jeudi 27 septembre 2012

Monsieur Vincent (1)


27.09 : St Vincent de Paul  (1)-                     (La personnalité de M. Vincent est si riche
que mon “mot“ sera en deux épisodes ! Prions ensemble ce grand Saint qui est bien d’actualité !


Autant le personnage “Monsieur Vincent“ est assez pittoresque, autant sa vie est digne d’un roman d’aventures ! Au moins il est des saints avec lesquels on ne peut guère s’ennuyer !

1. Jeunesse.
Il naquit en 1581 dans les Landes de parents agriculteurs sans fortune. Il n’avait donc aucune noblesse malgré la particule qui précède son nom (1).

L’enfant manifeste de bonnes dispositions intellectuelles. Aussi, ses parents se privèrent pour l’envoyer étudier à Dax ! Avisés, ils espéraient que ce troisième enfant sur six pourrait être un jour la providence pour sa famille !

De fait, très vite, il se fit remarquer par ses facilités intellectuelles ; lui-même d’ailleurs - paraît-il - en était conscient. Un défaut de mauvais augure qu’il rachètera plus tard par sa très grande humilité ! Aussi, réussit-il à gagner Toulouse dont la faculté de théologie était célèbre. Il y restera sept ans ! Durant cette période, il réussit à se faire recommander à l’évêque de Tarbes qui l’ordonna sous-diacre et diacre en 1598, mais lui refusa la prêtrise à cause de son âge (Il n’avait que 17 ans !). Qu’à cela ne tienne ! Notre futur Saint voulait brûler les étapes et il réussit à trouver un évêque plus complaisant en la personne du vieil évêque de Périgueux qui l’ordonna dans la chapelle de sa maison de campagne en 1600.

Cependant, durant cette période d’études, Vincent vivait assez misérablement, n’obtenant pas de postes aux bénéfices lucratifs ! Et il ne voulait surtout pas être à charge de sa famille…

La période 1605-1610 est assez floue et rocambolesque si l’on en croit trois de ses lettres qui jettent une lumière assez crue sur le futur saint ! Il raconte que le testament fait en sa faveur “par une bonne vieille de Toulouse“ (!!!) le contraint à poursuivre jusqu’à Marseille “un méchant mauvais garnement“ qui l’aurait volé de trois cents écus. Pour ce faire, il n’hésite pas à vendre le cheval pris de louage à Toulouse, estimant pouvoir le payer au retour… Il arrive ainsi à Marseille, fait emprisonner le voleur qui lui remet finalement les trois cents écus !
Mais - événement rocambolesque -, en revenant, le bateau qu’il prend à Narbonne se fait capturer par trois “brigantins Turcs“. Il est emmené à Tunis comme esclave. Il y restera deux ans. Mais il réussit à convertir son maître, un “renégat de Nice“.
Tous les deux parviennent cependant à se sauver sur un petit esquif. Ils arrivent à Avignon où le Vice-légat du pape reçoit avec grande joie le retour dans l’Eglise de l’ancien renégat ! De plus, il invite Vincent à venir à Rome pour le faire pourvoir de quelque “bon bénéfice“. Aussi, notre futur Saint usera, là encore, de quelques subterfuges d’argent pour s’assurer du voyage.

Naturellement, certains historiens mettent en doute tous ces scénarios qui pourraient sortir d’un conte de mille et une nuits ! Quoi qu’il en soit de l’authenticité des récits attestés par trois lettres de notre héros, on peut affirmer qu’à cette date, Vincent n’est nullement un saint. Il apparaît comme un garçon besogneux certes, mais sans scrupules excessifs en matière d’argent. Il est plein d’ambition et préoccupé de décrocher un bon bénéfice d’une fonction ecclésiastique.

D’après l’une de ses lettres, il va bien à Rome, mais n’obtient aucun avancement significatif. On le retrouve à Paris le 17 février 1910 où il est agrégé au corps des aumôniers de la reine Marguerite de Valois, l’ancienne épouse d’Henri  IV (2). Mais cette fonction est encore bien modeste puisqu’il partage le logement d’un ami, rue de Seine.


2. “Conversion“ !
C’est là, cependant, que la grâce l’attendait à propos encore d’une affaire d’argent dont, du coup, il fut victime. Mais foin des conjonctures en cette affaire trouble une fois de plus, ce fut, par grâce divine, l’occasion pour Vincent d’un renoncement aux biens de ce monde, d’une profonde conversion. Sans doute, le Cal de Bérulle ne fut pas étranger à ce retournement. Vincent l’avait rencontré grâce à l’un de ses amis, le curé de Clichy. Peu de temps après, ce dernier entrait à “l’Oratoire“ que le Cardinal venait de fonder à Paris et il aurait présenté Vincent pour lui succéder.

Voilà donc Vincent de Paul, curé de Clichy ! Certainement encouragé par Bérulle qui aura une grande influence sur lui, Vincent, dès lors, s’intéresse exclusivement aux âmes, catéchise les enfants, visite pauvres et malades, partout réconforte et console.


3. “Prémonitions“ !
Vincent ne restera que peu de temps en sa paroisse campagnarde. En 1612, Bérulle lui propose d’entrer comme précepteur chez les Gondi, riche famille d’origine florentine (3). Le Marquis Philippe-Emmanuel de Gondi et son épouse Françoise-Marguerite (malgré leur condition !) manifestaient clairement une foi profonde et une très grande charité !
Vincent fut, en ce poste, fort occupé. Les “mauvaises langues“ diront que la vertueuse (mais quelque peu scrupuleuse) Marquise de Gondi, heureuse d’avoir trouvé un “directeur“, se chargeait de l’occuper à elle seule ! Cependant, encouragé par ses protecteurs, “Monsieur Vincent“ comme on l’appelle désormais se préoccupe de la population qui habite sur les nombreux domaines des Gondi…  St Vincent y restera douze années (1612-1624) entrecoupée par une “fugue“ à Châtillon en 1017.

On ne sait que peu de choses des quatre premières années sinon que le futur Saint subit, durant toute cette période (1612-1616), une grave et forte tentation contre la foi. Mais, finalement, avec, probablement, le soutien du Cal de Bérulle, ce fut pour lui une occasion de très grands progrès vers la sainteté… Il se défait d’ailleurs, à cette époque, de certains bénéfices lucratifs ou avantages de sa fonction. Quel changement au regard du jeune Vincent !

Un fait pourtant à retenir de cette période : Il résidait alors au château de Folleville (Somme) chez les Gondi. Un jour, on appela M. Vincent à venir visiter un paysan qui se mourait. Une confession générale rendit la paix au pauvre homme ; et il mourut dans une très grande joie. Cet événement frappa si fortement Mme de Gondi qu’elle demanda à son aumônier de faire une prédication pour exhorter les paroissiens à une confession générale. Le résultat fut tel qu’il fallut l’aide des Jésuites voisins (d’Amiens). C’était le 25 janvier 1617. A juste titre, St Vincent lui-même et les Lazaristes virent plus tard en cette date la naissance de leur Institut !

En effet, Mme de Gondi, frappée de la nécessité de prêcher des “missions“ aux pauvres campagnards, décida d’offrir une dotation à la Communauté qui consentirait à en faire une tous les cinq ans sur ses terres. Mais personne ne répondit, pas même le Cal Bérulle. Il faudra que St Vincent s’y consacre lui-même, très modestement !

Cependant, le 1er Août 1617, St Vincent quitte soudainement la maison princière : il ne fournit aucune raison sinon un “voyage à faire !“. Il en parle cependant à Bérulle qui, justement, cherchait un desservant pour une paroisse des Dombes (Châtillon). Il n’y restera que quelques mois mais fera un immense travail missionnaire en cette région soumise à l’hérésie calviniste. Comme à Clichy, il prend contact avec les paroissiens, visite pauvres et malades, court à la recherches des “brebis perdues. L’hérésie perd du terrain ; la paroisse revit ! La conversion la plus notoire est celle du Comte de Rougemont, duelliste enragé, un “franc éclaircilleur“, dira St Vincent…

Le séjour à Châtillon, si bref fût-il, lui permet de jeter les bases d’une Institution très importante, plus importante même que celle dont l’aurore avait percée lors de ses prédications dans les campagnes, près du château de Folleville dans la Somme. L’épisode est amusant. On signale à Monsieur Vincent une maison un peu éloignée dont tous les habitants, malades, sont dans une grande nécessité. Il s’y rend. Et sur le chemin, il rencontre des femmes qui le devançaient ou qui revenaient… “Il y en avait tant, dira-t-il avec exagération, que vous auriez dit des processions !“. Immédiatement le génie d’organisation du Saint s’active : il propose à toutes ces femmes de “faire le pot“, chacune à leur tour, pour les nécessiteux du village et des alentours. Ce fut le début d’une future Institution à Paris : les confréries des “Dames de la Charité“.

Mais les Gondi voulaient retrouver leur aumônier ! Madame, surtout, quelque peu scrupuleuse a-t-on dit, était inconsolable de la perte de son directeur. On pria St Vincent de revenir. Même le sage Cal de Bérulle le priait seulement “de réfléchir sur la peine de Mme de Gondi et sur ce qu’il avait à faire !“. Il réfléchit donc et pria… Et il résolut de rentrer à Paris, malgré les pleurs de ses paroissiens de Châtillon !

A Paris, St Vincent reprend son activité apostolique : il se consacre entièrement à évangéliser les habitants des nombreux domaines des Gondi. On le trouve partout : à Villepreux (Seine et Oise), puis à Joigny (Yonne), à Montmirail (Marne), Folleville, bien sûr (Somme), Paillart (Oise)… etc. Partout le bien spirituel opéré est immense. Pour le consolider, il établit désormais des confréries, des “charités“ comme l’on disait.

Paradoxalement, il lui faut lutter cependant contre un “naturel mélancolique“, disait-on alors (acédie). Il note avec la simplicité d’un “enfant de Dieu“ : “Je m’adressai au Seigneur et le priai instamment de me changer cette humeur sèche et rebutante et de me donner un esprit doux et bénin ; et par la grâce de Notre Seigneur, avec un peu d’attention que j’ai faite à réprimer les bouillons de la nature, j’ai un peu quitté de mon humeur noire“.

Mais il y a encore une autre préoccupation apostolique qui se présente. M. de Gondi est général des galères du roi. Les rameurs de ces navires de guerre sont des condamnés aux travaux forcés (forçats). En attendant d’être conduit à Marseille (port des galères), ils croupissent enfermés à la Conciergerie, dans des cachots humides, malpropres, sans air et pleins de vermine.

St Vincent répond aussitôt à l’appel lancé par l’archevêque de Paris en faveur de ces pauvres condamnés. Il les visite, les réconforte, les instruit, obtient même leur transfert dans des lieux plus sains. Peut-être même alla-t-il jusqu’à Marseille, en 1618, afin d’améliorer leur sort… Son zèle fut reconnu par le roi Louis XIII qui lui conféra la charge d’“aumônier réal des galères“, avec appointements qui facilitèrent l’action apostolique de M. Vincent.

On ne peut songer à suivre avec exactitude le futur Saint sur tous les chemins qu’il emprunte, avec les rencontres qu’il y fait et qui mériteraient grande attention, celle en particulier avec François de Sales et Jeanne de Chantal (1619). Notons cependant que Jeanne de Chantal resta quelques années à Paris pour y implanter sa fondation. Elle fit agréer Monsieur Vincent comme supérieure des monastères de la Visitation à Paris (1622). Il y resta jusqu’à sa mort. Cette fonction lui vaudra une grande expérience pour ses propres fondations qui ne vont pas tarder à voir le jour.

A suivre : 4. Les fondations !“


Pour terminer aujourd’hui, retenons quelques aphorismes de ce grand Saint :

C’est aimer Dieu de la bonne manière que d’aimer les autres !

Faisons les affaires de Dieu, Il fera les nôtres.
 Le Bon Dieu fait toujours nos affaires quand nous faisons les siennes.

Déchargez votre esprit de tout ce qui vous peine : Dieu en aura soin !


(1) Son nom “de Paul“ devait désigner un lieu-dit habité autrefois pas ses ancêtres - procédé d’appellation fréquent -.

(2) dite “Reine Margot“ (+ 1615) !

(3) famille qui a suivi Catherine de Médicis lors de sa venue en France



Aucun commentaire: