vendredi 19 février 2016

Le vrai climat de la prière !

Epsilon  de carême - Comment prier ? (3) -

Mais alors, si la prière est à ce point dangereuse,
si elle risque de s'enliser dans un narcissisme qui s'ignore,
mieux vaut se contenter de vivre, sans s'aventurer dans ces zones spirituelles où dansent tant de mirages ! Tout le monde, finalement, ne peut pas faire de l'escalade vers l'oxygène des sommets… de Dieu !

C'est vrai, mais tous ont besoin pourtant de respirer pour vivre. Nous savons combien d'hommes aujourd'hui respirent mal. Le besoin est grand de dilater les respirations de l'homme. Non, il ne faut pas renoncer à l'aventure de la prière !

Et si l'on donnait à cette fameuse parabole du pharisien et du publicain un aboutissement heureux ?
On pourrait imaginer : « Le pharisien eut un frisson soudain et se prosterna la face contre terre en disant : “Seigneur, aie pitié du pharisien que je suis. Ah ! Je suis bien comme les autres hommes qui sont si aveugles à regarder vers toi et à regarder leurs frères. Seigneur que je connais si peu, enlève la poutre de mon œil !”… Puis le pharisien se releva et descendit au fond du Temple, à côté du publicain, pour partager son silence et sa prière ».

La trajectoire de la prière, toujours à refaire, c'est cette courte distance du pharisien au publicain. Il suffit de quelques pas intérieurs, il suffit de se retourner, il suffit de modifier son regard. Mais c'est déjà changer d'humanité et changer de Dieu !

La prière : changer d'humanité.
Changer d'humanité !  Car, en nous-mêmes, trop souvent pharisiens, que de manières de s'isoler, et de regarder de loin le reste des hommes ! Celui qui se met à distance des hommes est déjà loin de Dieu.
Prier, c'est d'abord recevoir en soi le monde entier, s'avancer vers Dieu avec tous les hommes dans son cœur, se mettre "dans l'axe de la misère humaine".
Que serait la prière de quelqu'un qui oublierait
tant de drames sanglants de par le monde,
tant d'injustices et de souffrances à côté de nous,
tant de grandeur, de fragilité et de misère dans notre humanité ?
Est-il possible de prier sans entendre sans cesse la voix de Jésus : "J'ai eu faim, j'ai eu soif, j'étais malade, j'étais en prison… …! ".
Prier, c'est d'abord être avec tout le monde. Car Dieu, depuis l'Incarnation, habite la foule des hommes. Prier, c'est partir en humanité. Et conséquemment peiner ensuite pour changer l'humanité, autour de nous et en nous.

La prière : changer de Dieu.
Et c'est aussi changer de Dieu !  Car la manière dont l'homme traite l'homme atteint Dieu ; et la manière dont l'homme traite Dieu atteint l'homme. Qui détruit Dieu détruit l'homme ; et qui tue l'homme tue Dieu.
Le pharisien, établi loin des hommes, dressait devant lui l'image d'un Dieu qui lui ressemblait : Dieu n'était pour lui qu'un "détour" pour ne pas sortir de lui-même.

Quel Dieu nous donnons-nous lorsque nous prions ?
Il n'est pas facile de répondre, mais n'oublions jamais le mot terrible d'un écrivain (Proudhon) : "J'ai cessé de croire en Dieu le jour où j'ai rencontré un homme meilleur que lui !".

Prendre le sentier de la prière, c'est percevoir que Dieu est autre que l'image de Lui que nous secrétions nous-mêmes.
Prendre le sentier de la prière, c'est consentir à la mort du dieu que nous avions habillé de notre propre image.

(Conclusion : à suivre)

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