lundi 15 février 2010

Incompréhension ! - 6 T.O p. Lundi – (Mc 8)

Je vous propose de lire, de méditer chez vous tout le chapitre 8ème de St Marc qui va être interrompu, pour nous, par le “temps du Carême“ !

Notre récit se situe juste après la multiplication des pains ! Normalement, pour un Juif qui se souvient de la manne, du désert, de Moïse, de la pérégrination du peuple dans le désert, etc…, Jésus apparaît là comme le vrai Moïse que Moïse lui-même a prédit (Cf. Dt. 28). Or, c’est à ce moment-là que les pharisiens - comme par hasard ! – “sortent“, discutent avec Jésus. Mais ils n’admettent pas la signification de la multiplication des pains ! Eux qui auraient du comprendre, ils demandent un autre “signe“ !

Jésus, énervé de leur opposition systématique, s’écrie : "… Il ne sera pas donné de signe à cette génération." – “Et les laissant là, il s'embarqua de nouveau et partit pour l'autre rive“. Autrement dit, Il les “plaque“ sèchement, comme on dit vulgairement !

C’est alors que dans le récit, il y a un événement un peu curieux mais fort intéressant (8.14sv) : les disciples avaient oublié de prendre des pains ! Or Jésus, lui, leur faisait cette recommandation : "Ouvrez l'œil, gardez-vous du levain des Pharisiens !". Mais eux de faire encore cette réflexion : ils n'ont pas de pains ! Ce qui “énerve“ Jésus : "Pourquoi faire cette réflexion, que vous n'avez pas de pains ? Vous ne comprenez pas encore ? Avez-vous donc l'esprit bouché, des yeux pour ne point voir et des oreilles pour ne point entendre ?" – Et il leur donne à nouveau une explication de la multiplication des pains !

Cette scène montre que Jésus a bien connu la condition humaine… toute entière ! Quand on a fortement discuté avec quelqu’un, après l’entrevue, les arguments continuent à tourner dans la tête… ! Ainsi, Jésus, après l’affrontement avec les pharisiens, pense avoir quelque réconfort auprès de ses apôtres qui, eux aussi, auraient dû comprendre. Et voilà que Jésus se retrouvant dans la barque avec eux, ceux-ci s’aperçoivent qu’“ils avaient oublié de prendre des pains” : “Ils n’avaient qu’un seul pain avec eux dans la barque”. Alors que Jésus, pensant toujours à la discussion avec les pharisiens, leur dit : “Ouvrez l'œil et gardez-vous du levain des Pharisiens”. Alors, les disciples se regardent et constatent qu’ils ont bien oublié le “pique-nique” !

Méprise ! Il y a deux registres de pensées : Jésus préoccupé de la signification de la multiplication des pains qui a provoqué la réaction négative des pharisiens … ; et registre de pensées des apôtres qui en restent, eux, au pain matériel… !

“Ne comprenez-vous donc pas ?” - On sent combien Jésus se sent incompris non seulement de ceux qui ne sont pas d’accord avec lui, non seulement de sa famille, de ses proches… mais aussi de ses apôtres. Jésus s’enfonce et s’enfoncera de plus en plus dans la solitude de sa mission messianique.

La pensée de Jésus évolue toujours dans la dimension verticale de signification. Le signifié est pour lui plus important que le signifiant : il y a le vent et l’Esprit ; l’eau et l’eau vive ; le vin et le sang ; les noces et l’Alliance… Ici, c’est la même ambiguïté. Les apôtres raisonnent au plan horizontal : l’eau, c’est H2O ; ça sert à laver, à boire. Mais la signification de l’eau ?… Or Jésus pense dans la dimension de la signification. Le levain des pharisiens, c’est cette doctrine qui empêche les spontanéités spirituelle de jaillir, qui bouche l’intelligence, qui empêche… ! Jésus parle très cruellement, à d’autres endroits, de ceux qui ont pris la clef de la science, qui empêchent les autres d’entrer et qui ne sont pas entrer eux-mêmes. C’est terrible, cela !

Alors dans St Marc - il est le seul à le rappeler -, à Bethsaïde, il y a la guérison d’un aveugle. Dans l’évangile, il y a beaucoup de guérison d’aveugles. Ce sont les aveugles qui ne voyaient pas clair et qui se mettent à voir clair. Leur l’intelligence accède à la compréhension du dessein de Dieu, à la folie de Dieu qui est plus sage que la sagesse des hommes.

Nous avons tous besoin d’un tel miracle. Nous sommes tous “bouchés”. Nous avons des yeux pour ne pas voir…, des oreilles pour ne pas entendre… !

En St Jean, Jésus avait dit : “Ma chair est une vraie nourriture… !”. On trouve ce langage trop dur. Et beaucoup s’en vont… Jésus dit alors aux Douze : "Voulez-vous partir, vous aussi ?". Simon-Pierre lui répondit : "Seigneur, à qui irons-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Nous, nous croyons, et nous avons reconnu que tu es le Saint de Dieu".

Nous sommes là comme au sommet de la manifestation de Jésus… La multiplication des pains, c’est le “GESTE“ de Jésus, par excellence, en lequel il se met tout entier, Geste qu’il nous a laissé en mémorial, Geste auquel on le reconnut après sa résurrection.

Et quand on est prêtre, chrétien, on ne se lasse pas de faire ce Geste en la personne du Christ, en offrant le sacrifice eucharistique. Parce que c’est toute la condition humaine, royale et sacerdotale, qui est comme restaurée. Comme c’est consolant, en notre vie, de pouvoir faire un geste auquel déjà il ne manque rien : “Par lui, en lui, avec lui… dans l’Esprit Saint, tout honneur et toute gloire” !

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