vendredi 18 septembre 2009

Verbe (Parole) fait chair (corps) - T.O. 25 imp. Mardi - (1 Tm 6, 2-1)

Nous arrivons déjà à la fin de la première lettre de Paul à Timothée. Après la “lecture“ dont nous avons parlé hier - la lecture publique des textes sacrés dans les assemblées, selon l’usage emprunté à la synagogue -, Paul parle à Timothée de ce qui découle de la lecture et qui doit venir après : l’exhortation et l’enseignement.

La lecture, au sens originel, l’écoute, est donc première. On n’insistera jamais assez sur ce point. “Shema Israël“. - “Ecoute, Israël !“ Avant la langue qui parle, il y a l’oreille qui écoute comme le dit si bien le premier des grands prophètes, Isaïe :“Le Seigneur Dieu m'a donné une langue de disciple pour que je sache apporter à l'épuisé une parole de réconfort“. Aussi, “ Il éveille chaque matin mon oreille pour que j'écoute comme un disciple“. (Is 50, 4-5). Et le psaume 40 affirme : “Tu n’as voulu ni holocaustes, ni sacrifices, tu m’as ouvert l’oreille“ (V/7).

Très curieusement, dans les Septantes (traduction grecque de la Bible au 3ème s. av. J.-C.) et dans l’épître aux Hébreux qui cite ce psaume, là où il est écrit :“Tu m’as ouvert l’oreille, tu m’as creusé l’oreille“, on a transcrit : “Tu m’as formé un corps !“ (He 10,37) - (Sept. : “Alors, je viens“).

Comment est-on passé de l’oreille au corps ? Certains médecins - comme le célèbre Docteur Tomatis - disent que le premier organe sensible qui vient à éclosion dans l’embryon, c’est l’oreille. Je ne saurais rentrer dans le détail, mais une chose est certaine : depuis l’Incarnation du Fils de Dieu, “Verbe fait chair“, la Parole de Dieu qui entre par les oreilles doit descendre jusqu’au plus profond de nous-mêmes, “faire corps“ avec nous. Le prophète Ezéchiel, avec son imagination toujours débordante, avait déjà fait cette expérience qui prophétisait en quelque sorte l’Incarnation du Fils de Dieu, Verbe de Dieu ! Recevoir la Parole avant de la proclamer !“Le Seigneur me dit : "Fils d'homme, mange ce rouleau ; ensuite tu iras parler à la maison d'Israël". J'ouvris la bouche et il me fit manger ce rouleau. Il me dit : "Fils d'homme, nourris ton ventre et remplis tes entrailles de ce rouleau que je te donne". Je le mangeai : il fut dans ma bouche d'une douceur de miel. Il me dit : "Fils d'homme, va ; rends-toi auprès de la maison d'Israël et parle-leur avec mes paroles“ (Ez. 3.1-4).

Ainsi la Parole qui entre par les oreilles doit “faire corps“ avec nous-mêmes ; elle doit entraîner comme un rebondissement de tout l’être dans l’action de grâces pour mieux la proclamer ! Dans cette perspective, la Parole divine demande à être appropriée jusqu’à l’incarnation.

Ainsi, dans la lecture (l’audition) qui est première, le disciple se familiarise ainsi avec le dessein de Dieu qui se déroule dans l’histoire et qui s’accomplit dans le Christ, Verbe incarné, par sa mort et sa résurrection. Aussi, faut-il toujours prier avant cette écoute de la Parole. Car une chose est également certaine : c’est l’Esprit de Dieu, l’Esprit Saint, qui favorise la réception de la Parole. Il suffit de se rappeler la fondation de la première Eglise chrétienne en Europe, à Philippes de Macédoine. St Luc note : “Nous adressâmes la parole aux femmes. L'une d'elles, nommée Lydie, (le premier chrétien en Europe - c’est à noter, Messieurs - fut une femme !) nous écoutait… Le Seigneur lui ouvrit le cœur, de sorte qu'elle s'attacha aux paroles de Paul.

Ainsi, par l’écoute de la Parole et avec l’aide de l’Esprit, le disciple du Christ acquiert une vertu dont on parlait beaucoup aux origines et peu désormais : une humble assurance qui donne la vigueur au témoignage de celui qui reçoit la Parole de Dieu.

De plus, on devient capable alors d’écouter la voix de Dieu, partout présente. Même si elle ne retentit plus dans les éclairs et les tonnerres, comme au temps de Moïse, la Parole de Dieu se discerne dans les événements de notre vie, et même dans “le souffle d’une brise légère“ comme pour Elie. (Il faudrait même traduire : “dans l’éclatement d’un silence, dans la poussière d’un silence“). Que l’Esprit nous aide à percevoir la voix du Seigneur !

Le mal vient souvent du fait que la langue fonctionne avant l’oreille. Il n’y a plus alors que des dialogues de sourds. Il suffit d’écouter certaines émissions télévisées, appelées “débats“, autour d’un soi-disant animateur. C’est souvent une cacophonie discordante. Et quand il s’agit d’émission religieuse, on parle souvent de tout sauf de l’essentiel : l’Unique dessein de Dieu et du Verbe Incarné venu l’accomplir par sa mort et sa résurrection.

Aujourd’hui, Paul parle à Timothée précisément de la cacophonie qui se produit fatalement quand l’oreille ne s’est pas ouverte à la lecture ; la langue ne fait alors que s’agiter dans le bavardage. Il parle beaucoup de ce phénomène, toujours aussi courant de nos jours ; (“Tu parles ! tu parles !... Ecoute d’abord“, disait St Bernard). il faudrait relire toute sa lettre pour retenir les qualités qu’il recommande à Timothée pour mieux entrer avec assurance dans ce qu’on appelle maintenant “le dialogue“ et porter notre témoignage de chrétien qui a su ouvrir son oreille avant d’agiter sa langue. “Shema Israël“ : avant tout, être à l’écoute de l’unique dessein du Dieu Unique qu’il a accompli en Jésus Christ et en Lui Seul, le Verbe incarné, mort et ressuscité, qu’il a accompli à Jérusalem où a commencé à se déchirer le voile qui nous empêchait de “voir Celui qui nous voit sans cesse !“.

“Il a détruit sur cette montagne le voile qui voilait tous les peuples et le tissu tendu sur toutes les nations… Car le Seigneur a parlé. Et on dira, en ce jour-là: Voyez, c'est notre Dieu, en lui nous espérions… Il nous sauve… “.

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