jeudi 21 octobre 2010

Foi et raison

Jeudi- 29e T.O. Témoigner ! - Ephésiens 4.14.21

Le passage d’aujourd’hui de la lettre aux Ephésiens termine la prière de St Paul interrompue par la contemplation du mystère pascal du Christ et de son action en l’homme : “Que Le Dieu de Notre Seigneur Jésus Christ, avait-il commencé, vous donne un esprit de sagesse qui vous le révèle, vous le fasse vraiment connaître…“. Et il termine aujourd’hui : “par la foi et établis dans l’amour“, “vous connaîtrez l’amour du Christ qui surpasse tout ce qu’on peut connaître !“.

C’est clair pour l’apôtre : le Dieu de Jésus Christ respecte trop ses créatures pour ne pas fortifier en eux “l’homme intérieur“ (1), c’est-à-dire l’intelligence de l’homme. La révélation de Dieu est un appel à notre intelligence et, de ce fait, une proposition à notre liberté. La foi est donc inséparablement acte d’intelligence, ouverture du cœur, décision de la volonté, de sorte que nous devons être “prêts“, dira St Pierre, à justifier notre espérance devant tous ceux qui nous en demandent compte“ (I P. 3.15). Savoir - même entre nous - exprimer notre engagement de foi… ! “Je ne suis pas chargé de vous faire croire ; je suis chargé de vous dire“, disait Ste Bernadette ! Oser dire !
Un certain “fidéisme“ qui exclut toute participation de la raison n’est pas la foi chrétienne. L’intelligence que Dieu nous a donnée doit nous permettre de ne pas sombrer dans les pièges de l’obscurantisme, du fanatisme ou de l’illuminisme.

Mais, pour autant, - et St Paul le souligne fortement -, notre raison raisonnante ne doit pas tomber non plus dans la démesure de l’orgueil et s’ériger en instance suprême qui déciderait, seule, de ce qui est vrai et de ce qui et faux, de ce que Dieu peut être ou ne pas être, faire ou ne pas faire. Ce rationalisme étroit ne peut accepter que Dieu puisse emprunter des chemins déraisonnables, tels ceux de la crèche à la croix ! Le mystère de Dieu ne se réduit pas à la mesure de l’homme.
Autrement dit, si notre intelligence doit avoir assez d’humilité pour accueillir ce qui la dépasse, si, bien plus, blessée par le péché, elle doit passer par une certaine pâque, il ne s’agit pas cependant d’un suicide - du suicide de notre intelligence -, mais d’un dépassement opéré par la grâce. St Paul le souligne dans sa lettre aux Romains.

Cela dit - et nous en avons bien l’expérience -, la foi n’est pas purement spéculative puisqu’elle doit conduire à une certaine vie d’intimité avec le Seigneur dont la prière est une forme privilégiée. Intimité qui devient la source d’une nouvelle intelligence dite “spirituelle“ parce que éclairée par la Révélation du Christ et animée par l’Esprit. Et tout disciple - sans être grand théologien, fort heureusement -, grâce à cette intimité avec le Christ peut découvrir sans cesse de nouvelles raisons de croire… Car alors il reçoit la force de “comprendre avec tous les saints ce qu’est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur… de la plénitude de Dieu“.

Aussi, St Jean, dans un autre style que celui de l’apôtre Paul, avait raison d’affirmer à sa façon : “Nous savons que le Fils de Dieu est venu et nous a donné l’intelligence pour connaître Celui qui est vrai. Et nous sommes dans Celui qui est vrai en son Fils Jésus Christ. C’est lui le véritable Dieu et la Vie éternelle“ (I Jn 5.20).

“Que le Christ habite donc en vos cœurs“, dit St Paul. Car à regarder tous ceux qui nous ont précédés, il faut dire finalement - et surtout - que la foi est grosse de toute une expérience de Dieu !


(1) Expression - de culture hellénique - qui désigne la partie rationnelle de l’homme par opposition à l’“homme extérieur“ qui est le corps. A distinguer de l’expression - de culture juive - “vieil homme“ (l’homme pécheur) par opposition à l’“homme nouveau“ (régénéré par le Christ).

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