vendredi 30 décembre 2011

Sainte Famille !

30 Décembre

Dans l'atmosphère familiale des fêtes de Noël, tournons nos regards vers la “Sainte Famille“ ! Oh ! bien sûr, certains objecteront : cette “Sainte Famille“ ne peut être notre modèle ; car, à Nazareth, c'était si… merveilleux !

Est-ce certain ? Car en ouvrant l'Evangile, nous voyons que, comme bien des mères, des pères d’aujourd’hui, Marie et Joseph furent affrontés à des contradictions, des incertitudes douloureuses, voire déconcertantes :
- Rappelons-nous la question de Marie : "Mais comment cela se fera-t-il ?"
- Et la dure nuit de Noël : "Ils ne trouvèrent pas de place à l’hôtellerie" (Luc 2.7)
- La douloureuse prophétie de Siméon : "Un glaive transpercera ton âme… !"
- La mystérieuse interrogation de Jésus, au Temple : "Pourquoi me cherchiez-vous ?" (Luc 2.49)
- La déroutante répartie du Christ à Cana : "Femme, que me veux-tu ?" (Jn 2.4)
- Et bien d’autres événements, … jusqu’au calvaire !

Et on peut penser que les longues années de silence à Nazareth - ce silence qu’a si bien glorifié le pape Paul VI lors de son pèlerinage en cette ville -, furent souvent pour Marie et Joseph une sorte de mystère déconcertant, une question permanente ! Oui, dans la maison de Nazareth comme dans toutes les maisons de la terre et en nos maisons religieuses, il y avait des problèmes, différents des nôtres sans doute, mais bien réels.

Mais je crois surtout que la solution des problèmes qui peuvent se poser à nous-mêmes aujourd’hui est la même, doit être la même que celle que Marie et Joseph ont adoptée pour eux-mêmes.
Cette solution, St Paul l’a formulée magnifiquement : "Faites vous un cœur plein de tendresse et de bonté, d'humilité et de douceur, de patience ... et par dessus tout cela, qu'il y est l'Amour : c'est lui qui fait l'unité dans la perfection" (Colos. 3-12/14)

Oui, “Qu'il y est l'Amour“… ! Le Fils de Dieu s’est incarné pour nous le transmettre ! Voilà la clef de tous les problèmes familiaux, communautaires, de nos difficultés, quel que soit le genre de vie que nous menons. Où doit donc être reçu et vécu cet Amour divin, sinon en priorité dans nos familles chrétiennes, en nos Communautés religieuses ? Comment aurions-nous l'outrecuidance de parler de paix, d'Amour à un monde divisé, désenchanté …, si au préalable, nous ne commencions pas, au sein de nos familles, de nos Communautés religieuses, à vivre de charité ?

Certes, ce n’est pas toujours facile! Mais nous le savons depuis que Dieu s’est fait homme au sein d’une famille humaine : c’est à travers les exigences concrètes, souvent banales, d’une vie familiale, communautaire que peut s’élaborer en chacun de nous cette sorte d’alchimie entre Amour divin et amour humain, en vue d’une transfiguration à la fois individuelle et collective qui sera une “renaissance“ “à l’image et ressemblance de Dieu“ !

C’est la vocation de toute famille chrétienne. C’est - bien davantage encore - la vocation de toute Communauté religieuse : témoigner de l’“Amour divin“ qui réalise la forte union entre les membres d’une même famille, d’une même Communauté, union tant physique que spirituelle…

Tant spirituelle ! Car vous le savez : certains - Religieuses, Religieux - sont appelés à dépasser les “liens du sang“ afin de mieux donner sens aux légitimes affections humaines auxquelles, eux, ils ont renoncé. Par toute leur vie consacrée à Dieu, ils désirent donner ce témoignage : l’Amour que le Fils de Dieu nous a transmis par son Incarnation doit pleinement se réaliser en nous tous, au jour éternel, lorsque nous serons invités à vivre à l’intérieur de ces relations d’Amour que s’échangent éternellement le Père, le Fils, le Saint-Esprit ! Tous, nous sommes appelés à vivre en la Famille de Dieu, en la Famille-Trinité dont, ici-bas, la “Sainte Famille“ était une image visible. Religieux, religieuses, nous avons à en témoigner !

Lorsque Dieu prit soin de constituer ici-bas sa “Sainte Famille“, il nous avertit que cette “Sainte Famille“ qu’il a désirée n’est pas fondée sur "la chair et le sang" : "à ceux qui croient en Lui, à ceux qui l'ont accueilli, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. Ils ne sont pas nés de la chair et du sang ... Ils sont nés de Dieu” (Jn 1.13) ; c'est ce que nous disait St Jean au jour de Noël. - “Ne savez-vous pas que je dois être aux affaires de mon Père ?“, demandera Jésus à Marie et Joseph. Ce n’est pas un reproche ! C’est une invitation : en accueillant le Verbe de Dieu, le Fils du Père éternel, disait dernièrement le pape Benoît XVI, nous entrons en relation filiale avec Dieu, ce qui transforme divinement toutes nos relations interpersonnelles. "Qui est ma mère, qui sont mes frères ? demandera encore Notre-Seigneur ; Ce sont tous ceux qui écoutent la Parole de Dieu". Cette fraternité divine et éternelle doit animer toutes nos relations familiales et amicales.

Aussi, notre dévotion à la Sainte Famille doit embellir toutes nos relations principalement à l’intérieur des familles chrétiennes, des Communautés religieuses. Prions à cette intention…
Prions et témoignons : même si nous avons renoncé aux affections humaines par notre vœu de chasteté, nous devons a fortiori “transpirer“, si je puis dire, de l’Amour de Dieu pour tout homme sans distinction. Et cela en évitant les deux écueils opposés dont on nous fait grief parfois :
- Ne pas accepter, au gré des circonstances ou situations, des succédanés aux affections humaines auxquelles nous avons renoncé. C’est souvent puéril, ridicule et dangereux ! Mais, par notre vie et notre voix, soyons les “hérauts“ de l’Amour de Dieu !
- Mais ne pas vivre non plus en “célibataire endurci et égoïste“. Cela arrive aussi au point que le féroce et sarcastique Voltaire qualifiait les moines de “gens qui s’assemblent sans se connaître, qui vivent ensemble sans s’aimer et qui se quittent sans se regretter“ ! C’est affreux !

Le P. Spicq, spécialiste de la “koinè“, de la langue du Nouveau-Testament, disait naguère que le mot “agapèthoi“ - qui vient du mot “agapè“ (amour) et que l’on traduit souvent par “Mes bien-aimés“ - devrait être transcrit par cette expression désormais très désuète : “Cher Révérend“. Car le mot contient à la fois 50% de respect et 50% d’affection. “Cher“, c’est l’affection ; “Révérend“, c’est le respect !

Aussi, je me permets de terminer au seuil d’une nouvelle année civile :
“Chers Révérends“, “Chères Révérendes“ : Heureuse et sanctifiante année 2012 sous le regard de la “Sainte Famille“ et dans la certitude de nous retrouver en la “Famille de Dieu“, Père, Fils et Esprit-Saint. Amen !

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