mercredi 16 septembre 2009

Le Christ pascal et l’Eglise - T.O. 24 imp. Mercredi - (I Tim 3.14-16)

Avec le week-end et les fêtes récentes qui ont brouillé quelque peu la continuité des lectures des jours du T.O., il n’est pas très facile de suivre la pensée de St Paul dans sa lettre à son jeune disciple Timothée qu’il considère comme son fils !

Nous l’avons déjà vu : l’Apôtre ressent de la fatigue ! Il arrive à la soixantaine ! Il envisage la fin de sa vie ! N’a-t-il pas lâché aux Anciens d’Ephèse tout attristés, au moment de son départ : “Vous ne reverrez plus mon visage !“. Soudainement, il se sent vieux ! Or, on remarque que les vieillards ont l’habitude de répéter toujours les mêmes choses avant que leur voix s’éteigne, comme s’ils voulaient condenser en quelques mots l’essentiel de leur expérience de vie !

Ainsi, d’après une vieille tradition, St Jean qui avait été le plus jeune disciple du Seigneur est mort très vieux à Ephèse ; et il ne répétait sur ses vieux jours qu’une seule phrase au point que ses amis, soupçonnant bien la richesse de vie de ce dernier des apôtres, le sollicitaient de fouiller sa mémoire. Mais lui de répéter toujours : “Mes enfants, aimez-vous les uns les autres !“. Il radotait ! Oui ! Mais, ce disant, il radotait le secret du monde transmis par le Christ !

J’ai l’impression que cette remarque convient également à St Paul. L’une des lectures des jours précédents nous transmettait son refrain : “Voici une parole sûre et qui mérite d’être accueillie sans réserve !“. Il dit non pas des paroles, des discours, des phrases, mais une parole ! Et cette parole est celle-ci : “Le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs“ que nous sommes ! Mystère de l’Incarnation et Mystère pascal tout à la fois ! Voilà l’essentiel !

Or, aujourd’hui, Paul redit cet essentiel d’une manière différente : “Jésus Christ a été manifesté dans la chair, et montré comme juste par l’Esprit“. Il est apparu comme tel sur la terre et au ciel, “parmi les anges de Dieu“. Et notre foi affirme qu’il est “exalté dans la gloire“ divine ! Là encore : Incarnation du Fils de Dieu et surtout sa Pâques qui nous entraîne à passer nous-mêmes de la mort à la vie !

Le salut que cherche tout homme, le salut au sens plénier du terme, le salut qui se fait voir tout au long des délivrances et des libérations qui jalonnent l’histoire de son peuple - [“Notre Dieu est un Dieu de délivrance ; à lui sont les issues de la mort“, chantait le psaume (68.12) -]…, ce salut, Paul en a fait une expérience intense sur le chemin de Damas. Ce salut de mort et de Vie, il l’a vécu personnellement. Ce salut lui fut en quelque sorte comme monnayé tout au long de son existence ; et ce salut se manifestera à lui pleinement - c’est son espérance - au terme de sa vie !

Aussi, dans sa vieillesse, il ne fait que répéter cette certitude en y ajoutant souvent une louange, une “action de grâce“ (= “eucharistie“), comme c’est souvent la coutume chez un Juif (ce mot “Juif“ ne signifie-t-il pas : louer, rendre grâce ?). Aussi, Paul terminait souvent son message unique par une louange : “Louange et gloire au roi des siècles, au Dieu unique, invisible et immortel pour les siècles des siècles !“ (1.17).

Cependant, aujourd’hui, l’Apôtre souligne à l’intention de son disciple, à notre intention, une caractéristique de ce mystère de mort et de vie. Face à ce mystère essentiel qu’il va encore souligner, il écrit juste avant : “Je veux que tu saches comment il faut se comporter dans la maison de Dieu, c’est-à-dire l’Eglise du Dieu vivant, colonne et appui de la vérité !“. Et il énonce alors immédiatement son message unique : la réalité du mystère pascal qui doit être couronné par notre action de grâce, notre eucharistie !


Autrement dit, ce mystère du salut opéré par le mystère pascal du Christ se concentre aujourd’hui en eucharistie, en action de grâce de notre vie, une action de grâce rendue possible par cette “Eucharistie“ que le Seigneur nous a laissée lui-même, que l’on célèbre chaque jour, et qui nous rassemble, nous réunit, nous unit. Si bien que, recevant le Corps du Christ, nous ne formons plus qu’un seul Corps : le Corps du Christ qui, dans ses membres, réalise actuellement Pâques, ce passage de mort à Vie. Pâques, c’est toujours aujourd’hui ! Pâques se réalise dans l’Eglise, Corps du Christ !

St Jean Chrysostome écrira : “C’est de son côté ouvert que le Christ a formé l’Eglise, comme il avait formé Eve du côté d’Adam“. L’Eglise est une re-création dans le Christ, “par qui tout fut, et rien de ce qui fut ne fut sans lui. En lui était la Vie“ (Jn 1.3). - “M’est avis, dira plus tard Jeanne d’Arc, lors de sa procès, que Notre Seigneur et l’Eglise, c’est tout un !“. - Et notre grand Bossuet proclamera : “L’Eglise, c’est Jésus Christ continué, communiqué et répandu à travers le temps et l’espace !“. - “Depuis dix ans que je parle de l’Eglise, dira Lacordaire, c’est, au fond, toujours de vous, Jésus, que je parle !“

De ce fait, l’Eglise - Corps du Christ qui ne cesse de s’étendre de la terre au ciel - est sainte, sans péché ; certes, cela ne veut pas dire qu’elle est sans pécheurs ! Mais sachons contempler l’Eglise dans sa réalité profonde : C’est le Corps du Christ ! Certains disent que l’Eglise change ! Oui, elle change mais à sa superficie en quelque sorte et non dans sa structure. Elle se transforme dans les remous de l’histoire que pour demeurer identique, disait Newman. Et il est bon de répéter, surtout ici : Le chrétien qui s’intéresse un peu trop à l’architecture de son église risque fort de négliger le Saint-Sacrement. - “Je ne veux rien savoir d’autre, répétait et “radotait“ St Paul, que le Christ crucifié“.. et désormais glorieux !

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