samedi 14 avril 2012

Assurance ! Hardiesse !

Samedi de Pâques 12 - Ac 4, 13-21 - Mc 16, 9-15

Dans la lecture d’aujourd’hui on constate un double progrès dans la rédaction des Actes des apôtres :
- l’un dans l’assurance du témoignage de Pierre et Jean, animés par l’Esprit Saint - on était dans l’étonnement “de voir l’assurance (parrèsia : assurance, hardiesse) de Pierre et de Jean“ -.
- l’autre dans la distinction que l’on fait et doit faire entre le peuple juif et les responsables de ce peuple, lors de cet événement central de l’histoire du monde : la Pâques du Seigneur !

L’assurance est une vertu chrétienne dont on ne parle pas beaucoup aujourd’hui. C’est dommage ! Dans les Actes des Apôtres, elle occupe une grande place. Par le baptême et l’adoption divine, le chrétien a d’abord une assurance devant Dieu le Père. Le voile dont parle St Paul dans sa 2ème lettre aux Corinthiens a disparu. Il faut en prendre conscience. Les Pères de l'Eglise et les commentaires divers citent ce texte de St Paul à propos de ce passage des Actes :
“En possession d'une telle espérance, nous sommes plein d'assurance ! Nous ne faisons pas comme Moïse qui se mettait un voile sur le visage pour éviter que les Israélites ne voient la fin d’un éclat passager… Mais leur intelligence s'est obscurcie ! Jusqu'à ce jour en effet, lorsqu'on lit l'Ancien Testament, ce même voile demeure. Il n'est point retiré ; car c'est le Christ qui le fait disparaître. Oui, jusqu'à ce jour, toutes les fois qu'ils lisent Moïse, un voile est posé sur leur cœur. C'est seulement par la conversion au Seigneur que le voile tombe. Car le Seigneur, c'est l'Esprit, et où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté. Et nous tous qui, le visage découvert, reflétons la gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même image, allant de gloire en gloire, par le Seigneur, qui est Esprit“ (2 Co 3,12-18).

Oui ! Seul le Christ ressuscité nous permet de marcher librement vers la vie glorieuse de Dieu avec assurance ! Depuis notre baptême, “nous sommes appelés enfants de Dieu. Et nous le sommes !“, dira St Jean (I Jn 3.1). Et si nous sentons notre indignité profonde, flagrante, St Jean ajoute (et c'est ma consolation !) : “Notre cœur aurait beau nous accusé, Dieu - avec le Christ - est plus grand que notre cœur !“ (Id 3.20)

Le chrétien doit encore témoigner, devant tous, de la “Bonne Nouvelle“ de Jésus ressuscité, avec grande assurance. Une “Bonne Nouvelle“, par nature, se propage. C’est déjà vrai d’une “mauvaise nouvelle“. A plus forte raison d’une “Bonne“ ! Et cela doit être vrai au maximum de l’Evangile, de la “Bonne Nouvelle“ par excellence.
A notre époque, on parle beaucoup de “partage“ ! Et c’est bien ! Mais alors, les chrétiens devraient-ils garder pour eux, sous le prétexte fallacieux d’un « respectueux dialogue » avec les autres, cette “Bonne Nouvelle“ que la mort a été vaincue, qu’une tête de pont a été créé par le Christ par delà l’absurdité de la mort, que si nous marchons comme il a marché, que si nous passons par où il est passé, nous parviendrons là où il est. Bien plus ! Dès maintenant il est avec nous sur la route ; et tous nos chemins peuvent être des “routes d’Emmaüs“ avec les Ecritures et la fraction du pain !

L’autre progrès que nous propose la liturgie d’aujourd’hui - et qui s’inscrit dans les Actes des Apôtres -, c’est la distinction entre le peuple juif et ses dirigeants à l’époque de la prédication évangélique. Les dirigeants, membres du Grand Conseil, craignent les effets sur le peuple du témoignage apostolique. Ils convoquent Pierre et Jean, et multiplient menaces et interdictions. La réplique ne se fait pas attendre.
“Mais Pierre et Jean de leur rétorquer : « Qu’est-ce qui est juste au yeux de Dieu : vous écouter ? ou l’écouter, Lui ? A vous d'en juger. Nous ne pouvons pas, quant à nous, ne pas publier ce que nous avons vu et entendu ». Cependant, après de nouvelles menaces, ils les relâchèrent, ne voyant pas comment les punir, à cause du peuple : car tout le monde glorifiait Dieu de ce qui s'était passé“. (Ac 4,19-21)

Quant à l’évangile d’aujourd’hui, il a été l’objet de grandes discussions :
- Longtemps - à cause du style, de la composition etc… -, on l’a considéré comme une conclusion du second évangile comme n’étant pas de Marc !
- Mais on constatait en même temps que Marc, alors, terminait son évangile de façon curieuse : il laissait ses lecteurs devant le tombeau ouvert, l’annonce de la résurrection que les Apôtres pourront constater en Galilée, et la perplexité des femmes qui se taisent, paralysées par la peur.
- On a pensé alors que la rédaction finale que nous donne l’évangile d’aujourd’hui venait remplacer une autre finale primitive, disparue, concluant certainement la brusque interruption avec ce qui précède.
- Et l’on expliquait que la Tradition scripturaire avait jugé bon de remplacer la finale disparue par celle que nous connaissons - notre évangile d’aujourd’hui - car cette Tradition transmettait, il est vrai, un résumé, une synthèse, un essai de coordination entre tous les témoignages qui nous sont donnés par les autres évangélistes. La diversité des témoignages est en effet très grande dans les évangiles. Certains pensaient que cette diversité affaiblissait l’authenticité du témoignage. Et la conclusion actuelle de l’évangile de Marc y palliait ! D’autres, au contraire, avec plus de raisons, affirmaient que précisément cette diversité était une preuve de l’authenticité de l’événement pascal. Allez donc vous y reconnaître avec tous ceux que l’on appelle “spécialistes“ très savants ? [Comme on l'a dit avec humour : si la Bible a été "arrachée aux sables" selon le titre d'un best-seller d'autrefois, elle a parfois besoin d'être arrachée aux professeurs !]
- Finalement, aujourd’hui, on pense que la conclusion actuelle de l’évangile est bien de St Marc, ou, du moins, de son entourage… ! En tous les cas, elle est bien “inspirée“ et canonique ! Et cela suffit ! D’ailleurs, elle était connue dès le 2ème siècle et on la trouve dans l’immense majorité des manuscrits grecs et autres. Et si l’on ne peut prouver parfaitement qu’elle a eu Marc pour auteur, il reste qu’elle constitue une authentique relique de la foi de la première génération chrétienne.

La liturgie nous fait lire cette synthèse en conclusion de l’Octave de Pâques qui s’achève en cette fin de semaine. Et il est grandement profitable de la méditer et de la méditer encore ! Je me permets, malgré les atermoiements que je vous ai rapportés, de vous y encourager fortement !

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