mercredi 23 avril 2014

Emmaüs, notre route…

Pâques –Mercredi   -       (Luc 24.13sv)

A l'écoute de notre évangile d'aujourd'hui, il faudrait se taire et laisser chaque parole déverser en notre cœur cette assurance pascale : "LE CHRIST EST RESSUSCITE !".
Cet évangile est, selon la l'expression que j'employais lundi dernier, comme le "point focal" de la lumière du matin de Pâques qui concentre tous les rayons du passé pour les projeter, en le traversant, vers l’avenir, vers notre avenir à construire avec le Christ !

Il s'agit d'une rencontre sur la route. Le déroulement en est très construit, dans un parallèle d'oppositions.
D'une part, deux disciples vont de Jérusalem à Emmaüs, mais leurs yeux sont empêchés de reconnaître Jésus qui fait route avec eux. Ils sont désemparés, découragés !
D'autre part, leurs yeux s'ouvrent et, dans un éclair, ils reconnaissent le Seigneur ; mais, Lui, Jésus, leur devient alors invisible ! Tout joyeux, vers Jérusalem ils remontent en racontant leur radieuse rencontre !

C'est un récit très construit dont St Luc a le secret ! Le célèbre Renan disait que ce texte est le plus beau morceau de littérature qui n’ait jamais été écrit.
Il s'articule autour de deux signes majeurs : la parole et le repas. C'est à partir de ces signes que les disciples passent du doute à la foi, du découragement à l'espérance, de la fuite à la mission.

De plus, nous avons là un modèle de catéchèse en trois temps :
- le temps de la parole sur la route,
- le temps du sacrement à l'auberge d'Emmaüs,
- et le temps de la conversion et du témoignage avec le retour à Jérusalem.

Emmaüs, notre route.                    Ceci se passait à Emmaüs, nous dit Luc, à deux heures de marche de Jérusalem.
Mais où se trouve Emmaüs ? La localisation en est incertaine. On a répertorié deux ou trois et même quatre "Emmaüs", selon les circonstances historiques qui imposèrent des changements d'itinéraire pour venir de la Méditerranée à Jérusalem... 
Peu importe d’ailleurs, car, finalement pour St Luc, Emmaüs est moins un lieu géographique qu’un cheminement, un itinéraire spirituel ! Vous me retrouverez, disait Jésus, sur la route de Galilée, "carrefour des nations", autrement dit sur les routes du monde, sur notre propre chemin !

Emmaüs est partout où le Seigneur Jésus révèle sa présence :
Pour Paul, ce fut le chemin de Damas ;
Pour Claudel, derrière un pilier de Notre-Dame de Paris… 
Et pour nous ? Emmaüs est là, chaque fois que Dieu nous fait signe sur la route de la vie, tandis que nous avançons, croyants parfois incertains, chercheurs de Dieu dans le doute et quelquefois dans la nuit. Le Christ est souvent sur notre chemin.
Mais savons-nous le reconnaître ? Pourtant, ce que facilement on appelle "hasard", c'est souvent le Christ qui arrive mais incognito, comme il le fit pour les deux disciples sur la route d'Emmaüs. Il nous faut le reconnaître !

Oui, prenons le chemin d'Emmaüs, celui de nos questions et de nos doutes, et apprenons comment Jésus nous y rejoint, nous éclaire, réchauffe notre cœur et nous assure de sa présence.

Le signe des Ecritures                    Le premier temps de la rencontre est celui de la parole sur la route
Alors que toute la vie de Jésus est présentée par Luc comme une marche, une "montée" vers Jérusalem, la ville sainte, voici que les deux disciples désespérés lui tournent le dos. Autrement dit, toute l'aventure vécue avec Jésus et l'immense espoir soulevé dans leur cœur, se termine dans l'échec de la croix. Jésus est mort. C'est fini.

Mais sur cette route du désespoir, Jésus s'approche, marche avec eux.
Jésus fait redire aux deux hommes ce qu'ils ont sur le cœur, ce qu'ils viennent de vivre ; Il leur pose des questions et, à partir de leurs réponses, il leur propose une autre lecture des évènements. Il les invite à tout relire "selon les Ecritures" et non plus selon leur attente très limitée et trop humaine, celle d'un libérateur politique et triomphant. Tandis qu'Il cite Moïse et les prophètes, ils comprennent que le Messie annoncé devait souffrir avant d'entrer dans la gloire de Dieu. Alors, la croix n’est plus un échec, mais une preuve suprême d'amour. A la lumière de la Parole de Dieu, tout prend un autre sens ; et un avenir s'ouvre devant eux... Ils se reprennent à espérer.

Pour nous aussi, la Parole de Dieu doit éclairer ce que nous avons à vivre d'une lumière toujours nouvelle

Le signe du repas                            Marchant avec leur mystérieux compagnon sur la route d'Emmaüs, nos deux disciples sont déjà intérieurement "retournés" : le "signe de la Parole" les a déjà fortement éclairés.

C'est alors qu'intervient le "signe du repas". C'est là que se fait la reconnaissance. En rompant le pain avec eux, Jésus pose le signe de l'alliance, le signe de la cène…
L’intelligence de la foi, éclairée par les Ecritures, les illumine d’un éclair fulgurant : cette fraction du pain,
c’est celle du repas de la Cène,
c’est encore celle de la multiplication des pains,
c’est celle du repas que Dieu donnait à son peuple dans le désert, avec la manne…,
c’est celle du repas que le Christ ne cessera de donner, à travers les siècles, à tous ses disciples pour leur transmettre sa vie, sa vie de Ressuscité !

C'est ce geste qui leur ouvre les yeux, ce geste qui est un "sacrement" de l'invisible, le "sacrement" d’une présence. C'est par ce signe, désormais, que le Christ reste avec eux. Ils le reconnaissent à la fraction du pain... !

Conversion et témoignage                  Vient alors le troisième temps, celui de la joie retrouvée, de la joie à annoncer. Après avoir eu le cœur “retourné“ par les Ecritures, par la "Parole" de Jésus au moment de la fraction du pain, ils "retournent" à Jérusalem tout joyeux ; et ils annoncent : "c'est vrai, le Seigneur est ressuscité !"

Nous aussi, ayant reconnu la présence du Ressuscité, nous sommes invités à toujours reprendre la route pour annoncer la Bonne Nouvelle à tous ceux qui cherchent dans la nuit ou qui pensent que leurs chemins ne mènent à rien…, à tous ceux qui se découragent...
Et ceux-là ne sont jamais aussi éloignés que nous le pensons ! C'est peut-être parfois notre frère, notre sœur !

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