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T.O. Vendredi 12/B (I Co.
15.12-20)
Certains
Corinthiens, nous l’avons vu, devaient croire seulement à l’immortalité de
l’âme. Et sans nier la résurrection du Christ, ils la considéraient comme un
fait exceptionnel dont ils ne voyaient pas très bien la portée. Ces opinions ou
tendances devaient résulter de la philosophie grecque qui manifestait des
préjugés contre la matière : le corps n’était finalement qu’un tombeau
dont il fallait sortir pour vivre véritablement. C’était une pensée qui a du se
répandre puisque l’apôtre l’évoque à son cher Timothée : “Quant aux bavardages impies, évite-les. Ceux qui s'y
livrent, en effet, progresseront dans l'impiété ; leur parole est comme une
gangrène qui s'étend. Tels sont Hyménée et Philétos. Ils se sont écartés de la
vérité en prétendant que la résurrection a déjà eu lieu ; ils renversent ainsi
la foi de plusieurs“ (II Tm 2 16-17). “La résurrection a
déjà eu lieu !“, disent certains, faisant allusion au baptême conçu, reçu comme
une résurrection spirituelle. Et, de ce fait, ils niaient la résurrection des
corps !
Dans
sa lettre - c’est notre lecture d’aujourd’hui -, Paul ne se lasse pas de
répéter les mêmes mots, les mêmes expressions comme dans une argumentation
pressante : certains disent, accuse-t-il, qu’il n’y a pas de résurrection
des morts ! Mais s’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non
plus n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est
notre foi. Raisonnement qu’il reprend pratiquement aussitôt une seconde
fois !
Paul
argumente donc :
-
S’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus n’est pas
ressuscité. Et toute notre espérance s’écroule ! (v/12-19)
-
Mais heureusement, le Christ est ressuscité. Et nous serons tous vivifiés par
lui (V/
20-28).
-
Sinon, tout ne serait qu’inconséquence ! (V/29-30).
Sans doute, Paul argumente-t-il
du fait que le Christ et les hommes ont commune nature ! Et beaucoup ont
affirmé que ce lien est causal : si notre résurrection qui est donc un
effet de celle du Christ ne doit pas avoir lieu, c’est que la cause n’a pas été
posée. L’argument s’appuierait alors sur la notion du “Corps mystique“ du
Christ : si le Corps ne ressuscite pas, pourquoi la tête (le Christ)
serait-elle ressuscitée ? Cette idée est très belle et très juste en
soi ! Paul l’avait probablement présente à la pensée ; il la
présuppose et l’esquissera un peu plus loin et la formulera par ailleurs. Mais
ici, il ne l’exprime pas expressément !
Aussi préfère-t-il, semble-t-il, appuyer son argument sur cette réflexion qui lui paraît encore
plus importante : si le Christ n’est pas ressuscité, non seulement notre
foi est sans appui, mais nos péchés demeurent en nous, ces péchés si
impitoyablement décrits au chapitre 6ème (nous l’avons vu) et dont les
Corinthiens se figuraient être délivrés ! Paul marque là une profonde et
irréversible relation entre “Résurrection du Christ“ et “Rédemption“ :
seul le Christ glorifié donne l’Esprit qui efface les péchés ! Un chrétien
est déjà ressuscité (Rm
6.1-7 ; Col 3.1)
parce que l’Esprit est, en lui, prémices du monde à venir (Rm 8.11-25 ; 2
Co. 5.5).
– “Si en effet nous croyons que Jésus est mort et qu'il
est ressuscité, de même aussi ceux qui sont morts, Dieu, à cause de ce Jésus, à
Jésus les réunira… Ainsi nous serons
avec le Seigneur, toujours“. (I Thess 4.13sv).
Un
Christ vaincu par la mort ne peut avoir détruit le péché dont la pénalité est
la mort ; si la mort a été plus forte que lui, c’est que le péché conserve
sa domination. Bien sûr, en cette argumentation, il faut avoir à la pensée la
thèse que Paul défendra toujours : il y a un lien entre la mort et le
péché ! Et, dans cette optique, l’apôtre de préciser les
conséquences : si le Christ n’est pas ressuscité, “ceux qui sont morts dans le Christ sont perdus !“. Et nous
ici-bas, “si nous avons mis notre espoir
dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de
tous les hommes !“. Nous sommes sans espérance véritable !
Cette dernière phrase a fait -
plus ou moins légitiment, me semble-t-il -, couler beaucoup d’encre, selon l’importance
que l’on donne à l’adverbe “seulement“ !
-
Si le Christ n’est pas ressuscité, notre espérance serait ridicule si elle ne
porte que pour la vie présente, seulement ! Cela reviendrait à dire comme
les chrétiens auxquels faisaient allusion Paul à Timothée : la
résurrection a déjà eu lieu par le baptême. Et cette force baptismale devrait
nous donner - plus ou moins, certes -,
mais devrait nous donner quand même le bonheur dès ici-bas ! Réflexion
qu’un curé de paroisse entend souvent devant telle ou telle souffrance,
épreuve : Si Dieu existe, si le Christ est ressuscité (en moi, par le
baptême)…, tous ces malheurs ne devraient pas arriver ! Et puis, autre
conséquence : renoncer aux jouissances légitimes du temps présent comme
l’ont fait les apôtres - et Paul lui-même, ô combien -, les missionnaires et
bien des chrétiens avec eux, comme le font actuellement bien des chrétiens, les
moines et les moniales… serait alors une duperie, une stupidité si notre
espérance suppose que l’on ne puisse attendre du Christ que des avantages
terrestres ! Quel malheur !
-
Mais on peut aussi faire porter l’adverbe “seulement“ sur le verbe “espérer“ ou
mieux sur l’ensemble de la phrase - et c’est faire
droit au texte de la meilleure manière - : si nous n’avons “rien qu’une
espérance“ seulement, et, bien plus - “quod absit“, loin de moi cette pensée -,
“rien que pour cette vie seulement“, alors oui, “nous sommes les plus à
plaindre des hommes !“
Mais non ! Nous le savons
bien : notre espérance n’est pas sans objet puisque le Christ est ressuscité ! Et, dès lors, les chrétiens ont mis
une fois pour toutes leur espérance dans le Christ-Sauveur, le médiateur
unique !
“Il n’y a qu’un
seul Dieu,
qu’un seul
médiateur entre Dieu et les hommes,
un homme :
Christ Jésus
qui s’est donné en
rançon pour tous…
Voilà mon
témoignage !“ (I Tim 2.5)
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