1er Mai 2014 -
Au matin de
la création de l'homme et de la femme, Dieu dit : "Soyez féconds, remplissez la terre, soumettez-la. Je vous donne
toute herbe qui porte sa semence..., tout arbre dont le fruit porte sa semence...!"
-
Autrement
dit : Tout est pour vous !
Oui, l'homme
est bien le roi de la création ;
Et il est
bien légitime que, par son intelligence, il parte à la découverte de tout ce
qui existe, de ce que Dieu "avait
fait bon et même très bon !".
Il est
légitime
qu'il montre
la beauté, la splendeur du créé par ses œuvres d'art...,
qu'il en
découvre toute la force par les sciences, les divers savoirs qu'il acquiert,
qu'il utilise
tout ce créé pour son bien et celui de ses frères... !
Oui, l'homme
est bien le roi de la création. Malheureusement, il oublie, par son orgueil et
sa concupiscence suscités par le Tentateur éternel, d'en faire hommage à
Dieu, à "Dieu, le Père, de qui
tout vient et vers qui nous allons" (I Co. 8.6). Bref, s'il est bien le roi de la création, il
oublie d'en être le prêtre.
Car il avait
reçu tout à la fois vocation royale et sacerdotale !
Aussi, au
lieu de remonter vers son créateur dans un élan de convergence eucharistique, "la création tout entière gémit",
dit St Paul (Rm 8.22) ; elle retombe, à cause de
l'orgueil de l'homme, dans la désharmonie, dans la multiplicité du chaos, dans
une discordance inexplicable (cf récit de la tout de Babel).
Pire, de ce
fait, les hommes se divisent à son sujet, se font la guerre, à la recherche
égoïste et orgueilleuse des biens de ce monde.
Il y a un
épisode intéressant à se sujet lorsque, affamés dans le désert, les Hébreux reçoivent
de Dieu le don de la manne. Certains en ramassèrent beaucoup malgré les
recommandations de Dieu transmises par Moïse ! (Cf. Ex. 16).
C'est le
réflexe d'égoïsme de tous les temps : dès qu'il y a une situation économique un
peu critique, certains font immédiatement des "réserves".
Mais aux
Hébreux qui firent ainsi, Dieu, avec humour, leur joua "un bon tour",
si je puis dire : les réserves faites devinrent pourriture dès le lendemain ! "Ne faites pas de trésor ici-bas, dira
Jésus... Car là où est ton trésor, là aussi
sera ton cœur !" (Mth
6.19,21).
Elle est
très grave, cette tentation. C'est la tentation de toujours, la première tentation que subit
Jésus lui-même. - Et actuellement, nous ne le savons que trop : la moitié des
hommes sont malades de trop manger ; et l'autre moitié des hommes sont malades
de n'avoir pas assez à manger !
Pire encore
: Il y a la tentation non seulement d'accaparer les biens de la terre avec ses
richesses diverses, mais également d'acquérir, d'accaparer toute fonction
humaine ou même spirituelle, ecclésiale non plus en tant que "gérant
des dons" de Dieu, mais en tant que propriétaire orgueilleux.
Et nous
savons les désastres actuels que cette tentation a provoqués dans l'histoire de
bien des Communautés religieuses. C'est en ce sens, comme on l'a dit, que la
religion elle-même peut devenir une idole, l'idole de ses propres idées, de ses
propres comportements.
Le pape
François ne cesse de le redire de façon forte et imagée parfois, à l'adresse de
tout responsable dans l'Eglise ! Car, en suivant cette tentation, rien, alors,
ne remonte véritablement vers Dieu en justes louanges ; rien n'est
véritablement partagé parce que tout est accaparement.
Jésus, lui,
disait : "Je suis descendu du ciel
pour faire, non pas ma propre volonté, mais la volonté de Celui qui m'a envoyé.
Or la volonté de celui qui m'a envoyé, c'est que je ne perde aucun de ceux
qu'il m'a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour !" (Jn 6.38). Tout recevoir du Père pour tout
faire remonter vers le Père. Aussi Jésus pouvait dire : "Mon Père travaille toujours ; et moi aussi, je travaille"
(Jn 5.17). Et à la veille de sa mort, il pourra
s'adresser à Dieu, son Père, en disant : "J'ai
achevé l'œuvre que tu m'as donné à faire !" (Jn 17.4). Et toujours il nous répète : "Il nous faut travailler aux œuvres de
Celui qui m'a envoyé !" (Jn 9.4).
Ainsi donc,
nous sommes faits pour un bon usage de la création dans l'action de grâces,
dans le partage pour tout faire remonter vers Dieu-Créateur.
C'est ainsi que doit s'exprimer la condition humaine, indissociablement royale
et sacerdotale. L'homme doit prendre possession des biens ce de monde, en
partager les fruits pour qu'avec tous ses frères il élève toute la création
vers le Créateur de tout bien.
Je dis tout
cela parce qu'il me semble que St Joseph artisan, St Joseph travailleur
fut certainement un grand modèle humain pour Jésus à Nazareth, pour nous-mêmes.
- Pour
Joseph, toute activité, tout travail étaient occasions d'action de grâces, de
louange à Dieu. Un travail bien fait était pour lui, certes, une récompense
de son labeur, mais surtout une façon de louer Dieu (comme le fera, bien plus
tard, un Saint François d'Assise, par exemple). D'ailleurs, le mot
"Juif" lui-même, venant du prénom "Juda" signifie
"rendre grâce". Quand Léa, épouse de Jacob, enfanta un quatrième
fils, elle s'écria : "Cette fois je
louerai le Seigneur ! C'est pourquoi elle l'appela Juda !" (Gen 29.35). Tout bon Juif ne cesse de dire
à Dieu et, aussi, à ses frères : "Toda" - "Merci !". -
Rendre grâce ! "Eucharistein", en grec !
St Joseph
fut certainement un grand exemple : Tout bien reçu de Dieu et tout
son travail étaient occasions de louer Dieu ! Dans la mentalité
juive, prendre un repas, par exemple, sans rendre grâce à Dieu, c'est un vol !
Et il suffit
de parcourir l'évangile pour remarquer qu'à chaque instant, Jésus ne faisait
rien sans louer Dieu, sans référence à son Père !
Que St
Joseph, l'artisan, le travailleur, nous aide à tout accomplir avec
action de grâces et louange à Dieu !
- Pour
Joseph, tout travail était aussi occasion de partage.
J'ai souvent
remarqué chez un artisan la joie toute simple de livrer à un autre le fruit de
son travail bien accompli, la joie aussi d'en parler, de parler de ses
"façons de faire", sans cette vanité, cet orgueil que l'on rencontre
parfois chez des soi-disant intellectuels ou spirituels.
Faire avec
joie et pour
autrui, n'est-ce pas "Joie d'évangile" ? Transmettre un don reçu
de Dieu !
Là encore St
Joseph fut certainement un exemple humain pour Jésus qui n'hésita pas, plus
tard, à multiplier le pain pour ceux qui avaient faim..., à transmettre la
Parole de Dieu, "Pain de vie" !
Que St
Joseph nous aide à ce que toute action accomplie, tout travail exécuté soient
non occasion de gloriole souvent ridicule, mais pure offrande venant de
Dieu pour ceux qui nous entourent...
- Pour
Joseph, toute sa vie de travail devint alors "eucharistie", devint
sacerdotale : occasion de tout faire remonter, occasion de faire remonter
toute la création, avec l'offrande de sa propre vie, vers Dieu. Oui, sa vie
devenait vie "sacerdotale" !
Et Jésus
amplifiera l'exemple qu'il reçut de Joseph !
Jésus passe
des gestes de la multiplication au "Geste par excellence", au
"Geste" de l'Eucharistie !
"Geste"
eucharistique en lequel il se met tout entier,
"Geste"
eucharistique du mystère pascal par lequel il ramasse toute la condition
humaine pour la présenter, comme "une
offrande pure et sainte", à Dieu son Père,
"Geste"
eucharistique par lequel on le reconnut après sa résurrection,
"Geste"
eucharistique par lequel toute la création, aujourd'hui encore, est sans cesse comme
"restaurée" pour remonter vers "son Père et notre Père",
"Geste"
eucharistique auquel il ne manque rien : "Par
Lui, avec Lui et en Lui..., dans l'Esprit-Saint, tout honneur et toute gloire
!".
Que St
Joseph nous aide à faire de toute notre vie une permanente "eucharistie",
en vivant l'Eucharistie même du Christ : une louange, un partage
et un élan de soi-même, avec toute la création, vers Dieu Créateur et
Rédempteur. "Faites ceci en mémoire
de moi !".
N'est-ce pas
le sens de notre baptême et de toute consécration religieuse ?
St Paul
avait bien compris tout cela, lui qui écrivait aux Colossiens le passage que la
liturgie nous proposait également pour aujourd'hui :
"Vivez dans l'action de grâce !
Et tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit
toujours au nom du Seigneur Jésus Christ, en offrant par lui votre action de
grâce à Dieu le Père
(littéralement
: "eucharistountes tô Théô" : "en faisant eucharistie à
Dieu")
Quel que soit votre travail, faites-le pour le Seigneur et non
pour plaire aux hommes... !
Et la
nouvelle traduction liturgique précise : "C'est
le Christ, le Seigneur, que vous servez !"
Ne faut-il
pas toujours s'en souvenir ? Pour véritablement "faire eucharistie"
dans l'Eucharistie du Seigneur !
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