mercredi 7 avril 2010

Mercredi de Pâques - La résurrection  et notre guérison !  - Ac 3, 1-10 - Ps 104 - Lc 24, 13-35

La guérison de l’infirme se fait à l’entrée du temple, hors du temple. Il faut se rappeler que les infirmes n’entraient pas dans le temple d’après une loi qu’on trouve dans le Lévitique :  « aucun homme ne doit s'approcher s'il a une infirmité, que ce soit un aveugle ou un boiteux, un homme défiguré ou déformé » (Lv 21,18).

Les aveugles et les boiteux sont particulièrement visés. Pour comprendre cette disposition, il faut se rappeler le récit de la prise de Jérusalem par David, racontée dans le 2ème livre de Samuel : « David avec ses gens marcha sur Jérusalem contre les Jébuséens qui habitaient le pays, et ceux-ci dirent à David : "Tu n'entreras pas ici ! Les aveugles et les boiteux t'en écarteront" ; c’était pour dire : "David n'entrera pas ici". Mais David s'empara de la forteresse de Sion - c'est la Cité de David -. » Aussi le texte ajoute : « Quant aux boiteux et aux aveugles, David les hait en son âme.  C'est pourquoi on dit : Aveugle et boiteux n'entreront pas au Temple. » ( 2 Sam. 5,6-8).

Jésus, lui, contrevient à cette loi, la contredit : « Il y eut aussi des aveugles et des boiteux qui s'approchèrent de lui dans le Temple, et il  les guérit… ;  les grands prêtres et les scribes furent indignés » (Mt 21,14.15b).

Quant à St Jean, il a retenu, parmi les 7 signes qui composent son Evangile, deux miracles opérés dans les deux piscines qui se trouvent l’une au nord et l’autre au sud du temple. Le boiteux de Bethesda et l’aveugle-né de Siloé, une fois guéris, entrent dans le temple qui leur était interdit tant qu’ils étaient atteints par leur infirmité.

Aussi, le miracle, que nous rapporte la lecture, s’inscrit en cette “iconographie“ première de Jérusalem ; et il serait dommage de ne pas rappeler, à cette occasion, la mutation essentielle qui s’opère dans le passage qui se fait de l’Ancien au Nouveau Testament ! Dans l’Ancien Testament, les maladies et les infirmités sont un handicap dans le rapport avec Dieu. Dans le Nouveau Testament, elles sont assumées par le Christ qui est venu guérir nos infirmités comme nos péchés ; et les miracles préfigurent la restauration totale de notre humanité pour entrer dans le “Nouveau Temple“, dans le “Royaume de Dieu“.

Le paralytique guéri par Pierre entre dans le temple en franchissant la Belle Porte : « d'un bond il fut debout, et il marchait.  Il entra avec eux dans le Temple, il marchait, bondissait et louait Dieu ! ».

L’Evangile rapporte l’épisode de la rencontre de Jésus avec deux de ses disciples sur la route d’Emmaüs. Le célèbre Renan disait que ce texte est le plus beau morceau de littérature qui n’ait jamais été écrit.

La présence de Jésus ressuscité est plus réelle que jamais, mais elle n’est plus perceptible immédiatement comme elle l’était auparavant. On a déjà vu cela avec l’Evangile d’hier, en parlant de Marie Madeleine qui croit d’abord voir le gardien du jardin.

Aussi, Cléophas et son compagnon partagent la mentalité courante du judaïsme de l’époque qui attend un Messie bien visible en restaurant la Royauté davidique et en chassant l’occupant romain. Jésus chemine un certain temps avec eux et leur donne l’occasion d’exprimer leur déception et leur scepticisme vis à vis du témoignage des femmes qu’ils considèrent comme des racontars de pure imagination. C’est une bonne chose de laisser ses interlocuteurs exprimer leurs déceptions et prendre, par le fait même, un certain recul par rapport à leurs idées toutes faites. Prendre son temps, c’est la meilleure manière de préparer celui qui va écouter LA PAROLE à accueillir le message qui lui est destiné et à comprendre ainsi le dessein de Dieu à travers toute l’histoire : « Alors il leur dit : "O cœurs sans intelligence, lents à croire à tout ce qu'ont annoncé les Prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ?".  Et, commençant par Moïse et parcourant tous les Prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait ». (Lc 24,25-27).

On emploie assez souvent aujourd’hui le mot savant de “herméneutique“. Ce mot vient tout simplement du verbe grec  “diermèneuô“ : interpréter, expliquer. Il est bon aujourd’hui de rappeler l’origine de cette pratique et surtout des effets qu’elle produit : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et qu’il nous faisait comprendre les Ecritures ». Quand on lit la Bible, l’Evangile, laissons le Christ entrer en notre cœur. C’est surtout lui qui expliquera…, bien plus que tous les manuels et livres si utiles soient-ils ! Surtout quand on sait que la “liturgie de la Parole“ est liée indissociablement à la “liturgie de la fraction du Pain“ : “Ils le reconnurent à la fraction du pain“.

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