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T.O. Mercredi 12/B - (I Co. 13).
Les
Corinthiens s’exaltent orgueilleusement des “charismes“ qui se manifestent au
sein de leur Communauté et qu’ils semblent rechercher avec avidité ! St
Paul leur réplique que le plus grand des dons de l’Esprit Saint, c’est la
CHARITE ! Bien qu’il soit surtout question en notre lecture d’aujourd’hui
des attitudes à l’égard du prochain, il n’est pas douteux que, pour Paul, la
“Charité“, c’est l’Amour de Dieu dont l’amour du prochain découle et dont il
est le signe, dira St Jean. “L’amour de
Dieu, dira l’apôtre pas ailleurs, a
été répandu en nos cœurs par l’Esprit Saint !“ (Rm 5.5), ce même Esprit
qui répand par ailleurs ses dons divers, appelés charismes !
L’importance
dogmatique du chapitre 13ème de la lettre de Paul est immense, car
il traite non seulement de la Charité, essence de la vie chrétienne, mais aussi
des autres vertus théologales et de la vision béatifique !
L’idée
essentielle est que sans la Charité qui seule mène à la perfection et puisse
subsister toujours, tout le reste est secondaire, voire inutile ! Elle
est donc, la Charité, absolument nécessaire à la différence des “charismes“
tant convoités par les Corinthiens, ces charismes qui revêtent les
caractéristiques d’un état d’enfance et de transition. Ils ne font pas voir
Dieu. La Charité qui vient de Dieu est seule capable de nous élever jusqu’à
Lui !
Et
du fait de cette affirmation importante, la rhétorique de St Paul devient
grandiose. Quand je parlerai les langues - le don le plus convoité chez les
Corinthiens -,
celle des hommes et celle des anges - c'est-à-dire quand j’aurai la langue la
plus sublime dont on puisse rêver -…, et même quand j’aurai la foi la plus
totale, cette foi qui pousse à agir parfaitement et envers Dieu et envers les
hommes..., s’il me manque la Charité, je ne suis rien !
La
charité est cet “Amour de Dieu répandu en nos cœurs“ qui se manifeste
glorieusement, surtout dans les rapports avec le prochain. Paul ne décrit pas de façon théorique ce
qu’est la Charité, l’“Agapè“ - car c’était une notion assez connue des premiers
chrétiens -, mais il la décrit par ses caractères et par les attitudes qu’elle
impose dans les relations fraternelles.
Et
il me plaît de penser que Paul, ce grand missionnaire si actif, a, ici, un
regard de grand contemplatif : il regarde le Christ, manifestation de
l’Amour de Dieu…, il regarde les vertus du Christ et en même temps, par
opposition, avec grande nostalgie, les défauts qu’il constate chez les Corinthiens.
Aussi,
dit-il, la Charité ne jalouse pas, ne plastronne pas orgueilleusement, ne
cherche pas son intérêt, n’est pas rancunière, trouve sa joie dans la vérité (un des grands
thèmes du pape Benoît XVI). La Charité excuse tout, croit tout, espère tout,
endure tout…
Il
est à remarquer que l’Apôtre qui n’avait l’intention que de souligner une
conduite surnaturelle inspirée par la Charité infusée en nos cœurs, en vient
finalement à décrire le plus beau portrait de l’“honnête homme“, du “kalos
kagathos“ (bon
et beau),
comme disaient les Grecs, le gentleman parfait, tant la Charité, depuis que le
Christ s’est fait homme, vient comme infuser, parfaire les vertus naturelles.
La
Charité, cet “Amour de Dieu répandu en nos cœurs“ ne peut donc disparaître.
Tous les charismes -
prophéties, langues, connaissances… -, tout le reste disparaîtra. Mais quand
viendra l’achèvement (“téleion“ :
le complet, l’achevé, le final), la perfection de l’autre monde, la vision de Dieu et
la béatitude qui en découle, alors ce qui est limité sera aboli.
“Quand j’étais
enfant…“
- Même arrivé à ce stade de contemplation, Paul ne peut s’empêcher de mettre
une petite touche d’ironie. “Quand
j’étais enfant…“, c’est-à-dire comme vous l’êtes dans l’ordre spirituel,
vous les Corinthiens, avec vos convoitises de dons tout extérieurs… ! Rejetez donc comme inutile ce qui est le
propre de l’enfance pour devenir vraiment adultes, c’est-à-dire capables de “connaître Dieu comme je suis connu“ de
Lui, comme vous-mêmes êtes connus de Lui !
Et
St Paul de conclure avec grandeur : Aujourd’hui, la foi, l’espérance, la
Charité demeurent. Mais la plus grande de ces vertus, c’est la Charité !
On
pourrait paraphraser : il est vrai que pour le temps présent subsistent
ensemble trois vertus qui paraissent inséparables : la foi, l’espérance,
la Charité. Et cette triade implique en soi de l’imperfection ! Car la foi
est une connaissance en énigme (à travers un miroir, de manière confuse (1), par analogie,
diraient les théologiens).
– L’espérance n’est qu’une attente ; elle ne tient pas encore ce qu’elle
désire : “Nous sommes sauvés en
espérance… et espérer ce que nous ne voyons pas, c’est l’attendre avec
persévérance“ (Rm
8.24).
Et
“La foi est une manière de posséder ce
que l’on espère“, conclue la lettre aux Hébreux (Cf.
Heb 11.1).
La
foi et l’espérance tomberont ! Seule subsistera la CHARITE parce qu’elle
est la plus grande vertu, nullement liée à l’état d’“enfance“, d’obscurité,
d’attente et de perfection partielle seulement ; elle est, au contraire,
la vertu définitive et parfaite, rendant capable de “voir Dieu“ !
Vivons
donc de cette CHARITE !
(1) Les miroirs, du temps de Sr Paul, étaient souvent du bronze poli !
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