dimanche 5 mai 2013

Amour et commandement


6e Dimanche de Pâques. 13/C -  (Jn 14.23 sv)


Le passage de l'Evangile que nous venons d'entendre fait partie du discours de Jésus au cours du dernier repas pris avec ses disciples. Ce sont des paroles d'adieu ! C'est son testament ! 
Juste avant d'être arrêté et conduit à la mort, Jésus console et réconforte ses apôtres. Il les éclaire sur son propre mystère ; Il les éclaire sur la vie qui sera désormais la leur après son départ.
Oui, c'est bien d'un testament dont il s'agit !

C'est pourquoi ces paroles de Jésus sont d'un grand prix pour nous ;
- elles définissent notre vie chrétienne dans ce qu'elle a de plus profond.
- Elles affirment que le Christ est toujours vivant ; il est présent, mais invisiblement.
- Elles proclament que ces paroles qu'il nous a laissées sont signes de sa présence ; et c'est pourquoi nous devons les méditer, les approfondir avec ferveur, pour devenir plus profondément disciples.

"Si quelqu'un m'aime, il restera fidèle à la parole".
Un peu avant, Jésus avait dit dans le même sens : "Celui qui s'attache à mes commandements et qui les observe, voilà celui qui m'aime !".

"Si quelqu'un m'aime…" - celui qui m'aime !". Il s'agit d'aimer ! Il s'agit d'aimer le Christ ! Aimer le Christ, non pas seulement croire (intellectuellement) en lui, mais l'aimer. "Pierre, m'aimes-tu ?", avait demandé Jésus à son premier apôtre ! Le Seigneur pose cette question à chacun d'entre nous.

Et cet amour que le Christ réclame de nous ne doit pas être, bien sûr, un enthousiasme passager, sentimental. Il est essentiellement union des vouloirs et don de soi. Il se manifeste authentiquement dans des œuvres, dans des faits, sinon il n'est pas sincère, il n'est pas vrai. L'amour secret du cœur doit faire ses preuves par une obéissance, une fidélité de tous les jours, de toute la vie, aux commandements du Seigneur. "Celui qui s'attache à mes commandements et qui les observe... !".

"Les commandements" ou ici, dans l'évangile, "la Parole", c'est d'une façon générale,
tout ce qu'il faut faire, 
tout ce qu'il faut attendre,
tout ce qu'il faut endurer aussi.
En un mot, c'est la volonté du Seigneur sur nous. "Que ta volonté soit faite", Seigneur. Ce n'est pas là seulement une formule de prière, c'est avant tout une exigence de vie !
Etre fidèle à sa Parole, c'est accepter, aimer cette volonté, en faire la règle de notre vie. Et être ainsi fidèle, c'est la preuve que l'on aime.

Mais l'on devine combien un tel amour est exigeant, infiniment plus que des lois ou des règlements. Notre vie chrétienne de doit pas être un simple assujettissement à des prescriptions imposées du dehors ; elle doit être un amour qui répond à un amour, un amour qui répond à l'amour de Dieu pour nous.

Je prendrai un exemple facile et commun. Nous remplissons aujourd'hui l'obligation de participer à la messe dominicale. C'est bien une "obligation". Mais celui qui a compris ce que c'est qu'être chrétien, viendra participer à l'Eucharistie non pas tant pour satisfaire à une obligation - bien réelle certes - mais parce qu'il aime le Seigneur, qu'il a réalisé en profondeur
- ce qu'est l'Eucharistie
- qu'il a besoin de cette rencontre avec le Christ dans ses paroles et son Eucharistie,
- qu'il a besoin aussi, sans cesse, de la rencontre avec ses frères chrétiens avec lesquels il construit le "Corps du Christ".

Cela change tout : il ne s'agit plus d'un simple acte d'obéissance imposé, mais d'un acte de charité qui jaillit spontanément du fond du cœur, qui engage tout l'être, toute la personne. La véritable obéissance chrétienne est un acte d'amour : "Obéir, c'est aimer", disait Ste Bernadette, sinon toute croyance n'a pas grande valeur.

Et cette obéissance rend parfaitement libre, car alors c'est de nous-mêmes, spontanément, que nous nous portons à ce qui nous est demandé : nous y sommes entraînés par un élan d'amour.

Mais en même temps, cet amour nous lie très profondément. Le chrétien qui aime vraiment le Seigneur ne s'appartient plus. "Charité" et "don de soi" sont nécessairement liés. Le chrétien est l'affranchi du Christ, mais aussi - c'est St Paul qui l'affirme (I Co.7.22) - "l'esclave du Christ", ce qui faisait dire à une chrétienne de notre temps (Madeleine Delbrel) : "Le chrétien est un captif", captif de son amour pour Dieu et de son amour des autres.

Ce n'est pas qu'on puisse aimer Dieu sans avoir été d'abord attiré, aimé par lui. St Jean le dit formellement : "Nous, nous aimons Dieu parce que, Lui, le premier, nous a aimés !" (I Jn 4.10,19). Si nous aimons Dieu, c'est par ce que Dieu nous aime et que nous croyons à cet amour premier et total. Mais celui qui aime est aimé davantage à mesure qu'il témoigne plus d'amour.

Ainsi, le Père aime le disciple aimant. Et le Christ l'aime aussi : "Je l'aimerai et je me manifesterai à lui". - "Nous établirons chez lui notre demeure !".

Le Père et le Fils sont inséparables. Lorsque le Père vient, il ne peut venir qu'avec son Fils. Et leur lien - leur lien d'Amour -, le Saint-Esprit, est toujours présent là où ils sont.

Ainsi le cœur du disciple devient comme un sanctuaire où vivent et agissent les Personnes divines, où il vit et agit en elles.

Mystère bien profond, insondable, qui nous aveugle par son excès de lumière, mais dont nous devons prendre conscience toujours davantage. Ces grandes réalités sont pour nous, si nous leur ouvrons notre âme. A la fidélité du disciple aimant est assurée une vie d'intimité personnelle et de communion avec Dieu révélé dans les profondeurs de sa vie trinitaire. Car "Dieu et Amour" en lui-même !

Et de cette vie d'intimité avec Dieu nait la joie et aussi la paix, cette paix promise par le Christ : "C'est la paix que je vous donne, ma paix ; mais ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne".

Qui ne désire du fond du cœur la paix ? L'homme est, naturellement, inquiet, anxieux, angoissé même, aujourd'hui surtout.

Mais la paix que donne le monde est toujours précaire, fragile, vulnérable. Nous en avons fait, nous en faisons souvent l'expérience. Elle repose sur de fausses assurances, de fausses promesses.

La paix véritable vient de Dieu. C'est le calme surnaturel, la sérénité de ceux qui sont à Dieu et se reposent en Lui, qui se savent conduits et guidés par Lui. Quelles que soient les vicissitudes de leur vie, les épreuves qu'ils traversent, ils peuvent demeurer dans cette paix profonde parce qu'ils sont sûrs de Dieu  !

Et ils peuvent aller chantant joyeusement :
"La charte du Seigneur est sûre. Elle rend sage le simple !" (Ps 19.18).
"Tous ses préceptes sont sûrs !" (Ps 118.7)
"Dès lors, "je suis sûr de voir les bienfaits du Seigneur !" (Ps 27.13).

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