lundi 11 avril 2011

Justice de Dieu

Carême 5. Lundi (Daniel 13.1sv)

Le livre de Daniel se présente comme l’œuvre d’un prophète contemporain de la captivité à Babylone (6e s.). Epoque affreuse : les déportés ne pouvaient plus rendre un culte au “Dieu Unique !“. Mais époque qui se termine merveilleusement lorsque Cyrus, roi de Perse, fait la conquête de l’empire babylonien. Il est comme un envoyé de Dieu puisqu’en 538 il permet aux Juifs de revenir à Jérusalem pour rebâtir le temple ! (Cf. II Chro. 36.22sv). Et le livre de souligner, bien sûr, que ce sont la foi et l’espérance du peuple qui lui permirent de durer malgré les épreuves et d’être enfin libre !

On sait maintenant depuis longtemps que la rédaction de ce livre date de l’époque des persécutions d’Antiochus Epiphane (moitié du 2ème siècle) qui provoqua la révolte des Maccabées. Ainsi le livre de Daniel (dans un style apocalyptique) veut dévoiler, révéler (c’est le sens du mot “apocalypse“) quel sera le dénouement heureux de cette nouvelle persécution en méditant sur le temps de l’exil à Babylone ! Comme autrefois, Dieu prépare la victoire finale contre les forces du mal !

Il est à remarquer d’ailleurs que c’est le livre de Daniel qui est le plus explicite, dans l’Ancien Testament, sur la résurrection des morts, à propos des martyrs de l’époque (Cf Dan. 12.2sv). Aussi, il n’est pas étonnant que le livre de Daniel soit largement cité dans le Nouveau Testament et surtout dans l’Apocalypse de St Jean pour souligner qu’en Jésus Christ la victoire divine sera toujours éclatante, et sur la mort elle-même… “O Mort, où est ta victoire ?“, s’exclamera St Paul.

Autrement dit, le livre de Daniel veut affirmer que Dieu est le Maître et de l’histoire du monde et de notre propre histoire personnelle. Dieu est le “Juge impartial“ : “Dan – El“ : “Daniel“ : “Dieu Juge !“.

Et cette pensée est illustrée par l’épisode de notre lecture : l’intervention de Dieu, à travers son prophète Daniel, en faveur de Suzanne injustement accusée, persécutée. Je dirais avec plaisanterie et humour que lorsque j’étais tout jeune - à une époque encore de réserve, si je puis dire ! - on remplaçait facilement cette histoire de Suzanne jugée sans doute, à l’époque, un peu scabreuse. Ce n’était pas une lecture très “liturgique !“. C’était dommage, car le livre veut souligner que Dieu n’abandonne pas les innocents et il punit les coupables !

Aussi, le livre souligne avec complaisance l’importance de la Loi…, de la Loi de Moïse…, de la Loi exemplaire de l’Alliance, sans pour autant parler de la probité des juges humains. C’est classique : ce n’est que lorsque le juge ou le prêtre d’ailleurs ont des défaillances que l’on fait toujours semblant de confondre le juge avec la justice ou le prêtre avec Dieu pour habituer les hommes à se défier de la justice ou de Dieu lui-même ! ! Il me semble que les mass-médias s’y entendent pour cela. Ils aiment faire des amalgames faciles !

Dans l’évangile où l’intégrité des juges est davantage louée, Jésus cependant élève toujours le débat. Il entraîne ses auditeurs plus loin, sur le terrain de la “Justice de Dieu“. “Dieu ne ferait-il pas “justice“ à ses élus qui crient vers lui, jour et nuit ?“ (Luc 18.7). Une phrase digne du livre de Daniel !

Mais comment crient-ils ? Car la prière n’a pas pour but de rétablir le droit ni l’ordre juste des salaires, des revenus, des impôts… , etc. “Qui m’a établi pour être votre juge ou pour faire vos partages ?“, demandera Notre Seigneur (Luc 12.14). Cela est de la responsabilité des hommes eux-mêmes ! La prière qui ne doit pas être un marchandage établit l’ordre moins entre les choses qu’à l’intérieur du cœur humain. La prière, c’est “être avec Dieu“ ; c’est “s’ajuster“ à Dieu. C’est “s’apprivoiser“ à lui comme il s’est “apprivoisé“ à nous en envoyant Jésus, son Fils, parmi nous, afin que soyons “justes“ en nous “ajustant“ à lui ! A l’exemple de Daniel, “Dan-El“ : “Dieu m’a jugé“, “Dieu m’a ajusté“, pourrait-on interpréter.

Cet “ajustement“ du cœur qui “s’ajuste“ à Dieu qui seul “justifie“, dira St Paul, est une force de vie, la force créatrice de l’Esprit Saint qui continue de supprimer en nous-mêmes les désordres afin que tous puissent chanter la gloire de Dieu qui fait toutes choses “justes“ ! Car il faut bien le reconnaître : l’homme peut rendre la justice, mais c’est Dieu qui fait la justice. Dieu fait la justice comme il fait le monde ; Dieu fait toujours la justice comme il recrée le monde en Jésus Christ… qui nous appelle à nous “ajuster“ à Lui ! Le Savons-nous suffisamment ?

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