27.09 :
St Vincent de Paul (1)- (La personnalité de M. Vincent est si
riche
que mon
“mot“ sera en deux épisodes ! Prions ensemble ce grand Saint qui est bien
d’actualité !
Autant le personnage “Monsieur Vincent“ est assez
pittoresque, autant sa vie est digne d’un roman d’aventures ! Au moins il
est des saints avec lesquels on ne peut guère s’ennuyer !
1. Jeunesse.
Il naquit en 1581 dans les Landes de parents
agriculteurs sans fortune. Il n’avait donc aucune noblesse malgré la particule
qui précède son nom (1).
L’enfant manifeste de bonnes dispositions
intellectuelles. Aussi, ses parents se privèrent pour l’envoyer étudier à
Dax ! Avisés, ils espéraient que ce troisième enfant sur six pourrait être
un jour la providence pour sa famille !
De fait, très vite, il se fit remarquer par ses
facilités intellectuelles ; lui-même d’ailleurs - paraît-il - en était
conscient. Un défaut de mauvais augure qu’il rachètera plus tard par sa très
grande humilité ! Aussi, réussit-il à gagner Toulouse dont la faculté de
théologie était célèbre. Il y restera sept ans ! Durant cette période, il
réussit à se faire recommander à l’évêque de Tarbes qui l’ordonna sous-diacre
et diacre en 1598, mais lui refusa la prêtrise à cause de son âge (Il n’avait que 17 ans !). Qu’à cela ne
tienne ! Notre futur Saint voulait brûler les étapes et il réussit à
trouver un évêque plus complaisant en la personne du vieil évêque de Périgueux
qui l’ordonna dans la chapelle de sa maison de campagne en 1600.
Cependant, durant cette période d’études, Vincent
vivait assez misérablement, n’obtenant pas de postes aux bénéfices lucratifs !
Et il ne voulait surtout pas être à charge de sa famille…
La période 1605-1610 est assez floue et
rocambolesque si l’on en croit trois de ses lettres qui jettent une lumière
assez crue sur le futur saint ! Il raconte que le testament fait en sa
faveur “par une bonne vieille de
Toulouse“ (!!!) le contraint à poursuivre jusqu’à Marseille “un méchant mauvais garnement“ qui
l’aurait volé de trois cents écus. Pour ce faire, il n’hésite pas à vendre le
cheval pris de louage à Toulouse, estimant pouvoir le payer au retour… Il
arrive ainsi à Marseille, fait emprisonner le voleur qui lui remet finalement
les trois cents écus !
Mais - événement rocambolesque -, en revenant, le
bateau qu’il prend à Narbonne se fait capturer par trois “brigantins Turcs“. Il est emmené à Tunis comme esclave. Il y
restera deux ans. Mais il réussit à convertir son maître, un “renégat de Nice“.
Tous les deux parviennent cependant à se sauver sur
un petit esquif. Ils arrivent à Avignon où le Vice-légat du pape reçoit avec
grande joie le retour dans l’Eglise de l’ancien renégat ! De plus, il invite
Vincent à venir à Rome pour le faire pourvoir de quelque “bon bénéfice“. Aussi,
notre futur Saint usera, là encore, de quelques subterfuges d’argent pour
s’assurer du voyage.
Naturellement, certains historiens mettent en doute
tous ces scénarios qui pourraient sortir d’un conte de mille et une
nuits ! Quoi qu’il en soit de l’authenticité des récits attestés par trois
lettres de notre héros, on peut affirmer qu’à cette date, Vincent n’est
nullement un saint. Il apparaît comme un garçon besogneux certes, mais sans
scrupules excessifs en matière d’argent. Il est plein d’ambition et préoccupé
de décrocher un bon bénéfice d’une fonction ecclésiastique.
D’après l’une de ses lettres, il va bien à Rome,
mais n’obtient aucun avancement significatif. On le retrouve à Paris le 17
février 1910 où il est agrégé au corps des aumôniers de la reine Marguerite de
Valois, l’ancienne épouse d’Henri IV (2).
Mais cette fonction est encore bien modeste puisqu’il partage le logement d’un
ami, rue de Seine.
2. “Conversion“ !
C’est là, cependant, que la grâce l’attendait à
propos encore d’une affaire d’argent dont, du coup, il fut victime. Mais foin
des conjonctures en cette affaire trouble une fois de plus, ce fut, par grâce
divine, l’occasion pour Vincent d’un renoncement aux biens de ce monde, d’une
profonde conversion. Sans doute, le Cal de Bérulle ne fut pas étranger à ce
retournement. Vincent l’avait rencontré grâce à l’un de ses amis, le curé de
Clichy. Peu de temps après, ce dernier entrait à “l’Oratoire“ que le Cardinal
venait de fonder à Paris et il aurait présenté Vincent pour lui succéder.
Voilà donc Vincent de Paul, curé de Clichy !
Certainement encouragé par Bérulle qui aura une grande influence sur lui,
Vincent, dès lors, s’intéresse exclusivement aux âmes, catéchise les enfants,
visite pauvres et malades, partout réconforte et console.
3. “Prémonitions“ !
Vincent ne restera que peu de temps en sa paroisse
campagnarde. En 1612, Bérulle lui propose d’entrer comme précepteur chez les
Gondi, riche famille d’origine florentine (3). Le Marquis Philippe-Emmanuel de
Gondi et son épouse Françoise-Marguerite (malgré leur condition !)
manifestaient clairement une foi profonde et une très grande charité !
Vincent fut, en ce poste, fort occupé. Les
“mauvaises langues“ diront que la vertueuse (mais
quelque peu scrupuleuse) Marquise de Gondi, heureuse d’avoir trouvé un
“directeur“, se chargeait de l’occuper à elle seule ! Cependant, encouragé
par ses protecteurs, “Monsieur Vincent“ comme on l’appelle désormais se
préoccupe de la population qui habite sur les nombreux domaines des Gondi… St Vincent y restera douze années (1612-1624)
entrecoupée par une “fugue“ à Châtillon en 1017.
On ne sait que peu de choses des quatre premières
années sinon que le futur Saint subit, durant toute cette période (1612-1616),
une grave et forte tentation contre la foi. Mais, finalement, avec, probablement,
le soutien du Cal de Bérulle, ce fut pour lui une occasion de très grands
progrès vers la sainteté… Il se défait d’ailleurs, à cette époque, de certains
bénéfices lucratifs ou avantages de sa fonction. Quel changement au regard du
jeune Vincent !
Un fait pourtant à retenir de cette période :
Il résidait alors au château de Folleville (Somme)
chez les Gondi. Un jour, on appela M. Vincent à venir visiter un paysan qui se
mourait. Une confession générale rendit la paix au pauvre homme ; et il mourut
dans une très grande joie. Cet événement frappa si fortement Mme de Gondi
qu’elle demanda à son aumônier de faire une prédication pour exhorter les
paroissiens à une confession générale. Le résultat fut tel qu’il fallut l’aide
des Jésuites voisins (d’Amiens). C’était
le 25 janvier 1617. A juste titre, St Vincent lui-même et les Lazaristes
virent plus tard en cette date la naissance de leur Institut !
En effet, Mme de Gondi, frappée de la nécessité de
prêcher des “missions“ aux pauvres campagnards, décida d’offrir une dotation à
la Communauté qui consentirait à en faire une tous les cinq ans sur ses terres.
Mais personne ne répondit, pas même le Cal Bérulle. Il faudra que St Vincent
s’y consacre lui-même, très modestement !
Cependant, le 1er Août 1617, St Vincent
quitte soudainement la maison princière : il ne fournit aucune raison
sinon un “voyage à faire !“. Il en parle cependant à Bérulle qui,
justement, cherchait un desservant pour une paroisse des Dombes (Châtillon). Il
n’y restera que quelques mois mais fera un immense travail missionnaire en
cette région soumise à l’hérésie calviniste. Comme à Clichy, il prend contact
avec les paroissiens, visite pauvres et malades, court à la recherches des
“brebis perdues. L’hérésie perd du terrain ; la paroisse revit ! La
conversion la plus notoire est celle du Comte de Rougemont, duelliste enragé,
un “franc éclaircilleur“, dira St
Vincent…
Le séjour à Châtillon, si bref fût-il, lui permet
de jeter les bases d’une Institution très importante, plus importante même que
celle dont l’aurore avait percée lors de ses prédications dans les campagnes,
près du château de Folleville dans la Somme. L’épisode est amusant. On signale
à Monsieur Vincent une maison un peu éloignée dont tous les habitants, malades,
sont dans une grande nécessité. Il s’y rend. Et sur le chemin, il rencontre des
femmes qui le devançaient ou qui revenaient… “Il y en avait tant, dira-t-il avec exagération, que vous auriez dit des processions !“.
Immédiatement le génie d’organisation du Saint s’active : il propose à
toutes ces femmes de “faire le pot“, chacune à leur tour, pour les nécessiteux
du village et des alentours. Ce fut le début d’une future Institution à
Paris : les confréries des “Dames de la Charité“.
Mais les Gondi voulaient retrouver leur
aumônier ! Madame, surtout, quelque peu scrupuleuse a-t-on dit, était
inconsolable de la perte de son directeur. On pria St Vincent de revenir. Même
le sage Cal de Bérulle le priait seulement “de
réfléchir sur la peine de Mme de Gondi et sur ce qu’il avait à faire !“.
Il réfléchit donc et pria… Et il résolut de rentrer à Paris, malgré les pleurs
de ses paroissiens de Châtillon !
A Paris, St Vincent reprend son activité
apostolique : il se consacre entièrement à évangéliser les habitants des
nombreux domaines des Gondi. On le trouve partout : à Villepreux (Seine et Oise), puis à Joigny (Yonne), à Montmirail (Marne), Folleville, bien sûr (Somme),
Paillart (Oise)… etc. Partout le bien spirituel
opéré est immense. Pour le consolider, il établit désormais des confréries, des
“charités“ comme l’on disait.
Paradoxalement, il lui faut lutter cependant contre
un “naturel mélancolique“, disait-on alors (acédie).
Il note avec la simplicité d’un “enfant de Dieu“ : “Je m’adressai au Seigneur et le priai instamment de me changer cette
humeur sèche et rebutante et de me donner un esprit doux et bénin ; et par
la grâce de Notre Seigneur, avec un peu d’attention que j’ai faite à réprimer
les bouillons de la nature, j’ai un peu quitté de mon humeur noire“.
Mais il y a encore une autre préoccupation
apostolique qui se présente. M. de Gondi est général des galères du roi. Les
rameurs de ces navires de guerre sont des condamnés aux travaux forcés
(forçats). En attendant d’être conduit à Marseille (port des galères), ils croupissent
enfermés à la Conciergerie, dans des cachots humides, malpropres, sans air et
pleins de vermine.
St Vincent répond aussitôt à l’appel lancé par l’archevêque
de Paris en faveur de ces pauvres condamnés. Il les visite, les réconforte, les
instruit, obtient même leur transfert dans des lieux plus sains. Peut-être même
alla-t-il jusqu’à Marseille, en 1618, afin d’améliorer leur sort… Son zèle fut
reconnu par le roi Louis XIII qui lui conféra la charge d’“aumônier réal des
galères“, avec appointements qui facilitèrent l’action apostolique de M.
Vincent.
On ne peut songer à suivre avec exactitude le futur
Saint sur tous les chemins qu’il emprunte, avec les rencontres qu’il y fait et
qui mériteraient grande attention, celle en particulier avec François de Sales
et Jeanne de Chantal (1619). Notons cependant que Jeanne de Chantal resta
quelques années à Paris pour y implanter sa fondation. Elle fit agréer Monsieur
Vincent comme supérieure des monastères de la Visitation à Paris (1622). Il y
resta jusqu’à sa mort. Cette fonction lui vaudra une grande expérience pour ses
propres fondations qui ne vont pas tarder à voir le jour.
A
suivre : 4. Les
fondations !“
Pour terminer aujourd’hui, retenons quelques
aphorismes de ce grand Saint :
C’est aimer Dieu de la bonne manière que d’aimer les autres !
Faisons les affaires de Dieu, Il fera les nôtres.
Le Bon Dieu fait toujours nos affaires quand nous faisons les siennes.
Déchargez votre esprit de tout ce qui vous peine : Dieu en aura soin !
(1) Son
nom “de Paul“ devait désigner un lieu-dit habité autrefois pas ses ancêtres -
procédé d’appellation fréquent -.
(2) dite “Reine
Margot“ (+ 1615) !
(3) famille qui a suivi Catherine
de Médicis lors de sa
venue en France
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