dimanche 19 décembre 2010

St Joseph

4e Dimanche de l’Avent 10-11/A

«Voici quelle fut l’origine ( la “Genèse”) de Jésus Christ.
Qui dit “Genèse” dit “commencement”. C’est le grand mot solennel du “commencement“ du monde, dans le livre de la Bible. Jésus, au moment où il s’insère dans l’histoire humaine, est le véritable “commencement”, le “commencement et la fin”, de toutes choses, de tout être, de chacun de nous. “Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute la plénitude…“ (Col 1.19). C’est en son commence-ment que nous avons notre origine et notre fin. Il nous faut donc faire très attention à cette “histoire humaine“, à ce “commencement“ humain du Fils de Dieu. Et aujourd’hui, puisque l’évangile nous y invite, méditons avec Joseph, ce grand inconnu dont on ne parle que très peu et qui est pourtant une grande figure de l’Avent.

«Marie avait été accordée en mariage à Joseph.»
Ah ! Cette histoire humaine de Joseph ! Ce fut, c’est toujours un sujet de plaisanteries faciles. Pauvre Joseph considéré comme “naïf“ et “victime“ ! C'est vraiment se moquer de l'Evangile et ne rien comprendre à cette union admirable entre Marie et de Joseph. C’est cette union conjugale qui est la “genèse”, le “commencement” et qui doit être le modèle de tous ceux qui s’unissent chrétiennement !
Cette union entre Marie et Joseph fut, sans conteste, celle qui “au commencement“, à “la plénitude des temps“ a le plus marqué l'histoire universelle…, celle qui a été la plus “féconde“ de toutes les unions. Puissent tous les couples invoquer et prier Marie et Joseph !
Donc, au départ, au “commencement”, il y a ce couple, ces deux Jeunes, entre 15 et 20 ans probablement, qui font ensemble ce merveilleux projet de devenir époux.

«Or, avant qu'ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l'action de l'Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme “juste“, ne voulait pas la dénoncer; il décida de la répudier en secret.»
Voici la deuxième phase : un projet qui semble brisé... une crise apparemment grave comme l’on dit, quand Joseph apprend que sa fiancée est enceinte. Il faut comprendre la souffrance affreuse qui se cache derrière la sobriété de l'Evangile ! En cette situation, Joseph “décide“ de ne pas épouser Marie. Et cette “décision“, est celle d'un homme “juste“.

De multiples interprétations ont été données de cette “justice“ de Joseph.
+ St Justin pense que Joseph, pas suffisamment informé, est juste parce qu'il veut appliquer la Loi (Cf. Deut 22/23). Mais peut-on penser que Joseph ait eu un soupçon d'adultère puni par la Loi ?
+ St Jérôme, lui, conclut que Joseph est “juste“ parce qu'il veut “renvoyer Marie en secret“. Mais, là encore, est-il juste d'abandonner à son sort une innocente ?
La seule solution à cette question est suggérée par le texte lui-même..., comme très souvent. En effet, avant même d'exprimer le débat psychologique de Joseph, Matthieu, très clairement, suppose connue la “conception virginale“ de l'enfant : “enceinte par l'action du Saint-Esprit“. Il est donc vraisemblable que Marie avait fait la confidence à son fiancé. De plus, le doute n’a pas effleuré Joseph : il connaît trop bien Marie, sa totale soumission à Dieu, sa pureté, sa sainteté… Le moindre soupçon serait infamant, non pas pour Marie, mais pour le soupçonneux, comme cela arrive souvent. La douleur de Joseph ne vient donc pas de là.

Joseph est “juste“ par un sens aigu du mystère, c’est-à-dire de Dieu qui se rend présent à l’homme. Dieu a fait de Marie son bien, pour un dessein qui passe toute vue humaine.
Devant Marie, devant l’œuvre de Dieu en Marie, Joseph a le recul sacré de tous ceux qui prennent conscience de leur indignité, comme les justes de l’A.T. : “Je suis un homme indigne“ disent souvent ceux que Dieu appelle à une mission…, ou comme Pierre : “Retire-toi de moi, parce que je suis un pécheur“. Quel rôle pourrait-il jouer Joseph, là où Dieu est le grand Acteur ? Et, comprenant alors que cet enfant vient de Dieu, il ne veut pas s'arroger des droits sur cet enfant qui n'est pas le sien... Il reconnaît, obscurément, la “paternité“ de Dieu ; il ne doit pas, lui, Joseph, passer avant Dieu. Aussi doit-il renoncer à son projet de couple. Comme Abraham qui se sacrifie à Dieu, Joseph est “juste” : il décide de se sacrifier. Sans doute pouvons-nous trouver là le motif de l’attitude permanente de Joseph : le silence, un silence qui adore…

«Il avait formé ce projet, lorsque l'“Ange du Seigneur“ lui apparut en “songe“, et lui dit : “Joseph, Fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse...“.
C'est donc Dieu, lui-même, qui intervient pour modifier le projet de Joseph. Et pour souligner l'aspect “religieux“, “divin“, de cette nouvelle décision de Joseph, Matthieu coule sa “révélation“ dans le “genre littéraire“ bien connu des “annonciations“ : “L’ange du Seigneur lui apparut…“.

Et quand Dieu intervient, souvent il ne demande pas autre chose que ce que l’on voulait faire, mais de la faire autrement. Joseph avait donc décidé de “renvoyer“ Marie, de renoncer à être le “père“ de l'“enfant conçu en Marie“. Et Dieu agit pour lui comme pour son grand ancêtre dans la foi, Abraham : ce Père des croyants, en acceptant de sacrifier son fils Isaac, reçoit finalement ce fils comme un “don de Dieu“ (Gen. 22). De même, à Joseph qui vient de renoncer à un fils, l'ange de Dieu lui demande de le recevoir autrement, comme un “don“ dans la foi. Ce fils auquel il a renoncé “selon la chair“, il va le recevoir comme “fils de la promesse“ (Cf. Gal. 4/23.28).
Et Joseph comprend parfaitement ce qui arrive en Marie :
- Sa maternité virginale est le signe du mystère de ce Fils qu’il reçoit de Dieu, du Dieu trois fois saint !
- Elle est le signe de la toute-puissance de Dieu à qui “rien n’est impossible“. Le salut, la vie, ne vient pas des capacités humaines, mais de Dieu, par son Esprit Saint “qui est Seigneur et qui donne la vie“. Aussi l’Evangéliste ajoute :

«Certes, l'enfant qui est engendré en elle vient de l'Esprit Saint. Mais elle mettra au monde un fils auquel tu donneras le nom de Jésus.»
Non seulement Joseph n’a pas à s’effacer, mais au contraire, il doit collaborer à l’œuvre de Dieu. Dieu a besoin de lui. Dieu lui confie un double rôle : - “prendre chez lui Marie“; - et “donner le nom à l'enfant“.

Décidément, Joseph n'a rien de ce personnage pâlot et passif qu'on lui attribue parfois.
- C'est un vrai “juste”, c’est-à-dire un homme qui s’ajuste à Dieu.
- Un croyant à qui il est demandé une “foi“ à la mesure de l'événement fantastique qui se prépare.
- Et, ajoutons, un “époux“ en parfaite communion avec la foi de son “épouse“.
Aujourd'hui, la psychologie moderne insiste sur la notion de “co-responsabilité”. Marie et Joseph vivent une vie de couple extraordinairement uni : ils “dialoguent“, mais au niveau le plus profond, cherchant l'un et l'autre la volonté de Dieu, adoptant la même attitude... qui est de dépasser les vues simplement humaines, pour croire à un avenir que Dieu ouvre devant eux. Et ceci, malgré la les apparences contradictoires…
- Ainsi, dans nos vies, il arrive qu'une situation contraignante, inattendue qui semble tout briser, soit, en fait, l'appel à un nouvel accueil de la volonté de Dieu. Mais c'est dans la nuit de la foi... comme en un “songe“ nocturne, à l’exemple de Joseph.

«Quand Joseph se réveilla, il prit chez lui son épouse et il ne la «connut» pas jusqu'à ce qu'elle eût enfanté un fils auquel il donna le nom de Jésus.»
Nous retrouvons maintenant, enfin, le projet de ce couple qui voulait se former au début du récit (“Marie accordée en mariage à Joseph“)..., ce projet un instant brisé... et qui se noue maintenant, mais tout autrement que prévu (“sans qu'il la connût“).
Ce texte est d'une clarté aveuglante, comme tout ce qui est divin : Joseph, par décision divine librement consentie dans la foi, reçoit une vraie paternité sans relations charnelles. Tout cela est mystère, comme Dieu est mystère, comme la “Création“ est mystère, comme la “Résurrection“, comme l'“Eucharistie“ est mystère. Dieu est tellement grand ! Immensément !

On retrouve, là, cette grande réflexion faite à Sara et à Marie : “Y-a-t-il une chose trop prodigieuse pour le Seigneur ?“ (Gen 18.14), car “rien n’est impossible à Dieu !“ (Lc 1.37).

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