jeudi 7 avril 2011

Patiente espérance !

Carême 4 Jeudi (Ex. 32.7sv)

Le désert est le lieu de la rencontre : Dieu conduisit le peuple au désert pour parler à son cœur et faire alliance avec lui ! Et Jésus lui-même se retirait au désert pour s’entretenir avec son Père…

Mais le désert est aussi le lieu de la tentation. Et Jésus lui-même fut tenté au désert…

Le désert est le lieu l’on expérimente le mieux comme les deux pôles de la condition humaine :

- Dégagé du superflu, on peut valoriser le bon usage de la création, le juste emploi des richesses de ce monde dans l’action de grâces envers le Donateur de tous biens et dans le partage équilibré avec ses frères.

- Et, en même temps, par une sorte de défoulement, on peut expérimenter des tentations de toutes sortes : tentation de la “grande-bouffe“, de l’apostasie… : c’est l’histoire du “veau d’or“ ! Le peuple dit à Aaron : “Fais-nous des dieux qui marchent à notre tête (que nous puissions “voir“ !), car ce Moïse qui nous a fait monter du pays d’Egypte (et qui a disparu dans la montagne de son Dieu !), nous ne savons pas ce qui lui est arrivé… !“.

Et la tentation sournoise et première est sans doute l’impatience ! “Le peuple, est-il dit, vit que Moïse tardait à descendre de la montagne !“. (Ex 32.1). Il faut savoir attendre avec patiente espérance. Attendre ! Quelle grande vertu finalement ! Comme celle des vierges sages de la parabole !

Cette insistance sur cette vertu de patience (l’hypomènè) est constante dans la Bible.

Les chrétiens vivent, en effet, dans cette période crépusculaire du monde, marquée par de grandes commotions et convulsions, [“On se dressera, en effet, nation contre nation et royaume contre royaume. Il y aura, par endroits, des famines et des tremblements de terre. Et tout cela ne fera que commencer les douleurs de l'enfantement“. (Mth 24.8)],… période qui aboutira au séisme final marquant l’inauguration du Royaume de Dieu. [Alors, nous dit l’épitre aux Hébreux : “.redressez vos mains inertes et vos genoux fléchissants et rendez droits pour vos pas les sentiers tortueux !“ (12.12)]. C’est dire que les croyants ne suivent pas une voie facile, comme détendus et préservés de tout danger [“Resserrée est la route qui conduit à la vie !“, disait Jésus (Mth 7.14)].

Aussi leur est-il demandée de garder intactes leur foi, leur confiance, leur fidélité à Dieu, dans la patience, au milieu des pires difficultés : tentation, afflictions, pressions, souffrances, tribulations, persécutions : [“Paul et Barnabé affermissaient le cœur des disciples, les encourageant à persévérer dans la foi, car, disaient-ils, il nous faut passer par bien des tribulations pour entrer dans le Royaume de Dieu“. (Act 14.22)]. - A l’exemple et à la suite du Christ qui a tellement enduré [“les regards fixés sur celui qui est l'initiateur de la foi et qui la mène à son accomplissement, Jésus, lui qui, renonçant à la joie qui lui revenait, endura la croix au mépris de la honte“ (Heb 12.2-3)], … à la suite du Christ, les croyants doivent soutenir l’assaut continuel de l’adversité : “rappelez-vous ces premiers jours, où après avoir été illuminés, vous avez soutenu un grand assaut de souffrances, tantôt exposés publiquement aux opprobres et aux tribulations, tantôt vous rendant solidaires de ceux qui étaient ainsi traités“. (Heb 10.32)].

Et le support de cette endurance est bien la patience qui, selon l’apocalypse (13.10) est l’endurance des saints. Il s’agit, de toute évidence, de courage [A l’ange qui est à Ephèse est demandé d’écrire : “Tu as de la persévérance ; tu as souffert à cause de mon nom et tu n'as pas perdu courage“. (Apoc . 2.3)], …de fermeté d’âme, de support viril de la souffrance [“au point que nous-mêmes sommes fiers de votre constance et de votre foi dans toutes les persécutions et tribulations que vous supportez“. (2 Thess 1.4 – Cf. Rm. 12.12]). Et d’après la langue du N.T. et la théologie chrétienne, la patience n’endure si courageusement que parce qu’elle est tendance vers l’achèvement eschatologique, vers la venue du Christ en sa gloire. Au fond, la patience, c’est l’espérance elle-même en tant qu’elle fait briller sa radieuse lumière et déploie son énergie dans le cœur des croyants et, de ce fait, autour d’eux.

Aussi, le chrétien endurant, patient, est fier et joyeux dans ses tribulations, sachant bien que celles-ci “produisent la constance, la constance une vertu éprouvée, la vertu éprouvée l’espérance. Or, l’espérance ne déçoit pas (Rm 5.3-5).

Le Siracide avait prescrit : “Dans toutes tes actions, souviens-toi de ta fin, et tu ne pècheras jamais“ (7.36). Pour les chrétiens, l’attente de la Parousie, de la rencontre avec le Christ est l’un des motifs de sa patience et l’un des grands moyens de sa sanctification, car nul, en effet, ne peut espérer voit le Seigneur s’il n’est sanctifié (Héb. 12.14). Aussi, St Jean affirme : “quiconque a une telle espérance en le Christ (dans la patience) se purifie, comme Lui-même, le Christ, est pur !“ (I Jn 3.3).

Au fond, l’espérance attend…, elle attend Dieu de Dieu. Aussi, c’est déjà avoir Dieu que de l’attendre… même dans la dure patience. Et Péguy avait bien raison : “La foi que j’aime le mieux, dit Dieu, c’est l’espérance“…, dont la patience est le flambeau lumineux qui éclaire toute la maison !

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