samedi 25 décembre 2010

Etre là !

Noël 2010 Jour

Hier soir, avec les enfants de la paroisse et avec vous-mêmes, je me suis permis de vous transmettre tous mes vœux de Noël avec l’humour amusant d’un conte de Noël. Ils n’en étaient pas moins sincères pour autant !

Mais ce matin, il y a, dans l’évangile, une phrase exclamative qui doit fortement et sérieusement nous interpeler : “Il est venu chez les siens ; et les siens ne l’ont pas reçu !“

Pourtant, pourtant, au temps du Christ, tout le monde attendait le Messie ; Tout le monde savait que c’est de Bethléem qu’il devait venir. Pendant la grande fête de Soukkot rapportée par Jean (ch. 7), on s’interroge sur Jésus ! Est-il le Messie ? Et certains de rétorquer : “Est-ce de la Galilée que le Messie doit venir ? l’Ecriture de dit-elle pas qu’il viendra de Bethléem…“. (Cf. Michée 5.2). Et, à l’arrivée des Rois-Mages, Hérode interroge les scribes qui répondent : Mais tout le monde le sait : c’est de Bethléem que doit venir le Messie ! C’est tellement évident ! … ! Pourtant - et St Matthieu le souligne intentionnellement -, si les Scribes savent la Bible par cœur, s’ils savent, à l’avance, le lieu de la naissance du Christ…, ils ne sont pas là à la crèche de Bethléem ! Eux qui sont tout proches, ils ne se dérangent pas ! Alors que les Mages qui ne connaissent pas la Bible, ces païens, ces “akoum“, ces adorateurs d’étoiles, eux, viennent de loin et arrivent à la crèche !

Comment cela peut-il se faire ? Le peuple élu, le peuple le mieux préparé, depuis des siècles, par une spéciale pédagogie divine à la venue du Messie, n’est pas là ! Ses représentants les plus qualifiés ne se dérangent pas, restent indifférents… et seront même hostiles au Christ ! C’est toute la grave interrogation qui habitera les premiers chrétiens de l’Eglise de Jérusalem qui étaient d’origine juive ; c’est l’immense souffrance qui habitera le cœur de St Paul : “Il est venu chez les siens ; et les siens ne l’ont pas reçu !“ Mais n’est-ce pas une question permanente ? Le Messie est venu… Mais il vient toujours ! Allons-nous à la crèche où Dieu veut naître encore aujourd’hui ? Ou sommes-nous comme les scribes qui ne se dérangent pas ?

Pour répondre, regardons en ce jour la crèche, regardons, ceux qui s’y trouvent pour être leurs compagnons !

- Il y a d’abord Marie ! Bien sûr ! Evidemment ! Mais Marie, c’est celle qui est, qui sera toujours là ! Elle est là depuis les origines. Elle est là après la naissance ; elle est là à la Présentation, au recouvrment au Temple. Elle est là aux noces de Cana, le premier des signes de Jésus. Elle est là au pied de la croix. Elle est là à la Pentecôte au point de départ de la prédication apostolique, à la naissance de l’Eglise... Elle est là tout le temps ! Elle est toujours là. Et il n’est pas étonnant que l’évangéliste précise à propos des Mages : “Ils trouvèrent l’enfant avec Marie, sa mère“. - Quand on veut trouver le Christ, allons vers Marie. En empruntant, notre chapelet à la main, le cœur, l’intelligence, la sensibilité, l’intuition de la Vierge-Mère, nous arriverons à la crèche. Et Marie qui est toujours là nous fera connaître le Verbe Incarné en qui habite la plénitude de la Divinité !

- Il y a St Joseph ! Il ne dit rien, Joseph ! Mais il est là, ce grand silencieux ! On dirait que Jésus a voulu avoir près de lui, dès sa venue en ce monde, une personne qui n’avait pas besoin de dire et redire, de paraître, mais simplement d’être, d’être là, d’être comme une image de son Père céleste qui, sans cesse, EST et n’a pas besoin de paraître. Etre dans la consistance de son être… Pour parvenir un jour à être véritablement, uniquement ! Etre avec celui qui EST ! Etre avec Celui qui EST !

- Il y a l’âne et le bœuf ! On ne peut concevoir une crèche, sans un âne et sans un bœuf ! Mais d’où sortent-ils ces deux-là ? On n’en parle pas dans l’Evangile. Ils sortent du prophète Isaïe. Et comme tous les prophètes qui avaient annoncé ce qui arriverait à la plénitude des temps, Isaïe affirme d’emblée : “Le bœuf connaît son propriétaire, ete l’âne la crèche de son maître ! Israël ne connaît pas ! Mon peuple ne comprend pas !“ - “Il est venu chez les siens ; et les siens ne l’ont pas reçu !“ – Soyons un peu comme l’âne et le bœuf, ne vous en déplaise. Ils sont là, eux ! Et s’ils s’éloignent parfois, ils savent toujours retourner vers leur maître !

- Et bien sûr, il y a les bergers… nombreux ! Les bergers, toujours empressés à favoriser le bien-être du troupeau, appliqués à écarter ce qui peut lui nuire, toujours attentifs à la réalité… sont moins victimes de cette maladie dont nous sommes tous victimes : le divertissement, l’aveuglement. C’est quand Moïse était berger qu’il fait l’expérience de la rencontre, parce qu’il a été attentif à un buisson en feu qui ne se consumait pas ! Etre attentif aux événements providentiels pour être là quand Dieu passe,…

Car il s’agit de discerner la présence de Dieu. Il s’agit d’“être là“ sur la trajectoire de Dieu qui passe. Avez-vous remarqué cette toute petite phrase de St Luc à propos de Marie et de Joseph : “Alors qu’ils étaient là…“ ! Oui, il faut souligner cette incise ! “Or il advint, comme ils étaient là… !“. Et on peut deviner par ces quelques mots l’allusion à la concision de l’hébreu : “Etre là !“ - “Etre !“ - “Je suis“ - “Je suis là !“. C’est ainsi que Dieu lui-même s’était révélé à Moïse ! “Je suis !“ Il faut être, avant tout ! Et non paraître !
Il y a une phrase terrible, en ce sens, chez le prophète Jérémie et qui doit nous frapper : “Les dépositaires de la Loi, dit Dieu, ne m’ont pas connu ; Moi !“ (2.8). Encore une fois, on peut connaître la Bible par cœur et ne pas être là quand se présente celui dont toute la Bible parle ! On peut accumuler des connaissances et des connaissances et ne pas être là sur la trajectoire de “Dieu qui passe“, sous l’aspect du cheminot qui se présente, ou bien plus, du plus petit de la famille qu’on ignore, de celui que l’on croise tous les jours, indifférent… et que sais-je encore. Etre là quand Dieu passe : “comme ils étaient là… !“ Dieu passe toujours, car il est venu nous rencontrer pour nous prendre à sa suite, tels que l’on est, là où nous en sommes, à notre niveau, et nous conduire afin de voir un jour Celui qui est toujours là, de voir Celui qui nous voit sans cesse !

“Vous trouverez un nouveau-né enveloppé de langes et couché dans une crèche !“ - “Il est venu chez les siens ; et les siens ne l’ont pas reçu !“
Est-ce que nous-mêmes, nous nous serions dérangés ? Voyons ! Dieu dans une crèche ! C’est si déconcertant ! Les promesses de Dieu se réalisent toujours, mais jamais comme notre raison raisonnante aurait pensé qu’elles devaient se réaliser. Un Dieu si déconcertant ! Je suis persuadé que même Marie a du être déconcertée, que dans sa foi, elle a dû se poser bien des questions, mais sans qu’aucune de ces questions ne devienne un doute ! Parce que “méditant sans cesse en son cœur“ paroles et événements, elle était là ! Etre là quand Dieu passe ! Il est venu ! Il vient ! Il viendra… toujours ! Etre là !

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