lundi 13 février 2012

Etre "intelligent" !

6 T.O. Lundi - (Mc 8.11-13)

Il serait peut-être convenable aujourd’hui d’être aussi bref que l’évangile est court. Je vais m’y efforcer !

Rappelons cependant que cet épisode de la confrontation de Jésus avec les pharisiens se situe juste après la multiplication des pains. Et on se souvient de toute la signification très dense de cet évènement : le pain-nourriture, la manne, ce “pain du ciel“ dans le désert au cours de la pérégrination du Peuple de Dieu vers la Terre promise, sous la conduite de Moïse… Jésus apparaît, là, comme le vrai Moïse que Dieu avait annoncé à Moïse lui-même pour conduire son Peuple : “Je leur susciterai, du milieu de leurs frères, un prophète semblable à toi, je mettrai mes paroles dans sa bouche et il leur dira tout ce que je lui ordonnerai“. (Dt 18.18).

Cette multiplication des pains est le “SIGNE“ par excellence : il dévoile l’identité de Jésus. Il est le Messie, comme le confessera peu de temps après St Pierre. Il est celui qui vient de Dieu pour réaliser la véritable Alliance de Dieu avec l’homme !

Cette multiplication prophétise encore le pain que le Seigneur donnera le Jeudi-Saint - “Je suis le Pain de vie“, avait-il dit (Jn 6.48) -, …comme il donnera sa vie, le lendemain, afin que nous puissions “obtenir la vie véritable(I Tm 6.19). Jésus donne ce pain de vie ; Il se donne lui-même. Il se donne à nous, aujourd’hui, par l’Eucharistie !

Et c’est juste après l’accomplissement de ce “Signe“ par excellence que les pharisiens, comme par hasard, sortent de leur embuscade si je puis dire, viennent discuter avec Jésus “pour le mettre à l’épreuve“ ! Ils réclament, eux, “un signe venant du ciel“, un signe à leur convenance qui puisse justifier, à leurs yeux, l’enseignement et les actes du Seigneur !

Mais Jésus n’a pas de meilleur signe que celui qu’il vient d’accomplir, un signe que les pharisiens refusent de déchiffrer. Aussi Jésus oppose une fin de non-recevoir : “Il ne sera donné aucun signe à cette génération !“. Autrement dit, l’attitude des pharisiens reproduit celle de la génération du désert qui mettait Dieu à l’épreuve en réclamant toujours de nouvelles preuves de sa puissance : "Jusques à quand ce peuple refusera-t-il de croire en moi, malgré les signes que j'ai produits chez lui ?" (Nb 14.11).

Demandons au Seigneur le don de l’intelligence : “intus legere“, savoir lire à l’intérieur des événements de notre vie les signes de la présence de Dieu. Dans la Bible, l’homme intelligent, c’est simplement celui qui cherche… qui cherche Dieu ! “Des cieux, le Seigneur s'est penché vers les hommes, pour voir s'il en est un d'intelligent qui cherche Dieu“ (Ps 14.2).

Pour cela il faut seulement être assez humble pour reconnaître d’abord que les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées : “Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes pensées au-dessus de vos pensées“. (Is 55.9). Il faut être assez humble pour savoir également que la Parole de Dieu, les pensées de Dieu ne descendent pas du ciel vers les hommes intelligents qui cherchent Dieu, sans recueillir des résultats (Is 55.10 sv). Bien plus, la Parole de Dieu, les pensées de Dieu peuvent alors, dans le cœur de l’homme intelligent qui cherche Dieu, avoir “la douceur du miel“, dit le prophète Ezéchiel (3.3) !

Les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées ! Autrement dit, le langage de Dieu est souvent paradoxal ; Dieu fait toujours éclater nos idées, si je puis dire, et “par en haut et par en bas“.
° par en haut : c’est le Dieu “Très-Haut qui crée ciel et terre“ (Gen 14.22) et toutes les merveilles qu’ils contiennent… Quel beau langage !
° par en bas : “Et le Verbe s’est fait chair“. Dieu dans une crèche, dans le village obscur de Nazareth…, sur une croix…, et jusque dans les apparences d’un peu de pain ! Quel mystère !

C’est Chesterton, je crois, qui disait que lorsque Dieu parle, toujours il fait “sauter le plafond et le plancher en même temps“. Dieu immanent et transcendant tout à la fois ! Quand Dieu parle à notre cœur, c’est d’autant plus sublime qu’on ne s’y attend pas. Et quand Dieu parle à notre cœur, c’est toujours également plus banal qu’on ne s’y attend. Dès lors, on devrait se méfier de tout sublime qui n’est pas banal. Les deux sont souvent inextricablement mêlés : il y en même temps le vent et l’Esprit, l’eau et l’eau vive, les noces et l’Alliance, le vin et le sang… etc… Dieu s’infiltre en notre vie de façon extrêmement banale et sublime en même temps ! Quoi de plus banal qu’un peu de pain. Quoi de plus sublime que la présence de Dieu ! Le SIGNE par excellence que pose Jésus !

Mais les pharisiens ne comprennent pas ce langage. Non seulement ils ne comprennent pas mais ils empêchent les spontanéités de l’intelligence d’aller d’en bas jusqu’en haut ; ils bouchent leurs oreilles comme l’aspic plaquant l’une contre terre et obstruant l’autre avec sa queue. “J’ai parlé, dit Dieu, et ils n’ont pas écouté“ ! (Is 66.4). Ils étaient dans leurs pensées, à eux !

Jésus parle très cruellement, à d’autres endroits, de ceux qui ont pris la clef de la connaissance ; non seulement ils ne sont pas entrés, mais ils empêchent ceux qui veulent entrer (Cf Luc 11.52) ! C’est terrible, cela !

Aucun commentaire: