samedi 11 avril 2009

Pâques – En ce jour du Seigneur… !

En ces jours-là... En ces jours-là, tout était comme à l'habitude : la parole était aux plus forts, la loi faisait fi des faibles et les hommes de cœur étaient bafoués !

En ces jours-là, dire que la vie des justes est dans la main de Dieu, n'avait guère de sens... Jésus lui-même avait crié : "Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné !" Cri terrible de l’homme souffrant même si en son cœur de croyant luit une espérance. Mais l'espérance ne parvient pas à gommer le cri de désespoir...

En ces jours-là, Jésus est au tombeau, tout est fini : la pierre est scellée, doublée d'une garde sourcilleuse...

En ce jour-là…Pourtant, en ce petit matin où la nuit traîne encore après l'effervescence des jours passés, en ce jour-là, plus rien n'est comme avant. Tout semble basculer comme cette lourde pierre sur la mort, qui roule pour laisser libre cours à la vie... En ce jour-là, ç'en est fini : le Père manifeste au monde et à chacun que "la vie des justes est dans la main de Dieu", et que la terre ne saurait retenir celui qui a mis en lui sa confiance. Les premiers témoins de ce jour-là constatent que la terre est ouverte et le tombeau vide. Le tombeau n'est plus le terme de notre voyage, il est devenu "passage".

En ce jour-là, parmi les témoins de la Vie, une femme, Marie, et la première. Non point Marie, la mère de Jésus. Non plus “l’autre Marie”, la mère de Jacques. Mais Marie que l’on a facilement identifiée - à tort ou à raison - avec la pécheresse, cette pécheresse qu’est l’humanité tout entière. C’est à remarquer et remarquable. Jésus, le Vivant abolit toute mort !

Déjà, naguère, c’est à une femme - une pécheresse, elle aussi, semble-t-il, la Samaritaine -, que Jésus, fatigué, assis au bord d’un puits, avait révélé le mystère de l’eau vive qui jaillit en Vie éternelle ; c’est à cette femme souillée du péché de toute l’humanité qu’il avait annoncé l’adoration pure que le Père peut agréer, le culte“ en esprit et vérité“.

En ce jour-là, Jésus attend donc Marie. Jésus est encore fatigué non d’une marche à travers la Samarie, mais de son passage à travers la passion et la mort. Il n’est plus assis près d’un puits, mais se tient debout dans le jardin de son tombeau. Il attend Marie ; il attend toute l’humanité, il nous attend, nous pécheurs plongés dans la mort ! Marguerite Youcenar commente en prenant la place de cette Marie : “Bien que le vent vînt du nord, on ne sentait pas l'odeur du cadavre de Dieu. Guidée par un souvenir, j'entrai dans cette caverne creusée au plus profond de moi-même ; je m'approchai comme en ma propre tombe. J'avais renoncé à tout espoir de Pâque, à toute promesse de résurrection. Je ne m'aperçus pas que la meule du pressoir était fendue dans toute sa longueur à la suite de quelque fermentation divine : Dieu s'était levé de la mort comme d'une couche d'insomnie… Je tombais à genoux, envahie par ce doux tremblement des femmes amoureuses qui croient sentir se répandre dans tout leur corps la substance de leur cœur”.

Oui, elle venait d'entendre prononcer son nom de cet accent inimitable, fait de douceur et de respect : ‘Marie !’ Se retournant, elle lui répondit en hébreu : ‘Rabbouni’, ce qui veut dire : ‘Mon Maître à moi !’. Cette scène vraie, de vérité d'évangile, déjà annoncée en bien des pages de la Bible, est capable de nous toucher tous en ce jour de Pâques au plus intime de nous-mêmes, car elle amorce le dialogue de vie que nous font envier la Samaritaine et la Madeleine.

Ce dialogue de Vie, Jean, lui aussi, en fait l’expérience, d’une manière différente. Dans une intuition vertigineuse comme il y en a peu dans une vie d'homme, dans un éclair de pensée fulgurant, Jean entend résonner en lui les paroles de Jésus ; soudainement, elles prennent sens et, devant le vide du tombeau, il comprend le sens de l'aventure humaine : "Il vit et il crut". En un instant, en un éclair de lumière, tout lui revient. Il se souvient ; il comprend. Lui qui a ressuscité le fils de la veuve à Naïm, lui qui a ressuscité la fille de Jaïre, lui qui a ressuscité son ami Lazare, il avait raison de proclamer, ce faisant : “Je suis la Résurrection et la Vie !”. Mystère éblouissant de ce passage du Fils de Dieu qui nous ouvre la voie… de la Vie.

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