dimanche 19 juin 2011

Sainte Trinité

Trinité 2011 (baptême d’Elise)

Pr. Comme vous le savez, je crois : j’ai, aujourd’hui, deux célébrations eucharistiques à célébrer dont la dernière s’accompagne d’un baptême ! Aussi, j’ai succombé à la paresse de ne pas prononcer cependant deux homélies différentes. Et comme à tout défaut, on trouve toujours une raison irréfutable parce que “nécessaire et suffisante“ comme, naguère, dans l’énoncé justificatif d’un théorème de mathématiques, j’ai pensé qu’il serait grandement dommage de ne pas vous associer, par la prière, à l’action de grâce pour la naissance au ciel d’une enfant de la terre - et je vous en remercie vivement -, tandis que je solliciterai ma seconde assemblée eucharistique à grandement considérer le bienfait, dans la Communion des Saints, de l’immense bénéfice de l’action priante de votre intercession.
Vous ne serez donc pas étonnés si mon propos fasse allusion à ce grand sacrement du baptême, en ce jour festif de l’insondable mystère de la Sainte Trinité !


Notre vie chrétienne (initiée au jour de notre baptême) est souvent dépendante de notre conception sur Dieu. Mais tous, malheureusement, nous avons, plus ou moins (bien sûr), la tentation de nous fabriquer une image divine au lieu de recevoir la révélation de Dieu par J. C. (C’est ce que j’appelle facilement “l’inversion sacrilège“ !)
- Quand, par exemple, nous nous contentons de l’observance extérieure des commandements par peur d’un châtiment, c’est que nous concevons Dieu comme un juge, parfois terrible. Mais ce Dieu-là n’est pas chrétien. “Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde”. (Jn 3.17).
- Quand nous implorons Dieu pour qu’il nous tire plus ou moins miraculeusement d’une situation difficile, c’est que nous concevons Dieu comme un Tout-Puissant, sorte de panacée à nos problèmes ou palliatif à notre peur de vivre. Ce n’est pas là le Dieu de Jésus Christ. “Cherchez la perfection, nous disait St Paul, encouragez-vous, soyez d’accord entre vous… et le Dieu d’amour sera avec vous”

“Le Dieu d’Amour !” Toutes les pages de la Bible le crient : “Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de fidélité”. (Ex. 33.6).

Oui, Dieu est Amour ! En Lui-même d’abord ! Et pour approcher faiblement de ce grand mystère, je prendrai aujourd’hui (en ce jour de baptême), la description de la plus grande des réalités humaines :
Regardez ! L’enfant n’est pas encore né ! Mais il est immergé dans un flot de tendresse. Il perçoit bien un bruit régulier et doux. Mais il ignore que ce sont des battements de cœur, du cœur de celle qui le porte et l’enveloppe de son amour. S’il saisissait son langage, il entendrait ces paroles : “Voici mon corps livré pour toi, voilà mon sang qui coule pour toi. Je te donne ma vie. Tout ce qui est à moi est à toi”. L’enfant vit de cette réalité, de cette relation extraordinaire. Mais il n’en a pas conscience. Il ne peut pas encore se situer consciemment en relation d’amour, de dire “Je” et dire “Tu”. Il lui faudra naître, se détacher du corps maternel, pour se distinguer et reconnaître comme sa source cette seconde personne que bientôt il appellera “Maman”.
Et dans le même temps, il va progressivement distinguer une autre Personne, une troisième, reconnaître un troisième visage qui lui sourit et lui dit : “Tu es mon Fils bien-aimé, tu as tout mon amour. Je suis, depuis longtemps, à l’origine de ta vie, avec ta mère, par elle, comme elle. Tu procèdes de nous deux, tu es le fruit de notre amour mutuel”.
Et bientôt, la mère et l’enfant qu’elle aura pris dans ses bras, diront ensemble : “Papa, Père”.

Cette histoire, elle est de tous les jours ; elle est nôtre. Et ce qui est bouleversant, c’est qu’à travers ces relations humaines qu’il est bon d’évoquer (aujourd’hui), nous découvrons, en transparence, une autre histoire, celle de Dieu lui-même, ce Dieu mystérieux qui s’est révélé notre “Père” en son Fils J. C., dans l’unité du Saint-Esprit.

Oui, Dieu est Amour. Le Dieu révélé en Jésus Christ n’est pas un solitaire. Il est Amour, Foyer, Famille ! Et il a créé l’homme - masculin et féminin -, à son image, à sa ressemblance, comme signe sensible et sacré (sacrement) qui nous manifeste l’amour invisible de Dieu-Trinité.
Dieu est Foyer : le Père et le Fils sont enlacés dans une étreinte incroyable ; et cette étreinte est une troisième Personne : l’Esprit Saint.
La Bonne Nouvelle de la Révélation du Dieu-Trinité nous fait entrevoir qu’il y a de la “différence” en Dieu lui-même. Je veux dire que la vie divine ne se définit pas par le retour narcissique sur soi de Dieu lui-même, mais par l’”extase” en l’autre. Chaque Personne divine n’existe que dans son rapport aux autres Personnes divines. Il faut même écarter l’idée d’un “face à face” exclusif du Père et du Fils, se suffisant à lui-même. L’Esprit Saint brise cette suffisance que l’on discerne parfois dans le “face à face” de deux amoureux ; le monde n’existe plus, alors pour eux. Au contraire, l’Esprit Saint est l’ouverture de la communion divine à ce qui n’est pas divin. Il est en quelque sorte, la manière qu’a Dieu d’exister en dehors de lui-même, dans le monde des créatures : “Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils”, par l’Esprit Saint qui a fécondé le sein de la Vierge Marie !

Alors, laissons-nous guider par cet Esprit de vérité qui nous fera non seulement comprendre de plus en plus qui est Dieu-Trinité, mais qui nous communiquera surtout cette vie que s’échangent les trois Personnes divines : “Comme le Père m’a aimé, disait Jésus, et que j’aime le Père, ainsi je vous ai aimés” (Cf Jn 15.9,23) (avec cet amour que s’échangent les trois Personne divines). Si nous voulons que notre monde, que nos relations entre nous, soient déjà, véritablement, le Royaume de Dieu, alors, il faut accepter de recevoir par l’Esprit Saint cette tendresse qui vient de Dieu et la communiquer.

Etre chrétien, c’est avoir la conviction d’être aimé par Dieu, Père. C’est croire en l’amour qui sauve en son Fils Jésus Christ. C’est fonder son espérance de vie sur l’Esprit Saint qui nous transmet cet Amour divin. Et nous savons que cet Amour divin a fait ses preuves en Jésus Christ, amour qui nous est rappelé et donné par tout sacrement (baptême, Eucharistie…).
Et si l’homme peut faire ainsi l’expérience de cet amour divin en lui-même, il ne doit pas s’attendre à des interventions extérieures et tapageuses de Dieu, à coups de miracles ou de faits extraordinaires. Dieu-Amour est au cœur de l’homme et avec lui dans les diverses circonstances de sa vie, dans l’intimité d’une rencontre, d’un événement (même pénible), d’une prière, d’un silence. Comme l’amour humain, mais plus que lui, l’amour de Dieu est projet et dynamisme de vie. Encore faut-il y croire.

Nous avons de la peine à y croire parce que dans le monde (celui dont nous parle St Jean), nous sommes habitués à nous méfier des projets des autres. Nous expérimentons si souvent le jugement des hommes au lieu de leur amour, leur intérêt égoïste et orgueilleux au lieu de leur bienveillance. Nous vivons dans un monde de requins et de loups qui s’entre-déchirent pour posséder l’avoir, le savoir et surtout le pouvoir. Mais, dites-moi : si le Soleil divin est caché derrière les nuages de nos égoïsmes orgueilleux, le mur de nos haines, cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas ! Mais comment les hommes peuvent-ils croire à la tendresse du Dieu-Amour, du Dieu-Famille, du Dieu-Trinité ? C’est impossible pour celui qui n’aime pas. Quant à celui qui n’est pas aimé, c’est difficile ; nous pourrions le nommer un “handicapé de la foi” !
Et si vous êtes dans le cas, objet de mépris ou d’indifférence, voici un conseil : vengez-vous ! Non pas à la manière des hommes qui rendent le mal pour le mal, mais à la façon royale de Dieu. Comme lui, là où il y a de la haine, semez cet amour de Dieu déposé en votre cœur d’homme. Telle est la définition de la Rédemption.

Le salut de Dieu en Jésus Christ - La Rédemption - n’est pas une récompense offerte à la suite d’une vie vertueuse. Il est l’accueil à chaque instant, en notre vie, de l’amour de Dieu, cet amour transformateur qui nous soustrait au jugement de condamnation. Refuser le don d’un tel amour, c’est se condamner à rester dans la rupture complète et avec Dieu et avec les hommes. Dans cette perspective, le jugement n’est pas un verdict extérieur qui n’arrivera qu’à la fin des temps, mais l’option responsable de chacun tout au long de la vie. C’est à chacun qu’est laissée la responsabilité de construire sa vie terrestre et en même temps de fixer sa destinée éternelle. Dieu respecte la liberté de l’homme jusqu’à ne pas lui imposer son salut. Cela fait aussi partie du mystère grandiose de son amour.

En tous les cas, il est de votre devoir à tous de transmettre cet amour de Dieu à Elise qui va en être marquée par un signe sacré, le sacrement du baptême !

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