jeudi 30 mai 2013

Constance de la patience !

Fête de Ste Jeanne d'Arc

Aujourd'hui, nous fêtons Sr Marie-Jeanne-d'Arc ; et, en lui offrant tous nos vœux, nous prions sa sainte patronne de la protéger, de lui donner sa grande foi, sa grande patience...

Un grand romancier catholique a beaucoup - et très profondément - médité sur la sainteté de Jeanne d'Arc : Georges Bernanos. Il a écrit un petit essai intitulé : "Jeanne, relapse et sainte".

Il affirme nettement que la sainteté de Jeanne d'Arc n'est pas d'abord une sainteté de faits d'armes ! Heureusement !
La couleur dominante de sa sainteté, c'est l'endurance de la patience pour le nom du Christ, devant le tribunal.
C'est d'autant plus à remarquer que ce tribunal était un tribunal d'Église ! Et Bernanos de souligner que l'inquisition était alors un tribunal absolument redoutable qui employait des moyens capables presque de dissoudre la personnalité humaine. Et d'ajouter : une des plus grandes souffrances de Jeanne d'Arc est qu'à la fin de son procès, on avait fini par la faire douter d'elle-même, de ce qu'elle était et de sa mission. On le sait, c'est parfois le lot de très grands saints, tels Thérèse de Lisieux, Mère Térésa... et bien d'autres...

Bernanos écrivait : "C'est désormais à elle-même que la petite martyre fait face, et elle ne s'en doute pas. Ses juges ne s'en doutent pas davantage.
Comme ces insectes qui au cœur de leur proie vivante déposent un ver, ils ont fait rentrer le doute dans cette âme d'enfant, et l'ignoble fruit venu à terme, ils ne reconnaissent plus leur victime, la cherchent, implorent d'elle ce que, par leur faute, elle n'est plus capable de donner, une parole pure, intacte, qui leur apporterait la certitude ou le pardon.
Littéralement, ils lui ont volé son âme. Deux jours encore, avec une impatience grandissante, ils secoueront vainement ce cadavre, puis las de cette lutte ridicule, ils jetteront au feu le jouet brisé. Qu'on brûle bien les os ! Qu'on sème au vent la cendre ! A quoi bon ? L'enfant inconnue a emporté son secret. La nuit qu'ils ont appelée sur elle les recouvre à leur tour."

Oui, la grande épreuve de Jeanne d'Arc a été précisément qu'au moment où on en était arrivé, comme le dit Bernanos, "à lui voler son âme", elle ait pu tenir dans la constance et dans le témoignage de sa fidélité jusqu'à la mort.

Mais il y a une différence fondamentale entre les tribunaux d'Inquisition et les tribunaux modernes. C'est que, précisément, dans les tribunaux d'Inquisition, la sainteté finit toujours par triompher. Et, en réalité, la réhabilitation de Jeanne d'Arc, c'est, à l'intérieur même de l'Église et sur l'initiative de l'Église, la remise en cause de ceux qui avaient jugé Jeanne d'Arc. Dans certaines sociétés modernes, ce genre de choses ne peut malheureusement se produire.
Et c'est pourquoi Bernanos conclut par cet éloge de l'Église à travers la sainteté de Jeanne d'Arc, éloge qui est une très belle page de notre littérature contemporaine et qui peut nous aider à comprendre le sens profond de la sainteté de Jeanne d'Arc.

Il n'y a maintenant, dit-il, qu'un seul procès à retenir, celui qui proclame : "désormais Jeanne est sainte, et nous la prions comme telle. Si l'on mesure à l'aune de l'expérience humaine une telle aventure, elle apparaît invraisemblable. La chance de la pauvre fille était si petite, l'affaire si obscure et les intérêts en jeu si puissants. Mais Dieu sait venger ses saints."

Et en son grand style souvent provocateur, provocateur de foi,, Bernanos poursuivait :
"Notre Église est l'Église des saints.
Nous respectons les services d'intendance, la prévôté, les majors et les cartographes, mais notre cœur est avec les gens de l'avant, notre cœur est avec ceux qui se font tuer.
Nul d'entre nous portant sa charge, patrie, métier, famille, avec nos pauvres visages creusés par l'angoisse, nos mains dures, l'énorme ennui de la vie quotidienne, du pain de chaque jour à défendre et l'honneur de nos maisons, nul d'entre nous n'aura jamais assez de théologie pour devenir seulement chanoine. Mais nous en savons assez pour devenir des saints !
Que d'autres administrent en paix le royaume de Dieu ! Nous avons déjà trop à faire d'arracher chaque heure du jour, une par une, à grand-peine, chaque heure de l'interminable jour, jusqu'à l'heure attendue, l'heure unique où Dieu daignera souffler sur sa créature exténuée". Il soufflera de son souffle de vie divine et éternelle !

"O mort, où est ta victoire ?", demandait St Paul. Nous sommes tous des destinés à la Vie de Dieu dès maintenant et éternellement. Tel fut le témoignage suprême de Jeanne d'Arc ! Imitons la constance de sa patience !

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