mercredi 3 février 2010

Le facteur de Dieu ! - 4 T.O p. Mercredi - (Mc 1.6sv)

J’ai déjà, il me semble, parlé de la seconde faute de David : oublier que Dieu seul est roi, qu’il n’en est que le lieutenant. C’est toujours le même problème : l’homme est bien le roi de la création ; mais il oublie d’en être le prêtre : tout ramener à Dieu dans un élan de reconnaissance, de bénédiction. “Que le Béni nous bénissent !“. Nous oublions si facilement cette prière qui sollicite une fécondité divine à tout ce que nous pouvons accomplir !

Aussi, je m’attacherai à l’évangile…, et avec un peu d’humour ! On m’a raconté - ou j’ai lu, je ne sais plus - : c’était aux temps des prêtres-ouvriers ! Dans un gros bourg de l'Ouest, l'un d’eux était facteur. Un jour, il célébrait un enterrement. A la sortie du cimetière, un ancien murmura à l'un de ses amis : “C'est incroyable ! Les prêtres ne veulent plus rien faire ! Voilà maintenant qu'ils font enterrer les morts par le facteur !” L'interlocuteur répliqua : “Mais c'est un prêtre... !” – “Allons donc ! C'est le facteur, il vient me porter le journal tous les matins ; et d'ailleurs il est très gentil...”.

Jésus n'était pas facteur, il était charpentier. Le mot grec que l'on traduit par “charpentier” a un sens plus large : il désigne l'ouvrier qui travaille le bois, la pierre ou le métal ; en fait il s'agissait souvent de “construction de maison”. Peu importe !

Et voilà le maçon qui prend la parole dans la synagogue ! C’est incroyable ! Il n'avait pas fait d'études particulières, il n'avait pas été formé par quelque grand maître. Comme le curé d’Ars dont on accueille les reliques ! “D'où cela lui vient-il ?” Ses paroles sont empreintes de sagesse, on dit même qu'il a fait des miracles ! Mais c'est tout de même le maçon, on connaît la famille, ce sont des gens comme tout le monde !

Ainsi, on se hâte de ramener Jésus à l'humanité commune. Ce que certains faisaient aussi pour le Curé d’Ars ! On regarde vers les siens, vers le passé, plutôt que de se laisser “interpeller” par une parole, un événement, par le surgissement d'un possible avenir tout neuf !

L'évangile nous dit que Jésus ne put accomplir “aucun miracle” dans son village et qu’il s'étonna de leur manque de foi”. Il dit : “Un prophète n'est méprisé que dans son pays, sa famille et sa propre maison”.

A Nazareth, Jésus n'était que le maçon, le camarade, le cousin. Il ne lui était pas permis d'être autre chose. Il était réduit à sa situation professionnelle, à son rôle social, à sa place dans la famille. Que de fois les êtres sont emprisonnés par une étiquette, une épithète, une réputation. Ce “pauvre curé d’Ars“ pouvait-il avoir une capacité hors du commun ?

Pour que Jésus puisse être autre chose que le gars du bâtiment ou le fils de Marie, il aurait fallu le regarder, et attendre de lui quelque chose d'unique : avoir “foi” en lui ! C’est classique, n’est-ce pas ?

Or, Jésus vient toujours étonner les siens, et les déranger. On veut souvent l'enfermer dans des formules, des programmes ou dans un merveilleux que l’on imagine. Or, pour lui, faire des miracles, c’est toujours pour bouleverser la vie, faire un retournement, une “conversion” des cœurs. Et cela de mille manières, souvent très discrètes.

Un autre saint - du 18ème siècle -, le Père de Caussade, écrivait : “Le Christ se présente à nous sous un déguisement : les uns ne Le reconnaissent pas, les autres sont d'autant plus prévenants que le déguisement est plus minable”. Quels sont les déguisements de Jésus ? Oh, ce n’est pas toujours celui du facteur, mais plutôt un événement qui nous surprend, un visage qui lève vers nous son attente, un de ces petits “riens” qui font la trame de la vie et que l’on remarque soudainement... A chacun de percer les “déguisements” de Jésus. N’avait-il pas pris le déguisement du “pauvre curé d’Ars, apparemment si minable ?

A chacun de reconnaître les envoyés du Seigneur. Car à beaucoup - à nous -, Jésus dit comme à Ezéchiel : “Fils d’homme, je t’envoie…”, que l‘on soit facteur ou non ! Et n’allez pas chercher très loin : ce peut être - ce doit être d’ailleurs - un mari pour son épouse et réciproquement. Ce peut être, soudainement, un ami, un compagnon de travail. Oh, bien sûr, tous ceux-là, comme Paul, comme chacun de nous, ils portent en eux une écharde qui les rend faibles. Mais malgré cette faiblesse, ils portent en eux un trésor : le Christ qui vient à nous. Oui, disait encore St Paul, nous sommes comme des poteries fragiles qui portons un trésor en nous-mêmes.

En sommes-nous conscients ? Car Dieu nous envoie beaucoup de messages tout au long de nos jours. Mais, souvent, nous les enfermons dans un cadre trop insignifiant. Comme les gens de Nazareth, nous n’avons plus l’oreille attentive. Et si, durant ces jours de visite du curé d’Ars, nous étions plus attentifs aux divers déguisements que Dieu prend pour nous adresser sa Parole ?

Je ne sais si aujourd’hui, il y a beaucoup de facteurs qui soient prêtres ! Ce que je sais, c‘est que nous sommes tous appelé à transmettre les messages et les lettres que le Seigneur veut adresser à chacun de nous. Le Saint Curé d’Ars avait bien compris cela !

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