Pâques
5 - Vendredi - (Actes 15.22)
Lorsqu’un groupe se développe, s’accroît,
s’élargit, il est normal qu’il rencontre des difficultés d’adaptation, des
problèmes d’intégration, voire des situations de tensions… Il ne faut surtout
pas s’en étonner !
C’est ce qui est arrivé à Antioche où très
vite “grand fut le nombre de ceux qui se
tournaient vers le Seigneur en devenant croyants“ (Act 11.31). Je ne
m’attarderai pas sur ces querelles bien connues entre chrétiens d’origine juive
et ceux d’origine grecque, romaine, querelles qui provoquèrent ce qu’on
appellera le “Concile de Jérusalem“ !
Je soulignerai seulement ce que le pape
François disait dimanche dernier à propos du conflit qui éclata à Jérusalem et
qui provoqua l'"institution des
diacres". Il est normal, disait-il, qu'il y ait des "affrontements"
même entre chrétiens. Mais - et c'est peut-être un secret - qui dit
affrontement doit dire discussion ; et qui dit discussion doit dire prière !
C'est l'enseignement des "Actes des apôtres" : Affrontement (ne pas
en avoir peur ; le silence est souvent la pire des attitudes)... affrontement -
discussions - prière ! Puissions-nous observer cette trilogie dans une union
avec le Christ !
Aussi, je ferai plutôt une réflexion qui
rejoint l’évangile à propos de cette ardente Communauté d’Antioche où, nous dit
St Luc, “pour la première fois, le nom de « chrétien » fut donné aux disciples“ (Actes 11.26).
Que veut dire ce mot, chez St Luc ?
C’est important pour nous qui nous disons chrétiens, de chrétiennes !
Il faut dire que les manuscrits (grecs) ont
souvent hésité sur la prononciation : « christianoi » ou
« chrèstianoi ». Différence d’une seule lettre !
Prenons d’abord la première
hypothèse : "Cristiavoi" : “ceux qui appartiennent
au Christ“ (I
Co. 15.23).
“Vous, vous êtes au Christ, dira St
Paul ; et le Christ est à Dieu“ (I Co. 3.23). (cf. Gal 3.29). Le Chrétien est
celui qui a une relation de dépendance avec le Christ, qui relève du Christ,
gravite dans son orbite, qui est de “la
maison du Christ“ (Cf.
I Tim 3.15),
(comme, par exemple, les hérodiens étaient “les
gens de la maison d’Hérode“). Le chrétien se réclame de Christ !
St Jean
définit l’être chrétien comme l’“être
de Dieu“ (Jn 8.47 ; 1 Jn 3.10 ; 4.2-3) ou l’“être du
Père“ (I Jn 2.16).
St Paul parlera, lui, de l’“être dans
le Christ“.
Bien plus
pour St Jean, “celui qui est engendré
par Dieu“ est, pour lui, le nom propre du chrétien (Jn 3.8 ; I Jn 2.29 ; 4.7 ; 5.1,4), un nom qui exprime son être profond.
Dans le
Christ, nous sommes "fils de
Dieu" à l'instar du "Fils
Unique" qui est devenu notre "Frère",
"Frère d'une multitude" !
St Jean
souligne cette réalité de façon très forte ! Parce que "enfant de Dieu" le chrétien participe véritablement à
la nature de son Père. Aussi, le même apôtre le désigne par “teknos“ qui veut dire "enfant engendré", de
préférence à “uois“, "fils"… car un fils peut être
simplement "adopté" ! Non, nous ne sommes pas des "fils
adoptés", mais bien réellement "enfants
engendrés de Dieu" ! Par le Christ, le "Fils Unique" !
En avons-nous suffisamment conscience ?
En conséquence, les chrétiens sont les serviteurs
du Christ : “Accorde, Seigneur,
à tes serviteurs, priaient St Pierre et St Jean, de dire ta Parole avec pleine assurance“ (Act 4.29). Et St Paul de
noter : “Si j’en étais encore à
plaire aux hommes, je ne serais plus serviteur du Christ“ (Gal 1.10). Et il parlera
d’un chrétien, Epaphras, en disant : “ce
serviteur de Jésus ne cesse de mener pour vous le combat de la prière“ ( Col 4.12).
Bien plus, les chrétiens sont même comme
des soldats du Christ, résolus à mourir avec lui, comme ils vivent avec
lui : “Si nous mourons avec lui,
avec lui, nous vivrons. Si nous souffrons avec lui, avec lui nous règnerons…“
(II
Tim. 2.11).
Et, prêts à mourir pour le Christ, ils deviennent par lui, avec lui, en lui,
des “saints“ (Rm. 1.7) c’est-à-dire des
consacrés à Dieu. Car Jésus étant l’“Oint“
de Dieu, c’est-à-dire “Messie“,
c’est-à-dire “Christ“ (même signification), les chrétiens
participent à cette même onction, de sorte que le baptême est une onction qui
consacre les fidèles à Dieu et au Christ : “Celui qui vous affermit avec vous en Christ et qui vous donne
l’onction, c’est Dieu !“ (II Co. 1.21). Ils sont donc “réservés“, séparés
pour son culte et son service !
On pourrait résumer tout cela par cette
phrase de St Paul : “Pour moi,
vivre, c’est Christ !“ (Ph. 1.21). Et la forme grammatical de la phrase
souligne que le verbe “vivre“ et le mot “Christ“ sont comme
interchangeables ! "Vivre", c'est "Christ" !
On conçoit dès lors qu’une communion si
intime avec le Seigneur fasse de la vie des chrétiens une révélation de la
présence et de l’action de leur Seigneur : “Si l’on vous outrage pour le nom du Christ, heureux êtes-vous… Si
c’est comme chrétien que l’un d’entre vous ait à souffrir, qu’il n’ait pas de
honte et qu’il glorifie Dieu pour ce nom“ (I Pet 4.14-16). Et on sait avec
quelle fierté les martyrs revendiqueront le titre de chrétiens, à commencer par
Ste Blandine, première martyre en notre pays, à Lyon (177) : “je suis
chrétienne“, proclamait-elle, haut et fort ! Peut-être se souvenait-elle
que Jacques avait qualifié le titre de chrétien, blasphémé par les païens, de
“beau nom“ (Jac
2.7).
C'est l'exemple de Siméon Berneux que nous fêterons prochainement à Château-du-Loir
!
Etre chrétien, c’est être véritablement en union
avec le Christ qui nous a tant manifester l’amour de son Père pour tous les
hommes… et qui nous demande de répandre cet amour de Dieu autour de nous, comme
il nous le dit dans l’évangile : “Aimez-vous
les uns les autres comme je vous ai aimés !“. Et il poursuit : "Je vous ai choisis, je vous ai mis à cette place afin que vous
partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure…“. Que le
“beau nom“ de chrétien soit donc pour chacun d’entre nous comme une prédiction
de notre destinée. (“Nomen est omen“, comme on dit en latin : le nom est
prédiction !). Le “beau nom“ de chrétien !
Après avoir parlé des « christianoi », il faudrait
développer quelque peu le sens de « chrèstianoi ».
Le Chrétien manifeste la "chrèstotes"
de Dieu, sa bénignité, sa bonté. Chez les païens, ce mot avait également le
sens moqueur de "débonnaire", de "bonasse". Et bien, tant
mieux si l'on dit du chrétien qu'il est "bonasse" - un peu fou -,
pourvu qu'il manifeste "l'être chrétien",
c'est-à-dire la bonté de l'amour de Dieu à l'égard de tout homme, à l'égard de
chacun qui peut devenir véritablement "fils
de Dieu", "celui que Dieu engendre" ne cesse d'engendrer
jusqu'à son "dies natalis",
son jour de naissance plénière au ciel !
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