28e T.O. 13.
Mardi - (Rm 1.16-25)
Dès le début de sa lettre adressée aux Romains, St
Paul affirme d'emblée le fondement de sa foi, n'ayant, dit-il, aucune "honte
de l'Evangile" qui proclame !
Le prestige de la ville de Rome, de la civilisation
romaine, de la "Pax Romana" aurait pu intimider l'apôtre ! Nullement
! La richesse de l'Evangile (du
christianisme, dirions-nous) est bien supérieure à telle ou telle
civilisation alors même qu'elle serait - si c'était possible - parfaite et
bénéfique pour tous les hommes... !
Quelle fierté chez l'apôtre, fierté de sa
vie dans le Christ, fierté d'une autre "civilisation" - "car notre cité à nous, dira-t-il, est dans les cieux" (Phil 3.20) ; c'est "la cité sainte, la Jérusalem céleste" (Heb. 21.2,10) -. Fierté de la
"civilisation du Christ", si je puis dire, qui instaure une profonde
communion avec Dieu et, de ce fait, une véritable communion, communauté
entre les hommes.
Et l'Evangile que proclame Paul est l'annonce de
cet ordre nouveau, d'une "nouvelle
création" (Gal 6.15) "afin que nous menions une vie
nouvelle" (Rm 6.4), "sous le régime nouveau de
l'Esprit" (Id 7.6). Aussi,
dit-il, "l'Evangile est puissance
de Dieu pour le salut de quiconque croit".
Le salut
de Dieu qu'annonce l'Evangile est
- la délivrance du péché "qui sait si bien nous entourer",
dit la lettre aux Hébreux (12.1) et dont "le salaire est la mort" (Rm 6.23),
- et en même temps, l'acquisition de la vie
d'amitié avec Dieu qui, dès ici-bas et maintenant, s'acquiert par la foi.
Une vie d'amitié avec Dieu qui s'épanouira en "vie éternelle". "Celui
qui écoute ma parole, disait Jésus, et
qui croit en Celui qui m'a envoyé, a la Vie éternelle... Il est passé de la
mort à la Vie !" (Jn 5.24). Quoi de plus exaltant ? On comprend la fierté
de Paul !
"Et pour
le Juif d'abord, puis du Grec", dit l'apôtre qui avait déclaré
à ses compatriotes d'Antioche de Pisidie : "C'est
à vous d'abord que devait être annoncé la Parole de Dieu" (Ac 13.46). Autrement dit, le Nouveau Testament
est dans la ligne de l'Ancien, bien d'avantage, évidemment, que du paganisme.
St Paul aborde ensuite un grand thème de façon
très concise comme souvent, ce qui le rend parfois difficile à lire. C'est
le thème de "la Justice de Dieu". Car "c'est dans l'Evangile" qu'il annonce, "que la justice de Dieu est révélée,
allant de la foi à la foi, selon ce qui est écrit : 'Le juste vivra par la foi'
(Ha. 2.4)". Que comprendre par ces formules si concises ?
La
Justice de Dieu !
- Justice que l'on a trop souvent perçue comme
"justice distributive". Selon leurs actes, Dieu punit les uns et
épargne les autres par miséricorde !
- La notion biblique est différente. St Thomas
d'Aquin lui-même l'a bien compris ; il assimile la "justice de
Dieu" à l'activité divine en vertu de laquelle "il pardonne aux
pécheurs". Déjà St Anselme qu'il cite s'adressait à Dieu en disant : "Quand tu pardonnes aux pécheurs, tu es
juste ; cela te convient !".
Autrement dit, la "justice de Dieu", c'est
la fidélité de Dieu à ses promesses de salut, à sa volonté miséricordieuse
de sauver tous les hommes. Dieu s'est engagé par amour envers ses créatures.
Nombre de psaumes le disent (98.2-3 ; 40.10-11 ;
51.16-17). Et le prophète Daniel (9.16)
prie Dieu de détourner sa colère de Jérusalem au nom justement de
cette justice-là !
Mais alors qu'en est-il donc de cette colère
dont parle déjà Daniel, de cette colère qu'explicite Paul : "La colère de Dieu se manifeste contre
toute impiété et toute injustice des hommes qui retiennent la vérité captive
de l'injustice". On peut entendre l'impiété vis-à-vis de Dieu,
et l'injustice vis-à-vis des hommes. Mais sachons que l'injustice est
unie à l'impiété comme à sa source.
Cependant l'idée importante de Paul en ces quelques
mots est d'affirmer l'incompatibilité absolue entre Dieu et l'homme qui refuse
la vérité divine qu'il connait pourtant mais qu'il maintient captive dans
l'injustice de son refus à faire la vérité, cette vérité qui est de se laisser
aimer efficacement par Dieu. Et cette incompatibilité dont l'homme est
responsable ne peut finir que par la destruction du mal.
Autrement dit, la "justice de Dieu" dont parle
St Paul, ne s'oppose pas à la miséricorde de Dieu - Dieu fait toujours
miséricorde à l'homme pécheur qui se repend - ; elle s'oppose, chez l'apôtre,
à la "colère de Dieu", une expression métaphorique qui signifie
que Dieu ne peut rien contre le refus de l'homme à accueillir la vérité de son
amour. Ce sont ceux, dit St Paul, qui "ont
échangé la vérité de Dieu contre le mensonge" ! Dieu n'y peut rien !
En reprenant la métaphore, je dirais que Dieu "est en colère" de ne
pouvoir exercer sa bonté envers l'homme !
Et nous retrouvons là tout l'enseignement de
Jésus selon St Jean : "Celui qui
fait la vérité vient à la lumière" (3.21).
Il s'agit d'adorer Dieu "en esprit
et vérité" (4.23-24). Et Jésus de
prier son Père à la veille de sa mort à propos de ses apôtres : "Père, consacre-les par la vérité"
(17.17). Et il annonçait : "Lorsque viendra l'Esprit de vérité, il
vous fera accéder à la vérité tout entière" (16.13).
Dans cette "vérité", la "justice de
Dieu" atteint l'homme pour qu'absous de ses péchés, il soit
"justifié", il devienne "juste", juste exactement ce qu'il
doit être, si je puis dire, c'est-à-dire conforme à l'idéal d'amour voulu par
Dieu Créateur qui l'a pensé de toute éternité "à son image et ressemblance" !
- Ainsi donc, la "justice de Dieu" est
d'abord en Dieu ; c'est sa volonté miséricordieuse de sauver tous les
hommes, fidélité conforme à ses promesses de salut. Elle s'oppose donc à la "colère de Dieu" qui n'est
finalement que son incapacité à sauver devant le refus de l'homme qui
maintient captive la vérité de son amour.
Cependant, la capacité qu'a l'homme également d'accueillir
la vérité de l'amour de Dieu, c'est ce que l'on appelle la foi.
La foi est la clef qui permet à la "justice
de Dieu", justice toujours miséricordieuse, de s'exercer et d'agir en
l'homme pour le transformer de pécheur en "juste". Cette foi, dit
Paul, doit être permanente en allant toujours s'approfondissant, "ex
fide in fidem", dit-il, d'une foi initiale à l'épanouissement d'une
foi de plus en plus parfaite, expansive et en chacun et, de ce fait, en la
société, ce qui permettra de parvenir tous ensemble "à la cité sainte, la Jérusalem céleste".
Ainsi pour Paul, l'Evangile qu'il proclame avec
fierté n'est pas un système, une théorie, un ensemble de dogmes, mais l'entrée
spontanée de l'homme dans le dessein d'amour de Dieu à son égard, et déjà,
par la foi, une prise de possession anticipée de tous les
bienfaits divins dont jouissent parfaitement tous les Bienheureux dans la cité
céleste.
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