
"Considérons tous, mes frères, disait Frère François, le Bon Pasteur qui a enduré la
souffrance de la croix pour sauver ses brebis !
Les brebis du Seigneur l'ont suivi dans la tribulation et la persécution et la honte,
la faim et la soif, dans l'infirmité et la tentation et les autres
épreuves ; et pour ces peines, elles ont reçu du Seigneur la Vie éternelle
!
Aussi, c'est une grande honte pour nous, serviteurs de Dieu : les
saints ont fait ces œuvres ; et nous, en les récitant et en les prêchant
seulement, nous voulons en recevoir honneur et gloire !" - "Comme
si nous les avions faites nous-mêmes !". "Misère de nous !".
Celui que Dante appelle "un Soleil" (Paradis XI.50) naquit vers 1182 à
Assise, dans cette Ombrie d'une beauté rustique mais si prenante ! Son père
était riche ! C'était, diraient certains aujourd'hui, un capitaliste de son
temps ! Il devait son argent à la laine, au drap ! Il voyageait souvent en
France, un pays qu'il aimait beaucoup, ainsi que sa langue qui alors était
internationale ! Aussi voulut-il nommé son fils "Francesco" - "français" ! Et François,
comme son père, aima notre langue avec laquelle, volontiers, il s'adressait à
Dieu dans ses prières !
Son père voulait, bien sûr, initier son
fils, puis l'associer, à ses affaires. Mais le fils du marchand âpre au gain, se montrait, lui, mille fois plus habile à dépenser l'argent qu'à le
gagner selon les règles du négoce ! Fantaisiste, farceur, il menait, en
joyeuse compagnie, des farandoles folles qui se terminaient parfois par des
frasques retentissantes ! Au reste, cependant, ce prodigue ne boudait l'aumône
! A ce prince charmant, de santé un peu faible, ses parents passaient ses
fredaines. Il faut bien que "jeunesse
se passe !".
Mais les temps sont durs ! L'Italie était en proie à des luttes politiques, sociales, économiques.
François en subit moult conséquences plus ou moins importantes. Il fut fait
prisonnier à Pérouges..., tomba malade..., puis part cependant en expédition
vers les Pouilles... Toutes ces circonstances le font réfléchir. Et le Seigneur
préparait ainsi l'âme de son disciple !
Il revint au pays natal. Ses amis lui font
fête, lui donnant le "sceptre des
fols" ; mais il reste en
arrière et comme figé. "Qu'as-tu
donc ?", lui demande-t-on. Et on plaisante : "Ne voyez-vous pas qu'il songe à prendre femme ?". -
"Oui, réplique François avec un sourire qu'on ne lui connaissait pas, je songe à prendre femme. Elle est si belle,
si riche, si pure que vous ne vîtes jamais sa pareille !".
Dès lors, toute vouée à Dame Pauvreté,
sa vie changea, devint sérieuse, retirée, habile à aider les pauvres. Et voici
comment une dernière victoire le sacra chevalier du Christ qui fut pauvre mais
désormais glorieux : il chevauchait et brusquement, au détour d'un chemin, il se
trouva face à un lépreux. D'instinct, il tourna bride. Mais ce recul lui fit
honte : il revint vers le malheureux, sauta de cheval, lui donna tout l'argent
qu'il avait sur lui, et lui baisa la main, cette main déjà stigmatisée par la
pourriture !
C'était en 1206. Et vous connaissez la suite. Son père, furieux, somme son fils de se
prononcer sur l'avenir qu'il désire choisir devant l'évêque puisqu'il se
réclame de lui, et devant les représentants de la ville. François ne dit rien,
sortit quelques instants et revint pratiquement nu, rendant à son père ses hardes
et l'argent qu'il avait !
Je ne peux m'étendre sur le reste de sa
vie : la fondation des "frères mineurs", appelés tels par
esprit de pauvreté... et d'humilité ; sa rencontre avec la jeune et belle
Claire qui l'admirait depuis sa conversion. Elle décida elle aussi, de servir
Dieu sous ses ordres. C'était en 1212.
François était un enthousiaste, un poète à
la sensibilité extrême, à la délicatesse merveilleuse. Il avait faim de
Dieu, d'absolu. Il était sûr de trouver ce qu'il cherchait dans
l'application de l'Evangile pris à la lettre. Ce "littéralisme" qui,
pour le monde, est une folie, le Christ ne le demande pas à tous. Il respecte
nos oreilles peu formées encore à entendre la musique de l'au-delà. Mais les
saints, eux, - tel François - savent déjà percevoir les mélodies harmonieuses
de la cantate céleste. Et ils ne peuvent qu'accorder toute leur vie aux
vibrations des harmoniques de la mélodie divine.
C'est, me semble-t-il, ce que sut
magnifiquement exprimer François dans les derniers temps de sa vie ici-bas par
ce que l'on appelle le "Cantique des créatures".
Blessé d'amour, l'oiseau de Dieu chanta
son Créateur :
"Très haut, tout puissant, bon Seigneur, à toi sont les louanges, la
gloire et l'honneur et toute bénédiction.
Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures, spécialement messire le frère
Soleil qui fait le jour ; et tu nous illumines par lui. Il est beau et radieux
avec grande splendeur : de toi, le Très-Haut, il porte témoignage !
Loué sois-tu, mon Seigneur pour sœur Lune.. ! ...
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour frère Vent... !
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur Eau qui est bien utile et humble, précieuse et
chaste !
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour frère Feu... Il est beau et joyeux, et robuste et fort
!
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour notre sœur Mère Terre qui nous soutient et nous nourrit...
!".
Et comme le premier magistrat de la ville
d'Assise, le Podestat, était en conflit avec l'évêque, François ajoute cette
strophe :
"Loué sois-tu, mon Seigneur, pour ceux qui pardonnent pour l'amour de Toi, et soutiennent
infirmité et tribulation. Heureux ceux qui persévèrent dans la paix, car par
Toi, Très-Haut, ils seront couronnés".
Et le prestige du bon petit Pauvre, du
jongleur de Dieu, était tel que cette poésie inspirée, chantée devant les
antagonistes et les gens d'Assise, amena une réconciliation générale.
Enfin, lorsque la mort se fit proche,
François composa cette suprême strophe :
"Loué sois-tu, mon Seigneur, pour notre sœur Mort corporelle, à laquelle nul vivant ne
peut échapper... !".
François d'Assise, a-t-on dit, paraît
avoir, parmi les saints, quelque chose d'unique. Il semble - et ce n'est pas à
cause de ses stigmates qui sont effet et non pas cause - il semble que nul
n'a été plus semblable au Christ, au moins par ce désir de lui conformer, même
extérieurement, toute sa vie !
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