vendredi 28 septembre 2012

Monsieur Vincent (2)


27.09 : St Vincent de Paul  -   (2)                            

1. Jeunesse…
2. “Conversion“ !
3. “Prémonitions“ !

4. Les “fondations“ !
Grâce au zèle apostolique et l’aide financière des Gondi, Vincent de Paul est chargé du collège des “Bons-Enfants“, proche de la porte Saint-Victor, avec le soin de “choisir six personnes ecclésiastiques dont la doctrine, piété, bonnes mœurs et intégrité de vie soit connues pour travailler audit œuvre sous sa direction, sa vie durant“

L’acte de fondation ainsi à peine posé (17 Avril 1625), Mme de Gondi décède le 23 juin de la même année. Et son époux, le général des galères, très affecté, renonce au monde et entre à l’Oratoire le 6 Avril 1626.

Le premier compagnon de M. Vincent fut Antoine Portal, prêtre du diocèse d’Arles, qu’il connaissait bien. Avec l’aide d’un autre prêtre, ils commencèrent le travail de la “Mission“, “allant prêcher de village en village“ si bien que quelques ecclésiastiques se joignirent à eux… Le 24 Avril 1626, Jean-François de Gondy, archevêque de Paris, approuve l’œuvre naissante… et un peu plus tard, le pape lui-même (12 janv. 1633).

A cette date, le siège de la “Mission“ n’était plus aux “Bons-Enfants“. On avait trouvé meilleur espace au prieuré Saint-Lazare qui donna le nom aux membres de l’Institut : “Les Lazaristes“. C’est en cet endroit que M. Vincent devait mourir vingt-huit ans plus tard.

Comme on l’a dit, en quittant Châtillon, l’apôtre n’avait pas oublié l’expérience de la confrérie de la “Charité“. Au contraire ! Et, à Paris, une œuvre semblable commença quand Dieu envoya providentiellement à M. Vincent sa principale collaboratrice, Louise de Marillac
Rapidement, toutes les paroisses de Paris eurent leur “Charité“. La plus importante de ces “Charités“ fut assurément celle de l’Hôtel-Dieu. La misère des hôpitaux de Paris était grande au début du 17ème siècle. St Vincent ne l’ignorait pas. Par diverses circonstances, l’archevêque de Paris lui ordonna de s’en occuper. Cette confrérie, née au début de 1634, comprenait déjà au mois de juillet cent à cent-vingt membres, presque tous portant de grands noms ! (4)

Au premier rang se distinguait Louise de Marillac (5). Jugeant que la contemplation serait plus nuisible qu’utile à cette âme ardente mais scrupuleuse, le Saint l’encouragea pour l’action. Il en fit une sorte de “Visiteuse“ et l’envoya partout où une “Charité“ périclitait.

Il allait en avoir besoin pour une tâche plus importante encore. L’expérience révélait qu’on ne pouvait tout demander aux “Dames“ qui devaient d’ailleurs assurer les soins de leur propre famille. Aussi beaucoup avaient contourné la difficulté en se faisant remplacer par des servantes. Et puis, chaque “Charité“ voulait facilement se targuer de particularités, ce qui était nuisible à l’unité des confréries.

Pour remédier à ces inconvénients, il valait mieux trouver de bonnes servantes, humbles et dévouées à la fois. La première qui se présenta fut une vachère de Suresnes, Marguerite Naseau. Elle avait appris à lire, presque seule, en gardant les vaches. “Dès qu’elle sut qu’il y avait à Paris une Confrérie de la “Charité“ pour les pauvres malades, elle y alla, poussée par le désir d’y être employée…Elle avait grande patience, ne murmurait jamais. Tout le monde l’aimait parce qu’il n’y avait rien qui ne fût aimable en elle. Sa charité a été si grande qu’elle est morte pour avoir fait coucher avec elle une pauvre fille, malade de la peste“. Cet éloge est de St Vincent lui-même qui aimait la citer en exemple aux filles de la charité.

Car Marguerite Naseau eut vite des émules. De nombreuses filles de la campagne venaient s’offrir à servir les pauvres. D’abord on les plaçait directement au service des confréries. Quand leur nombre augmenta, M. Vincent songea à leur donner une formation solide, bien nécessaire à raison des dangers multiples qu’offrait la capitale à ces âmes souvent naïves. Pour cela, il s’adressa à Louise de Marillac qui les prit chez elle, non loin de St Nicolas-du-Chardonnet (1633). Mais la maison devint vite trop étroite. Le “séminaire des Filles de la Charité“, comme on disait, finit par trouver une assez vaste propriété, près de Saint-Lazare, où Louise de Marillac fit construire une demeure simple mais assez grande. En tout cela, M. Vincent ne se reconnaissait aucun mérite. Il avait simplement suivi la Providence pas à pas. “C’est Dieu, mes filles, disait-il, que nous pouvons dire auteur de votre Compagnie !“. Ainsi naquit la “Compagnie des Filles de la Charité“.

Le dessein de Monsieur Vincent n’était certes pas de créer une Congrégation religieuse. D’ailleurs, en ce temps-là, vie religieuse féminine était synonyme de clôture ! St François de Sales lui-même l’avait expérimenté et avait dû renoncer à sa conception primitive de la Visitation. Aussi St Vincent de Paul se montra plus réaliste : ses filles n’étaient pas des religieuses, et il leur affirmait : “S’il se présentait parmi vous quelque esprit brouillon qui dit : « il faudrait être religieuses, cela serait bien plus beau ! », ah ! mes Sœurs, la Compagnie serait à l’extrême-onction…, car qui dit religieuse dit cloîtrée, et les filles de la Charité doivent aller partout !“. Il les définissait comme “n’ayant pour monastère que les maisons des malades, pour cellule une chambre de louage, pour chapelle l’église paroissiale, pour cloître les rues de la ville, pour clôture l’obéissance, pour grille la crainte de Dieu, pour voile la sainte modestie“. Cependant si l’étiquette faisait défaut, la réalité s’y trouvait : la pauvreté et le renoncement… , et puis, disait-il, “les solides vertus de la mortification intérieure et extérieure de notre jugement, de notre volonté, des re-souvenirs du voir, de l’écouter, du parler et des autres sens“. St Vincent ne voulait même pas parler de vœux. A la fin, il finit par concéder des vœux privés qui, chaque année, se renouvellent en la fête de l’Annonciation.

L’habit et la nourriture étaient ceux des villageoises des bords de Seine. Une robe de serge grise, un collet, un “toquois“ de toile blanche pour cacher les cheveux. La cornette de toile blanche était réservée, a-t-on dit, à celles que l’air incommodait (?). Cette façon alla, avec quelques modifications, se multipliant pour prendre cette allure de haut vol que les plus anciens d’entre nous ont encore connue ! St Vincent voulait ses filles humbles et modestes !

Mais en même temps, une autre œuvre se profilait. Le premier but de St Vincent était l’évangélisation. Pour cela, il y avait désormais “ les Prêtres de la Mission“, les “Lazaristes“, dira-t-on assez vite. Cependant il ne suffisait pas de remuer les paroisses ; il fallait maintenir le bien opéré par les missionnaires ! C’était la tâche du clergé paroissial. Hélas ! La décadence intellectuelle et même morale du clergé était grande au lendemain des guerres de religion ! Il fallait remédier à ce déplorable état spirituel. Le concile de Trente avait indiqué les moyens. En France il y avait l’Oratoire du Cal de Bérulle qui travaillait en ce sens en tenant quelques séminaires. M. Ollier avec l’œuvre de Saint-Sulpice allait venir. Mais, en 1630, c’était encore bien peu !

La Providence sollicita encore M. Vincent. L’initiative partit de l’évêque de Beauvais qui invita M. Vincent à faire une retraite pour ses ordinants. Ce fut un grand succès ; et l’évêque conseilla la formule à ses collègues. M. Vincent accepta de recevoir chaque année les futurs prêtres de Paris à “Saint-Lazare“ !
C’était une première étape. Restait à la compléter. Le collège des Bons-Enfants, après le départ de la “Mission“ pour “Saint-Lazare“ accueillit des écoliers pour les éduquer en vue du sacerdoce. A ce petit séminaire, dirions-nous, s’ajouta le grand Séminaire à partir de 1642. Et c’est ainsi que fut envisagée la formation d’un clergé capable de maintenir la foi dans les paroisses après le passage des “Prêtres de la Mission“ ! Cette Institution des “Grands Séminaires“ se poursuivit jusqu’à nous !

Vers 1635, au cours d’une grave maladie, St Vincent songea que, s’il venait à mourir, il regretterait de n’avoir pas donné de règles à ses missionnaires. Le travail, inspiré des constitutions de la Compagnie de Jésus, fut achevé en 1642. L’approbation romaine fut un peu longue à obtenir (en raison de la question des vœux, principalement). Elle parvint seulement deux ans avant la mort du Saint (1658) qui en exprima une grande joie !

Ce que M. Vincent avait toujours en vue, c’était l’évangélisation des campagnes. Les populations urbaines avaient à leur service de nombreuses familles religieuses. Se consacrer à des âmes ignorantes et parfois frustes réclamait beaucoup de vertu ; et la tentation venait facilement de s’évader vers des ministères plus relevés. Il combattait la suffisance d’un discours, demandait que l’on parlât simplement aux gens, sans prétention, “sans fard“. Mais sa sévérité sur ce sujet ne l’empêchait nullement de manifester une exquise charité. Et, étant dans le diocèse du Mans, je ne peux m’empêcher de transmettre un passage d’une lettre adressée à l’économe de la Maison de cette ville. Celui-ci condamnait trop facilement ses frères à la portion congrue. Aussi St Vincent lui écrivit-il : “J’ai nouvelle d’une de nos maisons que la mauvaise nourriture qu’on y donne fait de mauvais effets dans les corps et dans les esprits… Je vous dis ceci, Monsieur, à cause que vous êtes en pareil office et afin que vous ayez soin, s’il vous plaît, d’éviter semblables inconvénients, tâchant de donner de bon pain, de bonne viande et de ne pas vendre le meilleur vin pour en donner de pire, ni exposer la communauté aux plaintes d’un avare traitement…“.

Certes, St Vincent fut un grand “actif“ grâce à des moyens naturels exceptionnels : intelligence claire, pratique, peu portée à la spéculation, grande sensibilité, énergie et ténacité tout à la fois. Mais ces dons naturels n’auraient servi à rien si elles n’avaient été pratiquées sans la foi. Vincent de Paul fut un homme d’une immense charité, mais une charité qui suit immédiatement ce qu’on appelle “la foi vive“, une “foi vive“ qui, chez lui, se manifestait dans un abandon totale à la divine Providence qui ne peut s’exercer sans, de notre part, humilité, adoration, effacement personnel pour tout attribuer à Dieu !
S’il n’y avait pas chez lui grands raisonnements théologiques, il possédait ce “sens de la foi“ qui lui fait découvrir immédiatement les mauvais penchants, les dangereuses déviances et les erreurs. Il sut parfaitement déceler le grand danger du jansénisme. Il l’exprime à son ami et compatriote, Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran. S’il ménage l’homme en raison de ses vertus, sa grande foi le conduit à se montrer l’un des adversaires les plus résolus de l’erreur !

M. Vincent, durant sa vie, avait joui d’une assez bonne santé, malgré quelques maux passagers et quelques “fièvrottes“ comme il disait. Plus grave fut son mal de jambe qui se manifesta dès 1615 et qui ne fit que s’empirer avec les ans, au point qu’à la fin de sa vie il ne pouvait plus guère se déplacer. Il faut dire cependant que ses activités incessantes et ses nombreux déplacements ne l’empêchèrent point de dépasser les 80 ans, âge exceptionnel pour l’époque. Il mourut le 27 Septembre 1660 en sa 84ème année.
Il fut proclamé “Bienheureux“ en 1729 et fut canonisé en 1737. Et pour encourager la dévotion au saint, Léon XIII le proclama patron de toutes les œuvres charitables…


Pour terminer, retenons, comme hier, quelques aphorismes de ce grand Saint :

Dieu sait ce qui nous est convenable et il nous le donnera en temps voulu si nous nous abandonnons à Lui.

Pensez à passer autant de temps à remercier Dieu de ses bienfaits, qu’on en emploie à les lui demander

Je prie Dieu qu’il soit le cœur de votre cœur

 (4) La encore M. Vincent déploya son zèle d’organisateur :
- Il y avait la tâche spirituelle confiée à quatorze membres (élues s’il vous plaît) pour trois mois. Elles avaient pour mission de préparer les âmes à la confession générale.
- Il y avait les Dames chargées de recruter les confesseurs !
- Il y avait le “Groupe de la collation“ servie au malades au cours de l’après-midi.

(5) nièce (?) d’un garde des sceaux et d’un Maréchal de France, et veuve d’Antoine Le Gras, l’un des secrétaires de la reine Marie de Médicis.


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