lundi 10 décembre 2012

Exode - Délivrance !


 Avent 2 Lundi  12-13  - 

Pour comprendre quelque peu le prophète Isaïe, il faut toujours se souvenir de la clef qu’il nous transmet pour déchiffrer l’histoire, l’histoire sainte et notre propre histoire, lorsqu’il affirme :
“Ne vous souvenez plus des événements anciens, ne pensez plus aux choses passées. Voici que je vais faire une chose nouvelle. Déjà elle pointe. Ne la reconnaissez-vous pas ?“ (Is 43.18).

Isaïe est vraiment l’homme de la foi ; il avait réuni ses disciples en “une école de la foi“ près de la petite source de Gihon en contrebas de Jérusalem, à l’est. Cette toute petite source, affirmait-il, est le symbole de la présence de Dieu, de la force de Dieu face aux grandes puissances symbolisées, elles, par des fleuves immenses, le Nil et l’Euphrate.
Aussi, près de cette petite source de Gihon, face à une coalition de l’Assyrie et du Royaume du nord (Samarie), il lance son refrain de fidélité : “Si vous ne croyez pas, vous ne vous maintiendrez pas“. -  “Si vous ne tenez pas fermes (dans la foi), vous ne serez pas affermis !“. Il y a un jeu de mots en hébreu : “Si vous ne tenez pas fermes (ta’aminu), vous ne serez pas affermis (té’aménu)!“. La racine “aman“ (d’où vient notre “amen“) signifie solidité, stabilité, évoque l’idée de soutien, d’appui, de support durable…

Et c’est avec ce slogan de foi, qu’Isaïe invite ses disciples à considérer toute l’histoire du peuple élu ; et il s’écrie en quelque sorte : Avec le Seigneur, nous allons toujours vers un “plus“. Et le Royaume vers lequel nous marchons sera plus beau que tous les paradis que nous laissons derrière nous. On va toujours vers du nouveau.  - Avec la lecture d’aujourd’hui et celle de demain, c’est comme un nouvel exode :
“Le désert et la terre de la soif, qu’ils se réjouissent. Le pays aride, qu’il exulte et fleurisse…. On verra la gloire du Seigneur, la splendeur de notre Dieu…
Aplanissez la route pour notre Dieu... ! Alors la gloire de Dieu se révèlera ; et toute chair, d’un coup, la verra, car la bouche du Seigneur a parlé…“.

Oui, il s’agit, avec Isaïe (le 1er, 2ème ou 3ème, selon les distinctions actuelles, peu importe), d’un exode qui fera sortir le peuple élu, non plus d’Egypte, mais de Babylone, qui le fera encore traverser par bien des déserts pour toujours revenir en Terre promise, en Jérusalem !

Et conjointement aux diverses délivrances accomplies par le Seigneur, il ya, il y aura toujours une progression dans une nouvelle “Alliance“, plus grande que celle du Sinaï. C’est Jérémie qui précisera :
“Voici venir des jours - oracle du Seigneur - où je conclurai avec la maison d'Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle. Non pas comme l'alliance que j'ai conclue avec leurs pères, … et qu'eux-mêmes ont rompue… Voici l'alliance que je conclurai : … Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l'écrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu et eux seront mon peuple“ (Jr 31.31sv).

On va vers une nouvelle Alliance. Et l’on peut suivre, en survolant l’Ancien Testament, les étapes par lesquelles le peuple en arrive à cette conviction que, pour s’en sortir, si l’on peut dire, il  faut une nouvelle Alliance qui ne sera rien moins qu’une nouvelle Création grâce à laquelle la Loi du Seigneur sera inscrite dans les cœurs.

Au fur et à mesure que l’on avance dans cette Alliance avec Dieu, il y a comme un leitmotiv que, malheureusement, on peut reprendre à notre propre compte : le peuple fait l’expérience de l’infidélité (comme nous tous) et, de l’infidélité, il tombe dans l’esclavage (comme nous tous). Du fond de l’esclavage, comme au temps où il faisait des briques en Egypte, il  crie vers Dieu. Et Dieu lui envoie un Sauveur. Alors la délivrance se produit !

C’est un leitmotiv qui parcourt toute la Bible (Cf. livre des Juges, des Rois etc).

Mais vient un moment où, si je puis dire, le rythme s’accélère : lorsque le peuple est déporté à Babylone, il n’est plus qu’ossements desséchés. C’est l’anéantissement. Il se rend compte qu’il faut non seulement une nouvelle Alliance, mais bien un nouvelle Création. C’est Ezéchiel  qui développera cette théologie de la régénération comme d’une nouvelle création, par l’eau et par l’Esprit (Cf. sa vision ch. 37).

Et il est bon de remarquer que cette théologie d’exode et de délivrance, cette théologie de régénération nécessaire par l’eau et par l’Esprit, sera reprise sur un plan tout à fait personnel, par le psaume 50ème, par exemple, mis dans la bouche de David après son péché avec Bethsabée qui lui a fait commettre un meurtre :
“Crée en moi un cœur pur; restaure en ma poitrine un esprit nouveau !“. (Ps 50)

Il faut, il nous faut sans cesse une nouvelle “création“ qui sera due, comme la première, à un amour divin purement gratuit. Purement gratuit, comme l’affirme souvent St Paul. Il nous faut encore lutter contre une certaine philosophie platonicienne (transmise à nous par le “pseudo-Denys surtout) qui enferme la Révélation dans certaines catégories de pensée : “Le Bien est diffusif de lui-même“, comme si Dieu avait été obligé de créer parce qu’il est Bon ! - Et bien “NON“ ! C’est par un acte purement gratuit que Dieu a créé, qu’il ne cesse de créer, et qu’aujourd’hui même, si nous le voulons, il nous recrée… en vue d’une Alliance éternelle !

“Vois ! priait David. Mauvais je suis né, pécheur, ma mère m’a conçu. Mais tu aimes la vérité au fond de l’être !“.
Et Jésus qui est la Vérité...
“Je suis venu dans le monde, disait-il à Pilate qui ne comprenait pas (comme nous-mêmes parfois) pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix“ (Jn 18.37)
...Jésus qui est la Vérité fait la vérité - tu aimes la vérité au fond de l’être ! -, à condition de l’écouter avec foi, avec cette profonde foi que proclamait Isaïe, l’homme de la foi !

Aussi, dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus, regardant la foi de ceux qui portaient un paralysé sur une civière, dit : “Tes péchés sont pardonnés !“. Et comme signe de cette délivrance d’un exode douloureux, il le fait mettre debout et marcher…

Et tous de s’exclamer : “Aujourd’hui, nous avons vu des choses extraordinaires !“. C’est le refrain de toutes les délivrances qui ponctuent tous les exodes : “Merveilles que fit pour nous le Seigneur !“
C’est le refrain des bergers de Noël !
C’est le refrain pascal !
Aussi, avec St Jean nous nous préparons à chanter ce refrain d’éternité après nos exodes terrestres : “J’entendis comme la grande rumeur d’une foule immense qui, dans le ciel, chantait : « Alleluia ! Le salut, la gloire et la puissance sont à notre Dieu ! »“ (Apoc 19.1).

Dans cette attente, restons, avec Isaïe, fermes dans la foi :
Si vous ne tenez pas fermes (ta’aminu), vous ne serez pas affermis (té’aménu)!“. Amen !

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